On the dike [Kaori + Matsuko]
TW : mention de mort, mention de suicide, scène de combat (très léger)
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Matsuko se demanda un instant ce qu'il faisait là, assis sur une digue en bois du cours d'eau qui passait par ce parc, les jambes dans le vide. Il se demanda aussi pourquoi il se genrait au masculin dans sa tête. Il était une fille après tout, n'est-ce pas ? Bref, il était tard, il faisait déjà nuit et l'air se rafraîchissait. Pestant contre lui-même de ne pas avoir pris de pull avec lui, Matsuko serra sa veste du Valhalla autour de ses fines, mais musclées épaules et rejeta ses cheveux derrière sa nuque. Quelle idée de merde il avait eu, quelle idée de merde... Elle n'allait pas venir. Évidemment qu'elle n'allait pas venir. Pourquoi viendrait-elle ? Ils étaient dans des gangs ennemis, il l'avait littéralement empêchée d'aider Mikey (son propre frère !) face à Kazutora. Ah, et il était (indirectement) responsable de la mort d'un de ses amis d'enfance. Même pas vraiment indirectement, il se sentait juste très coupable de la mort de Baji, comme si c'était lui qui l'avait planté. Il ferma brusquement les yeux et murmura :
-Il s'est suicidé, il s'est suicidé, c'était sa décision...
C'était ce que Shuji lui avait dit, lorsqu'il lui avait confié sa culpabilité. Enfin, de façon plus agressive, mais il le rassurait, c'était déjà ça.
Shuji Hanma, son frère aîné de deux ans, lui avait personnellement confié la tâche d'occuper Kamayori Sano, aka Kaori, afin que celle-ci ne vienne pas contrecarrer les plans de Kazutora et Kisaki. Il était si fier d'être enfin dans un gang, et si fier de se voir confier une mission, qu'il était motivé au point de la mettre hors d'état de nuire dans la première minute de la bataille.
Sauf que bon, il n'avait pas prévu que Kaori soit aussi forte. Ni aussi putain de charismatique. Shuji ne l'avait malencontreusement pas prévenu de ce détail.
"Je suis largement plus fort qu'elle, avait-il dit, vous êtes donc plus ou moins à forces égales alors débrouille-toi pour l'occuper."
Soit son frère n'était pas doué dans les estimations, soit Matsuko était beaucoup moins fort que ce que pensait Shuji. Il valait mieux garder les deux options sous silence. De toute façon, il avait rempli sa mission. Juste pas de la façon prévue au départ.
Matsuko avait toujours secrètement admiré Kaori. Il ne savait pas grand-chose d'elle, seulement qu'elle était la sœur de Mikey et qu'elle était une des rares filles à faire partie intégrante d'un gang (et elle était probablement la seule de Tokyo à être haut placée dans la hiérarchie !). La seconde info avait suffi pour qu'il lui voue un véritable culte interne. Oh bien sûr, il ne savait rien de Kaori, elle pouvait très bien avoir usé de sa parentalité avec le chef pour se faire une place. Même dans ce cas là, Matsuko trouvait ça admirable. Après tout, son frère à lui avait longtemps refusé de l'intégrer à ses gangs, justement sous prétexte qu'il était une fille.
Quant à la partie charismatique de Kaori, c'était un charisme bien particulier. Un charisme discret qu'on ne trouvait parfois pas charismatique du tout, surtout dans le monde des gangs.
En effet, le charisme de Kaori venait avant tout, selon Matsuko, de sa sensibilité. Une sensibilité pure et emphatique. Si on plongeait dans ses yeux, on pouvait y voir toutes ses émotions légèrement chaotiques mais si belles en même temps se mélanger harmonieusement.
Bref, tout ça pour dire que Kaori avait été plus compliquée à occuper que prévu. Donc Matsuko avait dû improviser. Et pour cela il avait parlé.
C'était une fâcheuse manie chez lui, il aimait un peu trop raconter sa vie au premier venu qui lui paraissait gentil. Dieu savait comment, il n'avait pas encore rencontré de problèmes à cause de ça, mais ça restait un stress. Fin bon, le stress n'arrivait évidemment que quand le mal était fait, donc n'était pas vraiment utile.
