Chapitre 18


Les poings ensanglantés, les mains douloureuses, je continue de serrer presque désespérément la caméra en pleurant.

De violents flash continuent d'apparaître dans mon crane, de remplir mon esprit, avant de le vider complètement. L'espace de quelques secondes je me sens plein, entier, comme jamais je ne l'ai été, et l'instant d'après tout disparaît. Plus rien.

Le noir.

Mon néant douloureux et habituel.

Inlassablement, les larmes coulent encore et encore sur mes joues, alors que ma respiration s'accélère encore et encore. Je n'arrive pas à arrêter ses sanglots. J'ai l'impression d'avoir besoin de pleurer, de laisser sortir ce torrent de sentiments, mais je n'en comprends pas la raison.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi est ce que je suis triste à ce point.

Je ne comprends rien du tout de toute façon.

C'est comme avec Yoongi.

Il y a quelque chose de tellement familier avec lui, de tellement rassurant et d'effrayant en même temps. C'est comme si d'un côté, mon esprit me disait de l'éviter alors que mon cœur me poussait vers lui.

Pourquoi est ce que ma vie doit être un foutoir comme ça ?

Pourquoi est ce que j'ai cette foutue impression d'oublier des détails presque volontairement ?

Pourtant je veux me souvenir de ces détails. Du moins, je devrais le vouloir. Mais encore une fois, une partie de moi bloque la route à ces souvenirs. Et d'une certaine manière, ça me semble justifié. Sans que je ne le comprenne.

Encore une fois.

Pourquoi est ce que je n'arrive jamais à comprendre.

Je suis stupide. Insignifiant. Médiocre. Inutile.

Personne n'a besoin de moi ici.

Je n'ai d'utilité pour personne.

Je suis juste un boulet.

Un poids qu'on traîne sans réussir à s'en débarrasser.

Je replis mes jambes contre mon torse, les appuyant brutalement contre ce dernier, bloquant au passage ma respiration. Mes doigts collant de sang et tremblants, finissent par jeter la caméra au sol, à quelques mètres de moi.

Mon seul lien avec Yoongi s'explose alors contre le parquet, bruyamment. Des morceaux de plastiques arrivent à mes pieds, et je pleure de plus belle, en écrasant mes genoux au sol.

Aussitôt, mes mains attrapent le cadavre de l'appareil qui doit être inutilisable maintenant. Pourtant, j'essaye de le réparer, faisant tenir les morceaux ensemble comme je peux, bredouillant parfois des excuses entre deux reniflements.

Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça. Pourquoi est ce que je l'ai cassé ? Je n'aurais pas du.

Comment est ce qu'il va pouvoir me voir maintenant ?

Comment Yoongi va pouvoir veiller sur moi ?

Ça semble insensé. Tout ce que je dis, tout ce à quoi je pense, le semble. Cependant, je crois que ça ne l'est pas totalement.

Qu'il y a un sens dans mes réactions incompréhensibles. Il faut juste que je le trouve.

Couché sur le parquet de ma chambre, la caméra dans les mains, pressée contre ma poitrine, mes pleurs diminuent alors que mes yeux restent fixer sur le plafond. Ma respiration devient plus calme au fur et à mesure que les minutes passent, tout comme mon cœur.

Je fais le vide au fond de moi. Je ne pense qu'à Yoongi, qu'à son visage, son odeur, cette sensation de plénitude qu'il arrive à faire naître en moi. Il m'obsède.

Ouais, Yoongi m'obsède.

Tout de lui me rend fou, m'intrigue et m'énerve en même temps.

Je n'arrive pas à avoir autre chose que sa personne dans mon esprit, mais ça ne me dérange pas. Le voir dans mes pensées m'apaise progressivement et je reprends peu à peu mes esprits.

Puis finalement, je me relève doucement, comme si de rien était. Comme si ma crise de colère n'était qu'un rêve lointain, quelque chose qui ne s'était pas vraiment passé. Comme si ma cuisine et mon salon étaient dans un parfait état. Pourtant, je sais au fond de moi que ça ne l'ai pas.

Le cadavre de la caméra toujours dans la main, je descends finalement le regard dessus, et mes dents accrochent fortement mes lèvres, alors que mes yeux retiennent de nouvelles larmes.

