Chapitre 7


Son esprit était embrumé et divaguait dans un millier de sens. Il était légèrement perdu, ses doigts s'agitaient désespérément et inlassablement sur la vasque du lavabo sur lequel il était appuyé de tout son poids. Son corps était penché en avant, sa tête baissée, ses yeux fixaient le sol vivement, suivant les contours du carrelage, longeant les rebords du tapis au pied de la douche, puis revenant à l'endroit de départ : la base du lavabo blanc immaculé.

Liam souffla un grand coup, voilà qu'il ne pouvait même plus se contrôler après ça. Il était dans de beaux draps. Du bout des doigts, il tourna le bouton du lavabo pour avoir de l'eau bien fraîche. Le liquide coula entre ses mains, qu'il resserra pour finalement les porter à son visage. Cela le soulagea un peu, mais malgré tout il ne savait pas quoi penser, ni comment orienter ses esprit. Son âme toute entière grondait, tandis qu'il essuyait rageusement les gouttelettes qui dégoulinaient dans son cou. Il ne devait pas céder.

S'il ne parvenait plus à ramener son coté violent au plus profond de lui, c'était une mauvaise nouvelle... Et cette période noire qui remontait à ses années collège, il préférait l'oublier. Il le voulait de tout son cœur. Et il avait fait en sorte de celer toute trace de ces années au plus profond de son esprit. Il détestait cette part de sa vie, il était même persuadé que si elle se matérialisait devant lui il lui ferait la misère. Cette envie d'être à nouveau celui dont on avait peur grimpait lentement en lui, s'accrochant à tous ses souvenirs mauvais, à toutes les choses qui l'effrayaient plus ou moins. Non. Il fallait qu'il réussisse à repousser tout cela au fond de lui, et ne pas oublier de fermer à double tour cette fois. Il ne pouvais pas laisser cela recommencer, c'était de la folie, lui même s'en rendait compte.

Il luttait sincèrement contre cela, pourtant dans un accent de haine contre lui-même, il traversa la maison d'un pas décidé, entrant brusquement dans la cuisine tout en serrant des poings. Il s'approcha de Louis ; le pauvre Louis qui ne se doutait absolument de rien, qui face au plan de travail ne vit pas Liam arriver, mais qui se retrouva bien vite attrapé par le col, et cloué au mur par une force plutôt importante. Ses pieds ne touchaient plus terre, et le châtain commençait à paniquer.

Les pupilles de Liam étaient étrangement dilatées, le noir noyant cette douce couleur noisette tandis que dans le regard de Louis, la peur se lisait clairement. Ses yeux reflétaient l'inverse total de ceux de son cadet, le gris argenté envahissant le sombre. Le brun pouvait lire dans les yeux de son camarade comme dans un livre ouvert ; l'incompréhension, l'inquiétude, un léger voile de douleur, ainsi qu'une quatrième chose qu'il ne parvenait pas à identifier.

Leurs regards étaient liés.

- Liam... Commença l'ainé qui commençait à manquer d'air. Liam qu'est-ce que tu fais ?

Ce dernier le bloqua un peu plus, plissant les yeux, fronçant les sourcils, les phalanges de ses doigts se repliant encore un peu plus, blanchies par l'effort. Le plus vieux suffoquait à présent.

Le jeune Payne, dont les traits paraissaient plus matures dans l'action approcha son visage de celui de sa victime, le mécheux attendait -de toutes façons, qu'y avait-il d'autre à faire ? Il ne pouvait même plus bouger- redoutant la suite, étouffant un hoquet quand le front et le nez de Liam rencontrèrent ses mêmes parties chez lui, appuyant de toutes ses forces, si bien que le Tomlinson avait également mal aux endroits de colision.

Le châtain vit soudain les iris du Payne reprendre leur taille normale, la pression sur son visage s'amoindrit considérablement, alors que le brun penchait la tête de quelques millimètres, fermant les yeux. Et ses lèvres se posèrent sur celles du plus âgé, à qui il donna un baiser d'une tendresse infinie -qui contrastait parfaitement avec la situation- et auquel le mécheux ne répondit pas.

Profitant de cet instant de faiblesse chez son sauveur-agresseur, Louis le repoussa de toutes ses dernières forces, tandis que Liam, surprit, lâcha le Tomlinson. Ses articulations le faisaient souffrir -douleur à laquelle il ne fit pas vraiment attention.

