Je lançai l'appel vers le Mexique tout en ouvrant mon parapluie. La pluie s'était calmée, mais quelques gouttes continuaient tout de même de tomber. Je mis mes écouteurs avec difficulté quand elle décrocha :
- Hermanita !!! (Sœurette !!!)
Elle s'exclama de façon si joyeuse qu'elle m'arracha un rire en pleine rue.
- Cómo estás? (Comment ça va ?)
- Te quiero ! Tú siempre sabes cuando llamarme (Je t'aime ! Tu sais toujours quand appeler)
- Es porque soy tu mejor amiga Daniela, je ris (C'est parce que je suis ta meilleure amie)
- Si dices (Si tu le dis)
- Évidemment que je le dis !
Je fis une pause.
- Non, c'était surtout parce que tu me manquais vraiment.
- Toi aussi, tu me manques beaucoup Lulu
- Qué haces ? (Tu fais quoi ?)
- Rien de particulier, mais j'ai tellement de choses à te raconter. J'ai rencontré un garçon
- Quién es ? (C'est qui ?)
- Se llama Julio (il s'appelle Julio).
Elle dit cela tout excitée et éveillât encore plus ma curiosité. Je me demandais bien ce qui se passait dans sa vie amoureuse actuelle, mais on n'en avait pas grandement parlé ces derniers temps, ce qui me surprenait un peu, car la seule chose intéressante aux yeux de Daniela était l'amour, les garçons et l'alcool.
- Julio ? Enchantée, riais-je en m'arrêtant au passage clouté laissant alors passer des dizaines de petits taxis orange
Mon amie rit à l'autre bout du fil, me faisant franchement plaisir, ça faisait longtemps que je n'avais pas parlé à Daniela. Deux vieilles femmes discutant s'approchèrent de moi pour attendre, elles aussi, le passage du feu au vert. Les rues étaient assez bondées et la circulation encombrée dans cette ville pleine de travaux.
- Es muy guapo ! (Il est extrêmement beau !)
- No es lo más importante (Ce n'est pas la chose la plus importante)
Le feu passa au vert, je continuai d'avancer sous cette pluie et ce vent, traversant un vendeur de journal dans son kiosque.
- Habla por ti ! (Parle pour toi !)
Daniela avait raison. C'est vrai que parfois elle et moi, n'avions pas les mêmes priorités. Moi, j'avais tendance à chercher un garçon plutôt gentil et doux, qui cherchait à constamment s'améliorer, tandis qu'elle, elle cherchait plutôt des relations passionnelles.
- Piensa a tu corazón, (Pense à ton cœur), je prononçais ces mots en toute connaissance de cause tout en traversant la rue en direction de la bouche de métro.
J'avais totalement raison, de nombreuses fois, ses relations avaient fini dans un tumulte qui moi, m'aurait détruit. J'avais du mal à concevoir que Daniela aimait enchaîner des relations qui se terminaient toujours de la même manière.
Une fois devant la fameuse bouche de métro, je bipai ma carte d'abonnement et marchai en direction de la ligne Y85. Mon métro allait bientôt arriver, dans cinq minutes environ.
- Cómo encontrarlo ? (Comment l'as-tu rencontré ?)
J'étais vraiment curieuse de savoir comment est-ce qu'elle l'avait rencontré et en même temps effrayé d'avoir la réelle histoire.
- Oh, comme d'habitude, dans un bar !
J'avais l'impression de l'entendre sauter sur elle-même à pieds joints.
- J'espérais que tu me dises autre chose, je dis en m'asseyant sur un siège, attendant le transport en commun
- Comment veux-tu que je rencontre des mecs sinon
- À l'église, à la bibliothèque, au parc-
Quand je prononçais ce mot, je revis Ace et moi, lui en train de me " consoler " et moi pleurant... au parc.
- Argh, tout ce genre de choses ennuyeuses quoi ?
- Ce n'est pas ennuyeux, Daniela !
- Lucia Fernandez, tu ne me verras jamais dans une bibliothèque.
Au son de sa voix, je l'entendais presque lever les yeux au ciel
- C'est bien dommage, d'ailleurs
- Bon... En réalité, c'était un client de Maman... Il était un peu perdu après le départ de ses collègues
- Par perdu, tu veux dire bourré ?
- Bon, tu m'as très bien comprise Lucia.
- Bien évidemment, je te connais
- J'ai donc dû m'occuper de lui. Je lui ai laissé un petit mot sur sa table de chevet. Pour lui dire que s'il était rentré, c'était grâce à moi et que je lui avais laissé son téléphone et son portefeuille dans sa salle de bain.
