Chapitre 4

Des tas de choses annonçaient une journée agréable pour Sarah, ce matin-là. Pour commencer, elle se levait à neuf heures et demie, un lundi. Mais surtout, elle savait depuis deux jours que son frère arriverait dans l'après-midi avec sa petite amie. Sarah n'irait donc pas au club. En ce début des vacances de Noël, elle avait beaucoup à faire, à commencer par trouver des cadeaux à mettre sous le sapin.

La jeune fille descendit au rez-de-chaussée, encore dans ses pensées et le cerveau légèrement ensommeillé. Le petit-déjeuner étalé sur la table de la cuisine donnait l'impression que quelqu'un était parti au milieu de son repas.

-Nous aussi, on t'aime, bisous ! lui parvint la voix de sa mère depuis le hall d'entrée.

Sarah fronça les sourcils en entendant ces paroles. Peu après, sa mère entra dans la pièce, rayonnante, le téléphone à la main. Les soupçons de Sarah s'accentuèrent...

-Ton père vient d'appeler. annonça sa mère sans se départir de son sourire.

Et bingo ! Sarah aurait du parier.

Habituellement, son père ne téléphonait que le mercredi. La jeune fille fixa donc son regard perplexe sur sa génitrice, attendant la suite.

-Il rentre aujourd'hui.

Le sourire de Solène s'élargit encore plus.

Sarah soupira en replaçant une mèche de cheveux châtains derrière son oreille.

-Tu parles, il va reporter jusqu'à Noël comme d'habitude. On a de la chance s'il n'arrive pas en plein milieu du repas du réveillon.

-Oh, mon ange, c'est arrivé une seule fois. la réprimanda sa mère avec une grimace.

-Peut-être mais il reporte toujours son retour jusqu'à la dernière minute. répliqua Sarah, amère.

Le pauvre pain de mie, posé sur la table, se faisait martyrisé.

-Et puis,... une fois c'est déjà trop. reprit-elle après une légère pause.

-Tu sais c'est pas toujours facile de trouver un avion pour le ramener. défendit Solène.

-Ouais, bah cette fois ça va être pareil.

-Non, il m'a dit qu'il avait déjà réservé son vol.

Sarah soupira de nouveau.

-Ouais, bah moi j'y crois pas.

Le ton définitif de cette affirmation attrista sa mère. Déçue par le passé, Sarah souffrait sans le dire, y compris à elle-même, des absences de son père. Cependant, Solène se désolait de l'hostilité qui accompagnait cette tristesse. Elle espérait que, cette fois-ci, son mari reste longtemps à la maison et renoue des liens avec sa fille avant de retourner en voyage.

Le père de Sarah exerçait le métier de reporter et partait souvent plusieurs mois loin de sa famille. A 48 ans, un nombre incalculable de pays s'accumulaient dans sa liste de voyages et il se débrouillait avec 7 langues différentes. Sarah rêvait de parler anglais aussi bien que lui et c'était d'ailleurs la seule chose pour laquelle elle l'admirait. Enfant, bien sûr, ses nombreux voyages et les aventures traversées faisaient de lui un héros pour une petite fille. Aujourd'hui, elle le considérait comme un presque-inconnu, perpétuellement absent, dans le but de rédiger de simples bouts de papier. Et par-dessus tout, elle voyait en lui un homme incapable de tenir ses promesses.

Mais Sarah s'empêcha de ruminer en pensant à son père. Méditer sur ce qui la contrariait ne faisait pas parti de ses habitudes. Elle se concentra sur le craquement des céréales sous ses dents et sur la chaleur du lait qui s'écoulait dans sa gorge en réfléchissant plutôt au cadeau qui ferait plaisir à sa mère.

***

L'horloge du micro-ondes affichait treize heures et le déjeuner n'était toujours pas prêt. Cela tranchait avec les habitudes de Solène. Cependant, déterminée à boucler son travail, l'institutrice avait laissé le temps s'enfuir. Tandis que l'odeur des haricots dans la poêle envahissait la cuisine, Sarah se prélassait au fond du canapé, les yeux rivés sur son téléphone. La télé diffusait des images de forêt en feu mais la jeune fille ne regardait pas. Un écouteur vissé dans une oreille, elle contemplait une vidéo sur facebook d'une fille en train de se maquiller. Maquillage qui la tentait pour Noël.

