Chapitre 6

Je me suis endormi tard hier soir.

Mon stalker est revenu, comme prévu, et il a attendu jusqu'à deux heures du matin avant de repartir. Encore une fois, il a abaissé et relevé lentement la poignée, comme pour indiquer son départ, puis plus rien.

Heureusement que j'ai pu faire la grasse matinée ce matin, parce que je ne me serais pas senti d'aller en cours aujourd'hui. Je suis à peine remis de la gueule de bois de la veille, et j'ai un nombre incalculable d'heures de sommeil à rattraper.

Agressé par les vibrations incessantes de mon portable sur ma table de chevet, je me décide enfin à bouger pour le récupérer. J'ai plusieurs messages et appels manqués d'Hoseok. En ouvrant le premier je me rends compte que j'ai complètement zappé la sortie prévue.

Il est quatorze heures, je suis encore à poil dans mon lit et mon ami vient de me dire qu'il arrivait avec les autres dans quinze minutes, dans un message qui a été envoyé, il y a dix minutes.

Je saute hors de mes draps, et m'habille rapidement en sautant la case hygiène pour ce matin. Je renifle mon haleine au cas où, et finalement un brossage de dents s'impose quand même.

Cinq minutes plus tard, je saute dans mes pompes au moment où l'on cogne à la porte. J'ouvre et tombe nez à nez avec quatre visages souriants. Je bronche intérieurement. J'avais espéré, l'espace d'un instant, qu'ils oublient. Mais non, c'était trop demandé.

- Salut Kook. Je m'inquiétais, tu répondais pas à mes messages.

- Ouais, désolé, je dormais et j'ai pas eu le temps, répondis je en sortant.

- Bah tu nous fais pas rentrer ?

Je me retourne vers Yoongi qui me regarde les mains dans les poches, un sourcil arqué.

Les faire rentrer ? J'allais leur dire ouais. Déjà qu'ils se sont invités à cette sortie, alors les inviter chez moi. La blague.

- Ne rêve pas trop Yoongi, ricanais je en refermant ma porte.

Je l'entends pouffer derrière moi, puis nous prenons finalement la route.

- Au fait on va où ? demandais je.

Hoseok se retourne vers moi en souriant à pleine dents.

- Y a une fête foraine qui s'est installée avant hier, c'est à trois arrêts de métro de chez toi.

Nous descendons dans la bouche de métro avant de nous engouffrer dans la rame. Le roux et le bizarre (ouais c'est plus court que sourire rectangulaire) sont surexcités par la sortie. On dirait de vrais gosses.

Ils m'énervent.

Ils m'énervent parce que j'ai l'impression de ne plus avoir les capacités de m'amuser en toute insouciance comme eux. La possibilité que mon stalker soit encore près de moi m'empêche d'être serein. Cependant, aujourd'hui, comme les deux jours précédents d'ailleurs, il n'a pas l'air d'être là, alors je vais essayer d'en profiter comme je peux.

Quelques minutes plus tard, nous sortons enfin à l'air libre. Être sous terre me rend à moitié malade, c'est comme si j'allais manquer d'air d'une minute à l'autre. J'inspire alors bruyamment. Mon ami pose sa main sur mon épaule en me souriant. Je le repousse discrètement puis nous nous dirigeons vers le parc éphémère.

C'est gigantesque, je ne m'attendais pas à ce genre d'envergure pour une foire temporaire.

Les garçons, sauf Yoongi, courent immédiatement vers l'entrée en rigolant. De vrais gosses je vous dis. Le poireau se rapproche alors de moi et me sourit.

- Tu cours pas avec eux ?

- Pas vraiment mon truc. Et toi ?

- Pareil.

La conversation s'arrête là. Et tant mieux d'un côté. Je n'ai pas grand-chose à lui dire en fait. Même s'il n'est pas foncièrement désagréable, mais j'ai vraiment du mal à engager une conversation. Puis de toute façon, on arrive déjà au niveau des garçons qui viennent d'acheter nos places.

