Chapitre 12- [Partie 1]
Les quelques heures passées en compagnie de Matthieu avaient réussi à remettre en question tous mes engagements pris la vieille. J'étais encore plus perdue qu'avant. Je me posais mille et une questions, hésitant à aller au bout de mon plan. Je me concentrais sur les raisons qui m'avaient poussé à signer, oralement, ce contrat avec lui. Même si mes motivations étaient justes, je ne savais plus si ma décision était la plus judicieuse.
Pour me donner du courage, je me replongeais dans les jours qui avaient précédé ma décision. Je revivais ces intenses réflexions, ces dilemmes auxquelles j'avais fait face pour déboucher sur cette résolution qui m'avait paru, à l'époque, inébranlable. Je repensais à Clément, à son soutien et à son aide, lors de ces journées de préparation. La conversation que nous avions eu était, certes difficile, mais tellement salvatrice.
Enfin, je ne pus retenir mes pensées de s'envoler vers Alexia et la période difficile qu'elle traversait. Elle semblait être retombée dans ces vieux démons et je me devais de tout faire pour qu'elle ne commette pas, une seconde fois, les mêmes erreurs. Ma décision était prise, j'allais achever mon plan.
De plus, Matthieu m'intriguait énormément. J'avais imaginé, dès le départ, que ce n'était qu'un homme arrogant, fier et hautain, sûr de ses capacités sexuelles. Je ne pensais pas qu'il se cachait quelqu'un d'autre, sous cette carapace. Après notre rendez-vous dans l'arrière salle du restaurant, j'avais essayé d'en apprendre plus sur lui. Il avait soigneusement évité de se livrer. A la place, nous avions discuté de ses affaires et de son business. Je devais l'avouer, la nature de ses activités m'intriguait et m'excitait. Je n'arrivais pas à concevoir qu'un tel commerce puisse exister, sans que les gens comme moi, s'en aperçoivent. Surtout, j'avais entrevu les possibilités énormes qu'offraient ce type de lieu.
Matthieu me donnait l'impression de quelqu'un qui avait vécu plusieurs vies, dont de nombreux drames, et qui s'étaient réfugié dans le sexe. Je ne connaissais toujours rien de lui mais je refusais toujours d'aller vérifier sur Internet. Lors du prochain rendez-vous, je devrais tout tenter pour en apprendre plus sur lui.
En y pensant, je réalisais que, si ma tête avait été plus longue dans son processus de prise de décision, mon corps le réclamait déjà. Seule une partie de moi, celle de l'ancienne Emma, continuait à se poser des questions, à hésiter et à redouter la fin de cette histoire. Elle avait peur des conséquences de ses actes et de chambouler de nombreuses vies au passage. Toute cette histoire ne pouvait pas bien se finir, elle en était sûre.
Toutes ces réflexions m'avaient occupé l'esprit pendant la plus grande partie de mon trajet à travers Paris. L'établissement de Matthieu était situé à l'opposé de mon domicile et je regrettais d'avoir refusé qu'il me raccompagne en voiture. Parfois, il fallait savoir profiter des rares gestes de gentleman, surtout quand ils nous permettent d'éviter d'être entassée dans cette minuscule boite de ferraille, assise à côté d'un homme qui n'avait pas compris qu'il pouvait, lui aussi, serrer les jambes. J'avais beau coller les miennes le plus possible aux parois, je sentais encore son jean frotter sur mes mollets nus.
Pour éviter de penser à ce contact non voulu, mais imposé, je m'étais laisser absorber par mes pensées. J'étais partie tellement loin sur une autre planète, que je n'avais pas vu les plusieurs SMS en attente sur mon téléphone. Lors de mon dernier changement de métro, et de ma libération de cet inconnu qui me dégoutait énormément, je les consultais enfin. Le premier, de Clément, me demandait quand je reviendrais. Je lui répondis rapidement sans m'y attarder. Le deuxième, d'Alexia, nous signalait qu'elle allait mieux et qu'elle souhaitait nous voir toutes ce samedi soir pour nous annoncer une grande nouvelle. Les réponses et autres conversations fusèrent entre mes amies. J'étais heureuse de sa rémission et accepta son invitation. Le dernier, enfin, piquait ma curiosité. Il venait de Matthieu. Déjà, me disais-je étonné, je ne l'avais quitté que depuis trente minutes. Je l'ouvris avec hâte :
— Je veux te revoir samedi soir. Ça te convient ?
— Non, lui répondis-je immédiatement.
Il n'était pas question que je gâche mes plans avec Alexia et mes amies pour lui. Sa réponse ne tarda pas.
— Quoi ? Comment ça ? Tu ne veux plus me voir ?
— Samedi c'est dans deux jours et j'ai déjà des plans de prévus.
— Nous avons défini les termes du contrat Emma et je te rappelle que tu n'avais pas le droit de dire non. Donc samedi soir tu viens chez moi.
Son dernier SMS m'énerva. Je ne lui appartenais pas et j'avais le droit de vivre ma vie. Je n'avais jamais supporté les hommes qui pensaient pouvoir me contrôler, me donner des ordres ou me façonner à leur convenance. Je n'étais pas une femme marionnette qu'on pouvait disposer à sa guise. J'étais, enfin je me voyais, comme une femme forte, indépendante et maîtresse d'elle-même. Ainsi, la tentative de contrôle de Matthieu me repoussa dans mes retranchements. Je décidai de ne pas lui répondre. Mieux encore, j'éteignais mon téléphone pour ne pas être tentée. Il était 21h15, je rentrais retrouver Clément et ne voulait pas laisser Matthieu me gâcher ma soirée qui avait si bien commencée.
