|Point de vue de Hailey|

Je claque la porte de ma chambre ce qui étouffe les cris de Leith venant d'en bas puis me laisse glisser contre celle-ci en fermant les yeux.

Je m'écrase lourdement au sol ce qui brise à tout jamais la scène mythique que je vois et revois dans les nombreux films à l'eau de rose ou la jeune fille glisse en toute légèreté contre le mur pour se recroqueviller sur elle-même.

Malheureusement, je ne suis pas assez souple pour me recroqueviller sur moi-même, je décide juste de poser ma tête contre la porte et d'attendre que les bruits de coups de Leith cessent.

Il n'était pas censé venir, je devais juste lui envoyer ce stupide message pour quitter sa vie de manière théâtrale puis annoncer la nouvelle à mes parents.

Je me demande ce qu'il s'est passé dans sa tête pour qu'il accoure comme un fou et tabasse ma porte à coup de poings.

Sa réaction me laisse perplexe mais il me suffit de regarder à nouveau la vidéo que m'a envoyée Paris pour oublier mes faux espoirs.

Donc pour lui, je suis juste une coincée, chiante et pas amusante [NDA : Leith et Travis parlaient d'Eva dans la vidéo].

Quand j'ai envoyé ce message j'ai agi sur le coup de l'émotion mais je me remets en mémoire la discussion avec Nate, l'absence quotidienne de mon père et c'est peut-être égoïste mais on va dire que la relation que j'entretiens avec mes amies n'est pas au beau fixe non plus.

Perla et Paris sont obnubilées par leur bonheur absolu et Jane tente tant bien que mal de maintenir un équilibre entre Leith et moi.

Pour Perla et Paris, je me dis qu'avec la situation actuelle, elles ne s'en rendront même pas compte et pour Jane, je ne suis qu'un fardeau, si je pars elle n'aura plus besoin de choisir.

Puis si ce sont mes amies elles sont censées comprendre et respecter mon choix.

Tout ce dont j'ai besoin c'est d'espace pour réfléchir.

Puis les examens de fin d'année arrive à grand pas pour Leith et peu importe que ce soit le dernier des imbéciles, c'est mieux pour nous donner de prendre une route séparée.

Je passe la fin de la soirée à ressasser des arguments pour me convaincre que c'est la bonne décision, et j'en trouve très peu qui me donne envie de rester.

Par exemple, que Leith pourrait changer mais il n'a fait que s'enfoncer depuis ses derniers jours et je ne peux pas rester attacher à une personne du passé sans pouvoir vivre avec la personne du présent.

J'ai aussi un contre-argument, arriver en milieu d'année scolaire n'est pas facile.

Mais au point où j'en suis, peu importe si je finis l'année tout seule, j'ai compris ces derniers temps que mieux vaut être seul que mal accompagné comme l'a dit Jean Jacques Rousseau.

La porte d'entrée claque, ce qui me sort de ma rêverie.

Je descends rapidement les marches pour rejoindre ma mère qui est en train de se débarrasser de son lourd manteau d'hiver.

Elle me sourit et retire l'élastique qui a retenu ses cheveux prisonniers pendant cette journée de dur labeur.

« — Marie a été insupportable aujourd'hui, vivement qu'on la vire ! » S'exclame-t-elle en retirant ses chaussures.

« — Tu n'auras plus besoin de la supporter. » Lui dis-je en baissant la tête.

Elle fronce les sourcils et je la suis lorsqu'elle entre dans la cuisine.

« — Malgré que ce soit une tête de nœud, elle est l'un des meilleures éléments de la société, je doute qu'elle parte avant moi. » Me répond-elle en ouvrant le réfrigérateur.

« — C'est vrai elle ne partira pas avant toi. » Lui dis-je en scrutant le moindre de ses gestes.

Elle sort des restes du repas d'hier puis se tourne vers moi.

« — T'es sûre que ça va ? Tu as l'air bizarre. » Me dit-elle.

« — Maman, je veux partir en Floride. » Lui annonçais-je.

Elle me dévisage comme si je venais de lui annoncer que j'étais enceinte puis commence à rire ne sachant que faire d'autre.

Je la fixe attendant une réelle réponse de sa part.

« — Pourquoi tu changes d'avis soudainement ? » Me demande-t-elle en reprenant son sérieux.

Je m'installe sur une des chaises de la table de la cuisine.

« — J'ai envie de changement, de nouveau départ, puis papa me manque et même pour Nate c'est plus pratique quand il revient nous voir, les billets d'avions sont moins chère et il n'aura pas besoin de faire 5 heures de cars en plus. » Lui expliquais-je.

« — C'est vrai que tu étais étrange ces temps-ci, surtout avec l'histoire de Leith, d'ailleurs ça n'a aucun rapport avec lui ? » Me demande-t-elle.

« — J'ai besoin de m'éloigner de lui et de me retrouver réellement. Tu as raison je n'étais pas moi-même avant puis j'ai vraiment besoin de ce changement ? » Lui dis-je.

Elle hoche la tête en essayant de comprendre mon point de vue.

« — Bien, je vais en parler avec ton père mais je pense qu'il ne refusera pas, mais tu es sûre que tu prends la bonne décision parce que je ne veux pas qu'après tu regrettes et tu deviennes exécrable. » Me prévient-elle.

Je secoue ma tête négativement.

« — Non, ne t'en fais pas, j'ai réfléchi et je suis sûre que c'est une bonne idée. Tu penses qu'on peut partir ce week-end ? » Lui demandais-je.

