08

L'aube était là. Je regardai alors notre appartement une dernière fois, avant de refermer la porte derrière nous.

Nous commencions à marcher, Aël avec Seth à ses côtés, la brunette avec le rouquin et moi seul à l'arrière. Tout le monde transportait un sac chargé et marchait d'un pas déjà fatigué, en trainant les pieds.

« Atteeeendeeeez! » hurla aussitôt une voix lointaine accompagnée de bruits métalliques.

Je me tournai donc vers la source de ce boucan et aperçu Osar surmonté d'un gigantesque sac à dos sur lequel une masse d'objet, comme des casseroles, y était accroché. Malgré moi, un sourire se dessina sur mon visage et dès qu'il fut assez près, je l'agrippai dans mes bras en le serrant contre moi. Je n'avais jamais été aussi heureux de le voir.

« Tu es venu ! » m'exclamai-je.

Il hocha la tête, et me sourit. Lorsque Aël vint nous rejoindre, mon frère le salua, presque aussi content que moi.

Nous marchions en silence depuis bientôt 2 heures, la température continuait de monter et tout le monde était épuisé.

« Tu sais, tu n'étais pas obligé de faire tout ce que tu as fait pour me convaincre de venir. J'aurais flanché au moment même où tu aurais franchi le seuil de la porte. » lâcha mon ami d'une petite voix, pour se faire discret auprès des autres.

Il marchait en regardant ses pieds.

« Tu m'as même dit que j'étais comme ton frère... se moqua-t-il. Ton plan à foiré à partir de ce moment
— J'ai dit ça ? »

Il hocha la tête, amusé.

« Tu as pourtant aimé, rétorquai-je accompagné d'un sourire malicieux. Ça plaît à tout le monde que je les embrasse... » Dis-je faiblement en effleurant sa joue du bout des doigts.

Ses pommettes s'empourprèrent, puis il me poussa "amicalement", m'envoyant valser sur le sol. Il éclata de rire, ce qui attira l'attention des autres. Ils s'arrêtèrent tous, pour regarder ce qui se passait. Tous eurent l'air d'être amusés de me voir écrasé sur le sol. Je me relevai d'un bond en enlevant la poussière de mes vêtements.

J'adressai simplement mon majeur à mon ami, en emboîtant le pas. Les autres ne tardèrent pas à me suivre.

J'avais moi-même de la difficulté à marcher sous cette chaleur accablante. Plus personne ne parlait. À la vue d'un arbre étonnamment feuillu dans ces plaines, je me précipitai sans l'accord des autres sous celui-ci.

« Prenons quelques minutes à l'ombre pour nous reposer. » imposa directement mon frère à ma place.

Il vint alors s'installer à côté de moi, pendant qu'Osar distribuait un peu d'eau aux 3 autres.

« Où est-ce que nous allons ? me demanda alors Aël.
— Je n'en sais rien. Quelque part, ailleurs. »

Je passai alors une main sur mon visage en sueur, tout en fermant les yeux. Il était probablement midi, et je regrettais déjà d'être parti.

Je regardai l'horizon qui était majoritairement désert. Milor et Loki s'étaient laissés tombé dans les bras de Morphée. Les minutes s'étaient transformées en heures. Ma détermination, ma motivation s'était envolée en même temps que celles des autres... Osar faisait connaissance avec le petit con de Seth et mon petit frère somnolait appuyé sur mon épaule.

« Eh Aël, on devrait partir, ce n'est pas normal que tout soit aussi calme... On n'est pas très loin de la ville et si les Ramencheurs étaient sur le point de vraiment arriver, ils seraient tout près.
— Mmmh... »

Je me levai doucement pour ne pas le brusquer, puis il soupira en s'étirant.

Seth et Osar se levèrent brusquement en me voyant m'approcher et se postèrent devant moi, comme des soldats.

« On va reprendre la route. »

Ils hochèrent la tête et le brun alla réveiller la brunette. Je supposai donc que je devais me charger de réveiller le rouquin, qui dormait paisiblement. Je posai alors ma main sur son épaule et il ouvrit brusquement les yeux en se jetant violemment sur moi, pour m'attraper au cou. Ses doigts se resserrent au point de m'empêcher de respirer. J'étais incapable de repousser Milor, qui était beaucoup plus fort qu'il en avait l'air.