Yoongi attrape la mienne en même tant que la sienne, puis me tend le morceau de papier en souriant. J'attrape mon ticket en faisant attention d'éviter tout contact avec ses doigts et nous rentrons dans le parc.

L'après midi est bien entamé et, finalement, je dois revenir sur mon avis précédent. J'ai été de mauvaise foi et, pour une fois, je reconnais mes tords, ce qui est exceptionnel dans mon cas.

La journée se passe super bien, les garçons sont loin d'être aussi désagréable que je le pensais. Au contraire, je dois même dire que j'arrive à m'amuser, et ça fait du bien. Vraiment. Je ne me soucie de rien et je profite des attractions avec les autres. Je bouffe comme un ogre, chose que je n'ai pas faite depuis longtemps, et rigole, et ça aussi c'est exceptionnel. Définitivement.

- Allez on y va les garçons ça peut être bien !!

Taehyung regarde Jimin et Hoseok et les supplient du regard en pointant du doigt la maison hantée.

- J'aime pas ça moi ! Boude mon ami. Jungkook aide moi.

Je rigole en levant les mains.

- Je ne prends pas partie Seokie désolé.

Taehyung me lance un regard déçu. Je continue alors.

- Mais je dois dire que je voudrais bien tenter !

Le brun se met alors à sourire à pleine dents, ses lèvres formant alors un rectangle, pendant que les deux autres soupirent. Yoongi ne dit rien, mais je suis sûr qu'il est pour aussi, vu la façon qu'il a de regarder la maison.

Finalement et après, ce qu'il m'a presque semblé être des heures de négociations, nous entrons tous les cinq dans le couloir sombre devant nous. Des acteurs sortent de nulles part pour nous faire peur, et Jimin n'arrête pas de hurler comme un hystérique. Sérieusement, ce mec n'a pas de couilles.

Mes mains dans les poches, je ferme la marche, suivant les garçons quelques mètres derrière eux, quand, soudain, une antre complètement noir se dresse devant nous.

Les ténèbres à l'intérieur sont si intenses qu'on ne se voit même plus. Je déglutis. Ces ténèbres me refont penser à la ruelle. À ce soir là.

Sans m'en rendre compte, mon cœur s'est déjà mis à battre plus rapidement dans ma poitrine. Mon corps se tend et mes muscles se crispent. Je n'avance plus, je reste immobile dans cette pièce où le silence vient de s'abattre.

Il n'y a vraiment plus aucun bruit à part celui de ma respiration qui devient de plus en plus erratique. Est ce que les autres sont déjà partis ?

Je tourne la tête dans tous les sens, essayant de voir une bribe de lumière, mais c'est sans succès. Je ne vois rien, je n'entends rien et je n'arrive plus à bouger. Mon corps se met à trembler et le foutue malaise revient assiéger mon corps et mon esprit.

Putain, j'ai peur. Fais chier pourquoi j'ai peur. Il n'est pas là. Mon stalker n'est pas là. Enfin je crois. Non j'en suis sûr. Il ne peut pas être là. C'est impossible. Je l'aurai senti s'il était là.

Mes mains tremblent de plus en plus. Je ne sais pas ce que je dois faire. Je suis tétanisé. Il faut que j'essaye d'avancer ou que j'appelle les autres. Même si ça serait mettre ma fierté de côté, mais là je ne peux pas faire autrement.

Alors que je m'apprêtais à ouvrir la bouche, un léger crissement de semelle retentit à côté de moi. Je tourne le regard vers les ténèbres à ma droite, mais bien sûr je ne vois rien. Un de mes pieds bouge finalement et fais un pas en arrière, mais c'est trop tard je le sens. Cette chose dans la pièce, est maintenant trop proche.