Le lendemain matin, je me réveillai avec une angoisse profonde qui ne m'avait pas quitté de la nuit. J'avais très peu dormi à cause de cette peur effroyable : qu'avais-je donc fait ? J'étais effrayée à l'idée d'allumer mon téléphone et de découvrir les SMS de Matthieu. Ou peut-être l'absence. Il n'avait peut-être pas compris ma réaction et avait pris mon silence pour un oui. Peut-être pensait-il qu'il avait réussi à me faire venir. De nombreuses questions se bousculèrent en moi. Une seule façon d'être fixée : allumer mon téléphone.
Je pris mon Samsung en main quand le grincement de la porte de la chambre me fit sursauter. Me sentant coupable, je reposais, d'un geste rapide, mon téléphone sur la table de chevet. Clément entra alors pour me souhaiter une bonne journée et m'embrasser avant de partir. Gênée par cette marque d'affection, je décidai de mettre de côté Matthieu.
A 13 heures, j'ouvris enfin mon téléphone et découvrit une dizaine de SMS de Matthieu. L'incompréhension du début à vite fait place à de l'anxiété voire de l'inquiétude. Je ressentais son désarroi et sa peur dans son dernier message où il me suppliait de lui répondre. Il était évident qu'il commençait à tenir à moi. Et moi, qu'est-ce que je ressens pour lui ? Je laissai cette réflexion en suspens pour répondre à Matthieu, je l'avais déjà fait trop attendre.
— C'est d'accord pour demain après-midi (il m'avait proposé de changer l'horaire) à deux conditions.
— Lesquelles ? Merci de me répondre. Enfin ! Pourquoi tu me parlais plus ? m'envoya Matthieu dans un message qui exprimait à la fois son inquiétude et son soulagement. Ce court texte était très éloigné de ses SMS habituels, simples, clairs et concis.
— La première : je ne veux plus de cette règle qui dit que je suis obligée de venir te voir. La deuxième : tu acceptes de répondre à dix questions sur toi.
— D'accord pour la première. Pour la seconde seulement cinq questions fermées et pas une de plus.
Je fus surprise de sa réponse. Je pensais qu'il allait refuser catégoriquement la deuxième condition. Heureuse, je ne tentais pas de discuter. J'avais intentionnellement donné un chiffre élevé pour l'obliger à m'offrir cinq questions. En appliquant cette stratégie de négociation, je ne pus m'empêcher de remercier l'ancienne Emma d'avoir été aussi sérieuse en cours. Je rédigeais rapidement ma première question :
— Tu m'as dit que tu t'y connaissais en amour peut être plus que moi. J'en déduis que tu as déjà eu une histoire sérieuse. Est-ce le cas ?
— Oui. Pendant quatre ans.
— Ça s'est mal terminé ?
— Oui très mal.
— Et c'est pour ça que tu traites les filles comme des numéros jetables ?
— Oui mais ce n'est pas la seule raison. Et comment tu sais ça ?
— Tu as une réputation, Matthieu, qui te précède. Est-ce que tu vas me faire la même chose qu'à ses femmes ?
— Non. Je ne pense pas non.
— Est-ce que tu me laisseras te poser encore des questions sur toi demain ?
— Oui. C'était la dernière question. Rendez-vous demain à 14 heures chez moi.
Cet échange passionné m'avait occupé durant toute ma pause déjeuner et j'en avais presque oublié de manger. Ses réponses me troublaient. J'aimerais connaître toutes les raisons de son comportement, souvent irrespectueux, envers les femmes. Et surtout j'aimerais savoir pourquoi il ne me traiterait pas comme elle. Avait-il des sentiments pour moi ? Je commençais à le penser. Pourtant, à chaque fois que je le voyais, il se montrait distant, détaché presque pas intéressé. Il ne laissait transparaître aucun sentiment, aucune envie autre que sexuelle. Matthieu était pour moi un mystère que je n'arrivais pas à percer.
Est-ce que je voulais que Matthieu ressente quelque chose pour moi ? Oui. Non. Enfin, je ne sais pas. Je devais penser à mon plan en premier lieu, pas à moi. Jusqu'à quand tout cela allait durer ? J'en avais aucune idée. A chaque fois, il me surprenait encore et encore. A chaque fois, j'avais envie de le revoir pour mieux le connaître. Et parfois, tout simplement, pour être avec lui. Dans quoi mettais-je engagée ?
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Hello mes lecteurs :D
Je voulais vous remercier pour tous vos votes et surtout vos commentaires qui me font énormément du bien !
Grâce à vous, je gagne en confiance en moi et j'ai encore plus de motivation qu'avant pour écrire.
J'espère que la suite ne vous décevra pas. Maintenant, j'ai encore plus la pression ;)
Petite précision sur mon histoire, j'ai quasiment fini de l'écrire (il me reste un chapitre à conclure). En tout, elle fait 21 chapitres et j'ai déjà prévu d'en ajouter au moins 2. Je ferais également toutes les modifications que vous m'avez suggérées, merci à vous.
Par contre, je continuerai de publier que deux fois par semaine car je dois finir mon mémoire en parallèle...
Merci pour tout et bonne lecture !
Exiiste
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