-Il te reste du fard sur la palette que tu as eu à Noël, il y a deux ans ? questionna la jeune fille à l'attention de sa mère dans la cuisine.

-Oui, pourquoi ?

-Je suis en train de regarder un truc pas mal, faudrait que j'essaye mais il va me manquer quelques couleurs... répondit l'adolescente.

-Couleurs que moi j'ai, bien évidemment... C'est pratique les cadeaux qui nous servent à toutes les deux. ironisa Solène en remuant les haricots.

-Si tu préfères m'acheter une nouvelle palette c'est ton problème. répliqua Sarah sur le même ton.

Sa mère sourit puis voulut se renseigner sur le maquillage en question. Elle délaissa la cuisine quelques minutes pour s'installer à côté de sa fille et parler,....de trucs de filles. La sonnerie de la porte d'entrée retentit, surprenant Sarah : elle n'attendait pas son frère si tôt. Il lui avait envoyé un snap une demi- heure plus tôt pour prévenir qu'il quittait Lyon.

Solène se leva du canapé à la manière d'une enfant impatiente. Elle se dirigea vers le hall, un grand sourire aux lèvres. Sarah écouta la porte s'ouvrir alors qu'elle quittait le salon. Elle passa une main dans ses cheveux, les sourcils froncés.

C'est alors que Solène poussa un cri :

-Pierre !

Sarah sursauta et sortit précipitamment de la cuisine pour vérifier par elle-même.

-Papa ? s'étonna la jeune fille en pénétrant à l'intérieur du vestibule.

La haute stature de Pierre Gemarel se tenait effectivement devant elle. Sarah se raidit devant sa peau bronzée et son sourire, qu'elle considéra comme hypocrite. Elle le regarda enlacer sa femme, pour la première fois depuis quatre longs mois. Une valise attendait à côté de lui.

-Ma princesse ! dit-il, les mains tendues vers l'adolescente.

Ce surnom fit naître un sourire sur les lèvres de la jeune fille, qu'elle tenta de réprimer. Son père l'enserra dans ses bras musclés et lui caressa les cheveux. Sarah se laissa aller à lui rendre son étreinte même si elle restait perplexe : Pierre se trouvait là, une semaine avant Noël, comme promis au téléphone. Une première ! Un scoop tellement grand que le journaliste qu'il était pouvait en faire un article. Mais après tout, il s'agissait d'une bonne nouvelle, non ? La réponse à cette question semblait hésitante dans la tête de Sarah.

-Je suis tellement content d'être de retour !

-Tu as fait bon voyage ? demanda Solène, les mains posés sur la valise pour la guider à l'intérieur de la maison.

-On parlera de ça plus tard. éluda Pierre. Vous d'abord ! Comment ça va ma princesse ? Ca se passe bien au club ? Tu as bientôt des compétitions, non ?

-Euh, oui. J'ai pas le programme en tête. répondit évasivement Sarah.

-C'est ton bulletin ? demanda son père. Il désignait une feuille posée sur une chaise.

L'enveloppe était arrivée le matin même. Sarah et Solène venaient de le consulter.

-Les haricots ! s'exclama cette dernière en se précipitant vers la poêle.

-On va peut-être manger avant de regarder mon bulletin. fit Sarah, les escalopes de dinde au bout des bras.

-Ca tombe bien, je n'ai pas déjeuné ! approuva son père.

Il rajouta une assiette tandis que Solène le pressait de raconter son voyage en Afrique du Nord. Les récits de rencontres, de photos, de longues marches, de galères et de danger se succédèrent. Les deux femmes furent emportées au cœur de l'aventure, faisant presque oublier à Sarah son amertume. Presque... car elle ne pouvait s'empêcher d'éprouver un pincement au cœur quand elle pensait que tous ces moments, les mauvais comme les bons, son père les avaient vécu loin de sa famille.

