CHAPITRE 101
|Point de vue de Hailey|
C'est bientôt l'heure du dîner et je n'ai pas osé sortir de ma chambre depuis ma dernière altercation avec ma mère.
Je comprends qu'elle soit énervée par mon comportement mais j'ai l'impression de tout faire de travers.
J'enchaine gaffe sur gaffe.
Mon téléphone vibre sur le lit alors que je somnole, la tête posée sur mon bureau.
Je me relève doucement en baillant sans la moindre retenue puis attrape mon portable.
C'est un message de ma mère qui me demande de descendre manger.
Je suppose qu'on est revenu aux basiques communications par message maintenant, espérons que nous n'allons pas retourner aux discussions par post-it.
Je décide de ne pas trop la faire attendre et me baisse sous mon lit pour attraper mes chaussons qui doivent sûrement trainer par là.
Je rejoins rapidement ma mère qui est en train de boire sa soupe sans me lancer un seul regard.
Je sens que l'ambiance va être très joviale pendant les 5 prochains jours.
La voix de la journaliste émise par la télévision nous sert de fond sonore alors que le bruit de l'aiguille de l'horloge résonne dans la pièce chaque seconde.
Je bois ma soupe sans oser briser le silence mais cela commence à me peser.
Je n'aime pas spécialement l'ambiance et je viens à peine de me réconcilier avec mon père, si je dois rajouter ma mère dans la liste des réconciliations en cours, cela ne va pas vraiment m'aider.
Je pose soudainement ma cuillère dans mon bol, le bruit du couvert rencontrant le fond du bol lui fait relever la tête dans ma direction.
« — Qu'est ce que tu n'aimes pas chez Leith ? » Demandais-je, laissant échapper cette question qui me brûle les lèvres depuis hier soir.
Elle ne parait pas surprise par ce que je viens de lui dire, comme si elle s'y attendait mais elle ne me répond pas.
Je la fixe alors qu'elle finit sa soupe et alors qu'elle se lève pour débarrasser son bol vide je l'interpelle, n'appréciant pas son attitude puérile.
« — Tu comptes me répondre ? » Demandais-je d'un ton un peu trop agressif.
Elle continue de me jauger du regard avant de faire volte-face pour partir en direction de la cuisine.
Je la regarde bredouille ne sachant pas si elle est vraiment énervée ou si c'est juste un moyen de me faire poireauter.
Je pense que c'est un peu des deux.
Quand elle revient avec un yaourt dans la main, je me mords la langue pour ne pas m'énerver, elle joue vraiment avec mes nerfs et j'ai littéralement l'impression que nous avons échangé les rôles.
Je suis devenue la mère qui assiste à l'une des crises de sa fille rancunière.
Mais en réalité, je suis le portrait craché de ma mère, le spectacle auquel j'assiste est en fait ce que je fais subir à mes parents à chaque fois que mon côté égoïste prend le dessus.
« — Tu sais ce que tu m'as dit quand nous sommes rentrés du rendez-vous avec la proviseur et que tu nous attendais dans le salon avec la voisine ? » Me demande soudainement ma mère.
Je fronce les sourcils.
Je crois que j'avais 10 ans, Nate avait été convoqué après avoir mis une punaise sur la chaise de son professeur principal. Il venait de voir le film Indestructible et il avait voulu refaire la blague qu'avait faite Flash dans le film, malheureusement il n'a pas été aussi rapide qu'il aurait dû l'être et il s'est fait prendre.
Mes parents avaient demandé à la voisine de me garder le temps qu'ils en finissent avec cette affaire et je me rappelle enfin ce que je lui avais dit.
Mais je feins de ne pas m'en rappeler et je hausse les épaules.
« — Que tu es plus douée que Nate. »
« — Et en quoi cela un rapport avec ça ? » Demandais-je en essayant d'avoir une mine agacée.
« — Je n'avais pas compris pourquoi tu m'avais dit ça mais Nate m'a tout expliqué quelques jours après. » Me dit-elle en ignorant ma remarque.
