Chapitre 21 : le retour à Seattle

On ne se rend jamais compte à quel point notre chez-soi est confortable, jusqu'à ce qu'on en est éloignés, pendant trop longtemps.

Et pour moi, trois jours à Phoenix, résulte d'une éternité.

J'ai à peine le temps de fermer la porte derrière moi qu'une sensation chaleureuse m'envahit. Étonnant, quand ma maison est plus celle de Holden que la mienne, et que la décoration vous donne l'envie de vous pendre.

Malgré tout, je largue mes affaires dans le hall et me précipite vers la chambre pour m'écrouler dans le lit. Recroquevillé dans les draps, je rassemble les oreillers contre mon étreinte et tel un félin, me forme une petite niche.

Mon chez-moi.

Ma sécurité.

Mon tout.

Je rouvre péniblement les yeux lorsqu'une bourrasque sauvage vient s'écraser sur la fenêtre et je me mets à sourire.

Aux antipodes de l'Arizona, Seattle semble chaotique. Il n'y a pas de soleil, les nuages sont chargés d'une pluie mélangée à de la neige, et on dirait même qu'ils s'écrasent sur les forêts qui entourent notre quartier. La brume, la grisaille et la mélancolie enveloppent tout...

Comme moi.

Mais c'est ici que je me sens bien. Car au milieu de la chaleur et de la sécheresse de la ville de mon enfance, je ne vois que ce que j'ai subi :

L'hypocrisie et le danger.

— Saddie, ne t'allonges pas sur le lit avec tes chaussures.

La réprimande d'Holden brise si brusquement mon songe que j'en lève les yeux en l'air. Il le devine aisément et devient plus sévère.

— Je suis sérieux.

Je me redresse sur mes coudes et souffle lourdement, tandis qu'il replie soigneusement son trenchcoat dans le dressing. Avec une poigne maîtrisée, il retire sa chemise de son torse pour se changer directement et je surprends mon propre regard à papillonner sur sa peau.

Holden m'a toujours intrigué de ce côté-là.

Il a un épiderme parfait. Sans séquelles. Aucune cicatrice en vue. La seule que je connaisse de lui est une vieille marque de varicelle juste au-dessus de son sourcil...

Et c'est tout.

C'est à croire qu'il a un super-pouvoir. Comme s'il était protégé contre la vie et fait d'une armure corporelle invisible.

Et inversement, je l'ai toujours surpris. Les traces qu'ont laissé les broches dans mes jambes sont celles qui le fascinent le plus...

La première fois qu'on a fait l'amour, il y avait enfoncé ses doigts, comme pour les recouvrir. Il avait passé de longues minutes à toutes les chérir...

"Tes plaies sont les miennes" avait-il murmuré, sans même me demander d'où elles venaient... Et rien que pour ça, je n'avais pas fait un violent retour en arrière, dans la douleur.

Holden m'avait appris à aimer ces défauts de la vie... Alors que lui-même, n'en a aucun.

Une bien funeste ironie, non ?

Toujours allongée sur le lit, sans lui avoir obéi, il perd patience. Il lâche donc son t-shirt qu'il s'apprêta à enfiler et m'attrape par les jambes afin que mes chevilles ne touchent plus les draps. Je m'apprête à riposter, mais il s'agenouille devant moi et commence à défaire les lacets des Doc Martins qu'Evy m'a laissé.

Ses mèches foncées tombent dans ses yeux plissés sous la concentration.

Ses muscles roulent sous ses gestes déterminés.

Et moi, je reste là, sans réagir, trop obnubilée.

Et alors qu'il me débarrasse de mes chaussures, je me redresse suffisamment pour glisser ma main dans ses cheveux et souffler :

— Holden ?

— Quoi ?

Je t'aime.

— Je... Je suis contente qu'on soit de retour à la maison.

Il me toise pendant une longue seconde, avant de se redresser.

— Tu vas rester ici, alors ?

Je ne peux m'empêcher d'étouffer un bâillement. Après tout, on vient à peine de descendre de l'avion.

— Pourquoi ? Où veux-tu qu'on aille, encore ?

— Je n'en sais rien pour toi. Mais si tu veux que je te dépose quelque part sur mon chemin jusqu'au cabinet, tu me le dis.

La fatigue s'échappe presque immédiatement de mon être et je me lève à mon tour, tandis qu'il se dirige déjà vers la salle de bains.

J'ouvre plusieurs fois la bouche, mais rien ne me vient.

Après que je lui ai tout avoué, près du chêne de mon enfance, un silence étrange nous a enveloppé, tous les deux. C'était étrangement apaisant. Nous étions alors revenus à l'hôtel, nous avions dormi, pris le petit-déjeuner et c'était dans un calme réconfortant que nous avions pris l'avion.

Mais maintenant...