- ...Et il t'a rappelé complétai-je
- Comment as-tu deviné ? Ironisa t-elle avant de rire.
- Bon, je te souhaite vraiment que ce soit le bon. Tu le mérites vraiment, mais soit prudente. Ne te fais pas encore avoir. J'aimerais vraiment que tu puisses distinguer les bons des mauvais
- Tu n'as pas à t'en faire, je pense qu'il est effectivement le bon, je ne sais pas pourquoi
- Tu as dit la même chose, il y a quelques mois, riais-je
- Oui, mais je suis sûre que tu l'aimerais bien
- Et ça fait combien de temps ?
- À peu près trois semaines ! Ce n'est pas encore une relation longue durée, pourtant on s'entend super bien ! Il est venu manger une fois à la maison et mamá l'a beaucoup apprécié
- Vraiment ? C'est super ça.
- Oui ! Il me traite bien. Pour une fois, maintenant, je vois ce que tu veux dire quand tu parles de garçons gentils
- Daniela, deviendrait-elle une personne mature et sérieuse, riais-je aux éclats en regardant le temps d'arrivée de mon métro, qui était maintenant de trois minutes
Une femme enceinte passa devant moi, et me sourit, suivi d'un homme âgé aux cheveux gris.
- On a encore trois minutes devant nous. Il t'a déjà invité à sortir ?
- Oh oui ! J'ai failli oublier de te le dire, mais ce soir, il m'a invité dans un restaurant chic. Je me suis coiffé et habillé, je n'attends plus que lui.
- Et il vient même te chercher ?
- Oui, c'est incroyable n'est-ce pas ?!
- Daniela, tes blagues sont vraiment de mauvais goût.
- Je ne te mens pas, ce n'est pas une blague. Julio est réellement l'homme parfait.
- Te quiero, mais méfie-toi quand même
- Oui Maman, ne t'en fais pas !
- Tu m'enverras des photos de toi et du fameux Julio ?
- Compte sur moi, j'en ai plein dans mon téléphone. Attention à ton stockage quand je te les enverrai ce soir, rit-elle
- Profite bien, Dani, tu me manques beaucoup
- Toi aussi tu me manques beaucoup hermanita
Elle prit tout à coup une voix triste. Je la comprenais, c'était aussi dur pour moi de ne pas avoir ma meilleure amie à mes côtés. Même si je m'étais fait des amies, si j'avais eu Daniela avec moi, rien n'aurait été pareil.
- Bon, mon métro est là, il faut que je te laisse !
- Bien sûr ! Sabes cómo llamarme. Te quiero ( Tu sais comment me joindre, je t'aime )
- También ! ( Toi aussi ! )
Je serrai mon sac et me levai voyant le métro commencer d'approcher. Un monde fou s'était déjà amassé sans même que je ne m'en aperçoive. C'était ça les sorties de travail en début de soirée, à New York.
Quand l'engin automatique, s'arrêta enfin, je souris, contente de me dire qu'après cela, il ne me resterait plus que cinq minutes de marche et mon périple prendrait fin. J'avais hâte de rejoindre Alex et de passer ma soirée avec elle.
Je me mettais de côté tout en enfonçant mes écouteurs dans mes oreilles, et laissait passer les voyageurs, souhaitant sortir. Quelques secondes plus tard, je finis par m'insérer à mon tour, jouant des coudes afin de trouver une place convenable.
- Hablamos luego ! (On se parle plus tard !). Bisous
Je souriais satisfaite de mon appel. J'allais essayer de la rappeler au plus vite pour avoir l'avancée de son rendez-vous
- Bisous Lucia
On raccrocha alors toutes les deux quand la ram démarra.
Je rajustai mon pull noir de deux tailles trop grand pour moi, que j'avais accordé à un jogging gris lui aussi exagérément trop grand. Je posai mon sac à dos à mes côtés et en sortis un livre m'enfermant dans mon monde. J'avais une bonne quarantaine de minutes de trajet devant moi, j'allais donc en profiter pour m'enfermer dans ma lecture.
***
Je sonnai à l'interphone d'un grand manoir et après quelques bips, quelqu'un finit par répondre.
- Bonjour ? Vous êtes l'amie d'Alex ?
- Oui, disais-je mal à l'aise à l'extérieur
- Ah super ! Patientez deux minutes le temps que le portail s'ouvre
- D'accord
Je me retournais sur moi-même un bon nombre de fois afin de me rendre compte du luxe de l'endroit. La maison en face avait à son entrée une Ferrari garée. Il y avait des SUV et des voitures de sport garées partout. Je refis un tour sur moi-même et me retrouvais à fixer la maison de mon amie. Elle était énorme et dire qu'il y avait de nombreuses fenêtres serait un euphémisme.
