[ Période : Captain America : Civil War ]

RHODEY passa dans l'IRM. De l'autre côté de la vitre, Anna et Vision se tenait droit, Tony faisant les cent pas derrière eux.

- Comment est-ce que c'est arrivé ? demanda-t-il.

Vision pencha la tête vers lui.

- J'ai eu un moment de distraction.

- Je ne pensais pas que c'était possible.

- Moi non plus.

Anna se passa une main sur le visage, exténuée. Elle n'avait pas dormi depuis la nuit à Berlin, et elle avait des cernes de trois pieds de long sous les yeux. Elle s'approcha de Tony, et posa sa main sur son avant-bras. Du coin de l'œil, ils virent Natasha arriver, les bras croisés.

- Restes ici.

- Des clous, marmonna-t-elle en les suivant.

Même si elle essayait d'être le plus discrète possible, il n'y avait aucun doute sur le fait qu'au moins l'espionne l'avait repérée. Alors qu'ils s'arrêtaient au balcon en verre qui donnait sur le hangar principal, Anna se cacha de justesse derrière un mur.

- Sa colonne vertébrale est en miettes, des lombaires au sacrum. Avec de graves lésions de la moelle épinière. Il restera sans doute paralysé.

Anastasia se mordit le poing pour éviter de faire le moindre bruit. "Il allait s'en sortir", d'accord, mais à quel prix que Tony avait décidé d'omettre ?

- Steve ne renoncera jamais, dit Natasha. Si vous vous entêtez aussi il arrivera pire que ce qui est arrivé à Rhodey.

- Vous les avez laissés partir.

- Nous avons commis une grave erreur.

- "Nous" ? On ne se débarrasse pas comme ça de ses vieilles habitudes hein. Agent double un jour agent double toujours. C'est dans les gênes.

   L'adolescente écarquilla les yeux, priant pour avoir mal entendu.

- Quand est-ce que vous serez capable de réagir aux événements en fonction d'autre chose que de votre ego ? rétorqua-t-elle.

   Anna secouait frénétiquement la tête. La situation s'envenimait. Elle était même pire que jamais.

- T'Challah a raconté à Ross ce que vous avez fait. Ils vont venir vous arrêter.

   La jeune fille avait du plomb dans l'estomac, et le cœur au bord des lèvres. Ses yeux picotaient à cause des larmes qu'elle retenait.

- Si j'étais à leur place, je ne m'y risquerais pas.

   Anna entendit ses bottes claquer sur le sol plus qu'elle ne la vit partir. Lorsqu'elle passa devant elle, elle lui fit un léger sourire. Natasha ne lui rendit pas, l'air préoccupé. Elle avait l'air sur le point de pleurer. Ce n'était sans doute qu'une impression.

- Sors de là Anna.

   Elle baissa la tête, quittant sa cachette pour aller voir le milliardaire. Elle avait envie de lui dire des milliers de choses, mais elles se bousculaient toutes sur sa langue, et aucunes ne sortaient.

- Tu... On va être seuls, hein ?

   Tony lui offrit un sourire contraint.

- Tant que je t'ai toi, je vivrais.

   Elle hocha la tête, forçant le coin de ses lèvres à se relever pour essayer de lui remonter le moral autant que faire se peut.

   La montre à son poignet clignota, l'image d'un homme dessus.

- Je peux savoir ce que je regarde ?

- Un téléchargement prioritaire de la police de Berlin, répondit FRIDAY.

- Qu'est-ce qu'il se passe ?

- Démarre l'hélicoptère, dit-il simplement à son IA. Anna, viens avec moi. Mais pas de scène. Tu m'as bien compris ?

- Je- Oui Tony. D'accord. Mais qu'est-ce que ça veut dire ?

- Tu verras.

   Anna dormit tout le long du trajet en hélicoptère, épuisée par les derniers jour et son corps en compote.

   Elle se réveilla lorsqu'ils atterrissaient sous des trombes d'eau. Le sol s'ouvrit pour faire entrer l'hélicoptère à l'intérieur. Tony lui fit un briefing, expliquant ce que Zemo avait fait. Conclusion d'Anna : il n'était pas loin d'être au même niveau que le secrétaire d'état en terme de fils de puterie.

