1 - Chapitre 5
O'Neill était enfermé dans une sorte de cage, d'environ trois mètres de côté, au milieu d'une pièce bien plus vaste dont l'utilité s'était perdue quand ses concepteurs avaient disparu de la planète. Sam Carter se trouvait dans une cellule similaire, à une dizaine de mètres de lui. Teal'c et Harlock n'étaient pas retenus avec eux.
« J'espère que le gamin s'en tire bien », pensa le colonel. Il avait pu l'apercevoir brièvement lorsque deux Jaffas lui avaient fait traverser la pièce, mais le jeune homme n'avait montré aucun signe qui aurait pu laisser penser qu'il l'avait reconnu. Il avait l'air plus mort que vif, ils venaient probablement de le sortir du sarcophage.
Il n'avait aucune nouvelle de Teal'c.
O'Neill tenta une nouvelle fois d'engager la conversation avec le Jaffa posté entre les deux cellules, plus pour passer le temps que dans l'espoir d'obtenir un résultat quelconque. Il préférait ne pas trop penser à ce qui l'attendrait quand Ba'al l'enverrait chercher. Sa première entrevue avec lui s'était plutôt bien déroulée, comparé à ce qu'il avait dû subir lorsque, sous l'emprise d'un symbiote Tok'ra, il s'était jeté tête baissée dans une opération de sauvetage hasardeuse.
Il n'était pas prêt d'oublier les tortures raffinées de Ba'al.
Il était cependant étonné que le Goa'uld ne se soit pas davantage acharné. Ba'al n'était pas du genre à perdre du temps, ni à sous-estimer les humains. Il devait savoir que les laisser croupir en cellule n'aurait pas d'effet psychologique notable – enfin, pas tout de suite. Et par conséquent, il aurait déjà dû leur faire subir un interrogatoire plus poussé.
Le Jaffa ne bronchait pas. O'Neill essaya une nouvelle approche. Après tout, le dialogue était une méthode qui pouvait marcher. Teal'c en était la preuve vivante.
Enfin, vivante... Il faudrait d'abord que le colonel s'assure que son ami n'avait pas été exécuté pour l'exemple en tant que shol'va. Les Goa'ulds n'appréciaient guère la trahison de Teal'c, d'autant plus que les actions qu'il avait menées au sein du SG-C avaient pour beaucoup contribué au renforcement des rangs des rebelles jaffas.
O'Neill finit une tirade sur les avantages de la liberté, et les perspectives qui s'offriraient aux Jaffas une fois qu'ils se seraient affranchis des Goa'ulds, puis il guetta les réactions du garde.
Rien.
Zut. Il obtiendrait probablement autant de résultats à lui parler de base-ball. ... Tiens, ça, c'était une idée.
Le colonel ne put toutefois jamais commencer son monologue sur l'ouverture de la saison sportive de base-ball. Une escouade de Jaffas entra dans la pièce et se mit au garde-à-vous, laissant le passage à un Jaffa de rang supérieur : le primat de Ba'al.
— Le seigneur Ba'al requiert votre présence, annonça-t-il.
Carter et lui furent tirés hors de leur cellule et conduits jusqu'à une pièce construite toute en longueur, aux plafonds élevés et aux airs de nef gothique, qui avait visiblement été transformée par Ba'al en salle d'audience.
Le seigneur des lieux les attendait à l'autre bout de la pièce, nonchalamment assis sur un trône sculpté, de manufacture différente du bâtiment. Un ouvrage goa'uld, que Ba'al avait dû prendre sur son propre vaisseau.
— Colonel O'Neill ! fit Ba'al alors que les prisonniers n'étaient plus qu'à une dizaine de mètres de lui. Quelle joie de vous revoir ! Prenez place...
Deux sièges avaient été installés à proximité d'une table basse sur laquelle étaient disposés des plateaux de fruits et d'autres mets non identifiables. Carter interrogea le colonel du regard. Celui-ci répondit d'un haussement de sourcil avant de s'asseoir. Le major l'imita après une courte hésitation. O'Neill ignorait où voulait en venir le Goa'uld, mais autant profiter de chaque instant qui le séparait d'une prochaine séance d'interrogation particularisée telle que les affectionnait Ba'al.
Il évita néanmoins de toucher à la nourriture.
— Servez-vous, lui dit Ba'al, qui avait intercepté l'expression dubitative du colonel lorsqu'il avait regardé les plateaux.
Le colonel saisit un fruit qui ressemblait vaguement à une orange.
— N'ayez aucune crainte, ce n'est pas empoisonné, précisa Ba'al.
— Oh. Et vous vous imaginez peut-être qu'en nous invitant à une petite collation informelle, nous serions plus disposés à discuter avec vous ? ironisa O'Neill.
— Pas du tout, rassurez-vous. Mais je tenais à vous informer de votre sort...
— Je pense que je peux le deviner tout seul, interrompit O'Neill. Voyons... Vous voulez savoir ce que nous faisions sur cette planète, et accessoirement, vous voulez des informations sur le SG-C. Et vous ne reculerez devant aucun moyen pour les obtenir. C'est toujours la même chose, vous savez. Je commence à avoir l'habitude.
