52.
Une voix douce et posée, mais assurée me coupa de mes contemplations.
Je reposais toile avant de me lever, ce qui renversa tout autour de moi.
- Merde
Quelle rencontre fracassante... Abrutie que j'étais. Elle se précipita vers moi, et avec une rapidité surprenante, réussi à rattraper ma toile. Elle avait sauvé le plus important.
- Je suis désolée, je ne suis pas souvent maladroite
Je m'essuyais les mains sur mon jogging avant de me précipiter par terre en la voyant essayer de réparer mes erreurs. J'avais renversé de la peinture...
- C'est le jardinier qui va être content, elle rit, il trouvait que ça manquait déjà de couleur
Je ris mal à l'aise, ne sachant pas quoi dire.
- Je suis sincèrement désolée, répétais-je
- Il n'y a pas de mal, mon ange
Je me détendais un peu plus. On finit par se redresser toutes les deux puis elle attrapa ma toile dans ses mains.
- Vous avez un réel talent
- Rien n'est encore fait, je ris
- Et pourtant...
Elle me parlait... Je fis une pause en la regardant de plus près. Sa voix allait parfaitement avec son visage.
- Vous parlez...
Elle me donna un signe de la main qui voulait dire « oublie ça » ou alors « passe à autre chose ».
Moi qui pensais vraiment être seule ici.
- Il est l'heure de manger, je venais vous demander si vous vouliez manger à l'intérieur. Ou si vous préfériez attendre un peu et terminer
Je regardais mes outils... j'avais prévu de m'adonner à mes activités favorites, et manger plus que mon petit-déjeuner de ce matin, commençait à être un peu trop me demander.
- On pourrait manger toutes les deux si vous le souhaitez
Elle me sourit, m'offrant alors ses quelques petites rides. Je me sentais mal, elle voulait en fait manger avec moi. Peut-être n'avait-elle jamais quelqu'un avec qui manger avec elle. En même temps s'il fallait compter sur Ace...
- Est-ce que cela vous dérangerait de le décaler à un peu plus tard ? Je termine cette toile, dis-je en lui pointant le cadre peint de moitié, puis, je vous rejoins
- D'accord, me dit - elle en s'éloignant
Je soupirai en me jetant dans ma chaise. J'étais crispée, à cause du malaise que ma maladresse avait dû lui donner comme image de moi. Je retirai mon croquis du chevalet et l'échangeai contre la peinture que j'avais déjà débuté il y'a quelques jours de cela. J'avais peint abuela. Je l'avais déjà dit, je refusais de perdre les souvenirs que j'avais d'elle. Le buste allait être difficile à reproduire, alors j'avais opté pour une peinture. Je trempais mon pinceau dans un mélange de peinture à l'acrylique et d'encre bleue - grise. Au bout de quelques coups de pinceaux, j'avais déjà bien progressé.
Je finis par me lever épuisée. Je me mis à faire les cent pas à travers le grand espace qui se trouvait m'entourer. J'avais mal aux doigts à force de tenir ces pinceaux. J'entendis de nouveau des pas et quand je me tournais, je vis une Bridget chargée. Elle avait un plateau dans les mains.
- Vous devriez au moins grignoter
Elle me l'annonça, sans me laisser le choix. Je la rejoins alors là où j'avais laissé toutes mes affaires.
- Merci
Je n'allais pas refuser. J'avais un peu faim, donc elle avait eu une très bonne idée.
- Ça me fait plaisir, me répondit-elle
Je lui souris, quand, à son habitude, elle me décrit son plat, même s'il était évident que c'était du chocolat avec des biscuits.
Je faisais semblant d'écouter, mais en fait, je ne suivais que de moitié. J'avais faim. Ces biscuits me paraissaient encore chauds, et avec les températures actuelles, je n'attendais que de commencer. Elle finit par le comprendre, car elle cessa de me citer la variété de gâteaux sur ce plateau et se retira.
Je me rassis alors en attendant qu'elle soit loin de moi et en attrapai rapidement un, comme une voleuse.
C'était si bon... si bon qu'en mâchant rapidement, je me mordis profondément l'intérieur de la joue.
- Putain
Je gémis de douleur en sentant le goût de fer envahir ma bouche. Je sentis les larmes me monter aux yeux. Je n'avais jamais compris pourquoi ce truc faisait mal à ce point.
Je rentrai alors précipitamment à l'intérieur. Sans réfléchir. Il me fallait un mouchoir pour retirer le sang qui se répandait sur ma langue.
- Vous avez besoin de quelque chose ?
