Chapitre 9 : mes premiers rendez-vous

Per aspera ad astra. Depuis les épines, jusqu'aux étoiles.

Seattle est mon étoile.

Phoenix, mon épine.

Une phrase que j'ai lue un jour dans un livre et qui ancre à présent ma clavicule. Un souvenir qui se met à picoter ma peau alors que je suis appuyée sur la fenêtre de ma chambre d'hôtel, mes genoux ramenés à ma poitrine à peine couvert de mon peignoir.

L'avion m'a tout juste déposé en Arizona qu'une vague de souvenirs m'a subjugué au point de me couper la parole nette dans ma bouche. Et si Holden est trop occupé à reprendre une affaire d'urgence à distance, je me retrouve seule sur le balcon à regarder la ville s'illuminer dans le noir.

L'hiver ne vole pas les effets désertiques de la ville et une douce brise s'écrase sur ma peau, séchant l'eau d'une douche éternelle.

J'aurais aimé que Mia soit là.

J'aurais aimé passer tout le reste de mon temps en désillusion avec elle.

J'aurais aimé balayer cette histoire et revenir à Seattle.

Mais l'amère me gagne et je suis seule.

— Saddie ?

Pas si seule.

Je tourne la tête vers Holden qui se tient près de l'immense lit aux draps blancs, son ordinateur à la main. Il le dépose si doucement que chaque muscle de son corps semble rouler sous l'effort.

Parfois, il me surprend.

Il est irréel et pourtant, fait de chair et d'os. Un corps que j'aimerais toucher. Aduler.

Malheureusement, il y a trop de distance.

— Sors, ce soir.

— Je n'en ai pas envie.

— Tu as confondu mon ordre avec une question.

Son grondement résonne à travers la pièce entière. Au point où elle paraît vide. Il n'y a plus de lit, plus de petits sièges en velours, plus rien du tout... Seulement lui et ses foutus mots froids à la bouche.

— Et est-ce que monsieur le dictateur a une destination précise, pour moi ?

— Fais ce que tu veux. C'est ta ville natale, non ?

Et juste comme ça, il replonge à nouveau sur les draps et enfonce son nez dans l'écran de son ordinateur. Les lèvres plissées, je me redresse et avance jusqu'à lui, mais surtout à ma valise posée devant lui.

— Serais-tu aussi occupé, demain soir ?

Son nez se fronce sous un petit rire et il me décoche un regard acerbe.

— Ne compte pas là-dessus.

— Sur quoi, alors ?

Je laisse tomber mon peignoir le long de mon corps et me penche suffisamment pour couper sa vue à son écran.

— Tu as déjà essayé ça, Saddie, renifle-t-il.

— Oui.

— Et ça n'a pas marché.

J'attrape une robe rouge que j'enfile langoureusement et laisse chuter mes cheveux sur mes épaules, jusqu'à présent attachés dans un chignon.

— Peut-être. Mais je vais te laisser travailler ici en sachant que je vais boire un verre... Sans sous-vêtements.

Holden redresse le bout de son nez vers moi et vocifère :

— Tu n'as pas intérêt.

— Regarde-moi.

Dans un petit pivotement, j'attrape un sac avant de claquer la porte de la chambre derrière moi.

Partir est une bonne idée. Sûrement la meilleure qu'il ait pu avoir. S'il me jette dans une benne à épines, j'aimerais saigner de mon côté... Je ne tiens pas à l'éclabousser.

Qui sait...

Il aurait le malheur de vouloir m'aider.

Et Holden a une fâcheuse tendance à convoiter la destruction, quand c'est le cas.

Moi et lui y compris.

***

Parfois, j'ai le besoin pathologique de prendre mes affaires, marcher dans la mer et espérer rejoindre un royaume de sirènes et de magie. Avancer dans les vagues et me laisser transporter dans un monde magique, comme ceux décrits dans les livres.

À la place, je regarde mon cocktail changer ses couleurs au gré de la lumière du hall.