Ba'al le considéra avec un sourire suffisant. O'Neill tritura nerveusement son orange. Il y avait quelque chose d'autre. Ba'al ne se serait pas amusé à les amener ici sans raison.
— Non, je crois que je ne vais pas avoir besoin de vous pour ça, répondit Ba'al d'un ton faussement désinvolte. Votre ami du futur m'a déjà fourni des informations bien plus intéressantes que tout ce que vous pourriez me dire, j'en ai peur.
Quoi ?
— Par conséquent, et à mon grand regret, continua le Goa'uld, je ne pourrais m'occuper de vous avant un certain temps, aussi je vous demanderai d'être patient. J'ai à traiter d'affaires importantes sur cette planète qui ne souffriront d'aucun retard... Mais je ne dois rien vous apprendre, n'est-ce pas ?
— Justement, si, rétorqua O'Neill. Vous ne pouvez pas nous en dire plus sur ce que vous faites ici ?
— Il me semble, fit calmement Ba'al, que ce n'est pas à vous de poser les questions, colonel. C'est un travers qu'il vous faudra corriger...
— C'était juste pour faire la conversation, répondit le colonel. Puisque apparemment c'est le but de notre présence à cette table.
Et surtout, O'Neill espérait qu'en faisant traîner l'entretien, Ba'al, avec l'orgueil démesuré qui caractérisait tous les Goa'ulds, finirait par lui donner quelques explications.
Il essaya de communiquer mentalement à Carter de poursuivre le dialogue, mais celle-ci s'était murée dans le silence. Il n'avait pu lui arracher que quelques phrases depuis que les Jaffas l'avaient conduite chez Ba'al, peu après lui. Il ne pouvait pas lui en vouloir. Il était bien placé pour savoir les traitements que Ba'al infligeait aux prisonniers.
Le colonel songea avec inquiétude à Harlock. Le gamin ne lui avait pas révélé grand-chose sur lui (même s'il donnait toujours l'impression d'en savoir beaucoup plus qu'il ne voulait bien en dire). Mais, vu la façon dont Ba'al avait parlé de lui avec cet air satisfait, le Goa'uld devait de son côté avoir obtenu davantage.
O'Neill n'osait imaginer ce que Ba'al avait utilisé pour obtenir de tels résultats.
—————
— Activation non conforme de la porte des étoiles !
La zone 51 se mit en alerte. Kei ouvrit la fréquence qui lui permettait de contacter l'Arcadia. Elle avait apprécié la volonté évidente de coopérer des Terriens du SG-C. Malgré l'heure tardive, tout le personnel était encore à poste. Daniel était lui aussi resté près du système de contrôle quasiment toute la journée. Il n'avait voulu manquer ça sous aucun prétexte.
— Vos amis ont tardé, dit-il à Kei. Cela fait presque dix heures que nous les avons contactés.
— Vous oubliez qu'il s'agit d'un voyage temporel, répondit-elle. Il n'y a peut-être aucun lien entre le temps qui s'écoule maintenant et celui qui se passe pour eux.
Le général se rapprocha d'eux.
— Dès que vous serez en liaison, mademoiselle, déclara-t-il, annoncez-leur la situation de ce côté de la porte. Nous l'avons déplacée pour éviter des dégâts à Cheyenne Mountain, mais il y a quand même de nombreux bâtiments sensibles ici que je ne voudrais pas voir détruits... Et dites-leur de ne pas endommager la porte plus qu'elle ne l'est déjà !
Kei sourit sans répondre. Évidemment, la coopération pressée qu'elle avait constatée avait une bonne raison d'exister. En l'occurrence, le seul moyen de voyager dans l'espace pour les équipes commandées par le général était de franchir cette porte des étoiles, laquelle était actuellement hors service, et elle leur offrait sur un plateau un vaisseau et l'ingénieur qui allait avec.
Elle ne doutait pas une seule seconde que Tochiro réparerait tous les dommages en deux temps trois mouvements. En revanche, elle se demandait si le capitaine apprécierait de voir son vaisseau aux mains de militaires réguliers. Même au vingt-et-unième siècle. Ce qui était certain, et qu'elle appréhendait de plus en plus au fur et à mesure que l'arrivée de l'Arcadia se faisait plus évidente, c'était que l'arrivée d'un vaisseau pirate au beau milieu d'une base militaire risquait de provoquer une belle pagaille.
Il allait lui falloir un argumentaire convaincant et rapide pour éviter que la situation dégénère.
—————
— Nous recevons le signal de Kei !
— Préparez-vous pour la fin du saut !
Les doigts de Tochiro volèrent une nouvelle fois sur le clavier de commande.
— Professeur ! Kei nous transmet de prendre garde aux bâtiments qui sont autour de la sortie, et de tout faire pour ne pas endommager la porte !
— Des bâtiments ? Tu veux dire que tu vas tenter une dématérialisation warp en atmosphère ? demanda la femme qui se trouvait derrière lui.
— Je ne peux pas faire autrement, répliqua-t-il. Je compte sur toi pour minimiser les dégâts à l'atterrissage.
— Je crains fort de ne pas avoir le talent du capitaine légitime pour transformer un crash annoncé en un atterrissage de routine, répondit-elle.