Le mécheux reprenait son souffle à grandes goulées. Inspiration, expiration. Son regard croisa à nouveau celui du brun, et ses jambes eurent tôt fait de décider pour lui. Il s'enfuit, ouvrant la porte à la volée. Sorti dans le froid, ses poumons le brulèrent rapidement, et il finit par s'asseoir contre le mur de la maison. Son cœur battait la chamade, et il cherchait encore à comprendre le comportement de son cadet.

Liam pendant ce temps tentait de comprendre, ses yeux passant d'une main à l'autre, un nœud lui tordant le ventre. Qu'avait-il fait ? Pourquoi avait-il réagit ainsi ? Pourquoi n'avait-il pas réussi à se contrôler ? Devait-il avoir peur de lui même à présent ? Il se réfugia dans la chambre dans laquelle ils avaient dormi et ferma la porte à clé, se laissant glisser contre celle-ci, levant la tête au plafond.

De longues minutes s'écoulèrent sans que rien d'autre ne se passe. Aucun bruit, aucun geste, rien. Seul le tic-tac d'une horloge, le balancement du grand père sur le rocking chair, et le sifflement du vent. Le seul remue ménage était inaudible et se produisait dans les pensées des deux jeunes adultes.

Louis avait enfin reprit son souffle correctement, et ne ressentait plus aucune douleur excepté la légère morsure du vent d'hiver. Il était simplement légèrement gêné au niveau de la gorge, mais il essayait de ne pas y penser. Il se décida enfin à entrer de nouveau dans la maison qu'il trouva vide, à l'exception du vieil homme. Le silence était assourdissant. Inquiétant. Il ne savait pas si il s'en voulait, ni même si il en voulait à Liam. Soudain, son cerveau ne fit qu'un tour et sa tête se vida de son sang. Et si... ?

Il se rua à l'étage, ouvrant d'un geste la porte de la salle de bain, sans rien trouver de plus, puis il se précipita sur la porte de la chambre, en tournant la poignée, mais le loquet était fermé.

- Liam ?

- Vas t'en. Lui répondit une voix grave.

Louis soupira de soulagement.

- Liam...

- Vas t'en !

- Mais je...

- VAS T'EN !

- Liam écoutes moi au moins !

- Non... Vas t'en Louis... S'il te plaît... Laisse moi seul...

Du regret s'entendait clairement dans la voix du cadet, et les larmes ne tardèrent pas à couler. Le brun se prit la tête entre les mains et laissa libre cours à ces gouttelettes, les laissant dévaler son visage crispé. Il avait mal, mais c'était une douleur bien différente que ce qu'il pouvait ressentir physiquement.

Le Tomlinson tenta une dernière fois d'ouvrir la porte, mais ce fut évidemment un échec.

Le Payne de son coté pleurait silencieusement, ses mains agrippant ses cheveux avec force. Il voulait paraître fort, mais il était faible. Les hommes ne pleuraient pas. Dans sa tête un tourbillon de sentiments se croisaient, se perdaient, se retrouvaient, sans jamais qu'il n'arrive à les classer correctement. Il ne comprenait pas comment, en deux jours, sa vie avait pu pareillement changer.

* * *

Liam se releva, il avait du rester cloîtré dans sa chambre un bon quart d'heure au moins, si ce n'est plus. Ses muscles étaient tendus, il avait mal aux doigts. Il avait surtout mal au cœur, et se dégouttait lui-même. Il était un beau salaud finalement.

Il ouvrit la porte dans un petit claquement, et sortit de la pièce prudemment. Une masse sur le coté attira son attention. Louis était roulé en boule contre le mur. Attendri, le jeune Payne l'observa quelques longues secondes. Puis, croyant qu'il dormait, le brun referma la porte sans bruit, et d'un pas de loup, se dirigea vers la cuisine. Seulement le mécheux l'interpela.

- Pas la peine de t'échapper, je t'attends. Fit l'ainé, toujours dans la même position.

Le cadet se stoppa net. Il se retourna lentement, le visage marqué par la peur et la gêne. Il fit un pas en arrière lorsque l'autre leva la tête, et ancra son regard dans le sien. Il lui sembla qu'il se noyait dans une étendue cendrée. Il dégluti difficilement et bruyamment.