Tout au fond de moi, j'aurais voulu que Holden me suive. Je préfère passer mon attention sur une dispute avec lui, plutôt que de la laisser sur Phoenix. Mais peut-être est-ce qu'il l'a compris.

Malheureusement, je n'ai pas épousé un homme stupide.

Dans un soupir, je décroche mes doigts entremêlés et m'apprête à faire signe au barman de me servir la même chose, quand soudain, un cri suffoqué retentit derrière moi.

— Saddie ?! Oh mon Dieu, mais c'est bien toi !

Je n'ai même pas le temps de me tourner que des bras s'enroulent autour de ma nuque et que mon nez se retrouve enfoncé dans un décolleté plongeant.

— Je n'aurais jamais cru te revoir un jour de ma vie !

La femme me desserre de son étreinte que pour me faire voir un sourire des plus éclatants. Il y a une certaine pureté qui s'émane d'elle que je reconnais tout de suite, à défaut de ses longs cheveux dorés et de ses lèvres pulpeuses teintées de rouge.

— Attends... Ne me dis pas que... Oliver ?

— C'est Olivia, maintenant.

Folle de joie, j'abandonne mon verre, me redresse de mon tabouret et la serre à nouveau dans mes bras, la forçant une énième fois à abandonner ses deux valises derrière elle.

— Tu as réussi ! Je suis si heureuse pour toi !

— Ne suis-je pas magnifique ?

Je la fait tourner sur elle-même et elle éclate d'un rire si joyeux qu'il éclipse le nuage orageux qui stagnait au-dessus de ma tête depuis des jours entiers.

Olivia a toujours eu cette habilité. Même si elle vivait dans une famille qui était loin de comprendre pourquoi elle aimait autant se mettre du rouge à lèvres et des t-shirts moulants, elle n'hésitait jamais à sourire. Chaque moment qu'on avait pu lui porter dans sa vie a immédiatement été accueilli par l'un de ses légendaires éclats de rire.

Une splendeur humaine qui est probablement la seule bonne chose que je retiens de ma vie passée ici.

Au point où ça me serre le cœur.

Sans perdre de mon sourire, je l'invite à s'asseoir à mes côtés et frappe un coup sur le comptoir pour faire signe au barman de nous servir toutes les deux. Elle balaye ses longs cheveux dorés de ses épaules avant de passer un doigt appliqué dans son trousseau de clefs de l'hôtel.

— Franchement, Saddie, parmi toutes les personnes que j'allais croiser à la réunion, tu étais la dernière que je soupçonnais de venir.

— Ah oui ? Et pourquoi moi en particulière ?

J'enfonce mes dents directement dans ma paille, quand le barman nous sert enfin et Olivia poursuit avec prudence.

— La dernière année n'a été facile pour personne. Mais certainement pas pour toi.

— Je ne vais pas m'apitoyer sur mon sort pendant une éternité, Olivia. Parce que comme tu l'as dit, je n'étais pas la seule.

— Quand bien même.

Elle s'apprête à insister, quand son regard se pose sur la main qui tient mon verre et qu'elle manque de s'étouffer. Dans un petit sursaut, elle se redresse et me la prend en trépignant, presque.

— Oh mon Dieu ! Tu es mariée ?

On fait bien de me le rappeler.

J'arbore mon sourire le plus faux et fait rouler le cadeau empoisonné d'Holden sur mon épiderme jusqu'à ce que les diamants ne se voient plus.

— Depuis un an, déjà.

— Félicitations ! Wow, alors tu as vraiment dû te trouver une perle rare pour faire la concurrence à Cole ! Est-ce qu'il est venu avec toi ?

Malgré mes efforts, mon sourire disparaît automatiquement de mes lèvres et un frisson glacé creuse un sillon dans mon échine.

Parce que je n'attendais pas cette question avant demain.

Moins encore son prénom.

