Chapitre 6

Damon

— Demain vous avez un déjeuner à treize heures avec un de nos plus gros clients il souhaite s'assurer que la relève de Darryl sera à la hauteur, je vais vous aider à vous préparer, vous n'avez rien à craindre, tout se passera bien. Cet après-midi, il faut que vous vérifiiez et validiez trois nouveaux projets portés par nos directeurs, et la semaine prochaine on doit rendre visite à Eleganza, pour commencer à réfléchir à une publicité pour la sortie de leur prochaine gamme de sacs à main, c'est un de nos plus anciens clients et c'était toujours Darryl qui s'en occupait.

— Aïe, je grogne lorsqu'une épingle pique mon genou.

— Cessez de bouger, râle la tailleuse, des épingles plein la bouche.

Aubrey nous ignore et continue de déblatérer.

— Vendredi soir nous avons un gala de charité, on ne peut pas y couper, et vous devez y faire un discours, ça vous permettra de vous faire connaître auprès de nos principaux actionnaires. Vous avez lu le récap que je vous ai envoyé ?

— Non.

— Lisez-le, c'est important.

Je ne lui dis pas que j'ai bien essayé, mais que j'ai été incapable de me concentrer sur le moindre mot de ce rapport. Aubrey me prend déjà pour un demeurer, pas besoin d'en rajouter. Je grommelle entre mes dents, ça doit bien faire une heure que je subis cette foutue tailleuse, quand j'ai eu le malheur de me plaindre, Aubrey m'a jeté un regard noir. « Vous n'aviez qu'à être là quand Monsieur Martinez est passé, ce matin » a-t-elle dit. Ce qu'elle peut être insupportable. Elle a toujours raison, et c'est très agaçant. Ainsi que sa manière de se tenir, d'avoir un bureau toujours parfaitement rangé, de coiffer ses cheveux et ... même de parler. Tout chez elle est insupportable tant elle est parfaite. J'ai beau me dire que je vais bien me comporter, je sais que je ne résisterais pas longtemps à l'envie de la chiffonner pour voir s'il y a une femme sous ce masque de robot glacial. J'ai ri, plus tôt, quand elle m'a conseillé de ne pas coucher avec mes employées. Je me suis abstenue de lui faire remarquer qu'elle n'était pas mon employée, mais celle de mon grand-père. J'aurais dû, ça l'aurait peut-être fait sortir de ses gondes.

Aubrey est devant moi à lire ses notes sur la tablette qu'elle trimbale partout comme un doudou. Comme elle ne me regarde pas, j'en profite pour la détailler. Elle est belle, et ça m'emmerde, pourquoi mon grand-père ne pouvait pas avoir une vieille secrétaire chiante et lesbienne ? Ou un secrétaire inaccessible, mariée ? Il fallait qu'elle soit belle, intelligente, et chiante. Cela dit, elle est peut-être lesbienne, et ce serait une perte pour la gent masculine.

— Avez-vous organisé le pot de départ de mon grand-père ? je demande pour la couper dans sa diatribe.

Elle s'interrompt et bat plusieurs fois des cils, la faisant ressembler à un robot récupérant des informations dans sa base de données interne. Un magnifique robot.

— Oui, on l'organisera à seize heures jeudi, j'ai commandé un traiteur et Darryl viendra, après ça, il se reposera le plus possible.

— J'ai fini ! s'exclama la tailleuse. Vous pouvez retirer tout ça et vous rhabiller.

Je souffle, soulagée et m'empresse de me débarrasser du patron sur mesure qu'elle vient de me faire. Quand je relève les yeux après avoir retiré mon pantalon, je surprends Aubrey en train de m'observer. Je lui souris, un peu vaniteux, et elle s'empresse de détourner le regard en se grattant un sourcil.

— Dépêchez-vous, on a encore du travail, m'indique-t-elle en s'en allant, faisant claquer ses talons sur le parquet.

— Aubrey, je l'appelle, ne pouvant résister à la taquiner. Passez-moi mes vêtements s'il vous plaît.