La femme se positionna au centre de la passerelle, les bras croisés. Tochiro nota avec un sourire qu'elle ne s'était encore jamais assise dans le fauteuil de commandement depuis qu'elle était arrivée à bord.
— Séquence de sortie validée, annonça-t-il.
Il se retourna vers la femme. Elle fixait l'écran central d'un air de défi.
— Emeraldas...
— Oui ?
— Tout se passera bien...
Il avait réussi à contourner toutes les sécurités du vaisseau et de la porte de sortie. Une faille apparut dans la dimension warp. D'abord vacillante, elle grandit et atteignit bientôt une taille suffisante.
L'Arcadia s'engouffra dans la brèche.
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O'Neill essayait à présent de discuter avec le primat de Ba'al. Carter et lui avaient quitté le bâtiment dans lequel Ba'al s'était installé, et étaient escortés à travers les ruines par les mêmes Jaffas qui étaient venus les chercher en cellule. Ils se dirigeaient vers le vaisseau-mère, pour l'instant encore partiellement caché par la végétation.
Tout en monologuant sans grande conviction, le colonel regardait discrètement alentours, à l'affût de la moindre échappatoire. Ils n'auraient plus jamais une aussi belle occasion de fausser compagnie à leur escorte. Une fois à l'intérieur du ha'tak, les chances de s'enfuir seraient quasiment réduites à zéro. On ne pouvait pas quitter clandestinement un vaisseau goa'uld sans bénéficier d'une aide extérieure – et les probabilités d'une telle aide étaient quasi nulles.
— Silence ! ordonna le primat. Rien de ce que vous pourrez me dire ne m'incitera à trahir mon seigneur. Je n'apporterai pas la honte dans ma famille en devenant un shol'va !
— Vous ne vous êtes jamais demandé si votre famille ne serait pas plutôt fière de vous savoir en train de combattre pour leur liberté ? contre-attaqua O'Neill.
Le Jaffa resta silencieux.
Il s'est posé la question. Je tiens peut-être un rebelle potentiel. Il s'agit de faire preuve de doigté.
— Je peux quand même savoir votre nom ? reprit O'Neill.
Le Jaffa hésita un long moment, fixant le colonel d'un air soupçonneux. O'Neill pouvait presque suivre le fil de ses pensées : n'importe quelle concession que le primat ferait pouvait être interprétée comme un signe de faiblesse par ses hommes. En outre, le colonel ne pensait pas que Ba'al soit très tolérant à ce sujet.
— Je suis Mel'tek, finit par déclarer le Jaffa. J'ai l'honneur suprême d'être le primat de notre seigneur Ba'al, et je le servirai loyalement jusqu'à ma mort.
Mmm... Trop pompeux pour être honnête.
O'Neill n'insista pas davantage. Il attendrait d'être seul avec le Jaffa pour continuer son opération de persuasion. Mais Mel'tek semblait s'être décidé à engager la conversation.
— Vous allez être conduits en cellule de haute sécurité, continua-t-il. Le seigneur Ba'al s'occupera de votre sort plus tard... Lorsqu'il lui viendra l'envie de se distraire, j'imagine.
— Charmant programme, ironisa O'Neill. Enfin... Après tout ce que les Tauris lui ont fait, je ne pensais pas qu'il nous ferait l'affront de nous snober.
— Le seigneur Ba'al a d'autres occupations plus importantes.
— Tiens donc...
Le Jaffa le regarda à nouveau. Il eut l'air de peser le pour et le contre, puis fit un geste impatient, comme pour balayer les objections.
— J'ignore ce qu'il recherche sur cette planète. Il doit s'agir d'un objet de grande valeur, ou d'une arme très puissante.
Nous y voilà.
— Ba'al nous a ordonné de fouiller les ruines minutieusement et de lui rapporter toute découverte intéressante – artefacts, textes, et toutes les salles que nous dégagerions, poursuivit Mel'tek.
O'Neill nota que le primat avait laissé tomber le titre honorifique de son dieu. Un bon point pour lui. Carter semblait l'avoir remarqué également, car elle s'immisça dans la conversation.
— Vous avez trouvé quelque chose dans d'autres bâtiments que ceux à proximité de la porte ?
— Rien qui n'ait pu satisfaire notre maître, répondit Mel'tek.
Les autres Jaffas commençaient à considérer l'échange d'un drôle d'air. Mel'tek le remarqua et se renfrogna. Il allongea le pas pour gagner la tête du petit détachement, coupant court à toute autre question.
—————
— Surcharge du système de propulsion ! La salle des machines reporte qu'elle ne tiendra plus très longtemps à ce rythme !
— Encore quelques secondes ! cria Tochiro en retour. Nous sommes presque passés !
Le vaisseau pirate craquait de toutes parts. La passerelle était saturée de sonneries d'alarmes qui se déclenchaient successivement, au fur et à mesure que les instruments lâchaient. Les vagues d'énergie étaient telles qu'elles se matérialisaient sous forme visible, libérant au passage quelques décharges électriques dans les appareils de navigation.
— Rematérialisation en cours ! annonça Mimee. Nous aurons les mêmes paramètres de route et de vitesse qu'en entrée de saut !