J'aurais voulu passer une putain de soirée en rencard avec mon verre, de l'alcool à flots, dans le vain espoir que si on me la posait le lendemain, je serais trop anesthésié par une migraine de tous les diables pour en être atteinte.

Mais je n'ai pas assez d'alcool dans les veines.

Et Olivia attend une réponse.

Je manque de couiner en me dandinant sur ma chaise, mais me rattrape avec un petit ricanement.

— J'ai épousé un avocat, Olivia. Ce qui veut dire qu'il est dans notre chambre en train de profiter de son travail qui l'a suivi comme un petit chien, pendant que moi...

— Un avocat ? Rien que ça !

Trop occupée à se réjouir de la nouvelle, la blonde attrape la bouteille que le serveur nous a laissé et me sert comme si ce que je venais de lui annoncer était l'exploit du siècle.

Je l'ai pensé, avant.

Mes parents auraient été fiers, d'ailleurs.

Mais quand je bois, ce n'est pas pour trinquer. Plutôt pour oublier le genre d'homme qui m'est lié, à quelques étages au-dessus de ma tête. Dans un petit reniflement aigre, je passe ma main dans mes cheveux et redresse mon regard vers Olivia.

— Tu me dis que tu es surprise de me voir, mais... Je le suis aussi. La dernière fois que je t'ai vu, tu m'avais pourtant dit que tu ne mettrais plus jamais un seul pied ici.

— Et toi, tu m'avais dit que tu étais du même avis, il me semble ? Néanmoins, nous voilà, face à face... Dix ans plus tard.

— Il faut croire qu'il n'y a que les cons qui ne changent pas d'avis.

— Quelque chose me dit que nous sommes connes de l'avoir fait.

Cette fois-ci, c'est à elle de perdre de son sourire. Une cécité tragique envahit ses prunelles, qui, pendant un bref instant, redeviennent comme ceux qu'elle avait avant.

Ceux des enfants brisés.

Ceux à qui on a volé l'étincelle de vie, malgré des années de dure survie.

J'abandonne donc mon verre et lui prend les mains, la forçant à se concentrer sur moi et non les stupides images d'une dépravation passée.

— Restons ensemble, demain. On retournera dans ce trou à rats, la tête haute.

Elle retrouve son sourire charmant et prend une grande inspiration en venant farfouiller dans la poche intérieure de sa veste qui traînait toujours sur ses valises bouclées.

D'ailleurs, je n'en reviens toujours pas que la cérémonie se produira à nouveau dans la même école, après ce qui s'était passé... Je suppose qu'ils ont dû faire des rénovations.

— Je me suis posée cette question un million de fois, aussi.

Elle arque un sourcil et ricane, amère.

— Tu crois qu'il y aura des honneurs ? Des excuses ?

J'ouvre la bouche pour répondre, mais la grande porte vitrée de l'hôtel s'ouvre sous une brise nocturne. Quelques feuilles automnales viennent valser dans le hall tapissé de rouge et mes doigts se perdent dans mes cheveux.

Je n'en sais rien, à vrai dire.

Parce qu'ils pourront dire tout ce qu'ils voudront, comme ils l'avaient fait à l'époque, mais rien ne changera.

Moi, comme Olivia, ainsi que tous les autres...

On avait été là.

Et on est toujours là.

Rien ne s'oublie.

Je secoue la tête pour chasser mes idées et sourit dans la direction de mon amie.

— Peu importe, s'ils le font. Ça ne changera rien.

On s'échange un regard entendu et après une grande inspiration, elle se redresse. Parce qu'elle a ce don, Olivia : effacer une ardoise sur laquelle est inscrit des milliers d'histoires à l'encre indélébile, avec autant d'aisance qu'un coup de torchon.

— Bon. Je pense qu'on aura tout le temps de discuter de tout ça demain. Pas vrai ?

— Exactement. Par exemple, tu m'as demandé sur mon mari, mais... Et toi ? Quelqu'un dans ta vie ?