La femme était en train de tricoter quand elle se hâta vers moi. Elle jeta son travail, comme si elle était à mes services.
- Vos biscuits étaient tellement bons, que je me suis mordu dès la première bouchée
Elle réprima un rire :
- C'est moi ou vous venez de vous moquer. De moi ?
Mon ton tendait à l'humour ce qu'elle comprit. Je n'avais pas beaucoup fait attention à mon ton, donc j'étais contente qu'elle l'ait bien pris. Elle me tendit un rouleau de mouchoirs dont j'usais et j'abusais
- Je vais monter votre matériel, me dit-elle
Je n'avais pas eu le temps de lui répondre qu'elle était déjà partie. Si j'avais bien compris, c'était fini cette journée art, pour moi. Je la vis passer, mes affaires dans les bras. Je l'imitais alors et allai chercher le plateau de ce goûter sanglant.
Je n'osais pas lui dire que ce n'était rien et que je pouvais continuer. Elle avait déjà pris l'initiative pour moi. Elle revint un peu plus tard en me souriant.
- J'ai tout rangé. Pas dans la salle de bain, les toiles n'aiment pas l'humidité et pas non plus devant un radiateur. J'espère que ça vous ira
- Vous avez fait de la peinture ? essayais-je d'articuler
- Ma tante qui m'a élevé aimait beaucoup, j'ai les bases
- Il ne fallait pas vous déranger ;
Elle se rassit et reprit son tricot :
- De toute façon, ils annonçaient un mauvais temps, me pointa t - elle la fenêtre
Je regardais la piscine. Effectivement l'eau n'était plus calme. On y voyait légèrement des petites gouttelettes s'abattrent à la surface.
- Oh...
Je bus une nouvelle gorgée de chocolat avant de m'asseoir autour de l'îlot central.
- Si seulement il faisait assez froid...
Elle me le dit en piquant l'une de ses aiguilles dans une maille.
- C'est dommage avec toutes ces histoires de réchauffement climatique... On n'a plus de neige
Elle soupira tandis que je haussais les épaules :
- Je n'ai jamais trop aimé ça. C'est magnifique jusqu'à ce que ça te rentre dans les pieds, je ris
- C'est une façon de voir les choses
Je vidais ma tasse puis courais à la fenêtre. Elle m'observa sans rien dire.
- Il vous aime beaucoup, vous savez
- Vous pouvez me tutoyer, je n'aime pas trop tout ce qui est vouvoiement, je riais en ouvrant le robinet d'eau tiède pour rincer mon récipient
- Je m'en occupe, me dit-elle
- Oh non... Ce n'est rien, laissez
Elle tenta de me prendre la tasse des mains, et je me répétais :
- Je vous donne le droit de me tutoyer ET je me donne le droit de laver cette tasse
Elle sourit et se détourna de moi.
- Très bien, trésor. En attendant, je sais que vous aussi vous l'aimez bien
- Et ce n'est peut-être pas réciproque.
Je levai les yeux sur la vue en face de moi. Même d'ici, le jardin me semblait aussi beau que le jardin d'Eden, décrit dans la Genèse.
- Je le connais plutôt bien, si vous voulez tout savoir...
- Ah bon ?
- Je me suis occupée de lui et de sa défunte sœur. Elle prit un ton triste et nostalgique. Je me tournai vers elle, curieuse. Ils étaient tous les deux si proches... Ils offraient le portrait d'une famille parfaite. Des parents aimants et doux. Une belle fratrie
- Que leur est-il arrivé ? Je demandais timidement
J'avais honte de faire cette quête aux informations auprès de la gouvernante, et j'étais sûre que ça n'allait pas plaire à Ace. Il me dirait que je ne respectais pas sa vie privée et je le savais très bien, sauf que cela faisait des jours que je m'interdisais de poser des questions et cela ne me ressemblait pas.
- Un drame... ça m'attriste toujours autant
Je ne dis rien. Est-ce qu'elle se moquait de moi ? Je voulais plus que savoir que ce qui leur était arrivé était un drame.
- Soit... Je travaillais pour sa famille et maintenant, je suis avec lui. Donc, je le connais assez bien pour te dire qu'il t'aime beaucoup
- Il m'aime beaucoup parce que je suis la clé à je ne sais quel problème
Elle se tut. Comme si elle réfléchissait. Elle faillit dire quelque chose, mais s'interrompît de nouveau avant de reprendre :
- Je pense qu'il t'aime au-delà de ce que tu imagines
Mon cœur ne fit qu'un bond. Je voulais tellement qu'elle ait raison. Je voulais Ace. Je voulais pouvoir guérir ses blessures et le rendre de nouveau heureux, comme je voulais qu'il ait le même rôle pour moi.
