18- Désillusion




- Hey, toi, dis-je doucement.

Je refermai avec précaution la porte de notre cabanon. La pièce était vide exceptée Sun' qui était allongée dans son lit, roulée en boule, totalement immobile, le visage tourné vers le mur. Je grimpai le long de son échelle et posai ma main sur sa jambe.

- Ça ne va pas mieux, à ce que je vois.

Aucune réaction de la part de ma meilleure amie. J'aperçu une larme rouler le long de sa joue. Ses yeux étaient cernés et son visage rougi. Elle devait avoir longuement pleuré avant mon arrivé.

- Fais-moi une petite place, égoïste.

Je lui donnai une petite tape sur la cuisse ce qui eut pour effet de la remuer un peu. Elle se décala en reniflant, les yeux dans la vague, s'accrochant à son rouleau de papier toilette comme si c'était une bouée de sauvetage tandis que je m'allongeai à ses côtés.

- Tu as usé tout le stock de mouchoirs pour t'acharner autant sur nos réserves de papiers toilettes ?

Elle hocha lentement la tête tout en haussant des épaules tristement. Au bout de quelques secondes qui me semblèrent insoutenables, elle se tourna enfin vers moi. Et c'est à ce moment précis qu'elle craqua. Les larmes dégoulinèrent telles un torrent incontrôlable, ses sanglots désespérés remplacèrent le silence de la pièce, pourtant si calme quelques instants plus tôt. Je la pris tendrement dans mes bras tandis qu'elle évacuait toute sa détresse. Je lui découpai des feuilles de son rouleau et les lui tendis. Elle les saisit et se moucha bruyamment dedans. Je lui fis des petits cercles avec mon pouce dans ses cheveux dorés pour la calmer. Je ne saurai dire combien de temps nous sommes restées là, dans les bras l'une de l'autre

Peut-être quelques secondes.

Peut-être quelques minutes.

Peut-être une éternité.

Je n'ai pas eu à parler pour qu'elle se confie, qu'elle m'explique, qu'elle s'excuse. Elle me raconta tout : ses sorties tard le soir pour retrouver Côme, leur premier baiser, leur relation, la découverte du mot et du tee-shirt ainsi que... la soirée. Je ne pouvais qu'acquiescer tristement face à ses confidences. Lorsqu'elle eut finit de tout me raconter, je fus de nouveau ensevelie par une marée de larmes et d'incontrôlables secousses. 

- Et Côme ? Il t'a parlé de moi ?, dit-elle avec une lueur d'espoir dans ses yeux bouffis.

Je mis du temps à répondre. En réalité, je ne savais pas quoi lui dire. Cacher la vérité serait simple, mais elle et moi avons assez joué là-dessus pour le moment.

- Non Sun'. Je ne l'ai vu que de loin ce matin. Il n'est pas venu à notre table.

Son visage s'assombrit. Je lui embrassai le front, décalant quelques mèches collées par les larmes sur son visage.

-  Est-ce que tu pourrais me laisser s'il-te-plaît ?, dit-elle dans un souffle, cherchant à éviter mon regard à tout prix. J'ai besoin d'être seule.

Je me levai et sans rajouter un mot, je sortis de cette pièce à l'atmosphère si lourde.


~


- Alors ? Comment va-t-elle ?, me demanda Rose avec ironie.

Je reculai de mon banc et fixai un point dans mon assiette. Le brocoli qui s'y trouvait ne m'allait pas être d'un grand secours. Je relevai les yeux vers Rose puis sur toute la tablée pour finir par m'arrêter sur la silhouette de Côme que je devinais au loin aux bras d'une jeune fille à la chevelure rousse.

- Elle... ne va pas très bien.

- Oh ! Mince alors !, me répondit Rose avec ce même ton faussement désolée.

- Rose, dis-je fermement en continuant de fixer mon assiette.

- Quoi ?

Le minimum de courage que je réussis à rassembler me permit de lever mon regard vers elle et de la fixer droit dans les yeux.

- Arrête ça.

- Arrêter quoi ?, me dit-elle agressivement.

Je vis du coin de l'œil mes amis se raidirent et leurs visages se crisper.

- Ton petit jeu.

- Mais quel petit jeu, Clémence ?

Ses yeux lançaient dorénavant des éclairs et sa bouche s'étirait en un rictus mauvais.

« Ne rentre pas dans son jeu, ne rentre pas dans son jeu ! », me chuchotai ma conscience.

Je serai les poings sous la table et tachai de contrôler la colère qui pulsait de plus en plus vite dans mes veines. Entre la Rose de tout à l'heure et celle de maintenant, il n'y avait plus rien en commun. Je savais que ce n'était pas sa faute, que c'était le trop plein d'émotions de ses dernières 24h qui était en train de redescendre.

- Ne me dit pas que tu la défends ! Ne me dis pas que tu as accepté de lui pardonner !, dit-elle en haussant d'un ton.

La bande se jetait des œillades inquiètes, hésitant à intervenir.

- Si, Rose. Je la défends et oui, je lui ai pardonné.