C'est-à-dire beaucoup trop élevés pour une navigation en atmosphère. La trame interdimensionnelle se déchirait, laissant apparaître le ciel bleu de la Terre.
— Emeraldas ! cria Tochiro.
Celle-ci était arc-boutée sur la barre.
— Le gouvernail ne répond plus ! répondit-elle. Je ne contrôle plus rien !
Lentement, l'Arcadia émergea dans l'espace réel. Le vaisseau parut hésiter sur la conduite à tenir, encore retenu d'un côté dans la dimension warp tandis que son avant était en train de réacquérir l'énergie cinétique qu'il possédait au départ.
Les structures de la coque gémirent.
— Freinage d'urgence ! ordonna Emeraldas. Machines arrière toute ! Enclenchez les rétrofusées, puissance maximale !
Le vaisseau finit de se matérialiser. Enfin libéré, il accéléra d'un coup, mouvement aussitôt contré par les rétrofusées et le coup de barre énergique d'Emeraldas. L'Arcadia amorça un début de trajectoire plus ou moins parabolique qui le propulsa quelques centaines de mètres en hauteur, puis la courbe s'infléchit et le vaisseau retomba selon un angle qui ne lui laissait aucune chance d'effectuer un atterrissage sans dommages.
Le terrain était désertique et semblait dégagé.
L'Arcadia se mit en vrille. L'image de l'écran central, brouillée, se mit à tournoyer. Tochiro sentit son estomac protester. Les amortisseurs inertiels peinaient à compenser le mouvement.
— Les moteurs principaux viennent de nous lâcher ! diffusa le chef machine par l'interphone.
— Passez sur auxiliaires ! Nous avons encore trop de vitesse, il faut maintenir les rétrofusées à tout prix !
... Sinon, c'était l'explosion assurée lorsqu'ils arriveraient au sol.
Emeraldas luttait avec les commandes pour reprendre le contrôle du vaisseau. Le sol se rapprochait à toute vitesse.
— Redresse-toi !
Très doucement, presque à contrecœur, l'Arcadia releva le nez. Le sifflement des rétrofusées envahit la passerelle, se superposant aux alarmes. Deux explosions successives secouèrent l'équipage. Les rétrofusées rendaient l'âme à leur tour.
Le vaisseau toucha lourdement le sol, pulvérisa les rochers et arbustes qui se trouvaient sur son chemin sur près de cinq kilomètres avant de s'immobiliser définitivement dans un nuage de poussière.
—————
Lorsque la poussière commença à retomber et que le personnel autour de lui se décida à bouger, l'air hébété, Daniel prit le temps d'ôter ses lunettes et de les nettoyer minutieusement avant d'entreprendre quoi que ce soit.
Il n'en croyait toujours pas ses yeux.
Peu après la transmission de Kei, le vortex s'était... emballé. Ils avaient tous gagné une position d'observation plus abritée, dans l'attente de l'arrivée du vaisseau.
Daniel devait bien s'avouer qu'il ne s'attendait pas à ça. Lorsque Kei, et Harlock avant elle, avaient parlé de vaisseau, puis qu'il avait été question de le faire venir par la porte des étoiles, Daniel s'était imaginé un petit appareil. Quelque chose qui devait être plus ou moins de la même taille que la porte.
Il n'était pas certain de ce qu'il avait vu. Mais c'était... bien trop gros pour transiter par une porte des étoiles. Ça lui avait même paru bien trop gros pour atterrir au beau milieu de la zone 51.
Ses oreilles bourdonnaient. Kei le regardait avec inquiétude.
— Est-ce que ça va ? lui demanda-t-elle.
Il secoua la tête pour acquiescer, toujours bouche bée. Il y avait la porte, qui se dressait au milieu d'un cercle de sable vitrifié et dont le métal était encore rouge (Daniel aurait juré qu'il s'était déformé sous l'effet de la chaleur). Il y avait un hangar – heureusement vide – qui avait été soufflé au passage du vaisseau. Il y avait une immense tranchée qui se dévoilait peu à peu, au fur et à mesure que le nuage de poussière se déposait sur le sol.
Et il y avait cette haute forme sombre, dont les contours étaient encore diffus, immobile.
Bien trop gros...
La base était étonnamment calme. Ç'aurait dû être le contraire.
— Docteur Jackson !
Le général Hammond émergea du brouillard, suivi de près par le commandant Fields.
— La jeep nous attend, annonça-t-il sans préavis. Allons accueillir nos visiteurs.
Daniel aida Kei à monter dans le véhicule. La jeep démarra en trombe, escortée de part et d'autre par des véhicules similaires.
— C'est... votre vaisseau ? demanda Fields alors qu'ils se rapprochaient.
Le rideau de poussière se déchirait peu à peu. La silhouette échouée prenait de la consistance. C'était... menaçant.
Mais c'était également étrangement familier.
Où ai-je déjà vu ça ?
Daniel plissa les yeux pour essayer de distinguer plus clairement à travers les grains de sable qui volaient.
— Euh... Oui, répondit Kei à Fields. C'est l'Arcadia. Mais...
Elle hésitait.
— Mais quoi ? l'encouragea Daniel.
