49.



ACE

Los Angeles :
Heure inconnue :

- Tu ne viens me voir que maintenant ? Me dit Matt en entrant dans son bureau

Je me tournais alors vers lui en déposant le cadre photo qui trônait sur sa table de bureau.

- Tu en as des choses dans ce bureau

- Dans mon bureau. Alors évite de toucher à tout

Il passa devant moi avant de rabattre le cadre photo, mais c'était trop tard. C'était une photo de lui datant du lycée avec nous. Il y avait Alex. À l'époque où il la voulait, mais aussi à l'époque où Jane était encore là. À l'époque où Michael et un imbécile de première se la disputait.

- Tu as encore ce machin ? Je ris en m'asseyant sur son canapé

- J'aime bien garder les souvenirs de ceux à qui je tiens

- Je ne te savais pas comme ça

- C'était comment ce gala ?

Il venait de changer de sujet.

- Catastrophique. Elle s'est ramenée en pleine conversation à propos de Jane

Il leva les yeux vers moi, comme s'il était maintenant un peu plus attentif à la conversation. Il finit par s'asseoir.

- Et donc ?

- Elle est au courant de tout

- Comment ça « de tout » ?

- Pas de tout exactement mais elle sait que Jane était ma sœur. Elle se doute certainement qu'Alex est lié à Jane. Mes parents lui ont demandé de rester alors que l'on était en pleine conversation houleuse et mon paternel a fait ce qu'il sait faire de mieux

- Le fameux « vous a-t-il parlé de... »

Il éclata de rire en même temps que moi.

- Bordel ça me fait chier, toute cette histoire

J'agitais la tête en m'ébouriffant les cheveux.

- Sérieusement mec, j'espère que tu ne lui en as pas voulu par la suite

- Qu'est-ce que tu aurais voulu que je fasse. Elle n'avait pas à le savoir. Je veux la protéger de mes histoires

- La protéger...

- Tu m'as compris, oublie ça

- Oui c'est ça, il fit une pause en me fixant comme s'il m'analysait, je t'ai compris...

- Je la retrouve ce soir

- Qu'est-ce que tu foutais ici ?

- Rendez-vous, rien de particulier, je devais voir de vieux amis

- Tu devrais arrêter de t'en prendre à elle mec et aussi de t'introduire dans mon bureau comme ça

- Ton bureau que j'ai construit

Il agita la tête d'un air désapprobateur. J'avais raison, c'est moi qui avais levé les murs de cet endroit, alors il avait intérêt à me laisser un libre accès à son espace de travail.

- Si tu la veux réellement, je suis prêt à t'aider

- Bien-sûr que je la veux. Elle est la clé à tous mes problèmes

- Je veux dire... si tu la veux au-delà du plan

Mon cœur accéléra alors. Je ne la voulais pas au-delà du plan. Elle avait été là pour me servir de libératrice, rien de plus. Comment est-ce que j'aurais pu vouloir d'elle ? À part son corps, elle n'avait rien pour elle. Elle était une casse-pieds sur pattes, rien de plus.

- Je te défendrai auprès d'Hudson si c'est ça ton problème

- Je n'ai pas peur de lui. Je suis même prêt à épouser cette femme sous ses yeux

- Alors fais-le ! Je t'observe, tu sais

- Il n'y a rien à voir

Il se mit à jouer avec son stylo tout en me souriant.

- Tu peux te la taper si tu veux, mais par-dessus tout, tu peux aussi l'aimer

Je fronçais les sourcils, me demandant depuis quand mon ami s'était mis à l'humour

- Soit. Il mit fin à la conversation

- Je n'aime pas et je n'aimerais pas Lucia

- Pourtant il va bien falloir être plus doux avec elle si tu veux de son aide. La violence ne convainc plus personne en 2022

- Si tu le dis ;

J'avais beau sembler fermé, je l'écoutais attentivement. Il avait raison. Lucia avait un fort caractère, comme moi, et la pousser dans ses retranchements n'allait pas aider. Je levais les yeux vers Matt avant de sourire.

- Merci. Je dois te laisser. J'ai un vol à prendre

- On se retrouve quand à New-York ? me demanda t - il heureux.