- Comment as-tu pu faire ça ? Ne te souviens-tu pas de ce qu'elle t'a fait ? Regarde ta lèvre !

Je touchai du bout des doigts la blessure, qui me picotait depuis mes baisers passionnées avec Connor.

-Je pardonne, moi. Ne pas pardonner, ce n'est pas avancer.

- Mais avancer dans quoi ?

- Mais ça sert à quoi, franchement, de faire la gueule aux gens ? Ça nous amène à rien ! On est venu pour quoi au départ ?

J'attendis quelques secondes, puis repris avant qu'elle ne se décide à me répondre.

- Nous sommes venus passer un bon été, oublier nos problèmes à la maison, oublier notre quotidien. Alors ne compliquons pas les choses pour des futilités.

- Futilités ? Tu appelles ça futilités d'avoir failli être envoyé à l'hôpital, me dit-elle en pointant un doigt accusateur sur moi.

Des murmures commencèrent à s'élever près de nous.

- Que je sache, ce n'est pas sur toi qu'elle s'est acharnée. Il est donc à moi de voir si ça vaut le coup de gâcher un été pour ça ou non.

Elle me fusillait du regard mais je ne me défilai pas pour autant. 

- Qu'en pensez-vous ? , dis-je à mes amis qui ne s'étaient pas manifestés jusque-là. 

Tom se racla la gorge. Il n'allait pas dire quelque chose qui allait me plaire.

- Clémence, je suis d'accord avec toi mais... Tu as la grande qualité de  pardonner facilement. C'est rare. J'ai aussi mes propres qualités mais pas celle-là. Laisse-nous du temps pour digérer ce qui s'est passé.

-  Il est vrai que dans le fond tu as raison Clémence, mais Tom aussi, continua Coline.

- Il vous faut du temps ?, dis-je en serrant toujours aussi fort mes poings dont les jointures étaient maintenant aussi blanches que les visages de la tablée.

- Oui, déclara Bradley.

- Très bien. Du temps... Sage idée..., dis-je en fixant de nouveau un point sur la table.

Je relevai finalement la tête et échangeai mon air déterminé pour de la colère.

- Mais où voulez-vous le trouver ce temps ? Où ça ? Nous sommes ici depuis 3 semaines, bientôt 1 mois. Nous serons à la moitié de nos vacances dans 4 jours. Mais vous souhaitez du temps ?

Je m'arrêtai, le regard menaçant, cherchant une réponse sur leurs visages interdits. Il n'y avait que Rose qui continuait à me fixer dans les yeux.

- Il nous reste plus qu'un mois ensemble. Un pauvre mois... Qui dit que l'on se reverra dehors ? Que l'on gardera contact ? Que nous nous verrons toujours ? Que nous ne nous oublierons pas, petit à petit ?... Qui se souviendra de notre amitié à part ce foutu tableau de bois à l'entrée du camp ? Peut-être bien personne. On aura sûrement oublié. Alors profitons. Profitons de la chance de s'être rencontrés. Profitons du peu de temps qui nous reste tous ensemble et ne gâchons pas tout pour une simple connerie. A vous de choisir, finis-je en balayant la tablée du regard.

Je repoussai mon assiette, reculai et sortis de table. Je bousculai quelques personnes, des larmes de rages aux coins des yeux et ouvris avec fracas les portes battantes pour m'enfuir dans la nuit fraîche sous une pleine lune au regard triste.


PDV inconnu

Je progressai dans la forêt, suivant avec le plus de discrétion possible les pas de Clémence. Après l'avoir vu sortir du réfectoire, je n'avais pas pu m'empêcher de la suivre. J'avais du délaisser Lola et trouver une excuse pour sortir incognito sans attirer les soupçons.

Je me doutais d'où elle se dirigeait. Je venais aussi ici autrefois, lorsque j'avais besoin de solitude.

Je me cachais derrière un arbre tandis que Clémence montait le haut d'un majestueux chêne. Elle cala son corps mince dans le tronc et se mit à pleurer, cachant sa tête entre ses bras.

Je sortis de ma cachette et m'avançai à découvert vers elle. En entendant des bruits de pas, elle releva la tête et sa bouche s'arrondit sous la surprise. Je continuai mon avancé et grimpai avec agilité dans l'arbre qui m'avait tant de fois accueilli. Arrivé à la hauteur de Clémence, je m'assis à ses côtés. Elle ne m'avait pas jeté un regard lorsque je l'avais rejointe. Ses larmes continuaient de couler le long de ses joues, silencieuses. 

- Qu'est-ce que tu fais-là ?, me dit-elle d'un ton légèrement agressif.

- On dirait que tu n'es pas contente de me voir.

- Non, pas vraiment, Côme.


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Hey !

Désolée de ne pas avoir pus poster le chapitre hier...

Mais comme promis, le voilà !

J'aimerai aussi vous remercier pour les 3k ! Vous êtes topissimes !

Laissez un commentaire pour me donner vos impressions !

Je vous aime et encore pardon...

Ellie


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