   Ils descendirent, et furent accueillis, au grand plaisir d'Anastasia, par le secrétaire d'état. La jeune fille fit la moue, ignorant le dialogue des deux adultes.

- Pourquoi avez-vous emmené cette enfant, Stark ?

- Je...

- Parce qu'elle a le droit de savoir ce qu'il se passe, intervint Tony. Les Avengers sont sa famille.

   Cela cloua le bec à l'homme détestable. Alors qu'ils passaient devant lui, Anna lui écrasa le pied, "par mégarde".

- Dans ton c... coude, le vieux.

   Ils furent tous trois escortés par des militaires jusqu'à une salle ronde. Le secrétaire les laissa à l'entrée, au plus grand plaisir de la jeune fille.

   À peine Tony avait-il fait un pas dans la salle que des applaudissements ironiques retentirent, résonnant étrangement dans le cœur d'Anna.

- Le visionnaire, messieurs ! Le visionnaire est parmi nous. Il voit tout ! Il sait ce qui est bon pour vous, que ça vous convienne ou pas.

   Elle suivit le milliardaire vers la cellule d'où provenait la voix de Clint. Elle sentait la culpabilité de Tony, et la colère qui les entourait totalement. Elle avait des relents de claustrophobie.

Elle plaça ses mains sur les barreaux, sur la pointe des pieds pour voir ce qu'il se passait à l'intérieur.

- Salut Anna, dit-il en lui adressant un léger sourire.

Elle lui fit un petit signe de la main de la main pour le saluer, gênée.

- Allez, ça va Barton, dit le milliardaire. Je ne savais pas qu'on allait vous interner ici.

- Vous vous doutiez bien qu'ils allaient vous mettre quelque part Tony.

- Oui, mais pas dans... ce cabanon flottant hyper sécurisé. C'est une prison pour fou dangereux pas pour de simples...

- Criminels ?

Il se releva d'un coup, faisant reculer Anna en sursautant.

- Criminels, Tony. Je crois que c'est le mot que vous cherchez. Un mot qu'on avait encore jamais utilisé pour moi. Pour Sam ou Wanda. Et pourtant on est là.

   Anna s'éloigna de façon à n'entendre plus que leurs murmures. En ce moment, la technique de l'autruche qui fourre la tête dans le sable était sa préférée.

   Elle passa devant la cellule de quelqu'un qu'elle ne connaissait pas, avant de reculer.

- Tu es celui qui grandit et qui rapetisse, c'est ça ?

- Ouais ! répondit-il avec un grand sourire. Je suis Ant-Man. Ou Scott Lang. C'est sympa de m'avoir reconnu.

   Anna fit la moue, moqueuse.

- Pas de problème. Désolée pour ton nom de super-héros.

- Hé ! C'est pas moi qui ai choisi le nom, de toutes façons. Et puis, moi je suis désolé de t'avoir balancé dans les cartons, j'avais pas fait exprès.

- Pas de problème. C'est à peine bleu.

   En effet, ce n'était plus bleu. Son dos était désormais parsemé de violet, jaune, noir... Et quasiment la totalité de son corps était ainsi.

Il se ressaisit en voyant Tony arrivé, prenant une posture se voulant plus offensive. Anna toussota pour faire passer sa gêne.

- Hank Pym m'avait bien dit qu'il fallait se méfier des Stark.

- Vous êtes qui vous ?

- Non mais je rêve !

Anna lui adressa un sourire désolée, les pas dans le sillon de Tony.

- Comment va Rhodes ? demanda Sam dans la cellule suivante.

- On l'a transféré à l'hôpital de Columbia. Croisons les doigts.

Aussi niais que cela puisse paraître, Anna le fit, de tout son cœur.

- Ils vous ont donné à manger ?

   Elle allait laisser glisser une remarque sarcastique en entendant ce que Tony avait dit, mais elle se retint au dernier moment. La privation de nourriture était une technique de torture, ni plus ni moins, pour obtenir des informations. Comme la position de Steve et Bucky.