La même sensation qu'auparavant m'enveloppe. Celle de notre anniversaire de mariage.

Celle où je parle à un dos tourné.

— Saddie ? Dis-le-moi, maintenant, parce que je pars d'ici à un quart d'heure. grogne-t-il en débouclant sa ceinture.

— Tu retournes déjà au boulot ?

— Oui. J'ai eu un message de mon assistant et j'ai une affaire qui m'attends.

— Elles t'attendent depuis trois jours. Qu'est-ce que c'est un de plus ?

Il souffle, agacé et lève les bras en l'air.

— Je dois travailler, Saddie.

— Holden, on vient à peine de rentrer...

— Justement. Je ne tiens pas à avoir plus de retard sur mes dossiers.

— Tu ne veux pas rester avec moi ? parviens-je à demander.

— Pourquoi ?

Pour qu'on parle.

Pour qu'on réapprenne à s'entendre.

Pour qu'on arrête de se déchirer.

— Alors ?

— Dépose-moi chez ma sœur. finis-je par répondre en ravalant les pensées qui me brûlent la langue.

Holden ferme la porte de la salle de bains et je ne retrouve mon souffle que lorsque j'entends l'eau de la douche couler.

Parce qu'on l'a déjà assez fait.

Parce que c'est peut-être trop tôt.

Parce qu'il nous faudra du temps.

Défaite, je me tourne vers les chaussures d'Evy et les ramasse doucement pour les glisser dans l'arc-en-ciel de converses qui jonchent mon côté du dressing.

Ses derniers mots me reviennent en tête et je souris malgré moi.

Si j'avais dit oui, on serait déjà sur la route, loin de tout. Les pieds sur le tableau de bord de son van, un burger dégoulinant de gras dans une main, une carte vers l'inconnu dans l'autre. On serait sûrement en train de se disputer sur nos listes de célébrités qu'on se taperait bien.

Un rêve enfantin dans lequel je m'abrite alors que la dure réalité me rattrape.

Mais je n'ai pas dit mon dernier mot.

***

Alors que les essuie-glaces se dépêchent de dégager le pare-brise de toute la pluie que Seattle a décidé de déverser sur nous aujourd'hui, Holden se gare sur le bas-côté de la rue où habite Emilia. Ses doigts tambourinent nerveusement sur son volant, alors que je me penche sur la banquette arrière pour attraper mon sac de courses.

— Saddie, s'il te plaît... Dépêche-toi.

— Oui, oui, ne t'en fais pas. Tu n'as pas intérêt à être en retard pour retrouver Jill, je sais.

Son regard s'assombrit et il grimace.

— Ce n'est pas pour Jill que je...

— Mais oui, mon amour.

Je l'embrasse en lui adressant le plus faux des sourires et lui tapote la joue :

— Cette fois-ci, essaye quand même de garder ton alliance.

Je m'apprête à sortir de la voiture, mais j'ai à peine eu le temps d'ouvrir la portière qu'il enfonce ses doigts dans ma nuque pour ramener ma bouche contre la sienne.

C'est un baiser plus langoureux qu'il me donne que celui sur lequel je voulais partir...

Et même s'il finit par se détacher de mes lèvres, il murmure :

— La jalousie ne te va pas, mon amour.

Sans rien répondre, j'attrape mes affaires et sors.

Holden ne s'en va pas pour autant. D'ailleurs, même si je tourne le dos pour rentrer dans l'immeuble d'Emilia, il ne démarre que lorsque la porte se referme sur moi.

Et même si mes sourcils sont froncés sous la colère...

Je ne peux m'empêcher de me pincer les lèvres, goûtant encore son baiser... Le rouge aux joues.

Bordel, Holden.

On dirait bien que les vieilles habitudes sont ancrées dans la chambre conjugale des Parsons...

Sauf que je peux vous dire dès à présent que Saddie, comme Holden, ne sont pas prêts du tout de continuer sur ce chemin... Et beaucoup de choses vont changer 🤭 mais sont-ils préparés ? Là réside la question !

La vie à Seattle va commencer à monter en tension... Et ça commence déjà un peu 🤭

Petite annonce rapide pour vous dire que je change le planning de publications ! J'ai peu de temps en ce moment de corriger les chapitres donc je passe à (toujours hein ça change pas) deux publications par semaine, mais ce sera finalement le MARDI et le VENDREDI. je publie toujours le soir comme vous l'avez remarqué donc en soi vous l'aurez parfois le mercredi matin 🥰

Bon en gros, c'est mas vraiment un changement outrageant, je sais pas pk je l'annonce 😂

Bref ! Comme d'habitude, n'hésitez pas à me laisser vos avis quant à ce chapitre et vos vooootes 🥰 en attendant : à vendredi pour le chapitre de Saddie qui retrouve sa sœur 😘🥰

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