Il savait qu'il avait réussi et je ne voulais pas le voir plus longtemps avec ce sourire suffisant sur le visage.

- On en parlera par message sur le groupe se répondit-il, Dans la semaine, ce serait faisable. J'ai une réunion. Un nouvel investisseur

- Qui ça ?

Je lui posais la question en commençant à m'en aller. J'avais confiance en lui et il m'avait déjà envoyé ce dossier. Je lui posais plus la question par politesse que par pur intérêt. Il me suffisait de lire le dossier pendant mon vol.

- Jeff Holdings

- Je vois. Je lirais ton rapport. Ma secrétaire me l'a déjà transmis. On pourra se voir dans un bar

- Le même dans lequel on avait fait la misère à ta chérie ?

Je ne relevais pas le « chérie » mais je confirmais son idée d'un sourire mauvais.

- Exactement, le même, dis-je en éclatant de rire

J'abaissais la poignée de porte en fer froide avant d'être me tourner vers lui.

- Toi aussi, trouve-toi quelqu'un

- Et toi reste avec celle que tu as. Elle a un de ces cul bordel

J'agitais la tête en quittant la pièce.

- Fais-toi pardonner Scotten


Mon séjour à L.A avait été court. Je poussais la porte, exténué. Il faisait sombre. Seule la cuisine était allumée. J'avais laissé ma valise dans la voiture, mon chauffeur allait la sortir dans le garage et quelqu'un s'occuperait de faire ma lessive.
J'en avais de plus en plus marre de changer de ville, de voyager. Et Matthew commençait de plus en plus à être la personne que mes yeux voyait le plus.

- Je suis dans la cuisine, le cria Bridget

Je pénétrais la pièce. Il était 22:02 d'après ce que disait la montre à mon poignet. Mon trajet m'avait semblé autant long que court. Il me fallait aller voir Luchita et cette envie m'était venue après ma discussion avec Matthew.

- Je t'ai fait de quoi manger, me sourit-elle. Tu m'as l'air exténué mon chéri

Elle se rapprocha de moi, avant de me passer une serviette froide sur les yeux. Ça avait dû être ça le bruit que j'avais entendu en rentrant, celui d'un robinet d'eau, ouvert.

- Il ne faut pas que cette petite te vois comme ça. Je pense que c'est compliqué, mais elle commence à s'attacher à toi

- Elle a mangé en mon absence ?

Je me retirais de la vieille femme. La conversation me semblait être une conversation quant à l'éducation et à l'évolution d'une petite fille.

- J'ai vu mieux... Que lui as-tu fait ?

- Ça, ce sont mes histoires

Je me détournais d'elle, ennuyé par sa question. Elle avait ce don pour agacer les gens. Je ne supportais pas que l'on mette la faute sur moi. J'en avais déjà plein les pattes, alors avoir une personne qui me sermonnait n'aidait pas.

- Je l'aime bien

- Oui, mais ne t'attache pas à elle.

Je m'en allais, la laissant là, statique.

- Je ne mange pas ce soir, je vais la voir puis je vais dormir

Je montais à l'étage. Le couloir était très sombre alors quel ne fut ma surprise quand je vis que Luchita ne dormais pas encore. Je poussais doucement la porte de sa chambre quand je la vis de nouveau allongée dans cette position étrange.

- Holà

Je dis cela en m'approchant presque discrètement comme si je redoutais quelque chose. Quand je me penchais sur son visage qui me regardait avec une moue pitoyable, je vis qu'elle était rouge comme jamais encore. Son visage m'avait l'air humide. Mon cœur ne fit tressauta. Elle pleurait. Non en fait, elle avait pleuré, mais avait dû se calmer. Ça ne faisait pas longtemps en tout cas.

- Qu'est-ce qui ne va pas, princesse ?

J'éteins la lumière de la pièce. Je voulais parler avec elle avec. Je la sentis se rasseoir. Elle ne dit rien au début, puis renifla :

- Tu es rentré...

Elle sembla dire ça sans émotions particulières. Je ris doucement :

- Je suis rentré. Je t'écoute

- Un fils de pute me retient prisonnière chez lui

- Laisse-moi deviner. Il s'appelle Ace ?

- Non

Je fus surpris face à sa réponse.