Ses grands yeux roulent dans ses orbites lorsqu'elle me répond en pouffant :

— Tu parles ! J'ai l'impression que tous les hommes de cette planète se sont passés le mot. Soit, je ne tombe que sur des gros connards qui n'hésitent pas à ne laisser sur ma table de chevet qu'un souvenir de leur foutre joliment emballé dans une capote, soit, je tombe éperdument amoureuse d'un homme qui a déjà une alliance autour du doigt. Dans tous les cas, je pense abandonner la chasse.

Ce n'est peut-être pas si mal.

J'ai envie de lui dire de garder sa liberté. Qu'elle fait bien de rentrer toute seule, le soir, chez elle et de découvrir qu'elle peut tranquillement s'allonger où elle le veut et juste tranquillement être la meilleure version d'elle-même.

Mais je me contente de rire de bon cœur.

— Mais tu sais, c'est quoi le pire, Saddie ?

— Dis-moi.

— Parce que je suis contente de ne pas avoir quelqu'un avec qui il faut que je partage l'autre côté de mon lit si confortable, dans un sens... Mais je n'arrête pas de voir tout le monde recevoir les plus belles déclarations d'amour. Continuer, mais avec quelqu'un à ses côtés. Je veux dire... Est-ce que c'est vraiment si compliqué que ça de demander une petite attention de temps en temps ? Hormis le sexe et... Bref. Je souhaite simplement quelqu'un qui me fasse sentir comme une reine, parfois. Et non un objet qu'on oublie sur le tapis, le lendemain.

J'hoche doucement la tête quand elle se tourne à nouveau vers moi, un sourcil arqué, la pointe du petit parasol de son verre coincé entre ses dents.

— Je veux être capable de me souvenir de mes premiers dîners, même si vingt ans se sont écoulés après.

— Tout le monde mérite ça.

Elle lâche son petit parasol dans son cocktail et s'incline sur le comptoir en balayant ses cheveux dorés de ses épaules.

— Fais-moi rêver, Saddie. Parle-moi de tes premiers rendez-vous avec ton avocat.

Je manque de m'étouffer sur ma boisson et repose mon verre sur le bar.

— Voilà qui est direct... C'est vraiment de ça que tu veux parler alors qu'on vient de se retrouver ?

— Et pourquoi pas ? Ce n'est pas de ça qu'on parle en premier, quand on se retrouve ?

— En dix dans de temps j'ai autre chose à te raconter que mes premiers rendez-vous ! m'entêté-je en me grattant nerveusement la tempe.

Mais elle insiste d'un regard, augmentant ma gêne.

Merde, je ne préférais pas ! Surtout pas maintenant que Holden m'a laissé pour ce soir après une semaine de pure torture émotionnelle...

Et certainement pas alors que je suis assise ici sans même une foutue petite culotte !

— Oh, Olivia... Je ne suis pas sûre que c'est ce que tu veux entendre maintenant.

— Et pourquoi ça ? rugit-elle en se redressant brusquement, presque vexée.

Je glisse ma main dans ma nuque et soupire.

— Parce que ce n'est pas exactement ce dont j'aimerais me rappeler, aujourd'hui.

— Oh, allez, Saddie... Raconte-moi. À défaut d'avoir de l'amour de mon côté, je veux vraiment m'abreuver de celui des autres !

Mes lèvres se scellent sous l'hésitation, tandis que je scrute le visage de mon amie d'enfance, comme si j'y voyais un danger.

S'ouvrir, c'est donner à l'autre un indice où plonger un poignard.

Et je ne suis pas sûre de pouvoir me permettre ça, avec tout ce qui se passe.

Pourtant, quand je fais face à la gentillesse innée d'Olivia, je sais que je n'ai rien à craindre.

J'abandonne donc mon verre que je repousse du bout de mes doigts et revient en arrière.

Au moment où Holden était quelqu'un d'autre.

— D'accord...