- Vous essayez d'être sympa ? demanda sarcastiquement Sam.

- J'ai besoin de savoir où est Steve.

- Tony... marmonna Anna. Laisses tomber. On a perdu. Ça arrive.

- Écoutez la, parce que vous le saurez pas en faisant le flic sympa. Pour que je crache le morceau, essayez plutôt la manière forte.

   Sam flancha légèrement en voyant l'air effaré d'Anna, qui n'avait même pas remarqué que le milliardaire tapotait sur sa montre.

- Ah ça y est. Ils ont les oreilles bouchées. On a trente secondes avant qu'ils comprennent que ça ne vient pas de chez eux. Regardez.

Il montra ce qui semblait être à la jeune fille la photo de l'homme décédé dont FRIDAY avait parlé.

- C'était le psychiatre qui devait interroger Barnes. En d'autres termes, je me suis gouré, Sam. J'ai commis une erreur.

- C'est une première.

- Le Captain est complètement hors des clous, mais ça n'empêche qu'il va avoir besoin d'aide. On ne se connaît pas très bien, vous n'êtes pas obligé de...

- C'est bon, ça va.

Anna dansait d'un pied sur l'autre, un léger sourire aux lèvres.

- Je savais que tu étais génial Sam !

Il fit une moue faussement vexée.

- Comment ça ? Il t'a fallu tout ce temps pour t'en rendre compte ? Bon, je vais vous dire où ils sont. Mais jurez moi d'y aller seul, Stark. Sans Anna, et en ami.

- Quoi ? s'écria-t-elle. Arrêtez de me laisser en dehors de ça ! Tony a même dit que les Avengers sont de ma famille, parce que c'est le cas. J'en ai marre d'être laisser de côté ! Je suis grande, j'ai pas besoin d'être protégée.

- Tu as quatorze ans, s'énerva Tony. Même si tu était responsable, tu n'es pas en âge de le décider. C'est moi qui décide, en l'occurrence. Et je décide que tu restes à la tour. Si tu veux des responsabilités, tu en auras, tu vas devoir t'occuper de Rhodey quand il rentrera.

   Anna croisa les bras. Cela ne servait à rien d'en discuter maintenant, ce n'était vraiment pas le bon moment. Et prendre soin de Rhodey n'était pas la pire des punitions. Ils allaient sans doute se contenter de manger en regardant la télé.

- Maintenant que ça c'est réglé, dit Tony, je te jure que j'irais seul.

   Sam lui dit alors l'endroit où Steve et Bucky se trouvait. Le milliardaire remit les micros. Ce fut aussi rapide que cela.

   Ils ne restèrent pas longtemps, juste le temps qu'Anna parle avec tout le monde. Scott, Sam et Clint étaient les seuls à répondre. Wanda était plongée dans un mutisme qu'Anna comprenait parfaitement.

Alors qu'ils s'apprêtaient à rentrer dans l'hélicoptère, le secrétaire d'état les interpela.

- Stark ! Est-ce qu'il vous a dit où trouver Rogers ?

- Non il m'a dit d'aller au diable mais je crois que je vais plutôt rentrer à la base. Vous pouvez toujours m'appeler, je vous mettrais en attente j'adore voir clignoter la petite lumière.

   Anna lui fit un signe agréable du doigt avant de suivre Tony dans l'avion, un sourire aux lèvres.

- Tu es le genre de personne à avoir un air illuminé en regardant le micro-ondes, n'est-ce pas ? lui demande-t-elle.

- Oui. Tu vas me dire que toi non ?

Elle eut un instant de réflexion.

- Non... moi c'est le lave-linge.

Il ricana, le bruit étouffé par le vrombissement de l'hélicoptère.

Anna était partagée. Elle avait peur pour Tony et Steve, peut-être même pour Bucky, très peur même, mais elle était contente. Car il y avait de l'espoir que les Avengers restent encore ensemble, si Iron Man et Captain faisaient équipe. Et cela la transportait de joie.