Par chance, Kaori fut réceptive à ses paroles, ils avaient donc démarré une petite conversation sympathique tout en se battant férocement. Kaori avait un bon cardio. Et... il se pouvait... que malencontreusement... l'identité de Matsuko aie été évoquée. Il ne lui avait pas dit clairement qu'il était une fille, il n'était pas idiot à ce point, mais il avait laissé échapper quelques indices et insinuations. Du genre "je suis comme toi" et "c'est dur pour les gens comme moi de se faire respecter". Charmant. Bien Matsuko. Très intelligent de ta part, surtout maintenant que tu fais partie du Toman. De toute façon Hanma et Kisaki allaient probablement prévenir Mikey quand même que "Matsuko = fille mais pas dans les gangs elle se fait passer pour un mec".
Sauf que bon. Voilà quoi. Moins de gens savaient pour lui, mieux c'était.
Il lui avait demandé de le retrouver ici sur un coup de tête, sans vraiment y penser. De toute façon, il faisait toujours tout sur un coup de tête.
Matsuko soupira, il regarda sa montre. 22h17. Elle n'allait pas venir.
Peut-être était-ce une formule magique, car Matsuko entendit le bois de la digue grincer au rythme des pas de quelqu'un. Il se retourna précipitamment et leva la tête, c'était bien elle. Kaori. Elle portait toujours son uniforme du Toman, ce dernier légèrement différent des autres uniformes étant donné que le sien était en deux pièces (un pantalon et une veste lui arrivant au dessus des hanches), ses cheveux blonds coupés court de façon brouillonne voletaient au vent et ses égratignures dues au combat plus tôt dans la journée n'étaient pas pansées mais tout de même traitées et cicatrisées.
-Désolé pour le retard, murmura-t-elle, Mikey m'a retenue.
Ses yeux bleu marine étaient rougis, signe qu'elle avait dû pleurer. Pas étonnant : un de ses amis venait de mourir, même Matsuko avait versé sa larme.
-Tu es venue, souffla-t-il en guise de réponse, un peu sous le choc.
C'était plus une affirmation qu'une question.
-Oui, répondit-elle malgré tout.
-Pourquoi ?
-Eh bien, parce que tu me l'as demandé ?, répondit-elle en riant nerveusement.
Elle n'était pas à l'aise. Ça se voyait dans sa façon de se tordre les doigts et d'éviter le contact visuel prolongé avec lui. Il tenta un sourire rassurant, qui ressembla plus à une grimace. Néanmoins cela eut l'effet escompté, Kaori soupira un coup en s'asseyant un peu derrière lui et ramenant ses jambes contre elle.
-Enfaite, c'est plutôt à moi de te demander pourquoi tu m'as demandé de venir, reprit-elle. J'ai l'impression que tu avais beaucoup de choses à me dire.
-Et bien, je n'avais pas de truc précis à te dire, mais j'ai bien aimé discuter avec toi, donc je me suis dit "pourquoi pas ?" et je t'ai invité.
Elle hocha la tête machinalement, et contempla le cours d'eau, perdue dans ses pensées. Étonnamment, se nota Matsuko, le blanc n'était pas gênant.
-Tu connaissais bien Baji ?, demanda Kaori brusquement.
Elle n'avait pas détourné le regard de la rivière.
-Assez pour savoir qu'il ne méritait pas de mourir.
-Tu connaissais bien Kazutora ?
-Assez pour savoir qu'il valait mieux que ça.
Elle hocha la tête et sourit doucement.
-On est déjà d'accord sur ça, approuva-t-elle.
Ça donna du courage à Matsuko pour continuer à parler.
-J'ai connu Kazutora avant Baji. Il était obsédé par Mikey, mais à chaque fois qu'il évoquait Baji, sa voix devenait plus douce, comme si la mention de son simple nom avait le don de l'apaiser. Shuji —Hanma— et lui se sont rencontrés en maison de correction. Il y a environ un an, Shuji y a passé quelques mois. Ils y sont devenus amis, et —ne lui dit pas que je t'ai dit ça— je pense que Shuji a fort influencé Kazutora dans son objectif de tuer Mikey. Il a un bon fond, j'en suis persuadé.
-Il faut juste creuser un peu, murmura Kaori en guise de réponse.
Elle parla à son tour.
-Comme tu le sais probablement déjà, Kazutora est un membre fondateur du Toman, donc j'ai pas mal traîné avec lui. Jamais individuellement cependant, il était toujours collé à Baji.