Je croise les bras sur mon buste pour lui montrer qu'elle devrait aller plus vite et je réalise que je redeviens à nouveau égoïste et ingrate.
« — Il m'a dit que vous aviez eu cette sorte de compétition entre vous, qui ferez la plus grosse bêtise. Tu avais mis un coussin péteur sur le siège d'un professeur. Non seulement le professeur l'as vu mais un élève t'avais surpris en train de mettre le coussin sur le siège. Heureusement pour toi, cet élève était aussi le clown de la classe et semblait t'apprécier et donc il s'est dénoncé à ta place. Donc Nate a remporté la compétition. » Me rappelle-t-elle.
J'apprécie qu'elle me rappelle ma tentative raté de percer dans le monde de la farce.
J'essaye vraiment de comprendre en quoi cela a un rapport avec la situation mais je ne vois aucun lien logique.
« — Je ne comprends rien du tout. » Déclarais-je.
« — Est-ce que Nate te manque ? » Me demande-t-elle.
Je la regarde pour vérifier qu'elle a réellement posé cette question mais vu son expression qui attend ma réponse, je n'ai aucun doute.
« — Bien sûr, c'est évident. » Dis-je en levant les yeux au ciel.
« — Est-ce que faire des bêtises est une manière pour toi de t'occuper pendant son absence ? » Continue-t-elle.
Je la dévisage, comprenant enfin les liens logiques dans son schéma.
Est-elle vraiment en train d'insinuer que je fréquente Leith dans le but de faire des bêtises et donc d'énerver mes parents pour renouer avec le temps où je faisais des conneries avec Nate en attendant qu'il revienne ?
C'est la chose la plus tordue du monde.
« — Ca ne t'es pas venu à l'esprit que je suis amie avec Leith parce que nous avons des points communs ? » Demandais-je en essayant de rester calme.
« — Ecoute, j'essaye juste de comprendre ton attitude en ce moment, tu es de plus en plus dissipée et c'est peut-être parce que les idioties avec Nate te manque. » Me dit-elle comme si c'était logique.
« — S'il y a bien une chose qui me manque c'est Nate, pas les conneries que je faisais avec lui. » Répondais-je en me levant.
Elle me fusille du regard.
« — Surveille ton langage et le ton avec lequel tu me parles ! » S'exclame-t-elle.
En fait, je crois que pour ma mère l'idée que j'ai une vie sociale un jour s'est évanouie, et donc la soudaine apparition d'un ami est beaucoup trop étrange pour elle.
Enfin, j'essaye juste de trouver une raison parce que j'ai envie de dire que sa théorie est beaucoup trop perchée, je ne sais pas où est-elle allé la chercher.
« — Tu n'as pas répondu à ma question. » Constatais-je.
« — Quelle question ? » Me demande-t-elle.
« — Qu'est ce que tu n'aimes pas chez Leith ? » Lui rappelais-je.
Elle soupire mais je vois à son regard qu'elle va tout de même me répondre.
« — Il ne te correspond pas, pendant tout ce temps j'ai essayé de comprendre pourquoi tu as changé et c'était pourtant évident, un garçon. » Me dit-elle.
Oui, elle pensait vraiment que j'étais asociale.
« — Il fallait bien que ça arrive un jour je suppose puis c'est un ami. » Lui dis-je en baissant un peu ma garde.
« — C'est exactement ce que j'ai dit à tes grands-parents avant de me marier avec cette personne un an plus tard. » Me dit-elle avec un faible sourire.
« — Maman, j'ai 17 ans, pas 21. Je ne compte pas m'enfuir avec lui à Las Vegas pour qu'on aille se marier. Puis c'est réellement un ami et je ne comprends pas en quoi cela te dérange. » Lui rappelais-je en modérant mon ton.
Elle baisse sa tête puis quand elle le relève je suis touchée par ce que me transmettent ses deux beaux yeux.
Je peux voir de la honte mais aussi de l'amour et un peu de tristesse.
« — Je sais bien mais j'ai peur d'être seule. Pour moi hier tu avais encore 4 ans et tu suçais ton pouce, demain tu seras sûrement à mon enterrement avec tes trois enfants. » Me dit-elle.
