19. Il est revenu


•21 guns de Green Day en média. •

"Do you know what's worth fighting for

When it's not worth dying for?

Does it take your breath away

And you feel yourself suffocating?

Does the pain weigh out the pride?

And you look for a place to hide?

Did someone break your heart inside?

You're in ruins"

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Bonne lecture !!!

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L’incident du mardi dernier occupe constamment mon esprit. Pas uniquement pour Manon. Même si au fond, j’admets que le fait que quelqu’un d’autre puisse lui faire du mal atteint mon égo mais ma véritable raison est que les bagarres n’arrivent jamais au JF8. JAMAIS. Pas une seule fois en deux ans, je n’en ai vu une. Pourquoi la première viserait Manon alors qu’elle n’est pas une habituée du club? Peut-être que cette personne en voulait vraiment à Manon ou qu’on lui a payé pour faire exploser ce scandale. Une semaine s’est passée et zéro réponse. Ça m’énerve. Je tape sur le volant avant d’allumer une clope.

Manon ne sait pas que j’enquête là-dessus. J’ai fait le choix de l’ignorer dès mercredi après les cours. Pour la simple et bonne raison que j’ai peur qu’on lui fasse de mal par ma faute. Cette fille a de la souffrance en réserve pour toute une vie. Je l’ai compris assez tôt, à mon plus grand bonheur.

Elle n’a pas besoin de moi dans sa vie.  

Je me stationne devant JF8. Jaime m’a demandé de venir. En ce moment de l’après-midi, les portes du club sont fermées. Tiago et le personnel se préparent pour la nuit. Je n’y serai pas ce soir car j’ai un boulot à terminer. Je traverse la cours et pousse les portes d’entrée. Je salue Tiago qui se libère de son travail. Il jette sa serviette sur son épaule au moment où je me pose sur une banquette. Il me sert un whisky et pose ses deux mains sur le bord du bar.

― Il est revenu.

Je tue ma clope dans le cendrier et relève la tête vers le barman.

― De qui tu parles? Questionné-je l’esprit ailleurs.

J’avale mon verre cul sec et lui en redemande.

―Le gars qui a attaqué Manon. Il est repassé hier soir, s’attendant sûrement à la revoir. J’ai vu son tatouage. C’est un criquet.

Je tousse. Putain !

Je me raidis sur place. Je me pince l’intérieur de la bouche.

Les Criquets sont une bande de salopards qui viennent de Tenderloin et de Mission District. Ils portent tous un tatouage de criquet soit à leur poignet, leur coude, leur cou soit sur le torse pour les leaders ou le grand patron. Ce gang est partout au Sud de la Californie. Ils sont de loin, les plus recherchés par la police de San Francisco. Le pire est que le gang s’agrandit chaque jour. Ces gars ne s’amusent pas avec leurs adversaires. J’ai eu à les affronter une seule fois pendant un combat entre Jaime et un leader du nom de Driss.

J’ai eu de ‘la chance’ car je sais à quoi m’attendre s’ils s’en prennent à Manon. Ils n’ont aucune limite; la blessure de Manon en ait la preuve. J’ai en fureur que l’un d’eux puisse s’approcher d’elle, la toucher et la blesser. Pour la première fois depuis longtemps je regrette amèrement mes actes.

Est-ce que je dois présenter mes excuses à Manon?

Non, bien sûr que non. Ça ne changerait rien.

Cette guerre n’appartient pas à Manon pourtant par ma faute, elle en est la première victime. Ils me cherchaient moi. Et ils l’ont trouvé, elle.

Mais la plus importante question reste : comment un criquet a pu s’introduire au club de Jaime? Et en partir aussi facilement? Quelque chose cloche.

― Qu’est-ce que tu sais d’autres?

― Pas grand-chose. À part que le patron a reçu un mot aujourd’hui. M’enfin! Une menace.

Quoi? Mes yeux tombent de mes orbites. Alors c’est pour ça qu’il m’a appelé? Il se fout de ma gueule là. Le temps que je réparais ces merdes est échu.

― Sers m’en une autre.

Aussitôt versé, aussitôt avalé. Je le rends son verre et me gratte la barbe.

― Eh, je ne te l’ai pas dit. Elle ne s’est pas laissé faire. Vous formerez un joli couple.

― Ça n’arrivera pas Tiago.

Je suis le mieux placé pour savoir que Manon a un caractère assez imposant que l’on retrouve rarement chez les jeunes de notre âge. Elle est surtout la seule fille qui me tient tête et ne cherche pas à coucher avec moi. En un sens, je suis un vieux moteur que Manon arrive à mettre en marche. C’est aussi par crainte qu’elle puisse voir une once d’émotions en moi que j’ai coupé les ponts. J’admire les efforts qu’elle fournit pour ne rien montrer mais elle n’est pas forte à ce jeu. Ça m’a poussé à me poser la question : « Comment on peut souffrir de la distance d’une personne qui nous fait souffrir? » Je n’ai eu qu’une réponse : Manon est folle. On peut appeler ça : philanthropie, pureté d’âme, bonté, bienveillance… Pour moi, c’est de la folie pure et dure.

Sa folie aurait été une vraie source d’inspiration si elle n’avait pas les yeux, le rire ou la voix de Sarah.

Je caresse mon bracelet un instant en vagabondant dans mes pensées. Lorsque je relève les yeux, Tiago est encore là à me fixer.

― Tu sais où se trouve Jaime ?

― Dans son bureau.

Je tape mes doigts sur le bar et me lève. Tiago se remet au travail. Je chemine jusqu’au bureau. Je trouve le boss avachi sur un canapé, une bouteille à la main, les yeux tournée vers le plafond. Je racle la gorge pour annoncer ma présence.

― Enfin ! Souffle-t-il  

― Comment un criquet a pu s’introduire au JF8 Jaime ?

― Je l’ignore. Erreur de sécurité, je suppose.

Non. Il ne croit pas que je vais gober ce mensonge.

― L’erreur est humaine, prononcé-je d’un ton ironique. Je suppose que tu l’as su avant aujourd’hui et que tu as jugé mieux de me le cacher.

Son silence me répond. Tous mes pores vomissent de la colère. Je m’avance d’un bond et envoie ces bouteilles d’alcool valser à l’autre bout de la pièce. Le fracas des verres le réveille un peu.

― Je suis dans le business et je veux tout savoir.

Il se redresse, les yeux cloués sur ma personne puis penche la bouteille dans sa bouche. Je parviens à entendre son absorption. Il me regarde lassé puis essuie ses lèvres du revers de la main. Il tente de se lever mais retombe par lésinerie.

― Quoi encore? Tu veux un p’tit résumé? Le voici, c’est gratos : il est rentré, il a blessé ton amie et est reparti. Tu crois que je te mens?

Je n’aime pas sa façon de dire ‘il a blessé ton amie’. Il n’emploierait pas ce ton pour parler d’un chien errant. Mais, je ne vais pas le lui reprocher. Il n’y pas huit jours, j’aurais usé le même ton puis inutile de réveiller les soupçons en lui faisant croire que Manon a une place particulière dans ma vie, alors que c’est loin d’être le cas. Je préfère me concentrer sur le plus important. Je m’approche de lui, à petit pas.  

― Un criquet ne peut pas entrer ici, encore moins y repartir facilement. Qu’as-tu fait de lui?

Il néglige ma question et me jette une boule de papier en pleine face. Je l’attrape avant qu’elle n’atteigne le sol. Je le déplie et lis en lettre capitale :

DERNIER AVERTISSEMENT.

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