- Ah bon ? Alors qui est-il ?

- Il s'appelle Andrew Scotten. Je ne sais rien de lui, pourtant j'ai l'impression qu'il a un bon fond

La psychiatre que j'avais vu après la mort de ma sœur m'avait dit que ça libérait de discuter dans le noir. J'en avais maintenant la preuve. Elle parlait beaucoup.

- Tu m'as appelé Andrew ?

- Oui. Je ne sais pas pourquoi tu as changé de nom

- Je n'ai pas changé ma belle

- Je préfère Andrew

J'agitais la tête en me demandant ce qui lui arrivait.

- Mais Andrew me pousse à le détester...

- Ah bon ?

Je me déchaussais en m'installant mieux dans le lit. Je sentis qu'elle essuya ses joues, puis elle reprit :

- Oui... Comme je te l'ai dis, à mon avis, il a un bon fond. Mais il me déteste

Qu'arrivait-il à ma Luchita ? Elle pensait que je la détestais ?

- Il ne te déteste pas

- Il passe son temps à me faire du mal. Il me prive de tout. Et récemment, il me donne le sentiment de n'être qu'une esclave.

Je ne dis rien. Je ne l'aimais pas, mais je ne la détestais pas non plus. J'avais simplement mon objectif. Je baissais cependant la tête, comprenant ses mots, quand tout à coup, je sentis ses draps remuer. Je sentis Lucia bouger et en quelques secondes elle était sur moi.
Je m'allongeais par automatisme. Je ne savais pas non plus ce qui m'arrivait, est-ce qu'à un autre moment, je l'aurais repoussé ? Ou ça aurait été la même chose peu importe le moment ?

- Lucia ?, demandais-je

Elle se mit à défaire sa braguette, assise sur moi.

- Eh Luchita ?

Elle ne m'avait plus l'air d'être elle-même. Je fronçais les sourcils en me laissant faire. C'était vraiment une vraie putain de salope quand elle le voulait cette nana. L'affamée se pencha sur moi, puis me força à me détendre quand je sentis son souffle sur moi. Elle puait l'alcool.
Quand est-ce qu'avait-elle eu l'occasion de boire bordel.
Je la repoussais violemment sur le côté.

- Tu as bu ?!

J'essayais de me contenir. J'avais compris que ma façon de lui parler lui donnait en fait l'impression d'être haïs.

- Je suis désolée, s'excusa t - elle tout à coup

Je me levai, rallumais la lumière avant de me rasseoir, redécouvrant ses joues roses. En fait, son visage rouge venait de l'alcool. Elle ne buvait jamais.

- Tu es ivre Lucia ?

Je la regardais fixement avant de passer mes doigts sur ses pommettes suantes.

- Je suis désolée... Ces derniers jours j'ai commencé à me faufiler, et tu sais... j'ai trouvé cette pièce et il y en avait de partout et...

- C'est bon. J'ai compris

Je n'étais pas loin de me mettre en colère. J'avais l'impression que mon cœur plongeait dans une mare de sable mouvant. J'étouffais. Sa chambre était censée être fermée. Comment se faisait-il qu'elle avait réussi à la quitter, à fouiller dans cet endroit, jusqu'à trouver les bouteilles que je gardais.

- Tu contractes ta mâchoire, me fit-elle remarquer

Je la regardais droit dans les yeux. Elle avait cette histoire de règles à respecter... Venait-elle vraiment de briser l'une d'entre elles ?

- Qu'est-ce qui ne va pas Lucia ?

Je m'inquiétais réellement cette fois-ci. Je ne la reconnaissais pas. Elle referma ma braguette avant de sourire. Je lui donnais un sourire béa face à son geste.

- Je me sens seule... Je n'ai jamais été très extravertie et sociable ou même démonstrative, mais je me sens seule ces derniers temps, avoua-t-elle. Je ne vais plus te demander de me laisser partir Ace... C'est fini. Plus je me retrouve face à un refus, plus je me dis que tu es horrible. Je te déteste, mais je refuses te détester à ce point, car j'ai compris lors de ce gala, lors de la discussion avec tes parents que tu souffrais

Je déglutis.