Elle s'étouffe avec l'eau qu'elle vient de boire puis pose violemment son verre sur le comptoir.

Je fronce les sourcils.

« — Ce week-end ? Je n'ai même pas encore appelé ton père et je n'ai pas pris rendez-vous avec l'agence immobilière puis il nous faut de l'argent pour acheter une nouvelle maison en Floride, ce n'est pas rien. » Me rappelle-t-elle.

« — J'ai vraiment envie de partir, est ce que y'a pas moyen qu'on rejoigne papa et qu'on vive dans l'appartement qu'il loue pour le moment ? » Proposais-je.

« — C'est pour une personne, deux maximum on ne va pas pouvoir tenir à trois là dedans. » Me dit-elle.

Je baisse la tête, déçue.

« — Tu tiens vraiment à quitter la Californie maintenant ? Tu m'inquiètes Hailey, il ne t'est rien arrivée ? » S'inquiète-t-elle.

« — Juste des déceptions amicales rien de plus, mais si j'ai l'opportunité de pouvoir déménager, je la prends sans hésiter. » Lui dis-je.

Elle hésite et met quelques temps à me répondre.

« — Je peux voir avec ton père si tu peux le rejoindre ce week-end, tu verras comme ça si tu es prête à vivre aussi loin de tes amies, ça te donnera une idée de ce que pourrait être ta vie là bas. » Me propose-t-elle.

« — Ca ne te dérange pas de déménager ? Avec ton travail ? » Demandais-je.

« — Non, je me suis déjà renseignée et je peux être mutée dans le service en Floride, au moins plus de Marie mais toujours le même travail. Puis en premier lieu c'est nous qui t'avons proposée cette idée, donc ça me va. » Me dit-elle.

Je lui souris, mais j'ai néanmoins un poids sur le cœur en me rappelant que je tourne le dos à tout ce qu'il s'est passé en voulant déménager en Floride.

Je serais toujours attachée à Leith, ma partie naïve le sera en tout cas mais je me dois d'aller de l'avant.

De toute façon, je ne peux pas attendre éternellement qu'il change en sachant qu'il me considère comme la dernière des chieuses.

Au fond de moi, je n'ai pas envie de déménager mais ma raison me rappelle que c'est pour mon bien et que cela me permettra de mettre les choses au clair dans ma tête et peut-être de tourner la page.

Je sais qu'en restant ici, je resterais coincée dans ce chapitre de ma vie à tout jamais, celui dans lequel je rencontre Leith et qu'il m'embobine.

« — Je peux prévenir Perla, Jane et Paris ? » Demandais-je.

Si elle me répond positivement c'est que je vais déménager, mais si elle me demande d'attendre que tout soit bien signé c'est qu'il y a des chances pour qu'on reste.

Elle me considère quelques instants, puis finit par soupirer et hoche la tête.

Je me relève de ma chaise et m'approche de ma mère pour l'enlacer.

J'en fais peut-être un peu trop mais ce déménagement compte beaucoup pour moi.

Je me précipite alors dans ma chambre et attrape mon téléphone.

Il est hors de question que je prévienne Leith de mon départ, il le saura d'une manière ou d'une autre.

Je décide d'envoyer le même message à mes trois amies, n'ayant ni la motivation ni l'envie de faire trois messages différents pour dire exactement la même chose :

« Je déménage en Floride, ça rendra notre vie de famille plus pratique et j'ai besoin d'un nouveau départ. Nouveau départ ne veut pas dire que je vais t'oublier au contraire, je compte sur cette distance pour fortifier notre amitié et la rendre indestructible. Je n'ai pas totalement envie de partir, d'un côté je le veux pour pouvoir oublier cette mésaventure avec Leith mais de l'autre je sais que c'est égoïste puisque je te laisse en quelques sortes tomber mais je sais que toutes les trois réunis vous serez plus fortes que jamais et peu importe si vous comptez m'oublier, vous resterez à jamais graver dans mon cœur »

J'appuie sur envoyer puis m'affale sur mon lit.

Je n'aime pas écrire ce genre de message mais elles en méritent au moins un, elles n'ont peut-être pas été les meilleures amies du monde a certain moment mais je n'ai pas non plus agi comme j'aurais du le faire donc on est quittes.

Je pense que c'est Jane qui m'a marquée le plus, elle est gentille et en même temps si on creuse on peut voir des failles dans sa personnalité, des défauts qui la rendent d'un côté attachante et te donne envie de l'enfermer dans ta voiture pendant une journée. Elle peut-être odieuse avec les personnes qu'elle n'aime pas comme la meilleure des amies avec celles qu'elle porte dans son cœur.

Je souris en pensant aux magnifiques personnes qui sont restés à mes côtés puis quitte mon lit.

Je passe devant la cuisine alors que ma mère raccroche son téléphone puis elle hoche la tête pour me dire que c'est la dernière page de ma vie en Californie, pour le moment en tout cas.

J'enfile mes chaussures et mon manteau puis sors dehors pour me rendre chez la dernière personne a qui je dois l'annoncer.

Quand je toque chez Matthew, il ouvre la porte, j'analyse son sourire et le grave à jamais dans ma tête et dans mon cœur puis lui demande si on peut finir de regarder la saga Harry Potter.

Et c'est ainsi que j'ai passé ma dernière nuit en tant que Hailey Pears, lycéenne à la Oakland High School, en Californie.