Jour 10 (partie 1)


- Abi ?

Non ! Elle ne pouvait pas être là ! Elle allait me tuer, elle tuait tout le monde. C'était un monstre, pourquoi un monstre m'appellerait, si ce n'était pour me faire du mal ?

- Abi, sois gentille. Je ne te ferai pas de mal.

Sa voix sonnait fausse contre les murs. J'étais dans un labyrinthe de couloirs noirs, dans lequel il était tout bonnement impossible de retrouver son chemin. Et je me trouvais désormais dans un cul de sac. Je me collais contre le mur aussi lisse qu'une surface de verre, tapie dans l'ombre angoissante. Ça sentait l'oeuf pourri et le sang séché, mélangé à ma transpiration. Je respirais à peine, voulant à tout prix éviter de faire le moindre bruit.

Je ne pouvais pas faire marche arrière, je savais que je tomberai pile sur elle. Ici, peut-être ne me verrait-elle pas, cachée dans la pénombre. Mes sanglots retenus m'engloutissaient. Ses pas murmuraient contre le sol, elle approchait.

En face de moi, à l'angle du couloir, son ombre se détacha des murs dans une douceur terrifiante. Son visage demeurait invisible. Mes mains moites se plaquèrent contre ma bouche, je m'asphyxiais, manquant d'air. Sa posture dominante me laissais pantoise, je ne fis que me recroqueviller sur moi-même. Avec une lenteur mesurée, elle vint vers moi. Et enfin, la pénombre dévoila son visage, un sourire sadique sur les lèvres.

Je hurlai.

Mes yeux s'ouvrirent sur la nuit indifférente. Indifférente à mon cauchemar. Le plus terrible, cela n'avait pas été la peur que j'avais éprouvée, aussi réelle que celle qui habitait mon quotidien. Non, le plus terrible, c'était que le monstre de mon mauvais rêve... n'était autre que moi-même. Revoir mon visage meurtrier me donna la chair de poule, je serrai les dents et fermai durement les yeux, secouai la tête dans tous les sens, me rongeai les ongles jusqu'au sang.

Assise, je me repliai sur moi même. La nuit allait être longue...

Je ne m'étais pas rendormie. L'horreur seule avait été ma compagne, agrémentant mes courts moments de répis, de souffrance. Je ne me levai que lorsqu'il fit complètement clair. La nuit pouvait être réconfortante ; pas cette fois. J'executai mes gestes quotidiens sans réfléchir, en fait je ne savais même pas ce que je faisais. Je devais seulement me dépêcher, et partir d'ici au plus vite. C'était fini, je devais partir. Pourtant aucune once de joie ne croisait mon chemin.

Dans les sanitaires, je croisai un garçon, qui s'arrêta devant moi. Il me regardait, je ne savais pas pourquoi. Ses yeux marrons s'accrochaient à moi, m'analysant. Cela me mettait mal à l'aise, je pleurais peut-être sans m'en rendre compte.

- Est-ce que je... peux entrer ?

J'étais devant la porte d'une cabine de douche. En fait, c'était moi qui le regardais et non le contraire. Je ne ressentis aucune forme de honte quelconque, je trouvais plutôt la situation très comique. Pourtant je ne ris pas, mes lèvres ne savaient plus comment procéder. Je ne voulais plus rire. Je fis alors la chose la plus censée qui me vint à l'esprit sur le moment : je me jetai dans ses bras. En vérité, c'étaient mes bras qui se jetèrent sur lui, mais le résultat était le même. Ne s'attendant pas à cette réaction de ma part, il recula de quelques pas. Son t-shirt constituait une bouée de sauvetage, son parfum une bouffée d'oxygène, son corps la normalité. Il était ce que je n'avais jamais été, et c'était bon de se fondre en lui, plonger dans une autre vie.

Je fus interrompu dans ma rêverie :

- Je... je ne pense pas qu'on de connaisse.

Délicatement, il détacha mes mains des muscles tendus de son dos. Tête baissée, il me contourna et s'enferma rapidement dans la cabine.

Je suis dingue.

Lorsque cette pensée émergea dans mon esprit, mon cœur rata un battement et mon souffle se coupa. Béate, je fixais la porte qui venait d'être claquée. Une vague d'émotions m'emporta, je tambourinai contre le rempart. Lui aussi, il était contre moi. Un tremblement percuta mon corps et les coups qui résonnaient plus fort que mon cœur s'epuisèrent. Le monde se referma sur moi et je m'écroulai, des voix envahissant mon crâne.

Des bras musclés me prirent, je restais recroquevillée, terrifiée. Le parfum mentholé d'Ethan ne fit que m'effrayer davantage. Des tas de questions volaient dans ma tête.

- Ethan dis-moi que c'est fini. J'ai compté. Ça fait dix. Dix pile, j'ai gagné, je suis seule. Je ne veux pas la récompense. Laisse-moi seulement partir et oublier.

Les sanglots guidaient mes paroles à peine articulées, dont je ne comprenais plus moi-même le sens.

- Ce n'est certainement pas le moment de lâcher, commenta-t-il durement.

Je le repoussai avec hargne, je ne voulais pas de son contact ; il ne me lâcha pas.

- Dix filles, dix jours, dix épreuves, une récompense. Donne-moi cette fichue récompense s'il le faut, et je me casse.

Un coup de pied plus tard, j'étais par terre, traînant dans la poussière. Il m'avait portée à l'extérieur, le soleil brillant mordait mes rétines.  La chaleur m'attaquait, je distinguais avec peine le visage fermé de mon bourreau.

- Dix filles, dix jours, dix épreuves, répéta-t-il.

Je déglutis, ne désirant que fuir, loin, très loin, disparaître. Les bras croisés, Ethan me regardait d'en haut, me considérant comme la dernière des idiotes.

- Tu ne sais plus compter Abi ? Neuf filles, neuf jours, neuf épreuves. C'est là où en est le Jeu actuellement.

Une nausée bloqua ma gorge, mes paumes se refermèrent sur les cailloux au sol. La douleur de la veille n'égalait en rien ce que je ressentais en cet instant. Depuis le début, on me manipulait. Mon cœur ne s'impatienta pas, il cessa de battre cette fois. J'allais mourir, Ethan le savait depuis le début. Il était au courant de tout, rien n'avait compté.

- C'est la dernière épreuve aujourd'hui. Et si tu la remportes, c'est fini. Plus de Jeu.

Je voulais en finir, ne plus entendre parler du Jeu, du Camp. Simplement oublier. En sois, j'étais prête à me laisser mourir.

Mais au fond... avais-je réellement fait tout ça pour abandonner face à la mort alors que j'étais aux portes de la victoire ?

[ Oooouf ! J'ai tellement galéré à écrire ce chapitre, vous n'imaginez même pas.

Autant vous prévenir tout de suite,  mon rythme de publication va redevenir irrégulier à cause des cours (vive la S !), mais pas d'inquiétude, je reste active.

Qu'avez vous pensé de ce chapitre ? Le cauchemar ? Ethan ? Comprenez-vous Abi ?

Hâte de découvrir la DERNIÈRE épreuve ?

Voili voilou, bisous ! ]



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top