Jour 8 ( partie 4)

Abi

Toujours à quatre pattes, ma main rencontra un obstacle, comme une marche. La surface était froide et lisse, je pouvais aussi sentir de la poussière. En avançant ma main un peu plus loin, je devinai que je faisais face à un escalier. Je le longeai : inutile d'essayer de monter, je n'y voyais rien, j'avais peu de chance de semer mon poursuivant.

Une main sur la marche, l'autre sur le sol, j'avançais, la respiration haletante. Quand la marche s'arrêta, je bifurquai à droite et me cachai, le dos contre la paroi de l'escalier. En déplaçant ma main droite contre cette paroi, je sentis une cavité, me semblant assez large pour que je m'y glisse. Les craquements restaient à la même allure, ils ne m'avaient pas encore rattrapée. Avec un peu de chance, si je me glissais dans le creux, la chose n'allait pas me retrouver.... Enfin, c'était peu plausible, mais je ne voyais rien, et c'était ça ou la mort assurée. Je me déplaçai le plus silencieusement possible. D'après mon analyse, le seul moyen de passer était de ramper. Alors je me plaçai sur le ventre et m'y infiltrai tel un serpent.

Je réussis à passer mon corps entier et je me sentais très mal. Je détestais les endroits étroits et noirs. Je tentais de calmer ma respiration et les battements frénétiques de mon cœur, d'empêcher mes larmes de couler face à l'apparition imminente d'un nouveau flash-back. Pourquoi maintenant ?

-Abi ? Abi, où es-tu ?

Sa voix retentit dans toute la maison, ses talons claquent sur l'escalier en bois. Dans ma chambre, lumière éteinte, rideaux fermés, recroquevillée sous l'étroitesse de mon lit, j'attends anxieusement qu'elle me retrouve. Je ne bouge pas d'un poil, j'ai tellement peur.

La porte de ma chambre grince sinistrement, la lumière éblouit mes yeux, une sueur froide coule le long de ma colonne vertébrale.

-Abi, petite chipie, je peux savoir pourquoi rien n'est rangé en bas ? Ton père m'a dit que tu n'avais fait que des bêtises aujourd'hui...

Papa ment. J'ai obéi au doigt et à l'œil. J'ai tout rangé, et quand je suis montée, il a remis le désordre, je l'ai entendu. Mais ça ne sert à rien que je le dise, maman ne m'écoute jamais.

Je repoussai ces images le plus loin possible. Dans cet étroit couloir, la poussière recouvrait toute les surfaces et avait même réussi à envahir ma peau. Apparemment, la chose ne m'avait pas poursuivie. A présent, des pas résonnaient au-dessus de moi. J'entendis ensuite un cri étouffé, comme si quelqu'un soufflait pour s'empêcher de crier suite à une douleur. Puis des pas plus rapides, une porte qui claque... et un cri strident, me faisant sursauter. Je n'osais plus bouger. Une des filles avaient poussé ce cri, j'en étais persuadée. Mais pourquoi ?

Je songeai à rester ici. Tétanisée par la peur, restée dans cette cachette comme une véritable froussarde me paraissait une bonne solution. A peine cette pensée se forma dans mon esprit que l'on m'agrippa le poignet. Un hurlement s'échappa de mes lèvres, et je me débattis autant que je le pouvais.

-Lâchez-moi ! Lâchez-moi ! geignis-je.

Puis on tira sur mon poignet, j'étais traînée par terre, mon assaillant était bien trop fort pour que j'eusse pu faire quoi que ce soit. Ma poitrine frottait désagréablement contre le sol dur et froid. Je ne bougeais plus, je me laissais entraîner par... ce qui me traînait. A un moment, je me retrouvai suspendue dans le vide, on m'amenait vers le haut. Enfin, je fus balancée comme un vulgaire sac sur le sol. Je toussai, crachai, essayai de trouver mes repères. Mais je ne voyais toujours rien.

-Mais où je suis encore tombée ? râlai-je.

Puis une voix, semblable à un éclat de lumière, attira mon attention :

-Abi !

La voix d'Ambre, que je connaissais comme solide, peu facile à briser, était pleine de sanglots.

Ambre

- Abi !

Mes lèvres s'étaient ouvertes, mais avais-je vraiment parlé ? Elle regardait partout, complètement perdue. Elle semblait aussi terrifiée que moi, mais pas pour les mêmes raisons.

Quand je m'étais retournée après avoir fermé la porte, une forme à première vue humaine m'avait entourée. Seulement, elle se déplaçait aussi légèrement que le vent et de déformait telle une nuée de poussière. En regardant un peu mieux, j'avais vu qu'elle n'était pas solide, cette chose ressemblait plus à un gaz. Elle s'était approchée de moi, j'avais hurlé, puis pendant un court instant j'avais perdu la vue. Et quand je l'avais retrouvée, j'avais la tête dans le trou d'une guillotine. Mon cœur battait à tout rompre, j'étais complètement perdue, mes oreilles sifflait, ma vue devenait trouble, des gouttes de sueur perlait sur mon front, ma bouche se desséchait.