Le grand portail noir s'ouvrît tout à coup, m'arrachant un sursaut. Je courus dans l'allée, espérant que personne n'ai vu ma réaction disproportionnée.
Tandis que je traversais l'allée carrelée, une fontaine au style très atypique, entouré d'un sol gazonné et de quelques cyprès m'accueillit.
Je me présentai devant une porte, trois fois plus haute que moi, tout en verre, au cadre noir.
À peine avais-je posé mon pied sur le palier que la porte s'ouvrît sur une femme d'âge moyen, le regard épuisé certainement à cause du travail.
- Entrez madame ;
Sa politesse me surprit et me choqua presque. Venait-elle vraiment de m'appeler « madame » ? Je lui souris.
- Merci
On rentra et on traversa une entrée somptueuse au caractère franc et luxueux.
- Par ici
Je réajustais mon sac à dos puis m'installais dans le salon, à la place que m'avait indiqué la femme de ménage
- Attendez-la. Madame doit déjà être en train de s'habiller. Elle sera là dans quelques minutes
- Un grand merci, dis-je sincère en rajoutant un sourire à ma parole
Elle se pencha en avant, avant de se retirer. Je restai alors bouche bée, essayant de regarder le moins possible autour de moi. Si ceci était le genre de personne que côtoyait Ace, qu'en était-il de lui-même ?
Une personne ouvrit la porte baie vitrée à l'autre bout de la pièce, et juste en face de moi, se dressa un homme qui se mit ensuite à avancer, les cheveux et le corps mouillés.
Je clignai des yeux, totalement dans l'incompréhension et mal à l'aise. Comment réagir dans cette situation ? J'étais dans une maison inconnue, avec un homme inconnue et il fallait que je me gère ?
L'homme avança encore plus, quand son visage finit par se dessiner : Michael.
Il s'arrêta quelques pas plus tard, en face de moi. Et, comme s'il avait vu une apparition soudaine et inattendue, me fixa.
- Qu'est-ce que tu fais là Michael !
Je ne posais pas la question, je m'exclamais ! Que faisait-il ici !
- Je te retourne la question Fernandez
Il s'adossa nonchalamment contre la porte du salon me condamnant alors à rester là, avec lui.
- Que fais-tu chez mon amie, torse nu, comme si tu te baladais chez toi !?
- La réponse est dans la question, sourit-il narquois
- Quoi ?
Il ne dit rien, me fixant du regard.
Je compris alors.
Il était chez lui.
C'était moi l'intrus.
- Bravo. Tu comprends vite. Actuellement, c'est toi qui as ton popotin sur le canapé de mon salon
- Qu'est-ce que tu fais chez Alex ?
- Et toi, qu'est-ce que tu fais chez nous ?
- Chez vous....
Je n'aimais absolument pas la tournure que cette conversation prenait. Je n'étais pas chez Michael, mais chez Alex. Je ne comprenais pas pourquoi est-ce qu'il voulait tant se moquer de moi.
Je le fixais quand la lumière du lustre se refléta sur son ventre parfaitement musclé. Dieu Grec. Il avait le corps d'un Dieu grec.
Il rit alors amusé avant de se redresser toujours dans cette moquerie naturelle et s'assit en face de moi sur l'un des sièges libres.
- Dis-moi en plus sur la nature de ta présence dans ma maison
- Je n'ai rien à t'expliquer !
- Bien plus que tu ne le crois, Lucia
Il venait de m'appeler par mon prénom. Il était le seul de leur groupe à le faire. S'il n'avait pas été de leur groupe, j'aurais pu avoir envie de devenir son amie.
- Il suffirait que j'aille voir la sécurité pour te mettre dehors et t'interdire d'approcher le quartier
- Je suis venue voir mon amie, ignorais-je sa menace. Maintenant.... Pourquoi es-tu ici ?
- Je suis chez-moi, je te l'ai déjà dit
- Je doute de la véracité de tes propos
- Je n'ai pas besoin que tu me croies ;
Je levais les yeux au ciel, amusée. Son ton me fit rire et je détestais me dire qu'il avait une information, mais moi non.
- Bien évidemment, soupirais-je
Il se bougea, un sourire aux lèvres, sourire dont la nature m'était inconnue. Est-ce qu'il se moquait, me narguait ou est-ce qu'il m'offrait pour la première fois un sourire sincère ?
- C'est dommage que ton amie ne t'ait pas dit plus tôt qu'elle était ma sœur
Sur ce, il s'en alla, me laissant dans l'incompréhension la plus totale.
Alex était la sœur de Michael... ?
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