Le temps passa rapidement et ce fut bientôt l'heure de se mettre devant la télévision. C'était Bridget qui s'en était rendu compte la première. Je la suivis alors à travers un couloir bien plus court que les autres, et on arriva toutes les deux au salon. Les sièges en cuir proposaient une vue imprenable sur l'écran plasma devant nous. Je n'avais jamais vu quelque chose d'aussi grand. Tout était décoré avec beaucoup de goût et les petits détails en granite et en marbre donnait l'impression d'être en plein milieu de l'Olympe d'après la vision que j'en avais de ce lieu.
Elle alluma la télé sur une suite de publicités interminables. J'avais la bougeotte. Je voulais voir de quoi est-ce qu'il s'agissait. Le bruit de la télé, avec la pluie de l'extérieur, donnait l'impression d'être dans une petite chaumière de campagne.
Une porte claqua, puis une seconde, et un homme apparu dans le salon avec nous. Je le regardai sans réaction. Je clignais des yeux quand l'homme m'offrît un sourire radieux.
- J'espère pour vous, que vous vous êtes débarbouillé avant de rentrer
Bridget lui lança cette phrase menaçante sans même le regarder.
- C'est donc toi la petite compagne de notre patron ?
Je ris en agitant la tête.
- Plus prisonnière que compagne...
- Il me semblait pourtant qu'il vous appréciait...
L'homme s'assit à côté de moi. Avant de hausser les épaules dans l'incompréhension.
- Jamais, il n'était restée aussi longtemps dans cet endroit
- Ah bon ? Pourtant on dirait un paradis sur terre
- C'était l'une des maisons de vacances de sa famille, dit Bridget en coupant l'homme, et Monsieur n'aimerait pas que l'on se mette à faire les commères à sa place, dit-elle à l'intention de mon voisin de banquette
Il était propre sur lui. Bien coiffé, bien que légèrement mouillé. Il se racla la gorge et s'excusa. Je compris qu'ils avaient pour consigne de ne rien me dire.
- Je suis Allen
Il me tendit sa main que je serrais volontiers. J'étais contente d'avoir un peu de compagnie. Ça faisait longtemps. La dernière fois que j'avais parlé à quelqu'un d'autre qu'Ace, la personne s'était retrouvée à me critiquer entre deux toilettes.
- Lucia
- Je sais. Monsieur me donne souvent des recommandations à votre égard
- ALLEN !
Elle frappa dans ses mains et il sursauta. Je riais désolée pour lui. Il m'avait l'air très bavard.
- Je suis le chauffeur de Monsieur Scotten
- Vous n'êtes pas avec lui ?
- Il tenait à ce que l'on soit deux avec vous, alors il m'a autorisé à rester
Je lui souris en signe de réponse avant de m'asseoir en tailleur sur ces sièges d'un confort exceptionnel. J'avais hâte de le voir, donner ce fameux discours. Je voulais qu'il assure. Et j'avais maintenant la confirmation que j'étais frappée en plein fouet par ce qu'on appelait le syndrome de Stockholm. Il me plaisait alors que pas plus tard qu'il y a moins d'un mois, je voyais en lui l'incarnation même du diable.
- ÇA COMMENCE !
Bridget s'agita comme s'il s'agissait de son fils et Allen croisa ses bras. On aurait cru voir deux parents regardant le spectacle scolaire de leur enfant. C'était dire à quel point, on voyait qu'il tenait à lui.
- Mesdames, Messieurs, aujourd'hui vous allez pouvoir assister à l'un des plus gros événements du monde la finance américaine commença l'un des présentateurs
Bridget se remit à tricoter tout en suivant attentivement ce qu'annonçaient les deux hommes à la télé
- En effet George ! Deux grands PDG, l'un à la tête de l'entreprise la plus en vogue depuis plus de cinq an et l'autre à la tête de l'une des Holdings les plus prometteuses se sont réunis.
- Regardez tous ces journalistes, tous ces invités ! Mon Dieu ! Il va sans dire qu'aujourd'hui, nous allons assister à la plus célèbre signature de contrat jamais vu
- Vous avez raison, si jeune et tous les deux si beaux... Ce contrat promet une belle entente
Je rougis quand le journaliste reconnu sa beauté. Un coup de chaud me fit gesticuler sur ma place
- Tenez, ça commence !