Son regard se pose sur mes vêtements soigneusement pliés sur une chaise – par elle, je ne les ai pas pliés tout à l'heure – et elle récupère la pile, raide comme un piquet, pour me les apporter.

— Merci, vous êtes un ange.

Son visage vire au rose, et c'est adorable. J'ai envie de l'embrasser. Cette réflexion me fige. Non, je ne peux pas embrasser Aubrey, ça fait deux jours que je la connais et elle m'insupporte.

Je récupère mon pantalon, la forçant à rester tenir mon t-shirt, le temps que je l'enfile, je la surprends à me jeter un autre coup d'œil à la dérobade. Elle est beaucoup trop mignonne. Je me demande si elle a quelqu'un dans sa vie. Quel genre de femme est-elle dans l'intimité, sans toutes ces couches de froideur professionnelle ? Je regarde discrètement ses mains, mais elle ne porte pas de bague. Pas marié ou fiancée, donc. Peut-être qu'elle est célibataire.

Je finis d'enfiler mon t-shirt et attrape ma veste.

— Allons-y.

Je dois encore attendre quelques minutes qu'Aubrey règle les douze costumes – douze ? Pourquoi douze ? – puis nous nous engageons dans la rue.

— Allons manger une glace, je propose.

Elle me lance un regard surpris.

— Il faut retourner au bureau.

— On a le temps pour une glace.

— Le repas de midi était il y a à peine une heure.

— J'ai encore faim.

— Ce n'est pas de la faim, c'est de la gourmandise.

Je hausse les épaules, simplement satisfait de la titiller.

— J'ai envie d'une glace.

Je vois bien qu'elle hésite entre me pousser sur la route et accéder à ma demande. Je trouve ça assez amusant.

— Faisons quelque chose, on retourne au bureau et si vous finissez assez rapidement de valider les dossiers préliminaires alors on ressortira manger une glace.

J'hésite, conscient que je viens de me faire avoir, mais je n'ai pas dit mon dernier mot.

— Si je fais les trois dossiers, vous venez dîner avec moi.

Loin de s'en émouvoir, elle me lance un regard blasé.

— Ce n'est pas comme ça que ça marche, soupire-t-elle.

— Ah non ?

— Non, ces dossiers, vous les ferez de toute façon, épargnons-nous tout le moment où vous vous comportez comme un gamin et passons directement au moment où vous travailler, d'accord ? Si vous êtes bien sage, je vous apporterais une sucette.

Je la regarde vivement, me demandant si elle a conscience de l'ambiguïté de cette dernière phrase, mais si c'est le cas elle ne laisse rien paraître, marchant la tête droite. J'ai du mal à la cerner, a-t-elle de l'humour ou est-elle complètement insensible ?

On retourne en silence jusqu'au bureau et elle dépose sur le mien les trois dossiers. L'après-midi promet d'être longue. Mon regard se pose sur les dossiers. Les lettres dansent devant mes yeux, mon regard est capté par l'écran de veille de mon ordinateur portable, puis par l'immense vitre qui forme deux murs de ce bureau trop grand pour moi. Partout, je vois la touche de mon grand-père. Le petit cadre avec une photo de moi et ma grand-mère, quand j'étais petit, posé sur le bureau. Les stylos, ses préférés, dans un coin, les costumes, une cravate abandonnée dans un tiroir. Je remarque que l'un d'entre eux est fermé, et je n'en possède pas la clé, ça me questionne, mais on esprit est vite captivé par autre chose, la couleur des murs, une irrégularité dans le planché, un accro à ma manche. Je joue avec mon téléphone, discute avec mes potes, Ella et Rain me proposent une rave party, mais je décline, je ne me sens pas de sortir ce soir.

Les pieds sur le bureau je joue avec les trombones jusqu'à en faire une chaîne, puis avec la chaise, je tourne. Chaque fois que mon regard se pose sur les dossiers, je n'arrive pas à en lire plus d'un mot, une phrase quand j'insiste, mais le sens m'échappe, malgré les nombreuses images, je ne comprends rien. Je ne sais pas de quoi ça parle, je ne sais pas à quoi je sers dans ce processus.