Je m'apprête alors à écarter l'appareil de moi aussi rapidement que possible, quand, brusquement ma porte s'ouvre dans un claquement sonore qui retentit dans tout mon appartement.

Je sursaute aussitôt. Je n'avais pas fermé à clés ? Si je le fais toujours, je ferme toujours à clés. J'y ai pensé. Ce soir, je suis sûr d'y avoir pensé.

Je n'ai pas le temps de réfléchir plus longtemps qu'une silhouette déboule soudainement sur le palier de la pièce où je me trouve, et me fixe, les yeux presque fous, à quelques mètres de moi.

Yoongi dans l'embrasure de ma porte, les poings serrés contre son ventre, le souffle court, son regard cherchant inlassablement le mien.

Il a l'air inquiet, mais aussi rassuré d'une certaine manière. D'une manière que je n'arrive pas à comprendre.

En le voyant comme ça, autant impliqué par ma personne, parce qu'il a sûrement dû me voir m'énerver à travers la caméra, me fait me sentir mal. Un sentiment de culpabilité m'envahit alors, et je refonds en larmes en tendant le cadavre de son appareil vers lui.

- Yoongi... J'ai cassé la caméra... Je l'ai cassé... excuse moi... je ne voulais pas...je...

Ma phrase n'ira pas plus loin. Je n'en ai pas eu le temps. Au moment où j'ai commencé à ouvrir la bouche, Yoongi s'est rapproché rapidement de moi, avant de se jeter sur ma bouche.

Ses mains enserrant durement mes joues, alors que ses lèvres chaudes se pressent contre les miennes, je reste figé.

Une sensation étrange envahit immédiatement mon bas ventre, cette même chaleur que j'ai ressenti tout à l'heure dans la salle de classe, mais en beaucoup plus forte, et concentrée.

D'un naturel presque déconcertant, je passe mes bras autour de son cou, le rapprochant un peu plus de moi, pendant que lui me pousse vers le matelas, jusqu'à ce que, finalement, nos deux corps tombent lourdement sur le lit.

Je me retrouve alors, le dos contre les draps, surplombés par Yoongi qui m'observe, la respiration sifflante et les mains de part et d'autre de mon visage. Il est fébrile, et loin d'être calme. Je ne l'ai jamais vu comme ça. Il n'a jamais été aussi expressif.

C'est comme si cette froideur naturelle qu'il avait s'était transformé en désir ardent. Et ce désir, c'est moi qui est en train de le créer. Seconde par seconde ses pupilles, plantées dans les miennes, s'assombrissent encore et encore.

Rien que son regard réussit à me rendre fou, je sens mon cœur s'emballer immédiatement, et mes membres trembler. Mais ce n'est pas de peur, c'est d'excitation. Je suis impatient d'en avoir plus, d'avoir plus de Yoongi, de le sentir, entièrement.

C'est comme si j'avais attendu ce moment toute ma vie. Que depuis trop longtemps j'avais besoin de ce contact. Et qu'enfin je pouvais l'avoir.

Pourquoi est ce que j'ai l'impression que le fait d'avoir Yoongi près de moi me permet d'enfin respirer librement ?

Lentement, son visage se rapproche du mien. Il observe mes réactions, de manière prudente, comme s'il cherchait à sonder mes réactions, comme si, à la moindre trace de peur ou d'appréhension que je laisserais paraître, il s'enfuirait, comme un voleur.

Pourtant je n'ai pas peur, loin de là, mais lui ne le sais pas. Il n'est pas dans ma tête, il ne peut pas comprendre cet étrange flot de sentiments contradictoires qui se mélangent dans mon esprit. Il ne peut pas savoir que, malgré le fait que je l'ai repoussé, je ne lui en veux pas, je ne le déteste pas.

Je ne pourrais pas le détester.

Jamais.

Arrivé à quelques centimètres de mes lèvres, il s'arrête finalement avant de fermer les paupières, puis il soupire. Il essaye de se contrôler, de ne pas refaire le contact. Pourtant il en a envie et moi aussi. Moi aussi j'en crève d'envie. Je veux encore sa bouche contre la mienne. Je veux encore sentir cette chaleur grandir dans mon bas ventre.

