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Les mains dans les poches de sa veste, la tête enfoncée dans son écharpe, Minho marchait lentement dans le parc. Il gardait la tête basse, observant les ombres que faisait son corps au fur et à mesure qu'il longeait les lampadaires. Mis à part le bruit que faisaient ses chaussures lorsqu'elles s'enfonçaient dans la fine couche de neige allongée sur le sol, et les vrombissements des voitures au loin, le parc était plongé dans le silence de la nuit.

Minho soupira. Il avait un peu froid mais ça allait. Il était seul, libre, au calme et dans l'obscurité. Personne n'était là, à s'affairer autour de lui, à lui donner des migraines et à le contrôler. Ça allait.

Pour une fois depuis un bon bout de temps, Minho se sentait bien.

Un mince sourire s'étira sur ses lèvres alors qu'il relevait la tête de son écharpe pour la première fois depuis qu'il avait mis les pieds à l'extérieur. Minho ferma les yeux et rejeta sa tête en arrière en prenant une grande inspiration. L'air froid s'engouffra dans ses poumons, le faisant légèrement frissonner, avant qu'il ne soupire longuement, relâchant son souffle chaud.

Il secoua ses cheveux châtains pour y voir plus clair entre ses mèches et baissa à nouveau la tête, renfonçant son nez gelé dans son écharpe et accélérant le pas. De loin, on aurait pu le prendre pour un simple petit étudiant étant resté tard à son job ou à la biblibothèque et qui souhaitait juste rentrer le plus vite possible chez lui. Il aurait aimé vivre une telle vie.

Minho marchait vite mais prenait le temps de profiter de chaque secondes passées dans ce parc. On aurait presque put dire qu'il flottait entre les bancs, au milieu des allées de graviers. Les ombres données par les lampadaires le faisaient grandir puis rétrécir, lui donnaient parfois une deuxième ombre. Et Minho s'en amusait, tel l'enfant qu'il était.

Puis soudainement, le jeune homme se stoppa, fronçant les sourcils. A quelques mètres devant lui, une frêle silhouette était allongée sur un banc dont le dossier était recouvert d'une fine couche de neige. Minho pouvait apercevoir que l'une de ses jambes était relevée et que son bras droit pendait dans le vide. De la fumée s'échappait d'entrée ses lèvres, venant se perdre dans la fraîcheur hivernale, alors que de temps en temps, son bras droit se relevait et qu'une nouvelle vague de fumée blanche était soufflée.

Minho reprit sa marche, beaucoup moins rapide, et s'approcha de ce corps à semi-immobile, comme un petit animal curieux. Le garçon s'arrêta à seulement quelques pas du banc où ce trouvait cet inconnu. L'odeur de cigarette vint emplir les narines du jeune homme alors que l'inconnu ne semblait pas l'avoir remarqué, continuant de fumer sa cigarette, les yeux grands ouverts et dirigés vers le ciel sombre.

Minho plissa les yeux, essayant de distinguer plus en détails les traits de ce garçon, en vain : le banc était situé loin des lampadaires. Le garçon pouvait seulement apercevoir des cheveux ─ peut-être ─ bruns tomber sur son visage, des joues rebondies et il portait un simple pull, sûrement peu épais. Et pourtant, le garçon semblait être bien. Minho se demanda comment pouvait-il ne pas avoir froid...

L'inconnu ne semblait toujours pas avoir remarqué la présence du chatain, ses yeux semblait observer avec émerveillement le ciel. Alors Minho leva les yeux, curieux de savoir ce qui pouvait tant intéresser ce garçon là-haut. Le ciel était noir, sans lune et seules quelques petites étoiles étaient parsemées par-ci, par-là. Le garçon releva un sourcil, ne comprenant vraiment pas ce qui pouvait être si intéressant dans cette obscurité hivernale.

Et sans s'en rendre compte, les yeux toujours rivés sur le ciel, Minho murmura tout bas :

Qu'est-ce que tu regardes ?

Un léger mouvement se fit entendre plus bas et le châtain baissa sa tête. L'inconnu avait quitté le ciel des yeux, ceci étant posés sur Minho. Seule sa tête avait bougé, sa main continuant d'alterner entre le vide et ses lèvres alors que son visage avait adopté une expression surprise.

