X.
«—Est-ce que tu le vois, Rey?»
Finn avait déjà posé la question une bonne centaine de fois et ne semblait pas s'en lasser. Très concentrée dans la Force, la jeune femme tâchait de conserver son calme olympien malgré le stress particulièrement communicatif de son ami.
Le quartier autour de casino était une zone sinistrée. Pire, c'était une zone de guerre. La milice urbaine avait déclenché un plan de défense bien dérisoire contre les troupes chevronnées du Premier Ordre, plusieurs bâtiments brûlaient et des débris de vaisseaux spatiaux jonchaient le sol. Nulle trace de Poe ou de BB-8.
«—REY!»
Elle fit taire Finn d'un geste de la main, avant de l'abaisser, calmement. Malgré le bruit et le chaos ambiant, elle pouvait faire appel à la Force avec un minimum de concentration. Les yeux clos, elle se mit à chercher le pilote. Elle le connaissait bien et sa présence était inimitable.
«—Je crois savoir où il est Finn. Je sens sa présence quelque part dans cette direction, par là.»
C'en était assez pour Finn. Il partit comme un tir de blaster dans la direction approximative pointée par la Jedi. Mais ce n'était pas tout. Pendant son incursion dans la Force, elle avait senti d'autres choses. Perturbantes. Des émotions puissantes. Une présence menaçante, comme un trou dans la nuit. Il fallait faire vite si elle voulait qu'ils s'en sortent tous sains et saufs.
«—Attends moi, Finn! On doit pas se séparer, c'est dangereux!
—Je sais!»
Derrière les restes fumants –mais encore debouts– du hangar annexe, ils virent tous deux BB-8 faire des cercles en faisant des bruits assortis, suivi de très près par un Poe Damaron particulièrement échevelé.
«—Poe! On est venus te sauver!»
Le pilote sourit malgré l'étreinte vigoureuse de Finn qui menaçait de lui casser quelques côtes.
«—De pilote je passe à damoiseau en détresse.
—Tu peux tout faire! Sauf mourrir. Ca, je te l'interdit.»
Et ils s'embrassèrent fougueusement, pendant que Rey détourna les yeux, un sourire soulagé et attendri sur le visage.
«—Tout ça est très touchant, et ma prime grandit d'autant.»
Le chasseur de primes s'était relevé, son arme pointé sur le couple enlacé, bien déterminé. Poe lui jeta un regard assassin.
«—Bon sang, mais t'es pas mort, toi?
—Les chasseurs de Primes ne meurent jamais, vermine. Ils vont juste en Enfer se regrouper.»
En quelques secondes, Rey analysa la situation. Ses deux amis, enlacés et vulnérables, la menace du mercenaire et... Autre chose. Une menace sous-jacente, diffuse, discrète. Un trille de BB-8 attira son attention et elle vit : le hangar.
Ou plutôt ce qu'il en restait et n'allait pas tarder à s'écrouler. Si elle se débrouillait bien, elle pouvait neutraliser le mercenaire sans mettre les deux amoureux en péril. Il fallait simplement une petite distraction.
«—Et bien justement, c'est le moment d'aller au diable. Envoie nous une holo-carte postal.»
Puisant dans la Force, elle tendit le bras vers la structure briquebalante enflammée qui les surplombait alors que le Hutt tourna la tête dans sa direction.
«—Trois pour le prix d'un! Et le Premier Ordre est déjà là!»
Mais il n'eut pas le temps de se réjouir, il ne comprit que trop tard ce qui se passait. Grâce à la Force elle sentit le point faible de la superstructure et fit pression dessus. Elle relâcha tout d'un coup en comptant sur la gravité pour faire le reste.
Et cette improvisation fut couronnée de succès. Un peu trop, toutefois. Elle eut juste le temps de crier à ses deux amis.
«—ECARTEZ-VOUS!»
Ce fut tout le hangar enflammé qui bascula et bien plus vite que prévu. Ils allaient tous être écrasés si ils ne bougeaient pas. Le Hutt réalisa trop tard le danger dans lequel il était et n'eut pas le temps d'esquiver la poutrelle qui lui tomba dessus. Bloqué sous les débris, son curieux holo-scan lui échappa des mains, glissant jusqu'aux pieds du couple encore médusés.