— Eh bien... Il faut que vous soyez au courant avant de rencontrer l'équipage... L'Arcadia n'appartient pas à... comment dire... à une force armée constituée. Nous...
La jeep freina net. Daniel s'aperçut que, sans aucune transition, ils étaient sortis du nuage. Le vaisseau était maintenant parfaitement visible. Et, si jamais il avait eu le moindre doute à ce sujet, il ne pouvait qu'admettre qu'il s'agissait d'une création terrienne.
— C'est pas croyable... lâcha le conducteur.
Le vaisseau devait bien faire dans les quatre cents mètres de long. Il s'était enfoncé d'une dizaine de mètres dans le sol, et s'était immobilisé avec une gîte de quarante-cinq degrés. Ses deux réacteurs laissaient encore échapper des panaches de fumées. Daniel pouvait entendre le sifflement des systèmes de refroidissement qui tournaient à plein régime.
— Apparemment, votre ami et vous avez omis de nous faire part de certaines informations au sujet de vos activités spatiales, déclara Hammond.
Devant eux se dressait la poupe de l'Arcadia. Anachronique. Un morceau d'histoire sur un vaisseau bardé d'antennes et de radars. Et équipé de canons impressionnants.
Kei haussa les épaules et eut un sourire mi-amusé, mi-contrit.
Ils étaient face au château arrière d'un galion du dix-huitième siècle.
Mais surtout, ils contemplaient le pavillon.
Daniel devait se demander plus tard quel était l'intérêt d'arborer un pavillon sur un vaisseau spatial. Puis comment diable un drapeau pouvait-il bien flotter dans le vide interstellaire. Cependant, pour le moment, il était bien loin de ces considérations.
Le pavillon avait souffert, mais ce qu'il représentait était encore tout à fait reconnaissable.
— Des pirates...
—————
— Rapport des dégâts !
Tochiro se redressa avec précaution. Ils étaient encore entiers. En revanche, s'il en croyait son écran de contrôle, l'Arcadia était en piteux état.
— Rupture de la coque dans les tranches Alpha, Foxtrot, India et Lima, énonça Mimee. Le chef machine signale des fuites de combustibles importantes au niveau du réacteur numéro deux. Il a fait évacuer le compartiment. Les autres secteurs reportent des dégâts sérieux au niveau des consoles de contrôle... Les composants internes ont grillé.
— Les boucliers sont à zéro. Tout le système de défense est hors service et nous avons perdu les conduites de tir des trois tourelles, continua Sabu. Le système de pointage automatique est mort, et le mécanisme de la tourelle trois est faussé... Les gars disent que la cloison s'est enfoncée d'un bon mètre.
— Des blessés ? demanda Emeraldas.
— Seulement des brûlures légères en machine et quelques contusions.
— Estimation du potentiel global en cours de calcul... Quatorze pour cent... On s'en tire bien, soupira Tochiro.
Malgré tout, il espérait que la fuite provenait des tubes d'alimentation et non du réacteur lui-même. Il ignorait s'il pourrait réparer un réacteur fissuré en dehors d'un dock spatial. Et ce ne serait pas au vingt-et-unième siècle qu'il pourrait trouver les infrastructures adéquates.
—————
Ba'al passait en revue une rangée d'artefacts divers, qui avaient été alignés à l'extérieur du bloc de bâtiments dans lesquels ils avaient été découverts. Un monceau d'objets inutiles. Il n'y avait là que des fragments de tablettes illisibles, quelques pièces de vaisselle cabossées et sans aucune valeur, sans oublier ce qui ne lui paraissait n'être que des bouts de rochers.
Il ne cachait pas sa déception, ce qui avait pour effet de rendre les Jaffas chargés des fouilles plutôt nerveux.
Il passa sans un regard devant l'équipe figée dans un garde-à-vous impeccable. Il perdait un temps précieux. Tôt ou tard, Anubis s'intéresserait à lui, et se demanderait pourquoi il passait tant de temps sur cette planète. Il ne tenait pas à lui rendre de comptes, surtout pour lui faire part d'un échec.
— Syssend'har ! appela-t-il sans se retourner.
Il avait divisé l'équipe de fouille en plusieurs groupes, et comptait confier la direction de ceux-ci à certains de ses vassaux, des Goa'ulds. D'un côté, il serait assuré de l'efficacité du travail ici, mais de l'autre, il prenait le risque de fragiliser son territoire. Les vassaux maintenaient la permanence de la présence goa'uld. Ils entretenaient la crainte – et le culte – de sa personne parmi les populations des planètes qu'il avait conquises, supprimant toute velléité de rébellion.
Avec la montée en puissance de la Tauri et les idées de liberté qui se répandaient comme une traînée de poudre chez les Jaffas, demander à ses vassaux de s'absenter de leur planète était quasi suicidaire.
Il fallait absolument que ses recherches soient fructueuses.
— Je suis à vos ordres, seigneur Ba'al.
Syssend'har avait prêté serment d'allégeance très récemment. Ba'al profitait de l'activité en cours pour tester sa loyauté. Il souhaitait lui confier davantage de responsabilités.
Il avait un potentiel prometteur...