Je grimace à cette pensée, pourquoi doit-elle être aussi dramatique ?
Apparemment je ne suis pas la seule à passer une mauvaise journée.
« — Nate est partie, Dieu sait s'il va revenir un jour en un seul morceau, ton père est là 8 jours par mois et tu grandis tellement vite. Quand j'ai vu ce Leith, la façon dont vous vous regardiez, j'ai pris tellement peur que tu me laisses. » M'avoue-t-elle en tirant sur la nappe.
Mon cœur se compresse en voyant la douleur qui tire le visage de ma mère.
Sans aucun mot, je me relève pour la prendre dans mes bras.
Je ferme les yeux quand son odeur me parvient et m'envoie vers des souvenirs lointains.
« — Je t'assure c'est un ami. » Ajoutais-je.
Je sens son sourire contre mon épaule.
« — On ne me l'a fait pas. » Murmure-t-elle.
Et je ne peux m'empêcher de sourire à mon tour mais ce sourire s'évanouit quand je me rappelle que Leith est partie comme un voleur.
|Point de vue de Leith|
Je tiens mon portable, mon pouce reste en suspend au dessus de l'écran, soudain une main se pose sur mon épaule.
« — T'es sûr que tu veux faire ça ? » Me demande Travis en me dévisageant.
« — Est-ce que j'ai le choix puis de toute façon je n'ai été dans sa vie que quelques mois, je serais juste un idiot qu'elle a croisé quand elle y repensera dans quelques années. » Tentais-je de me rassurer.
Travis soupire en secouant sa tête puis jette un œil à mon portable.
« — Ecoute tu n'es pas obligé de le faire, il va faire quoi sinon cette idiot si tu refuses ? » Me demande-t-il.
« — Tu veux vraiment m'obliger à le répéter ? » Lui demandais-je.
Je verrouille mon portable et le pose loin de moi
Pour retourner m'assoir à côté de mon meilleur ami.
« — Tu me regardes comme le jour où je t'ai dit que nous n'avions plus l'âge de regarder les tortues ninjas. » Constate-t-il en essayant de jouer la carte de l'humour.
Je lui fais un faible sourire avant de me pencher pour attraper la bouteille sous mon lit.
Des souvenirs de mon premier baiser avec Hailey me reviennent en mémoire et je me fais violence pour pas juste retourner chez elle et l'embrasser.
Quand je tourne ma tête vers Travis, il me fixe comme si j'étais barge.
« — Soit tu viens d'avoir un rêve coquin ou alors... » Commence-t-il mais je le fusille du regard pour lui faire comprendre que ce n'est pas le moment.
« — Ah oui, j'ai croisé Jane dans le couloir en arrivant, elle m'a dit que quand tu n'auras plus tes règles elle a besoin que tu ailles la voir. » Me dit-il comme si ses propos n'étaient pas hors contexte.
Je hoche la tête tout en dévissant le bouchon de ma bouteille et l'apporte à ma bouche mais Travis me l'arrache des mains avant de la poser sur ma table de nuit.
Je lève les yeux au ciel.
« — Je devrais envoyer ce message ? » Demandais-je.
« — Ca fait un peu lâche. » M'avoue-t-il.
Et c'est parfaitement ce qui me défini mais je ne peux juste pas lui envoyer un message comme ça, elle mérite au moins que je lui dise en face à face.
« — Tu as eu des nouvelles de l'autre ? » Me demande-t-il.
« — Il m'a envoyé un message tout à l'heure pour me dire j-2. » Lui rapportais-je.
« — Je te jure que si un jour je croise sa face de rat écrasée, il va avoir affaire à moi. » Proclame Travis en se relevant.
« — Mais avant, je vais aller rendre visite à ta sœur parce que c'est un peu tendu dans l'aile sud. » Me dit-il.
Je grimace et m'apprête à le frapper mais il arrive à s'échapper à temps alors que j'entends son petit ricanement dans les escaliers.
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