Poe reprit l'initiative. En bon pilote, il avait presque des réflexes de Jedis. Il attrapa la main de son époux l'entrainant avec lui hors de danger. Le hangar à vaisseaux était immense. Il comprit en un fragment de seconde qu'ils ne s'en sortiraient pas.
Il adressa un dernier sourire charmeur à son amant, n'hésitant jamais à braver les circonstances. Finn comprit aussi. La façade s'écroulait, et il allait mourrir.
«—Je t'ai dit que je t'aimais?
—Pas assez souvent.
—Oh arrêtez, vous deux!»
Rey était debout, les deux bras tendus, la mâchoire crispée, suant à grosses gouttes.
«—Vous êtes mignons, mais je vais tenir longtemps!»
Les deux hommes s'entre-regardèrent sidérés par la scène : la Jedi retenant à elle toute seule un immeuble de plusieurs tonnes. Le Hutt, aux portes de la mort profita de cette fenêtre de tir. Hors de question de crever ici tout seul. Il pointa son blaster en tremblotant, utilisant ses dernières forces pour viser la Jedi : le tir partit vers Rey, qui le sentit sans même le voir.
Les réflexes conférés par la Force lui permirent de s'écarter pour éviter le tir mortel et se le prendre dans l'épaule. Elle poussa un cri de douleur qui fut étouffé par le bruit du hangar s'écrasant au sol sur ses deux amis.
«—NON!»
Le bruit fut assourdissant. Elle ne s'entendit même pas crier sa détresse. BB-8 était comme fou à côté d'elle. Les bruits de tirs, des moteurs, des vaisseaux, des bottes des soldats, les ordres firent peu à peu irruption dans ses oreilles. Elle sentit une goutte d'eau sur sa peau. Elle pleurait.
«—Je suis... Désolée... BB-8, ils sont morts et... j'ai pas pu les sauver...»
Elle s'accroupit au sol, enfouissant sa tête dans les mains. Les Jedis n'étaient pas censés s'attacher il parait, mais ce n'était pas possible. On ne pouvait pas traverser autant de choses sans ressentir des émotions, avoir des gens qu'on aime et auxquels on tient, au moins autant que sa propre vie.
Je ne serais jamais une vraie Jedi.
Les paroles de Finn lui revinrent en tête.
«—Tu te trompais, Finn. Je vous avais, vous deux. Qu'est-ce-que je fais faire, toute seule?
—Si tu veux nous enterrer, ma belle, va falloir faire mieux que ça.»
Elle sursauta en entendant la voix moqueuse de Poe. Elle releva la tête, la vue troublée par les larmes. Mais ils étaient bien là, tous les deux. Couverts de poussière blanchâtres, éraflés, contusionnés, mais vivants. Ils se soutenaient mutuellement par les épaules. Finn grimaça.
«—Arrête de frimer Poe, je sais que tu as mal.
—On va tous avoir mal si on se barre pas d'ici très vite.»
Rey n'en revenait pas.
«—Mais... Mais... Comment..?»
A sa grande surprise, Finn afficha un large sourire et Poe haussa les épaules avec sa nonchalance habituelle. Il lui désigna un trou, dans la façade du hangar.
«—Tu dois être notre ange gardien dans la Force, parce qu'échapper à une mort pareille de cette façon là, ça peut pas être un hasard.»
Et elle se jeta sur eux, les enlaçant, ivre de joie, pendant que BB-8 sifflait lui aussi. Alors qu'elle relâchait son étreinte, Finn la regarda, l'air contrit.
«—Qu'est-ce-qu'il y a?
—Je t'ai entendue, tout à l'heure, et je voulais te dire...»
Elle lui adressa un sourire.
«—Tu m'as entendue. C'est tout ce qui compte.»
Poe haussa un sourcil d'étonnement.
«—Je t'expliquerai. Un jour. Pour l'heure, on file au vaisseau et on se tire.»
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