— Espères-tu me satisfaire avec ces... détritus ? demanda Ba'al.
Si l'attitude des Jaffas indiquait clairement qu'ils s'attendaient à des représailles sévères, leur chef resta totalement impassible.
— J'ai sélectionné les objets les plus intéressants, seigneur, répondit-il.
— Aucune de ces... choses ne présente le moindre intérêt à mes yeux, rétorqua Ba'al sèchement.
— Si vous le dites... Comme j'ignore ce que vous cherchez, j'en suis réduit à de simples suppositions...
Ba'al ne répondit pas immédiatement. Cette dernière remarque frisait l'insolence. En d'autres temps, il aurait fait exécuter son auteur sans hésitation.
Mais aujourd'hui, quelque chose le retenait.
Syssend'har le fixait sans mot dire. Il avait le regard pénétrant et, – Ba'al en prit brusquement conscience avec une certaine horreur – cela tendait à le mettre mal à l'aise.
— Tu seras informé en temps utile, déclara Ba'al. Pour l'instant, contente-toi d'obéir à mes ordres.
— Comme vous voudrez.
Le Goa'uld eut un demi-sourire, puis exécuta un semblant de garde-à-vous lorsque Ba'al quitta le site. Juste avant d'être hors de vue, Ba'al se retourna et jeta un dernier coup d'œil à l'équipe. Bon, cela risquait de ternir un peu son prestige divin, mais...
La plupart des Jaffas avaient disparu. Probablement étaient-ils rentrés dans l'un ou l'autre bâtiment qui n'avait pas encore été exploré. Deux d'entre eux poussaient un conteneur sur son coussin magnétique entre les objets épars et, sous la direction de Syssend'har, en sélectionnaient certains pour les placer à l'intérieur du coffre.
Ba'al fut saisi d'une sensation désagréable. Se pourrait-il qu'un élément important lui ait échappé ?
Comme averti par un sixième sens, Syssend'har regarda dans sa direction. Les deux Goa'ulds se défièrent du regard tandis que le coffre disparaissait à son tour dans un bâtiment, puis Ba'al eut un geste qu'il voulait désinvolte et reprit son chemin. Après tout, peut-être que toutes les découvertes étaient entreposées dans une pièce quelconque pour éviter d'encombrer les extérieurs...
Ne te raconte pas de mensonges. Pourquoi irait-il stocker certains objets en laissant les autres en plan ?
Il rumina la stratégie à adopter. L'éventualité d'une trahison le disputait à la tentation d'utiliser tout le potentiel de Syssend'har. Enfin, pour être franc, de son hôte humain.
Après un court débat avec lui-même, Ba'al parvint à une conclusion identique aux autres fois où il s'était posé la même question : le risque était acceptable.
Son monologue intérieur ne suffit pas à dissiper les incertitudes de Ba'al. Il n'arrivait toujours pas à savoir ce que pensait exactement Syssend'har. Ses vassaux étaient d'ordinaire tellement prévisibles. Arrivistes, certes, mais prévisibles. Lui... Eh bien, il donnait toujours l'impression d'en savoir plus qu'il ne le disait.
Il avait eu des difficultés avec son hôte, et probablement devait-il maintenir toute sa concentration pour maintenir le contrôle, mais lorsque Ba'al faisait le bilan des renseignements qu'il avait obtenus, il se retrouvait au final avec bien peu de choses. Des informations distillées au compte-gouttes, assez pour lui mettre l'eau à la bouche, mais trop peu pour qu'elles soient exploitables. Tout cela commençait à l'impatienter, bien que Syssend'har ait toujours de bonnes explications : son hôte résistait, il ne possédait pas les connaissances techniques... Balivernes ! De plus en plus, Ba'al avait l'impression que son vassal cherchait à gagner du temps. Tout dans son comportement laissait entendre à Ba'al qu'il possédait un atout sur lui. Il devait savoir de quoi il s'agissait.
Il enverrait sa garde personnelle surveiller de près l'équipe de fouilles de Syssend'har.
—————
Le chuintement de vérins martyrisés vint rompre le silence tendu qui s'était installé au sein des soldats en posture de défense tout autour du vaisseau pirate. Daniel jeta un coup d'œil à la dérobée à Kei. Elle était en plein argumentaire avec le général Hammond. Quant à Fields, il conversait avec animation dans son téléphone portable.
— Je vous répète que c'est inutile d'appeler d'autres renforts ! disait Kei. Je connais Tochiro et les autres membres de l'équipage, et je réponds d'eux personnellement !
— Comprenez tout de même qu'en voyant ceci, répondit le général en montrant le pavillon à tête de mort, nous prenions quelques précautions...
— Bon sang, nous n'avons rien contre vous !
— Enfin, votre ami a quand même blessé le colonel O'Neill, et je ne suis pas sûr qu'il nous fasse entièrement confiance, continua Hammond, sceptique.
— Oui, mais... hésita Kei. Le capitaine... Ce n'est pas pareil.
Daniel observait un panneau s'ouvrir lentement sur le ventre du vaisseau. Visiblement, le mécanisme d'ouverture devait être faussé d'un côté. Arrivé à mi-parcours, le panneau tenta un instant de se déployer de façon dissymétrique mais se bloqua dans un bruit de tôles froissées. Hmm. Il y avait du dégât.