« Non, je m'en occupe. » lâcha une voix féminine, qui me semblait drôlement étouffée, loin.

Mes mains lâchèrent prise, même si ses jointures blanches m'empêchaient toujours d'avoir la moindre bouffée d'air. Puis le roux s'écroula comme une pierre à côté de moi. Je commençai à haleter, pouvant enfin respirer. Loki se trouvait debout devant moi, une batte de baseball sur l'épaule. Elle me tendit la main, que je pris aussitôt. Une fois debout, elle me fixa quelques secondes, puis me fit dos en lançant l'objet à Osar qui le rattrapa agilement.

« Plutôt utile, ce truc. » lâcha-t-elle impassible.

Osar lui sourit et rangea la batte dans son sac. Je regardai l'adolescent étalé sur le sol. Sa poitrine se soulevait paisiblement, il n'était heureusement pas mort.

« Tu aurais pu le tuer. Tu aurais dû me laisser mourir, réprimandai-je à la fille en passant une main sur ma nuque.
— Pour perdre 3 heures à attendre ton réveil ? Ça aurait été complètement stupide. » rétorqua Loki du tac au tac.

Elle s'approcha d'un pas assuré jusqu'à moi, puis s'arrêta à quelques centimètres de mon visage. Notre échange de regards perdura un bon moment et sa proximité me rendait nerveux. Puis, pendant que je scrutai son fin visage, elle me lança sur un ton envenimé :

« Je ne suis pas née de la dernière pluie, je sais ce que je fais. Je ne suis une misérable petite fille de campagne. La marque dans mon cou n'est pas une décoration. Alors ne me dit pas ce que je dois ou aurais dû faire, tu m'entends ? »

Sans même entendre ma réponse, elle tourna les talons, rejoignit son frère et lui murmura quelque chose qu'il accepta. Il prit donc leur ami inconscient sur son épaule, prêt à partir.

Elle marchait d'un pas énergique depuis un moment, rien ne semblait pouvoir l'arrêter. Milor avait repris ses esprits quelques minutes après notre départ, redevenant un enfant sage. Osar ne cessait pas de me regarder, puis de regarder la brune, il avait un sourire niais qui m'agaçait. Je ne voyais qu'elle. Mon jeu ne fonctionnait pas avec elle, pourquoi ? Je ne pouvais que rester pantois devant son caractère si récalcitrant.

« Cette fille te plaît, lâcha mon ami.
— Non, pas du tout, répondis-je impassible, sans lui adresser un seul coup d'œil.
— Ce duo de Ramencheurs vous ont envoûtés, ton frère et toi. Vous vous êtes, tous les deux, amourachés de Seth et Loki. »

Je le regardai perplexe, ne sachant pas s'il était sérieux. Quand j'aperçus son énorme sourire accroché aux coins des lèvres, sans surprise, je compris qu'il croyait effectivement ce qu'il disait.

« C'est dommage, je croyais que tu me connaissais mieux, Osar. »

Il soupira, mais n'ajouta rien.

Nous avions établi un petit campement à l'intention du crépuscule qui se pointait. J'avais ensuite proposé de faire le guet et personne n'avait refusé mon offre.

J'étais étalé sur le sol, les bras croisés derrière ma tête, à regarder les étoiles scintiller dans le ciel. La lune était inexistante, la température avait chuté, laissant une petite brise glacée.

Osar était blotti contre moi, la tête enfouie dans le creux de mon cou, ce qui m'arrachait un frisson de temps à autre. Nous avions toujours été étrangement près l'un de l'autre depuis que nous nous étions rencontrés. Il était la deuxième personne la plus importante à mes yeux, Aël étant la première.

Tout était silencieux et si paisible...

J'ouvris les yeux brusquement. Je m'étais endormi...! Par chance, il faisait toujours nuit et tout le monde dormait. À l'exception de la brune dont son visage se trouvait à quelques centimètres du mien.