- Maintenant, tu attends que je t'explique. Gronda l'ainé.

Il se leva et se posta devant Liam, sans quitter ses yeux, leurs corps séparés de quelques millimètres seulement. Son regard se fit sombre, intimidant, et Liam voulu reculer d'un pas... Mais les pupilles insistantes de Louis l'en dissuadèrent.

- J'ai besoin de respirer pour vivre. Fit ce dernier, gravement.

- Je... Commença le jeune Payne, l'incompréhension s'emparant de lui.

- Pour tout à l'heure. Continua le châtain. Si je t'ai repoussé, c'est pas contre toi. Mais, vois-tu, je manquait légèrement beaucoup d'air. Si tu vois ce que je veux dire.

Liam fronça imperceptiblement les sourcils, bascula doucement la tête sur le coté, perdu. Il resta sans réaction, si bien que Louis ajouta le geste aux paroles. Il prit la tête du brun entre ses deux mains, sentant ce dernier se tendre, et l'approcha à lui pour l'embrasser fougueusement. Une de ses mains descendit se placer au creux des reins du cadet.

Ce dernier quand à lui mit du temps à réaliser la situation, droit comme un piquet, et il n'esquissa aucun mouvement, si ce n'est de fermer les yeux. Puis inconsciemment, il passa ses bras dans le dos de Louis, et croisa ses poignets au niveau se sa nuque, répondant par la même occasion au baiser.

Quand le Tomlinson se détacha de lui, reculant d'un pas, Liam le rattrapa, se cramponnant au dos du pull du mécheux. Un petit gémissement lui échappa quand il le serra contre lui, enfouissant son visage dans le creux du cou de l'ainé, qui se retrouva surpris à son tour.

Soudain, le brun releva la tête, et dans un sourire resplendissant s'écria :

- Bon, j'ai faim moi du coup !

Il s'écarta à son tour, et se rua dans la cuisine, comme un enfant. Louis le rejoignit plus posément, souriant lui aussi. Il était un peu rassuré. Pour combien de temps ? Pénétrant dans la salle, reçut un objet non identifié en pleine tête.

- Eeh ! Se rebiffa-t'il.

Un petit rire lui parvint. Il ramassa l'objet qui s'avérait être un aliment, plus précisément, une carotte.

- Je pense que ce serait mieux, et moins compliqué, servi dans une assiette, mais si tu insiste...

Il croqua sur le légume, un air de défi illuminant ses traits. Liam frissonna.

- Quoi ? T'en voulais ?

Caché derrière la table, l'autre fit la moue. Louis rit, et quand le Payne s'échappa par la porte fenêtre -donnant sur l'extérieur-, il lui courut après, abandonnant la carotte à son triste sort.

Le mécheux le poursuivit quand il perdit sa trace ; il fit le tour de la maison, trottinant dans le froid, quand il se prit les pieds dans quelque chose et s'étala de tout son long sur le sol gelé. Il s'assit, patiemment, et enleva les quelques morceaux de feuilles de ses cheveux. Liam lui sauta soudain dessus, et il se retrouva de nouveau à côtoyer l'herbe givrée.

Ils se regardèrent un moment, leurs yeux s'attirant comme des aimants ; le regard de Liam dévia un peu plus bas, le temps d'une seconde, puis il se rattacha aux orbes grises qu'il venait de quitter. Bien évidement, Louis s'en aperçut, ses yeux n'ayant pas quittés ceux du brun, seulement lorsque le jeune Payne avait regardé sa bouche.

Il faisait froid dehors, la température était négative, pourtant, Louis brûlait de l'intérieur. Une sorte de haine se fit ressentir au plus profond de lui, et il dut lutter pour la laisser de côté. A ce moment, ce sentiment étrange et inconnu qui lui chatouillait les tripes se mêlait à cet autre qu'il voulait oublier. Et cette sensation lui envoyait des piques. L'adrenaline était la même, peu importe sa source. Et cela ne lui rappelait que trop bien ces moments douloureux avec son père.

Louis regardait Liam, et Liam regardait Louis, scrutant les moindres agitations dans les yeux de l'autre.

Un excès de cette sorte de haine plus fort que les autres naquit en Louis, qui se tendit, et tout son corps gronda, chaque millimètre de sa peau se contracta, et il finit par dévorer les lèvres de Liam, rompant le contact visuel. Ce dernier qui n'était qu'à moitié sur lui ; c'est à dire le haut du corps seulement sur le torse de son ainé ; étrangla un cri de surprise agréable. Leurs lèvres se celèrent. Leurs langues se mêlèrent.

