5. Say something.
"La seule façon de se débarrasser d'une tentation est d'y céder."
Oscar Wilde.
Ezra.
Une fois que la grande blonde qui sert de secrétaire se barre, seul le silence comble la pièce. Elle feuillette distraitement le cv que j'ai fabriqué de toutes pièces à partir d'internet avant de relever le regard sur moi. Je m'approche d'elle jusqu'à atteindre les fauteuils en cuir qui font face à son bureau.
Ses cheveux châtains sont attachés en une queue de cheval stricte, son maquillage foncé la rend que plus désirable, son piercing à l'arcade scintille ainsi que le bracelet qu'elle porte autour de sa cheville et ce jean slim doit lui faire un cul d'enfer. Je balade mes yeux sur sa silhouette, admirant chaque formes qui la constitue en tant que femme et que j'ai manqué. je plonge dans ses iris noisettes alors que ses sourcils forment un plis au centre.
J'y lis tout un cas d'émotions négatives qui me serre le cœur. Si la Azalea d'avant n'a pas changé, elle a la rancune tenace et vu comment je l'ai abandonné, je sais que je vais ramer à contre courant.
Je veux essayer une approche, n'importe laquelle, mais les mots restent bloqués dans ma gorge. Je ne sais pas par où commencer. J'aimerais la protéger du gang. Elle n'a rien à faire avec cela mais en même temps, je ne me vois pas lui mentir pour ses dix années d'absence.
Finalement, c'est elle qui brise le silence.
— Qu'est-ce que tu fais là Ezra ? Me demande-t-elle.
Essayant de garder la face, je désigne le cv du menton.
— Je cherche du boulot, confiais-je en mettant mes mains dans les poches.
Elle pose ses mains à plat sur le bureau et baisse la tête pour sûrement ne pas me gueuler dessus.
— À mon souvenir, tu ne t'appelles pas Nate Mickelson. D'ailleurs c'est un nom complètement ridicule, si tu veux mon avis.
— Je me suis dit, autant faire un petit clin d'œil aux séries que t'aimes, répondis-je en haussant les épaules.
Elle tasse le dossier en levant les yeux au ciel.
— J'aimais, c'est du passé. Maintenant c'est fini.
J'arque un sourcil pas convaincu pour un sou de ses dires. Azalea aimait et aime toujours ses séries juste parce que les acteurs sont beaux, selon elle.
Perso, je préfère dire que la chirurgie et le casting en est pour beaucoup.
— Si tu le dis, ricanais-je en m'installant dans le fauteuil. Alors, je suis pris ?
Elle souffle en se penchant pour prendre un stylo et c'est à cet instant que je le remarque. Son cou, nu. Une flèche vise mon cœur alors que je n'ose pas poser la question fatidique. Pourtant, allez savoir pourquoi, je me lance en étant en toute décontraction alors que mon cerveau fuse dans tous les sens.
— Tu ne l'as plus ?
Azalea me regarde en fronçant des sourcils alors que je lui montre son cou. Elle détourne les yeux et touche sa peau où il devrait y être.
— Non, il a fait un tour à la déchetterie et il est revenu en bouteille plastique, pratique, non ?
— Un geste pour la planète, ajoutais-je la gorge serrée en me moquant.
Ce bijou était tout pour nous. Il représentait notre relation, notre premier baiser dans sa chambre d'ado, à son quinzième anniversaire.
Je me souviens encore de son sourire qui faisait naître le mien quand elle a ouvert la boîte, de sa peau douce quand je lui ai accroché le collier. De son odeur de lilas que je pouvais respirer tous les jours, de son souffle sur mon visage. De sa langue caressant la mienne quand j'ai osé l'embrasser et de ses joues rouges de gêne.
Ce jour-là, j'ai mis tous mes problèmes de côté pour elle, me disant qu'elle était faite pour moi, que je ne pouvais pas passer à côté de ce qu'elle m'offrait.
La liberté et l'amour.
C'était un magnifique pendentif que j'avais fait commander au meilleur bijoutier de Paris. Une étoile à huit piques avec notre citation inscrite dessus.
"Parce que le ciel ne peut briller sans son étoile."
C'était la notre, elle nous représentait. Et j'étais fier de la voir le porter quand nous marchions dans les couloirs remplis d'envieux.
— Tu te crois drôle Marshall ? Ça t'amuse de venir me faire chier à mon travail, de revenir dans ma vie après dix ans ? Je vais te poser une question, une seule, et t'as intérêt à répondre honnêtement.
Je me racle la gorge et respire un bon coup, priant pour qu'elle ne tende pas un piège.
— Pourquoi t'es revenu ?