« Mais qu'est-ce... »

Sans même terminer ma phrase, elle plaqua sa main sur ma bouche et posa doucement son index sur ses lèvres pour me faire signe de me taire. Elle se releva et recula doucement et me dit silencieusement de la suivre. Je me levais facilement, puisque mon ami s'était un peu décalé.

Elle me mena à une centaine de mètres du campement. Dès que nous avions franchi une dizaine de mètres, j'avais commencé à parler, de tout et de rien, du petit repas que nous avions passé ensemble, des étoiles dans le ciel, je lui posais aussi des tas de questions ; sa couleur préférée, etc.

Elle s'arrêta alors nette et se tourna vers moi les dents serrées. Son poing s'écrasa douloureusement sur ma mâchoire et je la regardai, embarrassé.

« Tu vas la fermer à la fin ? »

Je déglutis, puis elle reprit la route, mais mes pieds restèrent ancrés dans le sol.

« Pourquoi tu m'as réveillé ? À ce que je peux comprendre, ce n'est pas parce que tu avais envie de parler, de me parler.
— Qui en aurait envie ? » rétorqua-t-elle sèchement.

Je soufflai d'agacement et tournai les talons.

« Retournons au campement, maintenant. Et tu ferais mieux de me suivre, si non je...
— Si non quoi ? Tu vas me poignarder, me tuer ? râla-t-elle les bras croisés sur sa poitrine.
— Qu'est-ce qui te prend ? commençai-je. Tu me réveilles pour aucune raison apparente, tu me frappes et t'énerves contre moi, quand pour une fois, je ne t'ai absolument rien fait ! m'emportai-je.
— Tais-toi.
— Pourquoi? Mademoiselle croit pouvoir me donner des ordres maintenant ?
— Erwin, tu vas la fermer, oui ?
— Non! Tu... »

Elle s'approcha et plaqua sa main sur ma bouche, comme elle l'avait fait quelques minutes auparavant, en regardant autour de nous. Mais cette fois-ci, j'attrapai abruptement son poignet.

« Qu'est-ce que tu m'énerves ! ajoutai-je. Je ne comprends pas pour...
— Ferme-là...!
— Je... »

J'écarquillai les yeux suite au contact de ses douces lèvres sur les miennes. Elle m'embrassa nonchalamment pendant à peine quelques secondes, tandis que moi, j'étais figé comme un gamin qui recevait son premier baiser à vie. Elle se décala ensuite, écœurée par la situation. J'effleurai mes lèvres du bout des doigts... Elle avait gâché mon jeu ! C'est moi qui devais faire ça ! Elle s'accroupit alors et je l'imitais aussitôt. Elle me pointa ensuite l'horizon.

« Maintenant que tu l'as fermé, regarde là-bas. Les Ramencheurs sont tout près, chuchota-t-elle. Ils auraient pu t'entendre.
— Pourquoi ne pas me l'avoir dit dès le départ ? Et puis comment tu savais qu'ils...
— La ferme. »

Nous restâmes là un moment à les regarder marcher dans l'obscurité avec leurs torches, tous les deux agacés par la présence de l'autre. Ils étaient étrangement nombreux, n'étaient pas accompagnés par des chiens, et même de loin, ils semblaient plus costauds, mieux armés. Ça n'envisageait rien de bon. Mes trois otages étaient de vrais amateurs.

Lorsque les Ramencheurs disparurent à l'horizon, je crus bon de rentrer au campement. Je me tournai donc vers Loki, qui n'hésita pas à me regarder froidement dans les yeux. Je regardai ses longs cheveux bruns emmêlés qui encadraient son joli visage sali par la terre. Ses yeux noisette m'hypnotisaient. Ma main glissa alors sur sa joue et, en un fragment de seconde, son poing s'écrasa à nouveau férocement sur mon visage. Un goût de fer éveilla mes papilles gustatives. J'étouffais un rire avec le revers de ma main en voyant la haine dans ses yeux. Je ne perdis pas une seconde de plus avant de me lever.

« Tu devrais faire attention, ma patience a ses limites. Tu ne devrais pas tenter de m'énerver, si tu savais ce que je peux faire... Tu devrais me laisser jouer Loki. » ajoutai-je, un sourire dépravé fendu jusqu'aux oreilles.

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