Solène, elle, ne pensait plus à l'absence. Son mari se tenait là désormais, rien d'autre ne comptait. Elle l'imaginait dans toutes ces situations qu'il décrivait. Il racontait si bien tous ces événements vécus. Enfin, vécus.... c'était ce que croyait sa femme et sa fille. Mais entre ce récit passionnant qu'elles pensaient vrai et la réalité... Deux histoires complètement différentes se jouaient. Différentes, mais pas moins palpitantes.

-Je t'emmène skier cet aprèm ? questionna Pierre à la fin du repas.

-Non, Simon doit arriver bientôt, je veux être là quand il rentrera, déclina la jeune fille.

-Oh, mais c'est super ! Je pensais pas qu'il rentrait si tôt ! s'exclama Pierre. La porte du lave-vaisselle claqua quand il la referma.

-Bah, comme l'année dernière. Il passe une semaine ici avant Noël et une semaine chez Andréa après. répondit Sarah sur le ton de l'évidence. Elle souhaitait montrer à son père que des habitudes se créaient sans lui.

-Ah, fit-il simplement. Il ne pouvait pas être au courant puisque l'année passée, il avait débarqué le vingt-quatre décembre à sept heures du matin.

Sarah perçut une lueur de tristesse passée sur son visage. Pourtant, elle ne ressentit pas une once de culpabilité. Enfin si, peut-être, tout au fond de son cœur...

***

Sarah mit son film en pause pour vérifier que ses oreilles ne lui jouaient pas un tour. Quelqu'un s'amusait effectivement à s'acharner sur la sonnerie de la porte d'entrée. Un grand sourire aux lèvres, Sarah déposa son ordinateur sur son lit et se leva. Elle traversa sa chambre en courant et dévala les escaliers. Ce n'est que parvenue sur la dernière marche qu'elle s'immobilisa, sans se départir de son sourire. Au milieu du salon se tenait un grand gaillard aux cheveux châtains. Ses yeux bruns, aussi pétillants que ceux de Sarah regardaient Solène, qui virevoltait autour de lui, la tête levée pour apercevoir son visage. A côté de lui, une jeune fille tout aussi souriante s'appuyait sur une valise bleu foncée. Beaucoup plus petite, des cheveux bruns lui tombaient en cascade sur les épaules.

-Salut Mowgli ! clama Sarah en se dirigeant vers son frère. Elle lui adressa une tape sur le bras à la manière d'un vieux pote qu'on retrouve.

-Salut princesse ! répondit-il. La jeune fille se retrouva vite enfouie dans ses bras.

Elle laissa quelques instants sa tête reposer sur le torse de son frère et s'imprégna de son odeur tandis qu'il embrassait son front.

-Hey, je suis pas Andréa, moi ! protesta t'elle alors que l'étreinte se prolongeait.

Simon la lâcha, ce qui permit à Sarah de distinguer le sourire de la jeune femme qui accompagnait son frère, à l'entente de ces mots. Andréa ne se formalisait plus des remarques de la jeune fille. Elles se saluèrent comme deux amies, ce qu'elles étaient devenues en réalité, avant que Pierre Gemarel ne fasse son apparition.

-Papa, t'es déjà rentré ? s'étonna Simon. Sa surprise contrastait cependant avec la réaction teintée de reproche délivrée par Sarah quelques heures plus tôt. Après tout, ce n'était pas lui qui devait supporter l'absence et cette maison trop grande pour deux personnes.

-Mon gars ! Je suis content de te retrouver. fit Pierre en donnant une franche accolade à son fils.

-Comment vas-tu Andréa ? salua t'il ensuite la jeune femme.

Andréa répondit poliment. Elle se montrait moins à l'aise avec le père de Simon qu'avec sa mère ou sa sœur. La jeune femme connaissait la maison comme la sienne mais elle n'en croisait presque jamais le propriétaire.

-Bon, on va monter les valises. déclara Simon après quelques minutes de bavardages.

-Je vous accompagne ! décida Sarah en saisissant un sac.

-Tout ça pour deux semaines ! s'exclama la jeune fille en considérant les deux grosses valises et les deux sacs qu'ils montèrent jusque dans la chambre de Simon. Vous savez qu'il restait des vêtements ici. A moins, bien sûr, que vous ayez prévu une valise entière de lingerie...