L'écran bascula et les journalistes passèrent en haut en coin d'affiche. On voyait maintenant Ace, assis aux côtés d'un homme. À droite d'Ace, Matthew, Michael et Hudson en bout de table qui avait vraiment l'air fermé si je devais en croire les traits de son visage. Il y avait effectivement aussi un homme à gauche d'Ace, jeune, beau et aux cheveux clairs. Deux hommes étaient, eux aussi, là, à ses côtés. Il affichait un sourire heureux et sincèrement fier de son accomplissement. Il chuchota des paroles à Ace. Puis, tous deux se levèrent. Ils se saluèrent d'une poignée de main ferme et l'on cessa tous de respirer.
Ace recula d'un pas et laissa ses amis saluer l'homme à leur tour. Puis se fut aux soutiens du châtain aux yeux bleus, de saluer. Ils se rassirent tous et une jeune femme, assez menu, aux longues jambes, habillée en tailleur, se présenta. Elle tenait une plaque en verre qui me semblait peser trois tonnes. Sur la plaque, reposait paisiblement les deux contrats, qu'elle leur donna en souriant. Ace, toujours aussi impassible, ne la regarde pas. Elle se tourna vers Matt et lui offrit un clin d'œil avant de regarder les hommes. Que venait-il de se passer ? Est-ce qu'elle le draguait ouvertement ? Me demandais-je avec le bruit des commentateurs en fond. Ace sorti un stylo de son costume, imité par l'autre. Ils sourirent tous deux aux caméras avant de signer. J'éclatais de joie, suivit d'Allen qui félicita Ace d'un hochement de tête ferme. Ace fit glisser son stylo d'une légèreté surprenante. Il ressemblait à quelqu'un qui avait fait ça toute sa vie. Je souris, ressentant un tourbillon de papillons dans mon ventre.
- Le président Stuart vient lui aussi de signer ! C'est plié ! Je répète c'est plié
Ace tendit son stylo à Matthew qui signa à son tour et une fois qu'Hudson eu terminé, sans plus attendre, tout le monde se leva. La salle renvoya un bruit de flashs. Je m'écriais contente pour ce nouveau contrat de signer, sans même savoir de quoi il en découlait. Bridget applaudit comme si elle était dans la salle et je me renfonçais dans le canapé.
Ace se leva pour saluer le fameux président Stuart, il agita la main à la foule avant de se diriger vers le pupitre. Derrière lui, les autres.
Hudson donna un coup de coude à Matthew pour lui pointer la même fille que tout à l'heure. Il n'avait pas l'air de se sentir concerné par l'événement.
- Je le déteste de plus en plus
- Qui donc ? demandèrent - ils en cœur, ayant presque l'air inquiet de ce que je pouvais ressentir à l'égard d'Ace
- Hudson !
Allen acquiesça :
- Vous devez avoir vos raisons
- Déjà, son comportement, dis-je en le pointant du doigt
- Vous êtes tous comme ça vous les jeunes, dit Bridget
- Peut-être, mais lui, il est pire si vous voulez mon avis
Je me détournai et fixai l'écran. On voyait Ace tapoter le micro avant de leur servir son sourire parfait habituel, je levais les yeux au ciel en imaginant la foule de personnes tombant dans son piège.
- Bonsoir à tous, commença t - il
La horde de journalistes en face de lui se mirent à s'exciter. Ils se levèrent tous en même temps et tentèrent de se rapprocher. L'un des membres du cordon de sécurité repoussa violemment un journaliste ce qui me fit de la peine... Il n'y avait pas besoin d'être aussi agressif. Le journaliste fût traîné hors de la petite salle. Les autres continuèrent de hurler le prénom d'Andrew Ace. Je pouffais en me répétant dans la tête : Andrew Ace. C'était drôle.
- S'il vous plaît, rit-il dans le micro
- ÊTES-VOUS SATISFAIT ? s'écria une journaliste
- Bien-sûr que je le suis
J'attendais qu'il ajoute : et je le serais encore plus si vous la fermiez tous, mais rien ne vint. Il était politiquement poli cette fois-ci.
La femme sourit, contente d'avoir réussi à capter son attention.
Michael fit signe aux journalistes de se calmer et après une bonne petite attente, les voix se calmèrent.
- Je souhaiterais tout d'abord commencer par remercier mes co-fondateurs.
Il s'écarta, et les invités, aux premiers rangs devant les journalistes applaudirent encore plus.
- Ils sont tellement nombreux, je commentais attentive à la scène. Je n'avais pas imaginé qu'il y aurait autant de personnes pour cet évènement.