Elle eut un sourire nostalgique.
-On ne voyait jamais l'un sans l'autre. Puis tu connais probablement le reste de l'histoire, notre anniversaire avec Mikey —fin cette histoire est plus centrée sur Mikey que moi mais t'as compris l'idée—, le braquage, la mort de Shin, Kazutora en prison. Tout ça pour une moto qu'il allait de toute façon avoir, belle ironie n'est-ce pas ? Je pense que notre anniversaire nous apportera toujours un arrière-goût amer.
Elle posa son menton sur ses bras.
-Ça fait peut-être égoïste, mais des fois je me demande s'ils comptaient m'offrir quelque chose. Pas une moto en tout cas, je suis incapable d'en conduire une, quand on fait une virée je vais toujours à l'arrière d'un gars. J'aime bien Pachin, il est un peu bourru mais fort stable vu que c'est lui qui porte le drapeau.
Matsuko était un peu étonné ; il voyait mal Kaori avoir une aussi bonne estime de Pachin.
-Tu sais ce que Shinishiro voulait t'offrir à toi ?
-Je suis contente que tu aies demandé.
Elle plongea alors sa main dans son col et en sortit un collier. Une croix noire assez discrète, le genre de collier qu'on retrouvait parfois chez les gangsters.
-Je suis pas spécialement pratiquante, expliqua-t-elle, mais j'ai toujours aimé son collier. Alors il me l'a donné. Enfin, il comptait me l'offrir pour mon anniversaire, c'est mon grand-père qui me l'a dit. Donc je l'ai pris, de la même façon que Mikey a pris la moto.
-C'est un très beau collier.
Elle soupira.
-C'est la dernière chose que j'ai de lui, j'y tiens beaucoup, dit-elle en rangeant la chaîne. Bref, et Baji ? Tu pensais quoi de lui ?
Matsuko fut intérieurement rassuré que Kaori relance la conversation, ça prouvait qu'elle ne détestait pas complètement parler avec lui.
-À peu près tout le monde dans le Valhalla avait compris que Baji n'était pas dans notre camp, moi y compris. Shuji m'a demandé de le surveiller, pour éviter une mauvaise surprise le jour de la bataille. Ce que j'ai fait, juste différemment de ce que Shuji voulait.
-Tu as l'air de rarement faire ce que Hanma veut.
-Oui bah il n'a qu'à être plus clair.
Il afficha une mimique qui fit rire Kaori.
-Bref, il voulait que je surveille ses allées et venues et particulièrement s'il communiquait avec des membres de son ancien gang. Et figure toi que oui, il communiquait avec son voisin et vice-capitaine, Chifuyu Matsuno. J'étais censé prévenir Shuji sauf que —attention spoiler— je ne l'ai pas fait.
-Pourquoi ?
-Parce que..., soupira Matsuko, je trouve qu'une amitié ne devrait pas être arrêtée à cause d'histoires de gang. Je veux dire, pourquoi était-il obligé de tabasser son ami pour prouver sa loyauté ? Même dans des camps ennemis, ne pouvaient-ils pas rester amis ? Ce n'est pas parce que on n'aime pas quelqu'un que nos amis sont obligés de ne pas les aimer aussi, tu vois ce que je veux dire ? Pardon si c'est pas clair, c'est la première fois que j'exprime ça à voix haute.
-Je crois comprendre.
-Tant mieux alors. Donc pour en revenir à nos moutons oui, je les ai laissés discuter tranquillement, et si Baji a dit à Matsuno des infos alors soit, de toute façon nos stratégies n'étaient pas très imprévisibles.
-C'est vrai qu'on s'attendait tous à quelques coups de pute.
-C'est la spécialité de Shuji après tout. À la seconde où on entre dans un gang il faut savoir se préparer aux coups de pute, c'est une évidence. Je suis tout de même allé voir Baji chez lui un peu après. On a discuté. Il m'a dit et je cite "tu me rappelles Kaori, mais avec les trucs chiants en moins".
-Faut dire qu'on se chamaillait souvent pour des broutilles. Il était chiant aussi. Même si je pense qu'on pouvait quand même nous qualifier d'amis.
Les deux semblèrent soudain de rappeler qu'ils parlaient d'un défunt, et ils se rembrunirent.
