|Point de vue de Nate|

Je tousse et ferme les yeux pour éviter le sable qui virevolte dans l'air à cause du vent.

Je relève mon haut pour qu'il cache mon nez mais je n'arrive pas à empêcher des grains de sables de se loger dans mes yeux et de me faire cligner à plusieurs reprises.

Je jure entre mes dents et finis à genoux sur le sable chaud alors que le soleil frappe sans relâche sur mon crâne.

Mon ventre choisit ce moment pour se manifester et se tord dans tous les sens mais je n'ai rien pour le soulager.

Je jette un coup d'œil à ma gourde mais me rappelle qu'elle est vide.

Je soupire et balaie du regard ce qui m'entoure pour me repérer mais je ne trouve rien, à part des dunes de sables.

Je m'effondre sur le sol et ferme les yeux alors que des images me reviennent en tête.

« — Ne fais pas le con Evan, range ce briquet ! » Lui dis-je d'un air amusé alors que je fais l'inventaire des munitions dans la tente.

Il secoue la tête et s'amuse à faire danser la flamme entre ses doigts.

« — Je déconne pas Evan, tu ne devrais même pas être là. » Ajoutais-je d'un ton léger.

Evan est connu pour ses folies, il a toujours son briquet sur lui et si au début tout le monde était perplexe et légèrement sur leurs gardes, Evan nous a prouvé qu'il maîtrisait parfaitement le feu et les supérieurs l'ont autorisé à le garder sur lui.

Je ne suis donc pas très sérieux quand je lui fais ces reproches, simplement pour l'embêter. Je le suspecte d'ailleurs d'être légèrement pyromane mais je ne devrais pas me le mettre à dos alors que nous sommes au milieu du désert et qu'il est tout aussi entraîner que moi, voir plus.

Je me penche pour ouvrir le coffre contenant les grenades puis commence à les compter lorsque Evan me pousse puis se penche sur le coffre.

Je fronce les sourcils alors qu'il en sort trois et commence à jongler avec.

« — Dans une autre vie je devais être jongleur ! » S'exclame-t-il en jonglant avec les grenades.

Je secoue ma tête pour montrer ma désapprobation mais il ne semble pas s'en rendre compte.

« — Repose ses grenades, je suis fatigué, j'étais de garde hier, tu ne peux être avoir pitié de moi et m'aider plutôt que de me retarder. » Lui dis-je en me frottant les yeux.

« — Non, c'est bien plus amusant de te voir faire tout le sale boulot. Aller, grouille-toi avant que j'appelle Max, et tu sais qu'il ne rigole pas lui ! » Me taquine-t-il.

Je soupire et reprends mon travail non sans jeter un regard noir à Evan.

J'arrive presque à la fin de mon inventaire lorsqu'Evan me dit d'un air désolé :

« — Oh merde ! »

Je fronce les sourcils et remarque alors qu'une des grenades n'a plus de tiges.

« — Donne-moi ça tout de suite Evan et dégage de là ! » Lui ordonnais-je.

Il semble hésiter quelques secondes mais finit par me jeter la grenade et quitte la tente.

Je sors de l'autre côté et commence à courir pour m'éloigner du campement mais je trébuche et la grenade atterrit au pied de la tente.

Je m'apprête à aller la récupérer mais c'est trop tard, elle explose dans un bruit assourdissant et un des débris m'assomme sur le coup.

Je revois ces images dans ma tête et me secoue la tête pour les chasser la douleur intense sur mon crâne se réveille.

Je prends sur moi et me relève.

J'étais sûr que le campement était, il y a encore les piquets des tentes enfoncés dans le sable mais c'est comme s'ils avaient tous disparu.

Je réalise alors qu'ils ont sûrement quitté les lieux. C'est souvent la procédure lorsque le camp est attaqué.

Mes pieds s'enfoncent dans le sable alors que j'extirpe ma boussole de ma poche.

Je relève la manche de mon haut pour relire le tatouage sur mon bras.

"Il faut toujours viser l'ouest pour voir la victoire."

Je n'avais pas compris pourquoi notre supérieur a insisté pour que l'on se tatoue cette phrase mais elle prend tout son sens maintenant.

Il nous répétait sans cesse que c'était notre ticket de sortie.

Je me repose donc sur ce tatouage en espérant qu'il va me sortir de ce pétrin.

Lorsque je me suis réveillé, après l'explosion, tout avait disparu mais la bosse sur ma tête m'a confirmé que je n'étais pas en train de rêver, que cela a bien eu lieu.

Pendant des jours j'avais l'impression d'être devenu sourd, et ma tête me faisait atrocement mal puis les souvenirs sont revenus peu à peu et je me retrouve ici, en plein désert.

Étant donné que j'étais simplement en train de faire l'inventaire, je n'avais pas sûr moi de radio, de toute façon je n'étais pas celui qui a été nommé pour porter la radio.

J'ai réussi à en retrouver une mais lorsque j'ai tenté de la faire marcher mais en à mon grand malheur l'explosion l'avait trop endommagé et c'est sûrement pour cela qu'ils l'ont laissé sur place.

Le soleil brûlant me frappe sur le visage et j'essuie du revers de la main la couche de sueur sur mon front.

C'est atroce.

J'en avais marre de dormir dans une tente avec plusieurs personnes et je rêvais d'un peu d'intimité et de solitude mais maintenant, je donnerais n'importe quoi pour avoir quelqu'un à mes côtés, même Evan et son briquet.

Ca m'étonnerait qu'ils soient partis à ma recherche en tout cas.

Ils m'ont sûrement ajouté à la liste des morts suite à l'explosion de la tente puis sont passés à autre chose.

Malgré tous les beaux discours sur l'union qui fait la force, sur le terrain, s'il y a des chances qu'un soldat soit mort, il est mort point barre. Ils ne vont pas perdre du temps à chercher un homme presque mort qui va simplement les handicaper.

C'est triste mais c'est ce qu'il s'est passé lors de ma première semaine sur le terrain.

J'étais prêt à aller aider un soldat à terre lorsque mon supérieur m'a tout simplement ordonné de le laisser.

J'avais l'impression d'être un monstre suite à cela et le pire c'est que maintenant je les comprends, comme si avoir fait cela à plusieurs reprises a rendu l'acte moins ignoble.

C'est bien pour cela que je ne compte pas sur mes collègues pour venir me chercher mais simplement sur mes capacités physiques.

Je n'ai aucune ressources, plus de nourritures et plus d'eau.

Si je trouve un cactus je serais peut-être capable d'en extraire de l'eau mais ils ont l'air d'être en voie d'extinction dans cette région.

Je position ma boussole devant moi et me tourne pour me diriger vers l'ouest.

Faite que ce tatouage n'est pas une blague.