7. All of me.
"L'amour ne consiste pas à dire « je t'aime », mais à prouver que c'est vrai."
Anonyme.
Azalea.
Je tourne à gauche comme me l'indique le GPS de mon téléphone avant d'arriver sur une ruelle composée de HLM neufs et luxueux.
Habite-t-il vraiment ici ?
Je me gare à moitié sur le trottoir et attend que monsieur Marshall ne veuille descendre de sa tour. Hier, j'ai eu la brillante idée d'accorder du temps à Frank, grave erreur de ma part.
Il m'a ordonné d'emmener Ezra avec moi pour mon voyage en Cévennes. J'ai supplié le directeur que cela ne servait à rien, surtout pour un aller-retour, que cela ne le concernait pas, que je n'étais pas obligé de trainer un stagiaire pour négocier avec les propriétaires des tissus dont nous avons besoin.
Pas besoin de vous dire que cela n'a pas fonctionné, j'ai dû me réveiller plus tôt que d'habitude et rouler dans Paris pour me rendre chez lui. Je regarde mon portable et constate qu'il a déjà dix minutes de retard.
Je soupire en détachant ma ceinture et monte les quatre étages qui me sépare de l'appartement d'Ezra. À bout de souffle, je pense sincèrement à me remettre au sport quand je frappe contre le bois de sa porte.
J'attends quelques secondes avant de tenter une seconde fois, mais plus fort. Cette fois, il semble m'avoir entendu car j'entends du raffut derrière la porte et l'instant d'après c'est un Ezra pas du tout réveillé qui m'ouvre.
Vêtu simplement d'un jogging pour dormir, je suis attirée par son torse nu qui reflète des tatouages, sa peau est parsemée d'encre noire au-dessus de certaines cicatrices qui n'étaient pas là avant, je m'en serais souvenue. Ses abdos ont évolué aussi, représentant une tablette entière de chocolat et ses oiseaux dessinaient sur ses bras semblent vouloir s'envoler. Mais ce qui m'hypnotise le plus est sa cicatrice qui lui barre le visage.
— Tu as de la bave au coin de la bouche, me charrit-il en reculant pour me laisser passer.
— N'importe quoi ! Me défendis-je en le suivant jusqu'à sa cuisine alors que je sais qu'un sourire en coin s'affiche sur son visage.
Plus fort que moi, je ne peux m'empêcher d'admirer les muscles de son dos qui se mouvent au gré de ses mouvements et surtout de l'immense étoile à huit piques qui l'orne.
— Tu as déjeuné ? me demande-t-il en faisant couler son café.
Je hoche de la tête et sans m'en rendre compte, je suis derrière lui, juste devant cette sublime étoile qui m'hypnotise. Son immense étoile qui prend toute la largeur de son dos, avec des éclats tout autour comme si elle brillait. Une étoile bleu foncé sur un fond noir entouré d'une fumée blanche. Les détails sont tellement bien fait qu'on dirait une vraie, les ombres jouent avec le dessin et les traits sont plus appuyés sur certains endroits rendant le tout magnifique.
Un frisson parcourt son dos quand je trace un trait de son tatouage de l'index. Je sens sa respiration se couper alors que je continue mon excursion.
— Aza, qu'est-ce que tu fais ? M'interroge-t-il doucement, comme s'il avait peur de briser ce silence.
Je ne réponds pas, me concentrant sur les émotions qui me traversent le corps et le cœur.
Ce n'est pas mon portrait mais je sais que cette étoile me représente. Ezra n'aurait jamais considéré quelqu'un d'autre comme sa Star. Je comprends que malgré ces années de séparation, il n'a jamais voulu m'oublier, comme moi.
Il se retourne alors que je reste perdue dans mes pensées. Ezra me prend les mains et plonge son regard dans le mien. Et je me rends compte d'une chose : Ezra Marshall ne se tatoue pas pour rien.
Ses oiseaux étaient pour sa sœur, Daya, quand ses parents sont morts il a suivi son oncle et son aînée pour vivre à Paris, à quatorze ans, il ne supportait pas d'être le seul homme de sa famille à pouvoir veiller sur sa sœur. Il n'avait pas fait le deuil de ses parents.
Il s'est donc tatoué pour leur prouver qu'il était assez fort pour surmonter cette épreuve, seul. Il a représenté sa force en représentant Daya, qui veut dire "oiseaux".