C'était normal, in fine, quand on considérait la manière dont le vaisseau était parvenu jusqu'ici, et Daniel espérait sincèrement qu'il était toujours capable de faire le voyage dans l'autre sens.
— Laissez-moi leur parler, ajouta Kei. Tout ce que je veux, c'est que nous retournions tous sains et saufs à notre époque ! Je vous assure que vous n'avez pas besoin de tous ces soldats. La seule chose que vous risquez d'obtenir, c'est que la situation dégénère !
— Mes hommes sont parfaitement bien entraînés, intervint Fields. Ils ne tireront que si j'en donne l'ordre. Et de votre côté ?
— Ils... Je... C'est sûr, vous ne mettez pas toutes les chances de votre côté en pointant des armes sur eux dès qu'ils vont sortir ! s'emporta Kei.
— Vous reconnaissez donc que la probabilité de voir vos hommes commencer à parlementer après avoir ouvert le feu n'est pas nulle ?
— Non... Bien sûr que non !... Et ce ne sont pas mes hommes !
Kei faisait les cent pas devant le général et Fields, l'air soucieux. Elle croisa le regard de Daniel, qui lut dans ses yeux un appel au secours muet. Bah, il ne pouvait pas faire grand-chose. Il essaya de se montrer conciliant.
— C'est la procédure normale, lui expliqua-t-il. De simples mesures de protection...
Kei ne l'écoutait plus. Elle scrutait le panneau, les yeux écarquillés.
— Oh, non, fit-elle.
Daniel suivit son regard. Il y avait du mouvement à proximité du vaisseau. Daniel distinguait deux silhouettes en bas de la rampe. D'autres personnes étaient apparemment en train de tenter de décoincer le vérin récalcitrant.
— Dites à vos soldats de baisser leurs armes, ordonna Kei. Vite !
Le ton de sa voix avait changé. Daniel sourit. C'était le pirate en elle qui ressortait, apparemment.
— Tochiro ! appela-t-elle en agitant les bras. Par ici !
Une des silhouettes – la plus petite – lui répondit d'un grand signe enthousiaste de la main. L'autre se retourna lentement dans leur direction.
— Il faut que vous baissiez vos armes maintenant, insista Kei.
— C'est impossible, rétorqua Fields. Je n'ai aucune garantie... c'est la sécurité de mes hommes qui est en jeu.
Kei fixa intensément Fields, puis Hammond.
— Vous ne comprenez pas. Ça risque d'être pris comme une provocation...
— Je croyais que vous n'aviez rien contre nous ? demanda Daniel.
— Je ne connais que deux personnes qui aient tendance à être chatouilleuses de la gâchette, répondit Kei. La première est partie avec votre équipe pour réparer la porte des étoiles, et la deuxième n'est pas à bord de l'Arcadia en temps normal. Elle commande un autre vaisseau... mais elle est apparemment venue donner un coup de main pour le voyage temporel.
— Et donc, s'entêta Fields, cela prouve que les renforts sont nécessaires.
— Vous n'avez aucune chance, déclara Kei froidement. Pas contre elle.
— Elle ?
Les deux silhouettes s'approchaient. La petite était coiffée d'un grand sombrero troué, et vêtue d'un poncho informe de couleur indéfinissable. Il s'agissait d'un homme, presque un nabot aux yeux de Daniel. Il arborait un sourire épanoui et cria quelque chose d'incompréhensible à l'intention du groupe. L'autre avait les traits dissimulés par le capuchon de sa cape, mais sa démarche féline laissait par moment entrevoir des éclats métalliques.
— Je vous présente le professeur Tochiro Oyama, dit Kei en désignant le nabot. Il est ingénieur. C'est lui qui a conçu et construit l'Arcadia. Entre autres. Elle, c'est Emeraldas. Capitaine du Queen Emeraldas... C'est un autre vaisseau pirate, ajouta Kei après réflexion.
— Quoi, encore un ? s'exclama Fields.
Visiblement, son instinct de militaire supportait mal cette invasion flagrante de sa base par des hors-la-loi. Emeraldas se raidit. La tension entre les deux groupes devint presque palpable.
Effectivement, cette pirate semblait plutôt chatouilleuse de la gâchette. « Allez, je sens que ça va être à moi de faire tomber la pression », pensa Daniel. Il s'avança d'un pas, les mains bien en évidence.
... s'agirait pas de se faire descendre sur un réflexe malheureux.
— Je suis Daniel Jackson, annonça-t-il. Voici le général Hammond, commandant le SG-C, et le commandant Fields, qui dirige cette base... Nous... euh... vous souhaitons la bienvenue au vingt-et-unième siècle.
Le nabot et la femme échangèrent un regard perplexe. Kei se lança dans une explication dans sa propre langue.
— ... C'est de l'anglais, finit-elle en repassant à un dialecte plus compréhensible. Comme dans tes rapports techniques, Tochiro.