Malgré le peu de lumière présente, leurs regards se rencontraient dans le silence et Minho sentit alors ses joues chauffer. C'était bien la première fois qu'il abordait de cette manière un inconnu...

Le châtain baissa alors les yeux, enfonçant un peu plus son nez dans son écharpe, se sentant alors honteux d'avoir dérangé ce garçon. Ce dernier continuait de fixer Minho, ayant jeté entre-temps sa cigarette terminée.

Les étoiles.

Douce et murmurée. Minho releva lentement les yeux, clignant plusieurs fois des paupières alors qu'il pouvait constater qu'un tout petit sourire avait pris place sur les lèvres du brunet.

Les étoiles ? Répéta alors timidement le châtain, les sourcils légèrement froncés. Mais... Y'en a presque pas et elles brillent pas beaucoup celles-là.

Enfantin, ce fut le premier mot qui vint à l'esprit du garçon lorsqu'il entendit de nouveau la voix de Minho. Il reposa ses yeux sur le ciel en lâchant un discret petit soupir.

C'est pas parce qu'elles sont différentes qu'elles n'ont pas leur importance là-haut... Et puis, je trouve que celles-là sont plus jolies que celles qui pètent le feu, murmura-t-il alors que le châtain l'observait, intrigué.

Minho se retrouva impressionné par la mentalité de ce garçon. Il semblait être ce genre de personnes rares, qui prennent en considération chaque petite choses aussi insignifiantes soient-elles, pour les rendre importantes, spéciales...

Est ce que... Est ce que c'est comme les gens ? Demanda alors Minho en frissonnant.

Peut-être...

Le châtain ferma fortement les yeux. Cet inconnu devait être quelqu'un de bienveillant et Minho se surprit à se dire que les personnes l'ayant dans leur entourage avaient bien de la chance... Avoir quelqu'un à ses côtés qui pouvait le voir d'une manière complètement différente par rapport aux autres, qui pouvait le voir comme il était réellement. Minho en aurait bien besoin d'une personne pareille...

Le jeune homme releva les yeux vers le ciel, entrouvrant légèrement ses lèvres. Il plissa quelque peu ses paupières afin de mieux les voir, ces jolies étoiles. Et Minho se rendit compte que l'inconnu avait raison... Tout d'un coup, ces quelques tout petits points brillants à peine, semblaient éclairer entièrement le ciel.

Les yeux de Minho s'éclairèrent comme ceux d'un enfant devant une montagne de cadeaux. Enfantin, c'était ce qu'il était... Ses lèvres s'étirèrent en un petit sourire alors qu'il baissait de nouveau la tête vers le brun. Ce dernier avait quitté son ciel des yeux pour les poser encore une fois sur Minho. Le châtain balada brièvement son regard sur le corps allongé du brun, se retenant de grimacer en le voyant si peu couvert en ce début de janvier. Le garçon ne semblait pas avoir froid mais Minho frissonnait rien qu'à le voir si peu protéger du froid...

Tu... Tu n'as pas froid ? Demanda-t-il en hésitant.

Le brun sembla lâcher un petit rire. Enfin... Ses lèvres s'étaient juste entrouvertes en un sourire et ce qui devait être un gloussement muet avait semblé passer la barrière de ses lippes.

Je vais bien, t'en fais pas, répondit-il simplement.

Là n'était pas la question... En y regardant bien, on aurait pu voir ses membres trembler légèrement sous la fine couche de vêtements qu'il portait. Et la neige, posée sur le dossier du banc, qui lui tombait parfois dessus en fonction de ses mouvements n'arrangeait rien.

Minho ne savait pas si il avait une veste, si il avait fait exprès de ne pas la mettre, si il l'avait oublié ou si il n'en avait juste pas. Mais il savait que, malgré l'apparence que cet inconnu essayait de se donner à l'instant, il avait froid.

Tu es sûr ?

Il n'avait pu s'en empêcher... Mais le brun secoua sa tête, un petit sourire toujours présent sur ses lèvres.

J'ai pas froid.

Mensonges. Ce fut ce à quoi Minho pensa suite à sa réponse. Oh et puis, ils ne se connaissaient pas. Pourquoi devait-il s'inquiéter de la santé de ce garçon ?