La porte s'ouvre sur Aubrey et je me sens tout à coup ridicule. Putain cette femme... je n'aime pas ce qu'elle me fait ressentir, avant ça ne me gênait pas d'être un pitre, d'être stupide, maintenant je que je la côtoie, je le ressens et c'est très désagréable.

— Vous avez fini ?

Je me redresse sur ma chaise en me raclant la gorge. Un truc que j'avais appris dans l'internat de bourge où j'avais fait mes études, c'était qu'avoir l'air confiant donnait envie aux autres de vous croire, même quand vous ne saviez rien.

— Oui, et je valide ces dossiers.

Aubrey hausse un sourcil aux trois dossiers que je lui tends.

— Vous les validez ? répète-t-elle, septique.

N'était-ce pas ce que je devais faire ?

— Parfaitement.

— Vous ne les avez pas lus.

Je déglutis. Apparemment, le bluff ne fonctionne pas avec elle, c'est noté.

— Non.

— Damon, murmure-t-elle d'un ton tellement désapprobateur.

Je me lève et saisis ma veste de costume, je me sens ridicule.

— La journée est finie, je m'en vais.

— Damon !

Je ne lui laisse pas le loisir de me rattraper, je fuis, lâchement. Dans la foulée, j'envoie un message à mes amis, finalement, je vais y aller à cette soirée.

La rave se déroule dans un vieil entrepôt abandonné à la sortie de la ville, c'est le pote d'un pote qui l'organise, un bon à rien comme moi, qui vit sur la rente que sa famille lui donne. Une rente astronomique. Je n'ai pas pris le temps de me changer avant d'y aller et je regrette un peu, tout le monde me regarde comme si je sortais... eh bien, d'une putain de bureau de publicitaire, je suppose. C'est un peu désagréable alors je me débarrasse de la veste dans les fourrés, mais pas assez vite pour empêcher Stuart de me repérer.

— Yo mon pote, tu t'es laissé passer la corde au cou, on dirait, se marre-t-il tout seul en tirant sur ma cravate.

Foutue cravate.

Ella et Rain ne sont pas loin accrochées l'une à l'autre elles ont l'air d'essayer de marcher en se roulant des pelles, se cognant à tout ce qui bouge, et ce qui ne bouge pas non plus d'ailleurs.

— Laisse tomber, grommelé-je en tirant sur ma cravate. C'est ma secrétaire, c'est une vraie furie.

— Elle est canon ? Veux savoir Stuart et je le fusille du regard.

— C'est ma secrétaire, rappelé-je.

— Mais pas la mienne, ricane-t-il en faisant des gestes obscènes.

Et ça me dérange. Je ne sais pas pourquoi, avant quand Stuart faisait ça, ça me faisait rire, mais là, plus vraiment. J'ai l'impression qu'il souille Aubrey avec ces gestes, qu'il la salit.

— Arrête t'es dégueu.

Je lui mets une tape derrière la tête et il me regarde sans comprendre.

— Bois ça va te détendre, m'encourage Ella en tendant son verre.

Je l'accepte sans me soucier de ce qu'il y a dedans, la délicieuse brûlure de l'alcool échauffe mon gosier. Tequila, parfait.

— De toute façon je ne suis pas là pour parler boulot, ce soir je veux chopper.

Stuart hurle d'enthousiasme et les filles sautillent jusqu'à la piste de danse. Plus on s'approche du centre, moins on s'entend penser, la musique est si forte qu'elle raisonne dans mes organes. C'est précisément ce que je veux, ne plus penser.

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Oops

ça fait une éternité que je n'ai pas publier par ici ! Navrée !

Je m'en vais de ce pas corriger le tire en programmant deux chapitres par semaines jusqu'à rattraper les chapitres déjà disponible sur Fyctia !

Désormais, ce roman sera publier le lundi et le jeudi !

En attendant, j'espère que ce chapitre vous aura plus !

Bonne lecture !

Kiss

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