-J'ai vu qu'il culpabilisait pour ce qu'il avait fait à Matsuno. Ça m'a fait de la peine, mais j'ai eu l'impression de comprendre ce qu'il ressentait.
-Comme ce que tu m'as expliqué sur l'amitié inter-gang ?
-Oh ça sonne bien ça, dit-il en souriant.
-C'est utile de faire du latin, même si c'est pénible.
-J'en doute fort. Je veux dire, c'est une langue morte. On ne l'utilise plus. À quoi ça sert ?
-À connaître l'origine d'un mot et son étymologie ça va de soi !
-Mais on a un dictionnaire pour ça !
-MAIS C'EST PAS PAREIL, cria Kaori.
Matsuko sursauta et se tut. Kaori se rendit compte qu'elle avait peut-être élevé la voix un peu fort, reprit contenance et ajouta :
-C'est comme avoir un dictionnaire mais dans sa tête tu vois...?
Matsuko hocha la tête. Quoique peu convaincu, il comprit que le débat était clos.
-Pardon d'avoir crié, s'excusa Kaori, c'est juste que je suis à cran aujourd'hui et j'ai déjà eu cette conversation au moins vingt fois avec Mikey, cinq avec Emma, deux avec Papi et je l'aurais probablement eu quelques fois aussi avec Shin, donc à force ça a tendance à m'irriter rapidement.
-Je comprends. Ça m'arrive aussi avec Shuji.
-Tu... te disputes souvent avec lui ?
-Ça arrive.
-Et qu'est-ce qui se passe quand ça arrive ?
-J'ai appris à savoir à partir de quand je dois me taire. Parfois je continue malgré les signaux, souvent il finit par gagner quand même.
-Ça t'es déjà arrivé de gagner ?
-Deux fois oui. La première quand je l'ai convaincu de m'apprendre à me battre, la deuxième quand je l'ai convaincu de m'intégrer dans le gang. Et crois moi ça n'a pas été facile.
-Je m'en doute. Il n'a pas l'air facile à vivre.
Kaori dut sentir que Matsuko n'était pas à l'aise, car elle revint au sujet de conversation principal.
-Donc, tu as parlé avec Baji ? Pas uniquement de moi j'espère, plaisanta-t-elle.
Belle tentative de détendre l'atmosphère, qui échoua tout de même.
-Eh bien, quoi d'autre... Je lui ai exprimé mon point de vue par rapport à Matsuno et mon truc de l'amitié inter-gang comme tu l'appelles, on a papoté, ah ! voilà j'étais à là ! Donc comme je te disais il culpabilisait d'avoir frappé Matsuno. Je l'ai rassuré en lui disant que de toute façon à la fin du combat les deux gangs allaient probablement fusionner —ce qui est arrivé— donc problème résolu. Aussi on a critiqué les cheveux de Shuji. Avec sa mèche jaune pisse et ses cheveux couleur caca là. Bouh..., dit-il en insistant sur la dernière syllabe.
-Mais t'as l'exacte même couleur sur ta mèche ?
Ses cheveux naturels étaient cependant légèrement plus clairs, mais il ne prit pas le temps de le préciser.
-Il m'a forcé ce bâtard. C'était sa condition sine qua non pour que j'intègre le gang. Un peu comme un signe qu'on est frères.
Kaori fronça les sourcils.
-Y'a pas besoin de mettre un signe.
-J'ai pas compris non plus, j'ai interprété ça comme un genre d'acte de propriété. Ça m'a pas plu.
-Pourquoi tu ne lui as pas simplement dit ?
-Parce que je voulais vraiment intégrer son gang.
Kaori ne semblait pas comprendre à quel point cette histoire de gang était importante pour Matsuko.
-Être dans un gang, reprit-il, ça prouve ma valeur à Shuji, ça me rend libre de faire ce que je veux quand je veux, avec l'attitude que je veux et sans que j'aie besoin de qui que ce soit.
-Tu n'as pas besoin d'être dans un gang pour ça.
-Si justement, c'est comme un genre de magie sociale mais pour faire peur tu vois ?
-J'ai pris latin j'te rappelle, j'y comprends rien à vos analyses sociologiques.