Le châtain soupira et sortit son téléphone de sa poche pour regarder l'heure. Et il constata qu'en plus du froid qui mordait ses doigts et l'heure tardive, il avait une dizaine d'appels manqués et une bonne douzaine de messages en attente. Minho fronça les sourcils et rangea l'objet dans la poche arrière de son jean. Ce qu'il aurait voulu rester plus longtemps à l'extérieur, à l'air libre.

Et lorsqu'il releva le regard, il croisa celui de l'inconnu qui, lui, ne l'avait pas quitté des yeux. Avec son bras gauche qui soutenait sa tête, sa main droite posée sur son ventre plat, sa jambe droite relevée et son pied gauche s'agitant au rythme du silence, le brun ressemblait à ce genre de personne sûre d'elles.

Minho se mordit la lèvre inférieure. Il devait rentrer chez lui mais il ne voulait pas vraiment laisser cet inconnu. Il voulait rester ici à observer les étoiles. Et il avait peur parce qu'il ne savait pas pourquoi il ressentait ça à cet instant... Les mains du châtain quittèrent le nid chaud des poches de sa veste, et se refermèrent sur la fermeture éclair. Minho la descendit jusqu'en bas, laissant le froid s'engouffrer dessous, caresser sa peau à travers son pull et mordre les morceaux de peau dévoilés à l'extérieur.

Le jeune homme retira le vêtement en prenant sur lui, frisonnant légèrement avant de poser délicatement la veste sur le corps du brun. Celui-ci n'eut pas le temps de se redresser pour lui demander ce qu'il faisait, que Minho lui avait souris et avait quitté le parc à grands pas, son nez toujours enfoncé dans son écharpe et ses mains réchauffées avec difficulté par les poches de son pantalon.


***



Minho s'arrêta devant sa maison, soupirant, et s'empressa de gravir les marches du perron. Il n'eut à peine le temps d'arriver devant la porte d'entrée que celle-ci s'ouvrit brusquement. Le jeune homme se figea et releva légèrement la tête de son écharpe en ouvrant grand ses yeux alors que sa mère se précipitait sur lui. La femme frissonna et leva ses mains en direction de son fils, l'attrapant par les joues pour le ramener contre elle. Minho se laissa faire, gardant ses mains dans ses poches alors qu'il soupirait à la vue de l'expression mécontente qu'arborait son père.

Bon Dieu Minho, mais où étais tu ?! Est ce que tu connais le principe d'un téléphone ?! Tu...

Tu ne vois pas qu'il est frigorifié et mal en point ? Coupa la mère du jeune homme en lançant un regard noir à son mari.

Minho n'eut le temps de dire quoique ce soit, que sa mère l'entraîna à l'intérieur, ordonnant à l'homme de bien fermer la porte. Le châtain soupira lorsque la chaleur de sa maison enveloppa son faible corps, le réchauffant et le faisant éternuer par la même occasion. Ses parents se figèrent à l'entente du petit bruit et se retournèrent lentement vers leur fils, une expression inquiète et scandalisée sur le visage.

Où est ta veste ? Demanda son père. Ne me dis pas que tu es partis sans !

Pourquoi es-tu allé dehors mon chéri ? Fit sa mère en s'approchant de lui. Il fait un froid de canard dehors...

─ Là n'est pas la question. Il est sortit alors qu'il sait qu'il n'en a pas le droit et sans être habillé en plus !

─ Je vais bien, dit alors Minho dans un murmure inaudible.

Sa phrase fut automatiquement balayée par le brouhaha du début de dispute de ses parents. Le châtain soupira et tourna les talons pour monter dans sa chambre d'un pas lent, ses parents étant trop occupés à se crier mutuellement dessus pour lui faire la moindre remarque.

Minho claqua la porte derrière lui et traîna des pieds jusqu'à son lit où il se laissa tomber dessus en position étoile de mer. Il se tourna sur le dos et retira son écharpe avant de la balancer sur le sol. Il ferma les yeux quand les cris de ses parents, à son sujet, traversèrent le bois de sa porte pour arriver jusqu'à ses oreilles. Foutue baraque, pensa-t-il.

Minho attrapa un oreiller au-dessus de sa tête et le serra contre son torse alors que son regard se posait sur le plafond noir de sa chambre. Et pour la première fois depuis neuf ans, Minho le trouva bien sombre, ce plafond. Trop sombre.

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