L'intéressé bougonna quelque chose d'inaudible, l'air vexé. La femme parut se détendre un peu. Elle ôta sa capuche d'un geste souple, libérant une cascade de cheveux roux. Lentement, elle dévisagea chaque personne présente. Les soldats, toujours en position de défense, mais chez lesquels on sentait maintenant une pointe d'hésitation, Fields, puis le général, et enfin Daniel.
Celui-ci se rendit compte qu'il avait la bouche ouverte, et fixait Emeraldas d'un air qui devait certainement être stupide depuis de trop longues secondes. Il essaya de sourire.
Des yeux bleus glacés dans un visage de rêve.
— Je suis Emeraldas, commandant par intérim l'Arcadia.
Elle fixa d'un regard appuyé les soldats, les armes toujours plus ou moins pointées sur elle.
— Je n'ai pas d'intentions hostiles... Pour l'instant.
Sur un signe du général, Fields cria un ordre bref au sous-officier le plus proche. Les soldats baissèrent leurs armes. Daniel se détendit, mais remarqua vite qu'il était bien le seul.
Hammond s'avança résolument.
— Vous n'avez rien à craindre de nous, madame. Notre objectif est d'établir, autant que faire se peut, des relations pacifiques avec les autres peuples de la galaxie... Et a fortiori, avec des voyageurs temporels tels que vous. Si vous voulez bien nous suivre, je vous propose de continuer cette discussion à la base.
L'ignorant superbement, Emeraldas se tourna vers Daniel.
— Où est Harlock ? demanda-t-elle.
Elle parlait avec précaution, comme si elle formulait mentalement chaque mot avant de le prononcer, mais n'avait presque pas d'accent. Daniel déglutit avec difficulté.
Euh... Au secours ?
— Nous avons eu des ennuis, répondit-il évasivement. Je pense que nous pourrons en discuter plus en détail à l'intérieur.
— Vraiment ?
— Euh... Oui. La situation est assez compliquée... Et... euh... Le général Hammond est responsable du programme « porte des étoiles » et il a toute autorité pour parler au nom de la Terre... Quant à moi, je ne suis qu'archéologue.
S'il pouvait l'éviter, il préférerait éviter de se retrouver à la table des négociations.
— Je choisis les interlocuteurs que je veux, déclara Emeraldas.
Soit.
— Et cela ne me gène pas de rester à l'extérieur... Je vous avais posé une question...
Il n'y couperait pas.
— Pourquoi moi ?
— Kei trouve que vous êtes gentil.
Daniel sentit qu'il piquait un fard alors que le général Hammond levait un sourcil et qu'Emeraldas souriait. La température ambiante parut se dégeler de quelques degrés.
— Ça risque de prendre un peu de temps, répondit Daniel.
— Très bien, soupira Emeraldas. Je vous suis.
Le nabot grogna une phrase indistincte. Emeraldas et lui eurent un bref échange, qui tourna visiblement à l'avantage de la femme. L'air peu convaincu, il fit demi-tour et regagna le vaisseau.
— Tochiro va s'occuper des réparations les plus urgentes, expliqua Emeraldas. Il nous rejoindra plus tard... J'aimerais mieux rendre un vaisseau en bon état à son propriétaire.
— Si cela peut vous arranger, avança Daniel, je ne pense pas qu'il y ait d'inconvénients à ce que nous vous suivions à bord.
Emeraldas le considéra, pensive, puis consulta Kei du regard. Les deux femmes eurent une moue dubitative.
— Non, ça ne lui ferait pas plaisir, déclara Kei. Il a horreur d'embarquer des passagers.
— Et il ne supporte pas quand des militaires réguliers envahissent sa passerelle, renchérit Emeraldas. N'en parlons plus ! Kei vous fait confiance, et j'ai dit que je vous suivais. Je ferai un résumé à Tochiro. Ce sera plus facile pour lui. Il a beau écrire en anglais, je doute qu'il sache le prononcer correctement. Et il faut une concentration terrible pour vous comprendre !
— Oh. Désolé.
— Pas grave. On s'habitue assez vite.
Durant le trajet retour, Kei et Emeraldas discutèrent dans leur propre langue, pendant que Daniel essayait désespérément de saisir le sens de la conversation.
Allez, quoi ! Tu es linguiste, ou pas ?
— Excusez-moi, fit-il. C'est de l'anglais qui a évolué, n'est-ce pas ?
— Hmm ?
— Votre langue, répéta-t-il. Elle a évolué à partir de l'anglais ?
— On peut dire ça. En quoi ça vous intéresse ? demanda Emeraldas.
— Eh bien... je suis linguiste, et...
— Je croyais que vous étiez archéologue ?
— Le professeur Jackson étudie les civilisations anciennes, expliqua Kei, venant au secours de Daniel. Les vieilles pierres, mais aussi les langues, les cultures...
— Je ne me considère pas comme appartenant à une civilisation ancienne, rétorqua Emeraldas.
— En l'occurrence, au SG-C, je travaille en tant que... comment dire... spécialiste des cultures extraterrestres...
— Je n'ai pas du tout l'intention de vous servir de sujet d'étude ! Trouvez quelqu'un d'autre.
— Mais... bégaya Daniel. Ce n'est pas ce que je voulais dire...
La rousse le gratifia d'un regard qui aurait glacé même un Goa'uld.
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