- Bien que je ne tolère pas ton comportement, j'accepte mon échec et aussi de me dire que je n'aurais plus jamais ma liberté. Me retrouver toujours face à tes non, me fait encore plus mal, donc pour me préserver, je vais arrêter. À chaque fois, je me dis que j'obtiendrais ce que je veux, mais tu ne cèdes pas alors, pourquoi se torturer ?

Elle rit tandis que je continuais de l'écouter.

- Qu'est-ce que tu aimerais avoir ?

- Tu sais déjà quelle aurait été ma réponse en temps normal

Elle fit une pause. Je me passais ma main dans mes cheveux :

- Dors avec moi

- Désolée, ma belle

- S'il te plaît. Je ne te demande pas grand-chose

Je me réinstallais sur son lit, me sentant exténué. Ça ne me coûtait rien, et obtenir un « j'abandonne de Lucia », me faisait tellement tomber des nues, que je me disais qu'elle devait vraiment en avoir besoin.

- Si tu veux savoir tout ce qui ne va pas... reste

- D'accord

Elle releva la tête surprise avant d'afficher un sourire resplendissant. J'éclatais alors de rire :

- Je sais que tu as envie de me baiser, mais au point de sourire comme ça...

Je me relevais en voyant qu'elle ne répondit pas. J'éteins la lumière.

- Laisse-moi me changer

- Tu aurais pu me laisser voir ça

- Tu penses le mériter poupée ?

- Évidemment

- Tu en es sûre ? Pour moi, quelqu'un qui me vole mon alcool ne mérite rien

J'étais tellement excité par cette conversation, mais je réussis à me calmer, ou presque.
J'entendis Luchita Fernandez se rallonger en me faisant une place, place que je finis par rejoindre un peu plus tard. J'avais le cœur qui battait aussi vite qu'un moteur de Ferrari, ça faisait longtemps que je n'avais pas dormi avec quelqu'un qui n'était pas une prostituée. À peine installé, elle se jeta sur mon torse et posa sa tête dessus.

- Profite

Elle ne dit rien de drôle à cela, et commença.

- J'étais plus jeune à l'époque et j'étais très proche de ma grand-mère. Ma sœur l'était aussi, mais passait moins de temps que moi, avec elle. Malgré son âge, elle était toujours courageuse et forte. Quand mes parents se disputaient en ma présence et en la présence de So', elle savait s'imposer et leur dire de la fermer. Elle m'a tout transmis, toutes ses passions. Elle m'a sauvé la vie lors de ce qui avait été ma première crise d'angoisse

- Je vois

Je savais déjà pourquoi est-ce qu'elle me racontait tout cela... et je me sentais pour une fois fier. Matt pouvait lui aussi l'être, j'avais réussi à la faire se confier.

- Le buste que tu as laissé brûler, était un buste la représentant. Je l'avais fait alors qu'elle était en pleine agonie...

Je cessais tout à coup de respirer. Je me disais que c'était un de ces trucs merdiques, qu'elle avait dû faire entre deux lundis.

- Elle était morte quand j'étais en train de le faire. C'était la seule chose qui me restait d'elle Ace... et tu l'as détruite. Je l'ai vu mourir une seconde fois

Je repris ma respiration en fermant mes yeux. Je ne voulais pas me mettre à imaginer sa douleur. Si j'imaginais, j'allais avoir de la compassion et c'était le premier pas, parmi une dizaine et vers ce que les gens appellent l'attachement.

- Alex... Elle est la seule vraie amie que je me suis faite ici. Tu me l'as aussi retiré en m'emmenant ici. Cette fille est tellement géniale, je ne comprends pas ce que tu as qui te pousses tant à la rejeter

- Tu ne sais pas tout Lucia...

- Alors dis-moi

Elle se mit à sangloter, mais je fis comme si de rien n'était.

Putain...

Je me mis à caresser ses cheveux, doucement.

Si au moins je pouvais faire ça..., étant donné que je ne comptais pas lui dire « oh pauvre Lucia, je te libère ».

- J'ai besoin de distraction, en dépit d'être libre et je ne veux pas oublier ma famille, mi abuela...

Je continuais à la caresser sans rien dire. Elle bâilla doucement. Je commençais moi aussi à somnoler, malgré tout...

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