Puis une planche dans le sol avait disparu et Abi en avait surgi comme par enchantement, trainée pas la même forme poussiéreuse que j'avais déjà vue. Elle tournait la tête dans tous les sens, comme si elle tentait d'analyser son environnement sans y parvenir. Je ne décelais aucune trace d'émotion dans son regard, c'était perturbant.

Je ne savais plus sur quoi me concentrer, trop d'informations se bousculaient devant mes yeux : Abi, les ombres flottantes, la guillotine... Je ne voyais pas la lame au-dessus de moi, cependant, elle était bien là. Comme un fantôme, une présence dont on n'a peu conscience, mais on sait qu'elle est là. Quand est-ce que le fer tranchant allait-il tomber sur ma nuque ? Le sentiment que je m'étais désormais habituée à côtoyer revint à la charge : celui d'être si proche de la Mort que je me sentais capable de la toucher, même de l'embrasser ! En huit jours, elle était devenue ma voisine, toujours prête à m'accueillir au moindre problème...

Les ombres avaient disparu, leur poussière peut-être retournée au sol. Nous n'étions plus qu'à deux, et j'ignorais où se trouvait la troisième candidate. Criait-elle ? Aucun moyen de le savoir.

Je ne m'entendais pas, mais je savais que j'étais en train de gémir, probablement un son entre les larmes et les cris. Probablement un son bestial, pas agréable à entendre. J'entendis un claquement, puis un énorme BOUM. Je distinguai une petite silhouette trapue sur le sol, aux côtés d'Abi. C'était flou. Incompréhensible.

Soudainement, je perdis tout espoir de survie. Je ne voulais plus continuer. Depuis le début, je savais que jamais je n'allais gagner. Je n'étais pas la plus forte. Et je n'allais plus pouvoir vivre normalement. La victoire ne me revenait pas. La mort était plus simple.

Abi

Un coup de vent me surprit, une masse s'abattit sur ma main, je poussai un léger cri. Que se passait-il cette fois ? Une voix un peu aiguë et tremblante, me parvint aux oreilles :

-C'est quoi ça encore ?

C'était l'autre fille, dont le nom m'échappa. Si j'avais bien analysé la situation, nous étions à trois dans la même pièce, et nous ne voyions rien. Du moins, je le supposais. Ambre avait un problème, car elle pleurait. La fille – Lidia ? Violette ? – m'adressa la parole :

-Tu vois ce que je vois ?

Donc elle voyait. Il me parut plus prudent de mentir :

-Oui...

-C'est soit elle, soit l'une de nous deux, affirma-t-elle.

Mince, je ne comprenais rien. Ambre hurla, plein de désespoir :

-Tuez-moi, je vous en supplie !

Je fus choquée par ses paroles. Ambre abandonnait si facilement ? Elle ne devait pas avoir les idées claires. Olivia – Olivia, oui – sembla mener un débat, elle marmonnait, mais je parvenais à l'entendre :

-Ambre est plus forte qu'Abi. Si je la tue, la victoire sera déjà acquise.

Je manquai de défaillir. Tuer Ambre ? C'était chacune pour soi, certes, et de toute manière, si je voulais gagner à tout prix, il le fallait. Mais elle avait prononcé cette phrase avec tant de détachement que j'en étais horrifiée. Et moi qui ne voyais rien, je ne pouvais rien faire.

Des pas sur le sol retentirent, en même temps résonna un simple :

-Adieu.

Quelque chose siffla dans l'air avant de retomber dans un grand bruit, un objet roula ensuite sur le sol. Mon sang battait dans mes oreilles, un étau enserra ma poitrine, ma respiration devint sifflante. De l'air, il me fallait de l'air !

Je recouvrai soudainement la vue, ce fut comme un miracle, une lumière blanche illumina l'obscurité sans pour autant m'éblouir, puis je vis. Une chevelure blonde traînait par terre, juste devant moi. Je fermai immédiatement les yeux, souhaitant oublier cette terrible image. Retourner dans le noir, comme si je n'avais rien vu. Une succession de représentations de la tête coupée d'Ambre apparut dans mon esprit, me rendant folle. Je me recroquevillai sur moi-même à même le sol, poussant des gémissements plaintifs. J'entendis à peine l'explosion.

Je ne sais ce qui se passa ensuite. Des images du visage mutilé de Bethy puis d'autres de la tête blonde détachée de son corps hantaient mes pensées.

Comme si plus rien n'avait lieu autour de moi, et que j'étais condamnée à revoir encore et encore les mêmes images atroces.


[ Wouaw ! Je m'excuse pour ces longues semaines de retard... cours + manque d'inspiration = pas bon mélange. Mais maintenant que je suis en vacances, je compte bien me rattraper (attention hein, j'ai quand même bossé, j'ai fait une grande partie de la correction ;) Et puis j'ai travaillé sur mes autres écrits aussi...) !

La rédaction de cette partie fut longue et périlleuse, alors n'hésitez pas à donner vos avis dans les commentaires, vos conseils et tout ça, j'adore vous lire aussi moi, faut pas croire !

Bref, j'ai trop hâte d'écrire le jour suivant, ça va être géniaaaal (j'espère !) !!!

Bisous baveux !  :) ]

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