Mes mains traînant alors contre mon corps, remontent autour de sa nuque pour l'effleurer. A ce contact, il ouvre immédiatement les paupières en lâchant un lécher grognement. Puis, il me regarde tendrement, comme s'il me demandait la permission d'aller plus loin. Comme s'il avait besoin de mon approbation.

- Je n'ai pas peur Yoongi.

A ma remarque, son front vient alors se poser contre le mien, et son souffle brûlant s'écrase sur moi.

- Mais tu ne comprends pas non plus pourquoi tu n'as pas peur. Ce n'est pas logique, tu le sais n'est ce pas ?

Ses doigts viennent alors caresser ma joue, essuyant au passage les dernières traces de larmes qu'il restait, alors que je me contente de froncer légèrement les sourcil, conscient que sa remarque avait une portée que je n'arrive pas à saisir.

- Qu'est ce que tu sais ?

Aussitôt, et comme pour effacer, ma question, ses lèvres viennent se poser rapidement sur les miennes avant de se retirer.

- Je suis désolé Jungkook, je n'ai pas le droit.

Je suis perdu. Pourquoi est ce qu'il a l'air de savoir plus de choses sur moi que moi même ? Et pourquoi il ne veut rien me dire ?

J'ai besoin de réponses. J'ai besoin de comprendre. C'est vital.

- Yoongi... S'il te plait.

De nouveau, il me fait taire par un baiser avant de reprendre, en serrant un peu plus fort mes joues.

- Ne parle pas. Ne demande rien. Laisse moi juste te toucher. Laisse moi te faire te sentir bien. Regarde moi. Ne pense qu'à moi. Oublie le reste Jungkook. Oublie la peur, oublie tes problèmes, oublie tout ce qui a pu te rendre dingue ces derniers mois. N'aies que moi en tête. Moi et seulement moi. C'est tout ce que je te demande, juste pour cette nuit, accepte moi sans poser de questions. Accepte nous.

Puis, comme pour clôturer ce discours, il m'embrasse encore, plus passionnément cette fois. Et de nouveau mon corps se remet à frissonner. Mes sens et mon esprit s'embrouillent. Mes mains se perdent brutalement dans son dos. Cherchant encore plus de contact. Cherchant à le rapprocher encore plus de moi.

Je grogne contre ses lèvres, alors que sa langue essaye de se frayer un passage entre ses dernières. Puis elle réussit, et vient chercher la mienne. Naturellement, mes jambes s'écartent, et son bassin s'y place, le collant au mien. Je suis déjà dur, je le sens bien. Et lui aussi. Je sens son désir, je sens qu'il est aussi fort que le mien.

Tout ce que je ressens en ce moment, est tellement naturel. Tous mes gestes sont comme guidés par quelque chose que j'ai l'impression de déjà connaître.

Cette situation. Il y a une sorte de familiarité déconcertante là dedans. Comme si je l'avais déjà vécu, des bonnes centaines de fois. Comme si le corps de Yoongi contre le mien, c'était juste une chose de logique, de naturelle, d'habituelle.

Comme si ce que l'on s'apprête à faire était destiné à se produire.

Parce qu'en ce moment, parce que sur ce lit, Yoongi et moi, c'est juste une évidence.

Alors, même si je veux des réponses, plus que tout, je ne le repousse pas. Je ne veux pas le repousser. En cet instant précis, l'avoir contre moi est plus important que tout le reste.

Alors je vais l'écouter.

Je vais vider mon esprit. Je vais ne voir que lui. Ne penser qu'à lui.

Pour cette nuit, je vais l'accepter.

Pour cette nuit, sans poser aucune question, je vais nous accepter.



NDA :

Hello ! Re moi ! 

La chapitre vous a peut être paru bizarre. Surement parce qu'il l'est et c'est voulu, mais en vrai j'ai vraiment un avis mitigé sur celui ci, j'ai peur d'avoir mis trop et pas assez d'infos en même temps. 

Après je sais qu'il est relativement vide en terme d'indices concrets, mais c'est voulu, je ne voulais pas faire plus long, parce que j'aime mon format des environ 2000 mots par chapitre, et je voudrais rester sur ça pour rester cohérente. 

Enfin en tout cas j'espère que le chapitre vous auras quand même plu. 

Promis la prochaine fois, vous aurez le droit à un cliffhanger de fou ! 

Loutres sur vous :)

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