Je souris alors que ma respiration reprend son rythme normal. Je contourne le bureau et se poste en face d'elle, si près que je peux voir les nuances de marrons dans ses yeux. Sachant pertinemment ce qui la perturbera et la laissera sans mot.
Je prends sa main et la fais tourner sur elle-même, lentement, comme si nous étions au ralenti pour la ramener à moi.
— Pour te reconquérir ma Star, soufflais-je avant de prendre le chemin de la sortie.
***
— Elle me déteste, annonçais-je à Clyde qui se marre, assis sur l'un des canapés du QG, une main derrière son crâne rasé.
— En même temps, tu t'attendais à quoi ? Tu as disparu pendant dix ans et tu crois que revenir comme un canard va arranger les choses ?
— Déjà, je ne suis pas un canard, répondis-je. Et t'as qu'à demander à Daya ? C'est elle qui m'a poussé à y aller.
Clyde lève un instant les yeux du téléphone avant de me regarder avec un sourire cruel sur les lèvres.
Et c'est parti...
— Tu veux vraiment que j'aille demander à la folle qui nous sert de chef ? Questionna-t-il bien fort pour que tout le monde l'entende.
— Je t'interdis de me traiter de folle, enfoiré !
Le cadre du téléphone bouge dans tous les sens alors que je souris face à leurs chamailleries. Après quelques secondes de lutte, j'aperçois enfin le visage de ma sœur me sourire alors que j'entends Clyde se plaindre.
— Comment tu vas mon prince ? N'écoute pas cet enfoiré. Il n'a pas encore compris qui dirige ici.
— Arrête, princesse, t'es trop dur avec lui.
— Qu'il s'estime heureux que je ne l'ai pas déjà tiré dessus, souffla-t-elle en levant des yeux.
— Déjà fait, affirme-t-il au loin.
— Ah oui, j'avais oublié, rigola-t-elle. Bref, ce n'est pas le sujet. Avec Aza, ça va ?
— J'ai aucune chance, déprimais-je comme un enfant de cinq ans.
— T'as pas besoin de chance Ezra, t'as besoin de porter tes cou... Quoi encore ? S'interrompit-elle en tournant la tête.
Je la vois froncer des sourcils et ordonner aux autres de se préparer. Mon cœur ne peut s'empêcher d'effectuer un salto face aux dangers qu'ils encourent.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— Rien, t'inquiète pas mon prince. C'est juste des petits cons qui veulent savoir qui aura la plus grosse. Je te rappelles plus tard, et d'ici là essaye de la faire rayonner !
Elle raccroche la seconde d'après et je me retrouve seul, devant mon écran noir et me demander pour la énième fois si j'ai bien fait de revenir à Paris.
Je veux me donner les moyens d'y arriver, que son coeur batte de nouveau pour moi. Je veux revoir son regard noisette scintillait pour moi, ses sourires qui illuminaient ma journée.
J'aimerais que tout redevienne comme avant, que je fasse machine-arrière en restant à Paris pour toujours, sans que mon oncle vienne tout gâcher.
Malheureusement, je ne peux pas me permettre de m'acharner sur mon sort alors que c'est moi le fautif.
Je me prépare un café en allant sur son compte instagram qui a déjà plus de trois millions d'abonnés. Toutes ses stories la représente, sur scène, habillée de robe en tout genre, avec sa mère, les promotions de Brown Marshall.
Dans une des publications, je la vois en train de manger une glace, un sourire collé aux lèvres. Plus je l'observe, plus je me rends compte du tatouage qui orne sa jambe droite. On dirait un phénix qui renaît de ses cendres.
Normalement, quand on fait un tatouage, il doit être personnel. Soit pour nous représenter, soit pour prouver notre amour, quel qu'il soit, à un de nos proches. Mais je vois mal Aza se faire un tatouage, surtout avec la grimace qu'elle effectuait à chaque fois que je lui expliquait la confection de mes oiseaux sur les bras.
En fait, j'ai trouvé.
Je ne peux pas être en parfaite connexion, sur la même onde si je ne la connais pas ! On s'est quittés quand on était encore adolescents. Tout change quand on devient adulte, notre vision du monde mais aussi nos goûts et nos priorités.
Si je veux tenter de renouer avec ma Star, je dois réapprendre à la connaître. Difficile cela dit si elle refuse de m'adresser un mot. Mais je connais une personne qui la connait mieux que n'importe qui !
C'est le seul être humain qui était là pour moi, plus que n'importe qui sur cette planète. Après avoir passé plusieurs mois en sa compagnie, j'avais trouvé une deuxième mère en elle, une femme pour qui je ferais tout.
Amanda Millet Johnson.