Un autre est arrivé, deux mois avant qu'il ne parte pour New-York. Une tête de mort entouré d'un serpent, il disait que c'était un tatouage de famille, génération après génération, tous les membres de la famille se le tatouer pour prouver leur loyauté envers les siens.
C'était des événements importants dans sa vie qui étaient la cause de ces tatouages, alors pourquoi moi ?
Étais-je si importante à ses yeux pour qu'il me dessine ?
La sonnerie de mon téléphone sonne dans la poche de ma veste et je m'empresse de prendre l'appel de Neya en m'éloignant de lui.
— J'ai appris pour ton voyage ce matin, t'aurais pu me prévenir mon macaron !
Je pouffe de rire face à son comportement digne d'un enfant de cinq ans avant de la rassurer.
— C'est juste le temps d'une journée, pas d'un mois. Nous serons de retour pour ce soir.
— Nous ? Tu y vas avec qui ? Questionna-t-elle.
— Avec Ezra.
J'entend un cri d'hystérique à travers le portable alors que je sens déjà la montagne de questions arriver. Dès qu'Ezra est rentré dans ma vie, après plus dix ans, j'ai prévenu Neya et on s'est fait une soirée papotage qui a fini en bordel dans mon appartement.
Depuis, elle s'est fait l'idée de nous remettre ensemble, et croyez-moi quand je vous dis que Neya Hartley ne lâche jamais l'affaire. Je crois qu'elle serait même capable de pactiser avec la diable.
— Mais c'est super mon macaron ! Vous allez enfin vous rapprocher, la mission Azra démarre !
— Azra ? Questionné-je en fronçant les sourcils.
— Oui, votre nom de ship.
— De quoi ? Écoute Neya, je n'ai pas le temps de comprendre ce que tu me chantes, alors on se voit quand je rentre, okay ?
Je n'attends pas qu'elle me réponde et lui raccroche au nez. J'entends Ezra se préparer alors j'en profite pour visiter son appartement.
Son salon est digne de sa personnalité, rangé et propre. On dirait presque que ma mère a déteint sur lui. Sa télévision prend toute la place du mur et son canapé d'angle me donne envie de m'assoupir, il paraît si moelleux.
Depuis combien de temps, je n'ai pas pris un jour de congé pour penser à moi ? Trop longtemps à mon goût.
Je passe mes doigts sur les bibelots qui décorent ses étagères et tombe sur un cadre de famille que je prends délicatement entre mes doigts.
J'y reconnais Daya avec ses cheveux blonds et constate qu'elle avait déjà un regard qui vous fait froid dans le dos à un si jeune âge. Elle porte un petit garçon, aussi haut que trois pommes, un sourire collé au visage.
Leur père a une main sur l'épaule de sa fille aînée et prend par la taille son épouse. Elle porte une robe à bustier noire et violet, des voiles descendent en cascade jusqu'à ses mollets, le tissu doit être de la soie car il semble très léger. Une rose est accrochée à sa taille d'où sortent des rubans violets et une fente laisse sa jambe prendre le soleil. Posée ainsi, dans cette tenue magnifique, elle représente la puissance d'une femme et cela m'en coupe le souffle.
— Diana Marshall, ma mère. Elle était éblouissante.
Je fais volte-face à vois Ezra qui m'attends, appuyé sur l'encadrement de la porte du salon. Il est habillé d'un jogging noir et de son fidèle manteau sans manches, son t-shirt lui compresse ses abdominaux et ses pectoraux alors que la prestance émane de lui comme si c'était naturel. Il n'a pas besoin d'être élégant ou de s'apprêter pour respirer le danger. Des frissons me grimpent aux bras alors que son regard semble me bouffer toute cru.
Son regard divague vers le cadre que je tiens toujours, son regard se voile de tristesse et d'une colère inconnue à mes yeux. Je m'empresse de remettre l'objet à sa place.
— Oui, tu as hérité de ses yeux, complimenté-je en détournant le regard.
Je passe devant lui et prend la route de la porte d'entrée, l'attendant sur le palier. Je n'aime pas entrer dans la vie personnelle des gens sans leur consentement, je trouve que c'est un manque de respect. Ezra m'a déjà raconté l'accident de ses parents qui les a tués mais je sais aussi qu'il n'aime pas en parler. Il avait douze ans la première fois qu'il est allé sur leurs tombes, six ans après le drame.