- Effectivement, dit Allen
- Merci aussi à vous d'avoir répondu présent, sans vous, tout ceci n'aurait pas été aussi beau
Il se tut et au même moment les acclamations reprirent, et j'étais sûre à ce moment-là de voir un Ace fier de presque avoir un statut de Dieu.
- Enfin, MERCI À MONSIEUR STUART. C'est grâce à vous que la signature de ce contrat a pu avoir lieu. Nous avons eu de nombreuses difficultés, mais l'entente et le respect ont su rester au beau fixe, afin de rendre ce jour possible.
Stuart sourit à Ace.
- Je suis persuadé, reprit-il, que nous saurons accomplir de belles choses. Nous nous lançons tous deux dans l'inconnu, mais je suis convaincu que nos forces réunit ensemble, sauront faire quelque chose d'encore plus grand
Les applaudissements se firent de nouveau entendre. Je n'avais jamais entendu Ace faire autant de la lèche. Je pouffai face à ses mots. Il n'en pensait certainement pas une miette. Pour lui, si tout ça était possible, ça devait être grâce à lui.
- Tous les quatre, tous les membres du corps de mon entreprise, sommes heureux de-
Son stylo qu'il tentait de ranger dans sa poche depuis quelques secondes s'échappa de ses mains. Il rit.
- J'en perds mes moyens ;
Toute la salle éclata de rire et Allen aussi :
- Je ne savais pas Monsieur, aussi drôle
- Il ne fait jamais de blagues ?
Je lui demandais en inclinant légèrement la tête.
- Pas en notre présence, dit Bridget
Elle avait l'air d'accord avec Allen. Ace se pencha au pied de son pupitre pour récupérer le stylo qui m'avait l'air d'avoir coûté un rein, si ce n'est plus cher. Il se redressa, quand au même moment, une détonation se fit entendre. Tous les flashs s'arrêtèrent.
- C'était quoi ça ?
Je me levais en voyant Ace tomber sur le pupitre en verre. D' où cela venait-il ?! Il s'accrocha avant de perdre des forces. Il finit par tomber en arrière. Il avait laissé sa veste de costume là où il était assis plus tôt, alors on pouvait voir sa chemise commencer à se teinter de rouge.
- Ce n'est pas possible !!
Allen venait de pousser un cri qui fit vibrer les murs.
Mon monde s'écroula... j'avais le sentiment de le perdre... Que venait-il de se passer ? J'étais désorientée. Tout se passait si bien jusqu'à présent. Je me rapprochais de l'écran, consternée par ce que je venais de voir. Il y avait du sang. Il était en train de partir ? Là ? Comme ça ?
Michael et Matt étaient en train de se précipiter vers lui. Hudson... Où était Hudson ? J'étais sûre que tout était de sa faute ! Non. Je disais n'importe quoi. Il adorait Ace. Ils s'entendaient tous bien. C'était contre moi qu'il en avait après. Quand mon sens de la logique revint, je vis finalement Hudson. Il était allé chercher la veste d'Ace, pour le couvrir.
D'où venait donc cette détonation ?! Ou plutôt... DE QUI ?
- Non... bafouillais-je
Bridget se figea, mais reprit vite ses esprits.
- Lucia...
Je tombai mais elle parvint à me rattraper de justesse. Je fixai l'écran en face de moi, tentai de m'en rapprocher encore plus comme pour le traverser et rejoindre Ace. Le son avait été coupé par les journalistes, certainement par respect. On n'avait donc plus aucune nouvelle.
- RESPECT DE MERDE
Imaginez un instant votre cœur cogner dans votre poitrine, pas pour une raison légère, mais parce que vous étiez en train de perdre un proche. Imaginez ne plus avoir la certitude de le voir ? Imaginez ne plus avoir de souffle. Plus d'air. Je me sentais partir. Mais je voulais rester là. C'était à lui de s'en aller ! Pas à moi, et si je voulais le faire rester avec moi, il fallait que je tienne.
Je sentis une larme couler, puis une autre. Je ne savais pas ce qui se passait. Allen s'arma de son téléphone et fit les cents pas, Bridget me serra. Elle me serrait très fort dans ses bras en me secouant. Ça me rappelait Abuela. C'était comme ça qu'elle avait l'habitude de faire pour me calmer.
- Ace... je pleurais
Je voulais savoir ce qui lui arrivait. Au moins, une chose restait positive ; on avait le lieu de la conférence. J'allais y aller. J'allais retourner à Manhattan.
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