Ils échangèrent un baiser passionné, roulant dans l'herbe gelée, Liam frissonnant à chaque contact glacé sur ses bras nus, que Louis s'empressa de protéger des siens, couvert de son pull.

Ils firent encore d'autres roulades, Liam cramponné au vêtement de Louis, Louis s'accrochant au T-shirt de Liam, leurs corps collés l'un à l'autre, leurs bouches se détachant uniquement pour reprendre leur souffle, puis les rassemblant de plus belle, comme si une force les empêchaient de se séparer. Leur échange était ponctué de petits gémissements de bien-être, ils cherchaient à se contrôler l'un l'autre ; ils étaient tantôt en position de soumission, tantôt en position de domination. Et ça leur plaisait.

Un claquement de volet contre le mur les fit sursauter, puis un cri les fit se séparer brusquement.

- Sales gosses ! Qu'est-ce que vous faites là ? S'écria une voix chevrotante. Devant ma fenêtre en plus ! Non mais ! Les jeunes de nos jours ! Ou Diable est passée l'éducation ! Liam je t'ai reconnu petit arriéré ! Quelle horreur ! Je pourrais porter plainte pour exposition !

- Oh non... Pas elle...

Il avait de mauvais souvenirs de cette vieille dame. Depuis sa plus tendre enfance, et à chaque fois qu'il venait ici, chez ses grands parents, elle prenait toujours le loisir de l'enquiquiner à souhait.

- Partez bande de petits sodomites ! Vous allez amener le Diable ! Du vent !

Louis qui avait levé les sourcil se leva, regarda la vieille femme dans les yeux et lui répondit :

- Et vous, vieille homophobe tout droit sortie de la maison de retraite ! Vieille folle !

- Je ne vous permet pas ! Vous manquez de respect à une personne âgée !

- Et vous à deux hommes qui ne vous ont rien demandés.

Le Tomlinson tourna les talons et s'éloigna. Le châtain revint sur ses pas, comme si il avait oublié quelque chose.

- Ah, et aussi, passez une bonne journée ! Fit-il avec un grand sourire. Je prendrais grand soin de vous faire parvenir un film de cul, ça vous décoincera peut être.

Puis il attrapa la main de Liam, et le tira derrière lui, tandis que ce dernier jeta un regard noir à la vieille femme.

- C'est ça ! Bon vent ! Allez donc vous bécoter ailleurs ! Non mais je vous jure ! A votre âge j'étais respectueuse !

- Ouais, pas comme maintenant. Grogna Louis.

- Liam, baise cette tapette bien fort pour moi !

C'en fut trop pour Louis qui s'éloigna plus rapidement, laissant le brun derrière lui cette fois. Celui-ci se retourna, leva son majeur et suivit le mécheux.

- Je pourrais appeler la police pour ça aussi !

Le cadet trouva l'ainé assis sur une chaise dans la cuisine la main appuyée sur son coude, et son front calé dans sa main.

- Hey Lou'...

L'interpelé leva les yeux.

- Je suis désolé...

- C'est pas ta faute... Grommela l'ainé.

- Je l'aime pas cette vieille cruche... Je l'ai jamais aimée... Dit-il en s'approchant du Tomlinson.

Liam entoura le cou de Louis de ses bras, il voyait bien qu'un truc clochait.

- Hey, je te baiserais jamais, si c'est ça qui te tracasse. Jamais... Si nous en avons envie un jour, oui, on se fera l'amour, mais je ne te baiserais pas.

Le châtain appuya sa tête contre le torse du Payne.

- Tu crois qu'elle va réellement appeler la police ?

- Non je pense pas. Et sinon, je ne les laisserait pas t'emmener.

Louis sourit faiblement, puis serra son cadet contre lui en murmurant un remerciement.

Il en était sur à présent. Cet homme lui apportait bien plus qu'un toit et de l'espoir.

Et Liam aussi se rendait compte que c'était un peu plus que de l'aide qu'il offrait au jeune homme. Même si il n'avait jamais cru au coup de foudre, il se dit que peut être cela pourrait ressembler à ce qu'il était en train de vivre.

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