Il me tend deux gobelets à emporter que je prends pour qu'il puisse mettre ses chaussures et fermer la porte. Il reprend son verre et je souffle un merci pour la boisson, sachant déjà que le café finira par la fenêtre car j'ai horreur de ça.
— J'espère que tu aimes toujours le chocolat chaud ? Me questionne-t-il.
Je souris franchement alors qu'une étincelle scintille en moi. Il s'est rappelé que je déteste le café.
— Avec deux sucres et une touche de caramel ? Espéré-je.
— Toujours.
Mon cœur rate un battement et une douce chaleur vient à sa rencontre. Ezra Marshall est un homme avec beaucoup de surprise, personne ne me contredira là-dessus. Mais quant il retient une information sur vous, vous pouvez être sûr qu'il tient à vous.
***
Cela fait trois heures qu'on roule et Ezra garde la bouche fermée. Pour combler ce silence oppressant, j'ai allumé la radio qui grésille plus qu'autre chose.
Je lui jette quelques coups d'oeil à répétition pour savoir s'il dort ou pas. Son regard fixe toujours l'horizon, le coude posé contre le rebord de la fenêtre.
Il parait tellement hors du temps qu'à cet instant je donnerai tout pour lire en lui comme dans un livre ouvert, comme avant. J'arrivais à déchiffrer ses micro-expressions, ses tics et ses manières de se comporter.
Je savais tout de lui, comme il savait tout de moi.
Et je crois que c'est ce qui m'énerve le plus. On dirait qu'il n'a rien oublié de mes goûts et de mes manières alors qu'il semble étranger à mes yeux.
Mais peut-être que cela vaut mieux ainsi. Notre vie et notre façon de penser ont changé avec le temps, nous ne sommes plus les mêmes adolescents épris l'un de l'autre. Mais si mon cœur bat plus fort quand il est à mes côtés, Ezra ne reste pas moins un étranger dont sa personnalité enfantine s'est effacé pour laisser place à un homme mûre et une aura dangereuse.
Au bout d'une trentaine de minutes, je décide de me garer dans une station service afin de faire le plein et d'acheter un en-cas.
Je rentre dans le local en baillant et passe d'abord aux toilettes avant de payer deux sandwichs et deux bouteilles d'eau pour la route.
Je marmonne un au-revoir au caissier et retourne à la voiture. J'écarquille légèrement des yeux quand je vois qu'Ezra a changé de place pour se mettre derrière le volant. Étant fatiguée, je ne dis rien et monte dans la voiture en lui tendant la moitié de mes achats. Il me remercie avec un sourire et je commence à déballer ma nourriture.
Après mettre rassasiée, je me cale au fond du siège, le vrombissement de la voiture me donne envie de dormir mais j'essaye de rester éveillée. Alors que mes yeux papillonnent contre mon sommeil, Ezra m'adresse enfin la parole.
— Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?
J'incline la tête, ne comprenant pas où il veut en venir.
— Je ne t'ai pas dit quoi ?
Il souffle et change de vitesse avant de me répondre.
— Pour toi et l'autre connard aux cheveux bruns.
Il me faut un temps de réaction pour comprendre que l'autre connard aux cheveux bruns est Jason. Des flashs d'hier me reviennent en mémoire alors que j'aborde un sourire narquois.
— Serais-tu jaloux ?
Il me regarde furtivement avant de se reconcentrer sur la route.
— Moi, jaloux, non. Je suis possessif.
J'ignore mon traître d'organe vital qui se défoule dans ma poitrine et enchaîne avec une réplique qui le remettra à sa place.
— La possessivité s'exprime quand on doit défendre une chose qui nous appartient. Et je ne t'appartient pas, Ezra.
— Toi, non. Mais ton cœur, oui.
Je veux contre-attaquer mais les mots me manquent. Je ne veux pas l'admettre mais il a raison. Comment mon coeur réagit à chaque fois qu'il me parle où qu'il prêt de moi me rend folle. Mon cerveau l'a oublié alors que mon cœur ne semble que l'avoir mis de côté pour le ressortit quand le moment sera venu.