Je n'ai pas besoin de frapper à la porte qu'elle m'accueille les bras grands ouverts. Je m'y réfugie avec plaisir, sentant son parfum de jasmin. Je suis plus grand qu'elle alors je pose mon menton sur le sommet de sa tête tandis que ses bras encerclant ma taille.
Amanda m'invite à rentrer et me propose un café alors que je m'installe à table, observant sa cuisine, toujours sans aucune trace de poussière.
Elle m'informe qu'Ayden est partie au travail et qu'elle était en train de jardiner dans le jardin. Je me propose de l'aider et nous plantons des légumes et des roses rouges dans son potager.
Équipé de gants et d'un tablier pour ne pas me salir, je recouvre la germe de navet de terre alors que je sens le regard d'Amanda sur ma peau. Je me tourne vers elle et aperçois une lueur de curiosité dans son regard.
— Alors Ezra, parle-moi de toi.
Je souris faiblement, sachant parfaitement que ce ne sont que des mensonges qui sortiront de ma bouche. Je ne peux pas lui avouer mes années de prison et pour intégration dans le gang familiale. Elle pourrait être en danger et je ne supporterai pas de voir la déception dans ses iris.
— J'ai fait des études en...
— Non. Me coupa-t-elle. Si tu ne veux rien me dire, je l'accepterai. Mais ne t'avises même pas de me mentir.
Je secoue la tête, en me disant que cette femme est vraiment spéciale et unique. Ne voulant pas prendre de risques, je garde ma bouche fermée et continue à tasser la terre.
Mon cerveau fuse alors que ma conscience me souffle de tout lui avouer. Amanda a toujours été là, même quand on me jugeait sur mon physique et mon passé. Elle avait été au-dessus de tout cela et ne comptant que sur ce qu'elle voyait et pas sur les rumeurs.
Elle m'a soutenu quand Aza et moi étions en dispute, m'expliquant les diverses choses qui pourraient m'aider dans mon avenir. Je passais mes journées chez elle, Amanda m'offrait un refuge dans mon monde ténébreux.
La gorge serrée, je fixe la terre, les genoux ancrés au sol.
— J'ai passé sept ans de ma vie en prison, avouais-je d'une voix bancale.
Je sens tous ces mouvements s'arrêter dans l'instant même et mon cœur manque de se briser à l'idée de la décevoir. Elle en aurait tous les droits, depuis que je la connais, Amanda a tout fait pour me mettre sur le droit chemin, pour que je vive tel l'adolescent que j'étais. Et dès que je suis parti, j'ai effacé tout ce qu'elle m'a appris pour plonger dans l'enfer, faisant partie des serviteurs du diable.
Sa main sur mon épaule me fait sursauter alors que je n'ose pas relever la tête.
— Ezra, regarde-moi, m'ordonna-t-elle alors que je refuse en secouant la tête.
J'ai sûrement l'air d'un gamin qui fait sa crise mais c'est au-dessus de mes forces. Voyant que je ne réagis pas, elle prend mon visage en coupe, plantant ses pupilles dans les miennes.
Elles sont dépourvues de dégoût ou de colère. Je lis simplement de la compassion et de l'amour. Puis, elle me prend dans ses bras.
Je reste immobile quelques secondes avant de profiter du contact maternelle qu'elle m'offre en fermant les yeux. Nous restons un bon moment dans cette position et ça fait du bien.
J'aurais aimé prendre ma mère dans mes bras, avant qu'elle ne parte.
Je recule alors qu'Amanda essuie une larme que je n'avais même pas senti couler sur ma joue.
— Ezra, tu te rappelles que ce que je t'es dis il y a dix ans ? Que tes actes ne font pas de toi une mauvaise personne. Tu es aller en prison ? Et alors ? J'avais fait une garde à vue quand j'avais dix-sept ans pour une histoire de vol. Et regarde-moi, je suis toujours vivante, en bonne santé et heureuse.
— Ce n'est pas comparable, disais-je dans un sourire.
— Azalea le sait ?
Je secoua furtivement la tête.
— Non, elle ne doit pas le savoir. Elle me haïra. Elle n'est pas compréhensible comme toi. Tu analyses avant de te jeter dans le tas, Azalea fonce tout droit sans s'arrêter. Elle ne me le pardonnera jamais.
— Comment tu le sais ?
— Parce que je suis un monstre... J'ai fait des choses horribles Amanda...
— Je t'interdis de te comparer à un monstre Ezra. Parle-le moi, dire des mots sur ce qu'on ressent nous permet de nous décharger d'un poids. Et tu sais que je ne te jugerais jamais.
Je sais que je ne devrais pas, mais Amanda a toujours eu un argument convainquant pour m'amadouer. Alors je prends une grande inspiration pour lui raconter toute mon histoire, de A à Z. Comme je ne l'avais encore jamais fait.
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