Mon ancienne amie d'enfance se redresse, fière d'être parvenue à me persuader et je cherche dans les tréfonds de mon esprit anesthésié par la douleur un souvenir pourtant inoubliable.

Comment le confesser ?

— Je ne voulais pas le revoir. Nous avons eu un premier rencard et à la fin de la soirée, alors qu'il m'a raccompagné jusqu'à chez-moi... Je lui ai dit que je tenais trop à mon espace personnel et que je ne désirais pas avoir quelqu'un à mes côtés. Je suis simplement rentrée et je l'ai laissé planté là, sans même écouter ce qu'il avait à répondre.

— Il avait été si terrible ?

Je souris en harmonie avec Olivia avant de poursuivre, en secouant la tête.

— Non. Non, c'était ça le pire ! On avait passé un bon moment. Mais je n'étais pas persuadée qu'il me voulait parce que je l'intéressais ou parce qu'il avait absolument besoin de quelqu'un à ses côtés.

— Et alors ?

Un pincement serre mon cœur au point où mes dents se figent dans le bout de ma langue.

Pourquoi est-ce que tout semble si lointain, désormais ?

— Une semaine plus tard, alors que j'étais tranquillement chez-moi, je reçois un message de sa part en me disant qu'il fallait que je me prépare. Je me suis dit... Merde ! Est-ce que je n'ai pas été assez claire ? Alors énervée, je lui ai répondu qu'il en étais hors de question. Il n'a pas répliqué, il s'est juste contenté de me donner une adresse d'un petit restaurant en centre-ville.

— Tu y es allée ? s'étonne-t-elle.

— Je n'aurais pas dû, je sais, mais j'étais bien trop énervée. Alors, je m'y suis rendue pour mettre les points sur les "i". Je dois même avouer que j'avais un peu peur. Je commençais à croire que c'était un fou qui ne prenait pas les non pour des réponses.

Je fais tourner mon doigt sur le rebord de mon verre et laisse un sourire sincère émerger sur mes lèvres. Parce que maintenant que j'y repense... C'était stupide. Impatiente, Olivia se met à se trémousser dans son siège et m'encourage à raconter la suite.

Ce que je fais, non sans soupirer.

— Mais quand je suis arrivée dans le restaurant, il n'était pas là. Il n'y avait qu'un serveur qui m'avait guidé à une petite table en terrasse où m'attendait un seul couvert ainsi que des fleurs et une carte qui me disait "bon appétit".

— Il t'avait offert un resto sans être là ?

— Exactement.

— Et ben putain !

— Encore une fois, je voulais partir. Mais je suis restée. Je ne sais pas pourquoi, d'ailleurs... Je ne le saurai surement jamais. Mais la vue était magnifique et l'été apportait une petite brise. Sans parler des fleurs... Enfin bref. À la fin du dîner, le serveur revient avec une autre carte. Cette fois-ci, elle me disait d'aller me promener sur le quai. De m'arrêter à la librairie du coin qui était encore ouvert et de récupérer un exemplaire collector de Gatsby Le Magnifique dont je lui avait parlé, à notre premier rendez-vous.

Olivia pose son menton sur ses mains nouées et je déglutis sous les souvenirs vivaces qui me fusillent presque sur place.

— Et quand j'ai fini la petite traînée d'indices qu'il a laissé derrière lui et que je suis rentrée chez-moi, je lui ai demandé pourquoi il a fait ça. Et il m'a répondu "je veux simplement faire partie de ton espace, alors établis les limites et je te prouverai que je mérite de les dépasser".

Alors que je dis ces mots, je jette un coup d'œil sur les ascenseurs qui mènent aux chambres de l'hôtel.

Je ne sais pas précisément ce que j'attends.

Mais je réalise soudainement que tout au fond de moi, je préfère être partout ailleurs, plutôt qu'ici.

Et peut-être qu'une partie cliniquement malade de mon être aurait préféré que ce soit dans les bras du même homme qui m'avait dit toutes ces si sublimes choses.