Simon leva les yeux au ciel. Il retrouvait bien sa petite sœur, un sourire en coin aux lèvres, fière de sa blague. Elle s'amusait à ce genre de remarques depuis qu'il sortait avec Andréa. Ou peut-être même avant à la réflexion.

Sarah déposa le sac qu'elle portait, à l'entrée de la chambre de son frère. Elle se laissa ensuite choir sur le matelas et respira le parfum de la lessive.

-T'as de la chance, Maman a fait ton lit. Enfin, votre lit du coup.

-On lui a manqué, elle prend soin de nous, répondit Simon en entrant à son tour dans la pièce. Ca doit pas être facile de vivre tous les jours avec toi.

Il posa son regard pétillant de malice sur sa sœur qui jouait à rebondir sur le lit mais il n'obtint qu'un regard noir en retour.

-Tu pourrais être plus sympa avec moi, je suis en train de tester ton lit, répliqua la jeune fille faussement vexée.

-Et alors, quelle est ta conclusion ? intervint Andréa. Elle commençait déjà à ouvrir un placard.

-Il ne grince pas, vous pourrez faire toutes sortes d'activités sans qu'on vous entende. Enfin, ce n'est pas le lit qui vous trahira en tout cas.

-Tu crois qu'on pourrait t'étouffer dans les couvertures par exemple ? tenta Simon.

-Eh, il est à peine rentré qu'il veut déjà me tuer ! s'offusqua Sarah. Méfie-toi Andréa, c'est un meurtrier !

La jeune femme lâcha un petit rire en rentrant une pile de jeans dans l'armoire. Le dos tourné au lit, elle entendit des cris et le bruit d'un corps qui tombait sur le matelas. Elle se retourna, intriguée, et se retrouva face à un fouillis de bras et de jambes. Sarah et Simon se battaient sur le matelas. Ils finirent par s'immobiliser, l'un au-dessus, l'autre au-dessous.

Sarah se tortillait en essayant vainement d'échapper aux chatouilles de son frère. Elle étouffait un rire chaque fois que les doigts du garçon pénétraient dans ses côtes.

-Simon, ah, arrête ! haleta t'elle.

Mais sourd à ces protestations, le garçon continua sa torture, le sourire aux lèvres. Il tourna un instant la tête vers sa petite amie. Celle-ci observait la scène, amusée.

-T'es un gamin, Simon Gemarel, dit-elle en captant son regard. Son visage changea aussitôt d'expression quand son copain la tira par le bras pour la faire tomber sur le matelas aux côtés de sa sœur.

Chatouiller deux personnes s'avéra beaucoup plus compliqué et les filles reprirent le dessus. Simon se débattit quelques secondes. Cependant il se révéla très fort et réussit à se dégager et à les plaquer sur le lit. Il éclata de rire en observant leurs joues rouges et leurs cheveux en bataille. Elles adoptèrent la même mine vexée, élargissant le sourire du garçon.

-Tu n'es pas mieux tu sais, fit Andréa en lui adressant une petite tape sur la joue.

Le jeune homme s'allongea à leurs côtés et plaça ses mains sur leurs épaules. Ils écoutèrent leurs souffles saccadés, perdus dans leurs pensées respectives.

Sarah se repassait la scène ponctuée de rires.

Andréa promenait son regard sur le plafond blanc et sur l'abat-jour bleu foncé, à la couleur élimée par endroit, en réprimant son envie d'embrasser Simon.

Celui-ci savourait simplement cet instant aux côtés des deux filles qu'il aimait le plus dans sa vie.

Andréa déposa un baiser sur la joue de son amant. Ce dernier sourit puis se releva, déterminé à aller skier.

***

-T'es rouillé, constata Sarah quand son frère la rejoignit en bas du télésiège. Cela faisait déjà une trentaine de secondes que la jeune fille patientait.

-J'attendais Andréa, se justifia Simon.

-Tu rigoles ou quoi ? s'offusqua la jeune femme. J'étais devant toi presque toute la descente. Ne m'utilises pas comme excuse pour justifier ton niveau, monsieur l'acteur.

Simon sourit à ce surnom né quelques années plus tôt en référence à sa passion pour l'audiovisuel.

-T'es rouillé, t'es rouillé, Mowgli, renchérit Sarah en avançant dans la file devant le télésiège.