Une boule de terreur se crée dans ma bouche et s'apprête à exploser quand des doigts viennent s'entremêler dans les miens. Je me crispe une nouvelle fois, mais soupire presque de soulagement quelques instants après.

C'est bizarre. Je ne panique plus. Toute ma peur s'est envolée lorsque que cette main chaude et chaleureuse est venue se placer dans la mienne. Par réflexe, je tourne le visage vers cette personne et plisse des yeux mais l'obscurité m'empêche de voir qui est ce qui me touche. Qui est ce qui est à côté de moi en ce moment ?

Je déglutis, mais ma gorge est toujours trop sèche et je n'arrive pas à prononcer un seul mot. Je trésaille légèrement au moment où son pouce glisse sur ma paume. Son doigt dessine de petits cercles qui se veulent rassurant et ma respiration redevient normale.

Après quelques instants, il me fait avancer dans la pièce, lentement, en prenant soin d'accompagner chacun de mes pas, puis, enfin j'aperçois un peu de lumière. À ce moment là, il me lâche sans rien dire. Les bruits de ses pas s'éloignent jusqu'à devenir imperceptible et disparaître pendant que je continue d'avancer. Finalement je débouche sur la sortie, en reprenant bruyamment mon souffle et les quatre garçons m'attendant en souriant.

- Alors tu t'étais perdu ou quoi Kook, demande Hoseok en rigolant.

Je hausse un sourcil et me retourne vers la pièce sombre derrière moi. Pourquoi ils sont tous les quatre là ? Je ne comprends pas. Ce n'est pas un d'entre qui a pris ma main ?

- Les gars... c'est qui... à l'intérieur.... qui....

Je bredouille et n'arrive même pas à aligner plus de deux mots. Ils me regardent en haussant les sourcils. Alors ils n'ont vraiment pas l'air de comprendre ce que je suis en train de dire. Ou alors l'un d'entre eux fait semblant. Ou alors...

Un frisson me parcoure l'échine. Est ce que ça pourrait être mon stalker à l'intérieur ? Non, je n'ai pas senti sa présence comme d'habitude. C'est impossible.

Je me retourne de nouveau vers la sortie de la maison hantée. Il n'y a personne.

- Jungkook ?

Je leur refais une nouvelle fois face. Je ne peux surtout pas leur dire ce qu'il vient de se passer. Pour quoi il me prendrait ? Un taré sûrement.

- Non, rien laissez tomber. Je vais rentrer, je vous avoue que je suis fatigué.

Je leur passe devant en reprenant mon air froid habituel. Cependant, alors que je pensais qu'ils allaient me laisser sans rien dire, j'ai maintenant quatre chiens collés à mes basques. Je soupire en jetant un coup d'œil en arrière.

- Si tu rentres on rentre aussi, rigole Jimin en s'approchant de moi et en passant son bras autour de mon cou.

Je grogne en brisant son emprise. Il commence à devenir vraiment trop tactile à mon goût et ça m'énerve, clairement. Je souffle et garde le rythme de ma marche sans attendre les autres derrière moi. Mais un souffle chaud vient s'écraser dans ma nuque

- Mignon.

Je me retourne immédiatement. C'est encore Jimin. C'est bon j'explose. Je le prends par le col et le regarde méchamment en le faisant reculer en arrière.

- Tu commences à me les briser ! Sérieusement ! Je t'ai déjà dit que je n'étais pas gay, alors t'arrêteras avec tes réflexions à deux balles, ou je vais vraiment t'en coller une !

Les trois autres nous regardent sans rien comprendre. Finalement, je le lâche brutalement et tourne les talons.

- Eh Jungkook !

Mais ça vient pas de lui suffire cette explication ou quoi ?

- C'est prétentieux ce genre de réflexion tu sais. De toi à moi. Tu ne m'intéresses pas le moins du monde alors descend un peu mec.

Je m'arrête légèrement sous ses paroles avant de reprendre la route et de faire comme si je n'avais rien entendu.

Mais j'ai entendu.