J'ai l'impression que plus on se parle, moins j'arrive à le comprendre, j'ai du mal à réapprendre à le connaître et ça me bouffe de l'intérieur. Perdue entre la raison et le cœur.
Il m'a abandonné sans aucune explication.
Il m'a brisé le cœur.
J'ouvre la bouche et la referme plusieurs fois, ne sachant pas du tout ce que je suis censé lui dire. Quand on se côtoyait tous les jours, les discussions venaient aussi facilement que les gestes attentionnés. On n'avait pas besoin de tourner autour du pot, exprimant notre pensée chacun notre tour.
Avant, quand on arrivait pas à exprimer nos émotions, on avait créé un jeu pour éviter les disputes. Le but était simple. On avait cinq minutes pour exprimer notre ressenti envers l'autre en commençant notre phrase par "Je ne comprends pas". Bien sûr l'autre n'a pas le droit d'intervenir avant qu'on est fini notre phrase.
Pas besoin de préciser que cette idée est aussi débile que Frank. Pourtant c'est la seule chose qui me vient en tête.
— Five minutes without filter ? Proposé-je en me mordant la lèvre.
Avec le temps qui s'est écoulé, pas sûr qu'il accepte. Il hausse les sourcils et reste silencieux avant de hocher doucement de la tête.
Je respire un bon coup avant de me lancer, à deux doigts de vomir, c'est comme si je faisais un saut dans le vide sans savoir si le harnais de sécurité est bien attaché.
— Je ne comprends pas pourquoi tu souhaites me reconquérir alors que c'est toi qui m'a quitté il y a dix ans. Je ne comprends pas pourquoi tu reviens dans ma vie si ce n'est pour me faire souffrir à nouveau. Je ne comprends pas ton retour dans ma vie, tout simplement.
La gorge serrée, je me retiens de laisser mes larmes couler sur mes joues. Ne sachant pas comment il va réagir, je préfère regarder la route devant moi.
— Pourquoi je souhaites te reconquérir ? Facile. Me répond-t-il de sa voix rauque. Parce que durant ses dix putains d'années, je n'ai fait que penser à toi. Tu t'es ancré dans mon esprit pour ne plus jamais en ressortir. Je sais que c'est long dix ans. Crois-moi, quand je te dis que je les ai vus défiler au ralenti. Alors je sais que ce sera toi et personne d'autre.
Je reste sans voix un moment et décide de briser la règle de notre jeu, celle de ne pas intervenir.
— Alors pourquoi t'es parti ? Demandé-je d'une petite voix.
Il me regarde dans les yeux, et j'y lis une peine immense, un raz-de-marré qui se cache sous des non-dits et des mensonges. Je veux la vérité. Je veux savoir pourquoi il est parti sans aucune raison valable.
— Ma Star, ce n'est pas...
Un bruit éclate en provenance du moteur de ma voiture, je tourne vivement la tête vers la source de son interruption alors qu'il se gare sur le côté.
— Je vais voir ce qu'il a, m'annonce Ezra en quittant l'habitacle.
Je vois sa musculature disparaître derrière le capot et maudit ma malchance. Il allait peut-être m'avouer la raison de son départ. La réponse que j'attend depuis mes quinze ans, et voilà que la voiture n'en fait qu'à sa tête.
J'attends bien dix minutes avant qu'il ne pose ses fesses sur le siège de la voiture.
— J'espère que c'était pas un rendez-vous, parce qu'il va falloir attendre la dépanneuse, souffla-t-il en posant sa tête contre l'appuie-tête.
Sérieusement ?
C'est maintenant obligé, j'ai forcément commis plusieurs pêchés dans mon ancienne vie pour que les catastrophes s'accumulent sur ma personne.
***
Hello mes stars ! 👋
Comment allez-vous ?
Que pensez de leur nom de ship ! Perso je kiffe ! 😍
Et Neya qui met son grain de sel comme on aime !
Un petit jeu pour détendre l'atmosphère et découvrir des non-dits. 🤫
Ezra était près à tout le confier et une panne l'arrête !
Tuer autrice !
Nan, je rigole ! 😅
On ne me tue pas, de toute façon vous connaîtrez jamais la fin si vous me tuez ! 😈
À votre avis comment va se dérouler la suite ?
Kiss ! 💋💋💋
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