-Eh, arrêtez de vous acharnez contre moi, protesta le jeune homme. C'est que la deuxième piste, il faut que je me remettes dedans.

Sa petite sœur sourit : elle venait de surpasser son frère, chose impensable quelques années plus tôt.

Quelques secondes plus tard, Sarah, Simon et Andréa se trouvaient installés dans le télésiège 27. Celui-ci penchait légèrement vers la droite.

-Heureusement que vous êtes arrivés, s'exclama Sarah en remuant pour s'installer plus confortablement au fond de son siège. Son manteau crissa contre le plastique. J'en pouvais plus d'être seule avec papa et maman.

-C'était seulement quelques heures, ça devait pas être si terrible, ricana Simon.

-Si, si, je te jure. Papa a raconté son voyage extraordinaiiiiire et puis il faisait tout à ma place. Et maman, bah, elle le dévore des yeux et puis c'est tout.

-Je suis peut-être un peu dure avec eux, pensa Sarah alors que son récit faisait sourire son frère.

-Il était pas palpitant son voyage ? s'étonna le garçon.

-Si, mais...

Simon attendait mais Sarah se contenta de soupirer avant de changer de sujet :

-Bon, vous avez des idées pour les cadeaux de Noël ?

-Une tasse "Joyeux Noël Maîtresse", plaisanta Simon ce qui fit rire les deux filles.

-Pas sûre que Maman apprécierait... commenta Sarah. Pourquoi pas un truc pour faire la cuisine ?

-Tu veux lui offrir une casserole ? interpréta le garçon, visiblement septique.

-Non, protesta sa sœur. Je pensais plutôt à un truc spécial genre un robot ou une machine pour faire du pain, un truc du genre.

-Elle cuisine beaucoup ? demanda Andréa.

-Bah, normal quoi... répondit Sarah en haussant les épaules. Mais je vois pas vraiment ce qu'on pourrait lui offrir d'autre. Elle a rien demandé. En plus, elle a pas de passion ou de trucs comme ça.

-Bah si, elle adore lire, contredit Simon en laissant pendre ses skis dans le vide. Il apercevait le poste de contrôle à l'arrivée du télésiège.

-Elle aime bien de temps en temps mais...

Le jeune homme ne laissa pas finir sa sœur :

-Elle trouve quand même le moyen de rentrer dans une librairie dès qu'elle en voit une.

-Oui, j'ai remarqué aussi qu'elle lisait beaucoup. On en avait parlé une fois ensemble, renchérit Andréa en soulevant la barre de protection.

Sarah ne répondit pas : il était temps de descendre du télésiège, ils réfléchiraient aux cadeaux de Noël plus tard.

***

Après trois heures passées à skier, Sarah avait hâte de rentrer prendre son traditionnel chocolat chaud.

Le ciel se teintait déjà de rose lorsqu'ils s'engouffrèrent à l'intérieur de la voiture de Simon après avoir galéré à rentrer les trois paires de ski dans le coffre. Le garçon démarra et le véhicule passa devant les télécabines immobilisées. La station fermait ses portes. Le panneau lumineux n'affichait que "16h56" mais la nuit ne tarderait pas à tomber.

Entre les trois jeunes, la conversation s'orienta rapidement vers les cadeaux de Noël. Tandis que Sarah et Andréa débattaient sur le prix à mettre pour un appareil photo, Simon se remémorait la discussion dans le télésiège. Il réalisa alors que sa petite sœur ne savait même pas quel était le principal loisir de leur mère. On ne pouvait pas vraiment appeler ça une passion mais la lecture restait un hobby qui la caractérisait, au moins un peu, et sa fille ne le remarquait même pas.

Bientôt, la voiture s'immobilisa devant la maison. Les couleurs du soleil qui disparaissait derrière les montagnes donnaient l'impression que le bois du chalet brûlait. Les trois jeunes rentrèrent leur matériel de glisse au fond du garage puis Sarah pénétra la première à l'intérieur du lieu de vie pour se précipiter à l'étage.

-Prem's dans la salle de bain ! cria t'elle en grimpant les escaliers.