Et du coup, petit un, j'ai honte de ma montée de colère et petit deux, pourquoi il était comme ça avec moi si je ne l'intéressais pas ? C'était juste pour me faire chier ? Ou pour me faire péter un câble ?

Je ne marche plus maintenant, je cours. Tout ce que je veux c'est rentrer chez moi et me vider la tête, seul. Je marche jusqu'à l'arrêt de métro, et m'y engouffre rapidement. Dans la rame, je reporte le regard vers ma main et repense à ce qu'il vient de se passer.

Cette chaleur apaisante, je la sens encore sur ma paume. Qui est la personne qui a pris ma main ? Est ce qu'elle savait que je paniquais ? Que je m'étais perdu ?

Le plus bizarre dans tout ça, c'est que, quand cette personne m'a touché, je n'ai pas ressenti le dégoût habituel que j'ai quand quelqu'un me touche. C'est la première fois, depuis que j'ai ce problème, que j'apprécie le contact d'un individu.

Putain mais qui c'était ?

Je grogne en portant ma tête contre mes mains et mes coudes se pose sur les genoux. Ça me rend dingue. Tout me rend dingue en ce moment. Ces garçons, mon appartement, et puis ces photos.

Il m'en a déjà envoyé deux. Mais je sais qu'il y en aura d'autres, beaucoup d'autres. Je le sens, c'est comme un vieux pressentiment que j'ai. Et je suis sûr qu'il va être encore plus fondé, quand je vais arriver chez moi.

Il y aura une photo, m'attendant gentiment sur le palier. Un morceau de papier brillant que je prendrais dans ma main avant de finalement le poser sur ma table basse. Comme un puzzle, je vais garder ces sortes de preuves et essayer de comprendre ce qu'il fait, de le comprendre lui. Parce que je ne veux pas seulement qu'il se stoppe, je veux comprendre. Je veux savoir pourquoi moi.

Je monte les marches de mon immeuble trois par trois et débouche enfin à mon étage. Essoufflé, je reprends mon souffle en avançant plus lentement. Mes yeux sont fixés sur mon palier. Il n'y a rien. Rien du tout. Pourquoi il n'y a rien, mais le pire, c'est pourquoi est ce que je suis légèrement déçu ?

Sans m'attarder sur le pas de ma porte, j'entre finalement, et me pose sur le canapé. Pendant deux bonnes heures, je zappe les différentes chaînes à la télévision, mes pupilles faisant des allers retours entre cette dernière et ma table basse.

Ça m'énerve parce que je pensais commencer à le cerner, ne serait ce qu'un peu, mais pas du tout finalement. Il n'y aura pas de régularité dans ses envois. C'était juste une blague qui a duré deux jours. Il ne cherche pas à me parler par papiers interposés, il veut juste jouer avec moi.

Il n'y a aucune raison à tout ça. Il n'y a au final rien à comprendre avec lui.

Ma théorie était complètement fausse. Et clairement ça me fout les nerfs en pelote. Ça me casse les couilles si on veut aller dans le vulgaire.

Pourtant, alors que je regarde ma porte en soupirant, le bruit me parvient soudainement aux oreilles. Il s'arrête devant mon palier, et je me lève rapidement pour rejoindre ce dernier. C'est lui je le sais, et intérieurement, je suis légèrement excité.

Je me tiens debout, devant le pan de bois qui nous sépare, et attends un signe, sans dire un mot. Puis, quelque chose choque contre mes orteils, avant que mon stalker ne s'en aille.

Je ne regarde pas encore le sol, j'attends. Il s'en va vraiment. Pourquoi, il ne reste pas ce soir ? J'essaye de réfléchir sur le pourquoi du comment de son départ précipité, mais la tentation de ce qu'il y a par terre est trop forte.

Mon regard descend finalement sur le bas, et n'aperçoit que la phrase joliment écrite au marqueur noir.

« Prudence est mère de sûreté »

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