71. Viens comme tu es
Manon
^De : Nina
Tu ne vas tout même pas nous laisser nous rendre à l'orphelinat tous seuls?!!!! ^
Les points d'exclamations de Nina m'agressent les yeux alors que je ne suis pas tout à fait réveillée. Je grogne entre les oreillers et me résigne à sortir du lit. J'éteins mon horloge olfactive étant donné que je me lève une heure avant l'heure programmée.
Après une douche rapide, je compose le numéro de Nina en me coiffant devant le miroir de ma salle de bain. Je mets sur haut-parleur au moment où elle décroche.
― Tu as eu l'honneur de me réveiller ce matin.
― C'est plutôt une bonne chose, non. Dis-moi que t'es prête.
― Oui, je voulais savoir comment vous vous organisez afin d'éviter de faire des gaffes.
Je pose ma brosse à cheveux sur le rebord du lavabo pour attacher ma chevelure. Mon amie prend un temps de reflexion avant d'ajouter :
― Tu nous retrouves, Logan et moi, devant l'orphelinat.
― Soan et Gabin ne viennent pas?
J'applique un rouge à lèvre rouge coquelicot.
― Je ne pense pas. Sois-là dans un quart d'heure ma belle.
Elle raccroche.
Qu'est-ce qui peut empêcher à Soan et Gabin de venir? Ils étaient trop emballés dans ce projet pour lâcher en ce moment. Je n'emporte que mon portable et la clef de ma voiture en sortant de ma chambre. Je ne croise ni mon père ni Emma en sortant de la villa. Mes doigts finissent par composer le numéro de Soan au cours du trajet. Ça sonne sans réponse. Je me pince le bout de la langue.
Je tourne vers Union Square, quartier où siège la filiale de mon père. Deux kilomètres plus tard, je me stationne derrière la voiture de Nina. Je saisis ma clef et laisse mon portable dans la caisse, pour éviter toutes distractions.
On se fait un câlin après que Logan ait attrapé l'enveloppe contenant le chèque. Nous appuyons sur la sonnette de la petite porte en bois. La façade n'est qu'un grand mur d'environ quatre mètres de haut et six mètres de long sur lequel est accrochée une barre métallique avec le nom de l'Orphelinat écrit dessus.
L'accueil de la bonne sœur semble surprendre Logan. Mes expressions faciales lui font sourire et se détendre.
― Votre humanité donne tout plein d'espoir.
Logan allait se l'ouvrir pour avouer que l'idée venait de moi lorsque j'agrandisse mes yeux pour l'inciter à se taire. C'est nous. Moi tout seule, je n'y arriverai pas. Franchement, ce garçon doit avoir un problème avec les compliments.
Elle nous invite ensuite à la suivre à l'intérieur. Nous pénétrons dans une grande salle où joue une trentaine d'enfants de moins de quinze ans. Soudainement, mes mains deviennent moites et tremblantes. Je décide de les garder jointes, le temps que je reprenne mon état normal.
La sœur la plus proche vient vers nous et nous adresse un sourire. Elle nous parle mais mon esprit est perdu dans la salle. Distraite, je m'avance et m'accroupis au niveau d'un petit garçon d'environ cinq ans. Il a les cheveux noirs, les sourcils épais, les yeux marron caca. Rassembler son puzzle est sa seule occupation.
― Bonjour, je peux t'aider ?
Il hoche la tête, puis s'avance pour que je puisse m'asseoir à ses côtés. Je me laisse emporter tout en gardant une petite conversation avec lui. Le temps défile et nous finissons par rassembler les cent pièces du puzzle. Je ne faisais plus attention à rien. Lorsque je relève les yeux, Nina discutait avec une fillette de dix ans et Logan se trouvait dans un cercle d'enfants. J'aime ce que je vois.
Nous quittons l'Orphelinat vers les 13 heures. Nina et Soan partent de leur côté. Et lorsque je grimpe dans la voiture, mon premier réflexe est de vérifier mon smartphone.
Trois appels manqués d'Ayden et deux de mon père avec un vocal pour chacun d'eux. J'ai un message de Soan.
« Sans blague. Je t'ai dit de laisser un mot lorsque tu sors de la maison. C'est que je fais toujours moi... Appelle-moi dès que tu auras ce message. »
« Je voudrais qu'on se voit cet après-midi. Fais-moi signe bébé. »
^De Soan
Je présume que tu m'appelles à cause de mon absence ce matin. Je rentre à Frisco bientôt. Je te raconterai tout ma belle. Bisous. ^
À plusieurs reprises, mes paupières se battent contre leurs grés. Je rentre à Frisco bientôt. Sans déconner.
^À Soan
Comme ça tu quittes la ville sans me le faire savoir. Chouette amitié. En tout cas, prends soin de toi. Bisous. À bientôt. ^
Je n'ai pas eu le temps de le déposer qu'il s'est mis à vibrer.
^De Soan
Je sais que c'est vexant. Mais sache que je suis parti dans la précipitation. Tu sais que je t'aime. ^
Mouais. Je passe la clef dans le contact et roule vers Potrero Hill. J'écoute de la musique inspirante le long de la route qui mène à la maison.
Je me gare près du portail, parcours la propriété à pied et grimpe dans ma chambre après avoir appelé mon père à travers toute la villa. Je me change en tenue d'atelier pour peindre le fond d'un tableau que je veux naturaliste. Je mets de la peinture jaune moutarde sur un morceau d'éponge que j'applique sur la toile. Je ne sais pas où je vais avec ce tableau pour une fois.