Mais ce n'est pas le cas.

Ce n'est pas le cas, Saddie.

Je manque de couiner quand je me retourne vers Olivia qui se redresse sur ses coudes, légèrement confuse.

— Et qu'est-ce qui s'est passé ensuite ?

— Il a recommencé. Parfois quand je ne le voulais pas. Quand les choses n'allaient pas. Il me disait d'aller quelque part. De prendre un café sur une magnifique petite place, de profiter du silence et de la nature d'un parc... De faire un tour en ferry... Sans même le revoir. Puis un jour, il n'a pas donné de nouvelles. Et... Et j'avais trouvé ça atroce. Alors c'est là que j'ai compris que je ne voulais plus passer une seule seconde sans lui. Parce que c'était...

Invivable.

Déchirant.

Massacrant.

Il y a tant d'adjectifs pour décrire mon cœur brisé, à ce moment-là. Mais étrangement aucun pour celui que je ressens maintenant. Et même si je me pince les lèvres pour ravaler un sanglot, je ne peux empêcher une larme de perler le long de ma joue.

Olivia s'empresse de tendre la serviette que le barman lui avait donné avec son verre, mais je le refuse avec politesse.

Non, c'est trop ridicule. Je ne peux pas pleurer pour ça, ici.

Je ne veux pas pleurer tout court.

— Saddie... Pourquoi est-ce que ça te rends triste ? C'est une merveilleuse histoire...

— Je ne suis pas triste.

Quand est-ce que j'arrêterai de mentir ?

— Pardon, finis-je par souffler à bout de lèvres, c'était stupide de te raconter tout ça. J'ai réussi à tourner toute cette conversation autour de mon unique personne. Je suis désolée.

— Non, non, Saddie... Ce n'est pas vrai, arrête.

Elle se lève en insistant pour payer nos verres et passe sa main sur ma joue avec une telle tendresse que pendant un instant, je jurerai que sa main est faite de coton et de myosotis.

Ça me ramène sur Terre, dans cette réalité où je n'ai pas les douces paroles de mon mari, mais que son acharnement.

Et je ne sais pas s'il faut que je souris.

— Tu sais, les enfants brisés ont du mal à vivre, parce qu'ils n'ont rien fait d'autre que survivre pendant des années qui sont censées être faits d'or. Mais ce n'est pas impossible. Je refusais d'y croire aussi, après ce qui s'est passé, mais... Crois-moi. On y a le droit. Il faut juste qu'on se batte pour l'acquérir. N'abandonne pas. D'accord ?

Elle se penche sur ma joue qu'elle embrasse avec bonté et j'efface mes larmes d'un revers de coude.

Putain, faut-il que ça m'arrive...

— Je suis désolée, Olivia. Vraiment.

— Ne t'en fais pas. Et ne t'excuses pas, non plus. Je crois qu'on a toutes besoin d'une bonne nuit de sommeil, parce que demain sera éprouvant. Qui plus est, tu m'as promis que nous nous battrons ensemble. Ne m'abandonne pas sur notre champ de bataille, Saddie.

— Jamais, chuchoté-je en me levant à mon tour.

Même si, encore une fois, j'ai peur de décevoir, car je ne crois plus dans mes propres promesses.

Pour toutes celles qui ont eu du mal à imaginer à quoi ressemblait Holden quand leur problèmes n'étaient pas encore là... Voilà.

Et oui. Holden est vraiment fou de sa femme et ce depuis la première fois qu'il l'a vu. Surprenant hein ? 😂

Bref, on rencontre Olivia, une ancienne copine du lycée où est allé Saddie et on a un nom et quelques indices d'évènements... Est-ce que ça éclaire un peu vos théories ?

Qu'en avez vous pensé ? 🥰

Je vous dit à vendredi pour la suiteeeee 🥰 (un PDV de Holden en plus 😎)

Bisous !

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