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/Ecoutez Divenire de Ludovico Einaudi (en média) avec le chapitre\



"La sottise, l'erreur, le péché, la lésine,

Occupent nos esprits et travaillent nos corps,

Et nous alimentons nos aimables remords,

Comme les mendiants nourrissent leur vermine. " - Baudelaire, Les fleurs du mal




"Tu m'avais dit au téléphone que tu étais au restaurant avec un ami. Et tu as raccroché.. Je suis resté la nuit entière dehors, ce soir là. Je n'arrivais pas à comprendre ce qu'il se passait réellement, mais je savais que tu m'échappais. Tu t'éloignais de moi, de notre monde pour t'en construire un nouveau. Je n'arrive plus à retenir mes larmes, et j'ai du mal à voir ce que j'écrit. L'encre bave de tout les côtés, mais je m'en fiche. Je n'ai pas besoin que tu lises ces lettres, je veux que tu entendes ce que mon coeur te dit. Je veux que tu saches à quel point tu me manques, à quel point je t'aime. Tu étais tout pour moi. Tu étais ma moitié. Souviens toi, Aliyah."


"Arrêtes !"


Je jetai Aliyah sur le divan et commençai à la chatouiller. Elle riait aux éclats, et les autres nous regardaient du coin de l'oeil, un sourire collé sur le visage de chacun.


"On dirait un chien qui retrouve son maître." rigola Elizabeth.


"Tu viens d'insinuer que je suis un chien ?" dis-je en me redressant.


"Elle n'insinue pas, c'est la vérité."


Je lançai un regard haineux à Aliyah et la porta sur mon épaule. Je l'emmenais jusque dans sa chambre et la posa sur son lit, avant de me mettre à genou face à elle, assise. Elle plongea son regard dans le mien, et entoura mon visage de ses douces mains.


"Tu m'a tellement manqué."


Je soufflai ces simples mots comme un appel à l'aide, comme pour lui demander de revenir.


"Toi aussi, Aiden.."


"Pourquoi tu ne viens plus nous voir ?"


Elle soupira et lâcha subitement mon visage.


"Je n'ai pas le temps." dit-elle en baissant le regard.


"Tu as pourtant le temps d'aller au restaurant avec un ami."


Elle releva ses yeux vers moi, brillant, puis elle les rabaissa aussitôt vers sa montre. Je n'aurais pas dû dire ça.


"Je dois y aller."


Elle se leva et je l'attrapai par le bras.


"Non, restes encore un peu."


"Je ne dois pas être en retard, Aiden."


"Peu importe, tu n'es restée que quelques minutes."


"Je ne devais pas venir à la base."


Puis elle se détacha de mon emprise. Je ne savais pas comment réagir. Et je ressenti la même chose que ce soir là. Je me suis senti abandonné.



"Je n'avais pas compris le fait que tu voulais t'en aller. Tu aimais venir au foyer, tu aimais nous voir.. Tu ne m'appelais plus la nuit, et je pensais que tu arrivais à dormir. C'était moi qui n'y arrivait plus.. J'étais sans défense. Je ne voulais pas te déranger. Puis j'ai commencé à comprendre que tu n'étais pas responsable de tout ça."



L'homme la tenait par le bras. Il semblait lui crier dessus. Et elle avait l'air terrifiée. La colère que je ressentis à ce moment même était inégalable. Je ne contrôlais plus mes gestes, et je m'avançai vers eux comme une furie. Il l'engueulait, et elle baissait la tête. Comment pourrais-je rester stoïque face à cette situation. Et je ne sais comment, je lui ai enfoncé mon poing dans la figure. Il se retrouva à terre, et je n'entendais plus que la colère hurler en moi. Il n'a pas le droit de la toucher.


"Oses la toucher encore une fois, fils de pute, et je te tue."


Les cris d'Aliyah semblait s'éclaircir au fur et à mesure que je me rendais compte de ce que je venais de faire. Elle me disait de partir. Pourquoi ? Elle avait besoin de moi, pourquoi ne voulait-elle pas que je l'aide ?


"Aiden, s'il te plaît."


"Mais-"


"Dégages !"


Puis elle s'en alla. Elle l'aida à se relever, et entra dans la maison, me laissant seul encore une fois.


Je claquai la porte de ma chambre et m'effondra. Que se passe-t-il ? Je ne comprend plus rien. Elle ne veut plus me voir. Elle ne veut plus de moi.



"Parfois je vais devant ta tombe et dépose quelques fleurs. Tu n'aimais pas les fleurs. Pourtant c'est ce qu'on pose habituellement sur les tombes. Puis je me suis rappelé de tes poèmes. Je les ai fait plastifier, et je les ai déposé sur la pierre froide qui repose sur toi. C'est dur pour moi d'aller là bas. J'ai l'impression que tu y es aussi, et je ne veux pas que tu me vois pleurer. Je ne dois pas être triste de ton départ. Tu es sûrement mieux, là bas. Loin d'ici, de ces monstres qui t'ont fait tant de mal. Mais je n'y arrive pas. Je t'avais promis de ne pas sombrer, de ne jamais toucher à l'alcool, ni à la drogue. Je ne le ferais pas. Tu avais horreur de ça."



"Pourquoi es-tu ici ?"


Je jouai avec ses cheveux fins pendant qu'elle était allongée contre mon torse.


"Mes parents ne pouvaient plus s'occuper de moi.. Mon père a des problèmes de dépendance, et ma mère ne semble pas être au courant de mon existence."


Je soupirai faiblement et l'écoutai parler.. Elle était triste, je l'entendais à sa voix.


"Et toi ?"


Un frisson parcouru ma colonne vertébrale.


"Je n'en sais rien. Je suis ici depuis mes deux ans. Je crois que mes parents ont morts."



"Tu n'aimais pas parler de ça.. Mais d'un côté, tu me disais que ça te rassurait de savoir que tu n'étais pas la seule à vivre ce genre de choses. Je ne voulais pas t'en parler. Je ne voulais pas te voir triste. Un peu après l'incident, j'avais essayé de t'appeler, mais tu ne répondais toujours pas. J'étais tellement détruit, tellement seul. Les autres essayaient de comprendre, ils ne peuvent pas. Ils ne peuvent pas me comprendre. Ils ne peuvent pas savoir à quel point tu comptais pour moi. Ils ne peuvent pas savoir à quel point je souffre, là maintenant. Mais j'ai besoin de tout remettre dans l'ordre. Je dois le faire. Je veux que tu vois comment moi, j'ai vécu cette histoire, et comme j'ai souffert de ton malheur. Alors on va tout reprendre du début."




"On passe une moitié de sa vie à attendre ceux qu'on aimera et l'autre moitié à quitter ceux qu'on aime." - Victor Hugo.


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