D'ordinaire, j'ai une idée claire et nette de ce que je vais faire. Mais là, pour une raison que j'ignore, j'avance à l'aveugle. J'aime croire que c'est le genre d'idée qui se dévoile petit à petit.
Je n'ai pas fini de tapoter l'éponge que la sonnerie de mon portable vient m'interrompre. Qui peut bien m'appeler ?
Ayden
Merde. Je décroche et m'applique à lui mentir.
― Ton père m'a demandé si je sais où tu es. Je suis rassuré de savoir que je ne suis pas le seul à qui tu fais le mort depuis ce matin.
Je mords la lèvre inférieure, dépose ma palette de peinture et traine vers ma chambre.
― Je suis désolée. L'Orphelinat m'a pris tout mon temps. Que puis-je faire pour me faire pardonner ?
Je l'entends rire. Ce rire eurythmique.
― Descendre, marcher vers le portail, faire quelques pas vers l'extérieur et me prendre dans tes bras devraient suffire. Après tout, je dis « devraient ».
Quel coquin.
― Laisse-moi deux minutes pour me changer mon amour.
― Non.
― Non ?
― Viens comme tu es bébé.
Je fais une moue dégoutée.
― Ok !
Je raccroche et dégringole les marches qui conduisent au rez-de-chaussée. Je traverse la cours et m'arrête une seconde derrière le portail sous le regard interrogateur d'André. Il doit certainement se demander si je vais sortir dans cet état. J'ouvre la petite porte et tombe nez-à-nez avec le brun. Il sourit en me voyant et se retient de rire en remarquant ma tenue.
Je ne vais pas m'infliger cette honte. Je retourne à l'intérieur en courant. Dix secondes plus tard, je me fais attraper par la taille. Ses bras me portent et mon copain tourne sur lui-même. Un petit cri d'effroi m'échappe.
― Où comptes-tu t'enfuir comme ça ?
― Je suis moche. Lâche-moi pour que j'aille me changer.
Ma voix sonne comme une lamentation.
― Qui est cette fille qui dit que ma copine est moche ?
Je n'arrive pas à contenir mon p'tit rire. Il finit par me déposer au sol et m'embroussaille les cheveux tout en riant. Les cheveux sur les paupières, je ne vois plus rien alors que je lui demande d'arrêter. En réponse, ses lèvres s'unissent aux miennes en un baiser intense. Nous en sortons à bout de souffle.
― Tu es magnifique mon amour. (Ses bras m'entourent la taille et approchent nos deux corps. Je me permets de jeter mes cheveux à l'arrière. Ses iris immobilisent les miens). Je ne veux plus t'entendre dire le contraire.
Il se cambre en avant et frotte son nez au mien.
― Je ne dirai plus jamais que je suis moche.
Nous échangeons un autre baiser aussi vivant que le précédent.
― J'ai failli oublier que je t'ai apporté un truc. Attends-moi à l'intérieur.
Perplexe, un sourcil arqué, je me dirige vers la porte d'entrée. Je monte me changer et me rincer les mains.
J'entends un toc toc et la tête d'Ayden apparait entre l'embrasure. Il prend soin de cacher ses mains.
― C'est quoi ?
Je m'humidifie les lèvres, m'avance vers lui, tout sourire. Sa main me tend le petit paquet. Je vais m'asseoir sur le fauteuil près de la baie vitrée. Je sors une petite boite beige du paquet. Je suis curieuse de voir le contenu. Je jette un coup d'œil vers Ayden qui m'observe, un sourire en coin. Je l'ouvre sous ses yeux contemplatifs.
Je vois mon ancien IPhone réparé. Je secoue la tête avant qu'un rire m'échappe.
― Je ne m'attendais pas à ça.
Il se jette sur le lit.
― La vie serait bien ennuyante sinon.
Je me lève et m'allonge près de lui. Un bras autour de son cou, je lui donne un bisou à la commissure de ses lèvres. Il garde les yeux fermés puis passe un bras autour de ma hanche.
― Je me souviens d'un rêve dans lequel une personne me promettait un bouquet dont chaque fleur représenterait un trait de ma personnalité. Cette même personne m'a aussi promis de briser mon enfance avec la nouvelle version du Roi Lion.
J'explose de rire.
― Ce rêve devait être bizarre, cette personne vraiment barje. Non ?
Il ouvre un œil.
― Pas du tout, grâce à elle, j'ai eu la force ou plutôt l'envie de sortir au plus vite de cette impasse. J'avais hâte de me réveiller pour lui dire tout ce que j'avais sur le cœur. Maintenant qu'elle sait que je l'aime de toute mon âme, que je la désire de tout mon être et la veut de tout mon cœur pour toute ma vie. Et celle d'après. Je voudrais bien briser mon enfance et voir à quoi ressemble un bouquet qui reflète ma personnalité.
Je penche la tête en arrière pour refouler mes larmes. Je compte bien continuer le jeu malgré mon cœur qui explose en mille fleurs dans ma poitrine.
― J'envie cette personne. En même temps, je ne voudrai pas être à sa place. Former un bouquet avec les traits de personnalité d'Ayden est un travail qui demande du temps. Heureusement, le roi lion se trouve plus facilement.
Il finit par écarter les paupières. Il m'admire avec ses yeux de rêveurs qui me font craquer. Ses lèvres m'embrassent le front, puis le nez pour atterrir sur mes lèvres.
― Allons le regarder alors.
Je vous remercie de votre lecture♡. N'hésitez pas à laisser une petite étoile⭐.
Coeurs sur vous ❤
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