Aussitôt, son frère s'élança à sa suite. Tandis que les marches vibraient sous ses pas, il se rappela qu'il avait 19 ans et que sa copine le regardait sûrement en se demandant quel genre de gamin il faisait. Il ralentit l'allure pour monter l'escalier normalement. Il vit alors avec surprise Andréa le dépasser et s'engouffrer dans leur chambre et en ressortir quelques secondes plus tard, une serviette sous le bras. Mais Sarah fermait déjà la porte de la salle de bain.

***

Les cours de droit d'Andréa s'étalaient sur la table basse. Elle désirait commencer ses révisions mais Pierre était venu lui poser des questions sur ses études. Enfoncée dans le canapé, sa tasse de chocolat réchauffant ses mains, Sarah écoutait la conversation d'un air distrait.

Après des dizaines de questions sur les partiels, les résultats et les cours d'Andréa, Pierre Gemarel décida de s'attaquer à son fils :

-Et toi mon gars, qu'est-ce que t'apprends dans ton école de cinéma ?

-On dit audiovisuel, papa. corrigea Simon. Mais, j'apprends pas mal de trucs. On fait beaucoup plus de pratique que l'année dernière : du mixage, tout ça... On a pas mal parlé du doublage ces derniers temps.

Le garçon sourit, il semblait prêt à rire quand ses yeux croisèrent ceux de sa petite sœur.

-Devinez quel film on a pris pour exemple. lança t'il.

-Euh, je sais pas, un film en anglais non ? tenta son père mais Simon secoua la tête.

-Non, un dessin animé.

Sarah releva la tête de son chocolat, les yeux pétillants, soudain inspirée.

-Le livre de la jungle. révéla le jeune homme avant même qu'elle ait pu faire une proposition.

La jeune fille éclata de rire :

-Naaan, Mowgli, t'as étudié ton film préféré ?

-Ce n'est plus mon film préféré. démentit l'intéressé.

-Ca c'est toi qui le dis Mowgli. répliqua Sarah en insistant sur le surnom qu'elle donnait à son frère depuis de très nombreuses années.

-Bon, les enfants, maintenant que je suis en vacances, je vais pouvoir vous emmener partout. Il y a pas un petit parc que vous vouliez faire ?

Sarah et Simon se regardèrent.

-Tu parles du truc dont on t'avait parlé il y a quatre ans ? questionna la jeune fille, une main perdue dans la douceur de ses cheveux.

-Euh oui, peut-être. répondit Pierre, toujours enthousiaste malgré le scepticisme de sa fille. Si longtemps que ça, tu crois ?

Simon hocha la tête. Il pressentait que le décalage de son père finirait par énerver Sarah.

-En tout cas, on ira faire du ski tous les cinq. renchérit Pierre. On n'a pas eu beaucoup l'occasion de passer du temps ensemble, Andréa, il faut remédier à ça.

Sarah haussa les sourcils. La copine de Simon n'était pas la seule avec qui il n'avait "pas eu beaucoup l'occasion de passer du temps". D'ailleurs cette formule s'apparentait à un euphémisme car il n'avait croisé Andréa qu'à de rares repas de famille.

-Je vous emmènerais prendre des photos des animaux dans les montagnes. Tu verras, Andréa c'est super, Sarah adore ça !

La jeune fille haussa discrètement les épaules en croisant le regard d'Andréa. Elle considérait que son père exagérait. Ce qui ne l'empêcha pas de sourire. Les merveilleuses heures passées sur la neige à prendre des clichés se rappelaient à sa mémoire.

-Tu pourrais nous montrer les photos de ton voyage, d'ailleurs. proposa Simon.

Pierre perdit aussitôt son enthousiasme.

-Euh, oui. Oui, oui, bien sûr mais... pas maintenant. Mon appareil est déchargé et puis, il faut que je les tries d'abord. expliqua t'il en gesticulant avec ses mains.

-Plus tard. conclut Pierre avec un sourire.

***

Bonjour !

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? On découvre un peu plus la famille de Sarah. Ses relations avec son père et son frère notamment. Comment les trouvez-vous ? Personnellement, j'adore Simon.

N'hésitez pas à me donner votre avis et à voter. Ca me fait vraiment plaisir et ça m'encourage.

Bonne semaine !

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