-Merde c'est vrai. Bah en gros la magie sociale c'est quand en fonction de ton apparence ou ton titre ou ton diplôme ou que sais-je on te traite bien. Et ducoup être dans un gang c'est pareil mais plus pour le respect que les gens du milieu te portent. C'était clair ?
Kaori fronça les sourcils en une grimace exagérée.
-En fait en sciences sociales vous jugez les gens.
-Ouais à peu près, rit-il. Mais promis c'est bien.
-Si tu le dis...
Ça faisait du bien de parler des cours avec quelqu'un, Matsuko parlait rarement école avec Kazutora, encore moins avec Shuji, les deux étant des glandeurs suprêmes. Kaori était une travailleuse, ça se sentait rien que par la manière dont elle parlait de son option.
Bien sûr Matsuko avait quelques amies à l'école (celles qui l'approchaient malgré son lien de parenté avec Shuji), mais il ressentait en permanence une sorte de distance avec elles. Elles étaient pourtant toutes très gentilles et n'avaient jamais rien fait pour le mettre à l'écart, au point où Matsuko se demandait si ce n'était pas lui le problème.
-Quand même, t'es pas non plus un gars qui se la pête de fou, reprit Kaori, donc c'est pas non plus le truc le plus important pour toi.
Elle insistait. Matsuko commença à se demander si elle se doutait de quelque chose. En tout cas elle mettait le doigt dessus depuis quelques minutes déjà. Ça lui faisait peur.
-C'est moi ou tu aimes bien avoir le dernier mot ?
-Quand je suis convaincue d'avoir raison, oui. Après si je me rends compte que j'ai tort je m'enfonce pas dans ma connerie. Ça c'est un truc pour vous les mecs.
Elle tendait une perche. À lui de la prendre. Il laissa Kaori poireauter. Il se sentait lâche.
-Qu'est-ce qui fait qu'on se ressemble ?
-Pardon ?
Il ruminait tellement ses pensées qu'il n'avait pas bien compris la question de Kaori.
-Baji dit qu'on se ressemble. Tu as dit qu'on se ressemble pendant la bataille. Alors je demande en quoi, selon toi, nous nous ressemblons.
-Oh... eh bien, reprit-il après avoir réfléchi un moment, pour commencer on est tous les deux dans la famille du chef de notre gang, et on est dedans grâce à ça.
-Je t'arrête tout de suite là-dessus, coupa sèchement Kaori. Si je suis dans le Toman c'est parce que j'en ai envie et que je le mérite car je sais me battre. Ça n'a rien à voir avec le fait que je sois parente avec Mikey.
-C'est quand même lui qui t'as fait intégrer le gang.
-Techniquement non vu que je suis membre fondatrice. Puis même c'est une question de principe.
-Je vois le genre. "Oh c'est une fille donc elle doit être dans le gang seulement à cause de Mikey." Comme si les filles ne pouvaient pas se battre, franchement !
Kaori rit en entendant la voix grave qu'il avait imitée.
-C'est ce que j'ai voulu éviter quand je suis entré dans le Valhalla.
Kaori reprit son sérieux en entendant la déclaration de Matsuko. Celui-ci prit une grande inspiration et enveloppa sa poitrine de ses bras pour se donner du courage.
-Je n'ai pas... je ne suis pas... comme toi. Je ne suis pas assez courageux pour... être "la seule fille du gang". J'ai trop peur qu'on ne me prenne pas au sérieux. J'ai peur qu'on me tabasse. J'ai peur que Shuji me traite comme un moins que rien. J'ai peur qu'être dans le "mauvais gang" me coûte la vie. J'ai peur d'exagérer ma peur. Et j'ai peur que ce que je viens de confier me fasse perdre tout ce que j'ai construit.
-Donc... c'est bien ce que je pensais. Tu es bien une fille.
-Oui.
-Mais pourtant tu continues de te genrer au masculin.
-...je sais pas. Je sais plus. Parfois j'adore être un gars, j'adore qu'on m'appelle "mec" et qu'on me genre au masculin. Puis d'autres fois cet uniforme me donne l'impression d'être trop grand pour moi, et là je suis juste une fille qui se fait passer pour un gars.
-Et... tu te sens comment aujourd'hui ?
-Eh bien... je me genre au masculin dans ma tête, donc on va dire plus le premier cas.
-Alors pour ce soir tu seras un gars.
-...T'as l'air d'accepter le truc vachement vite. T'es sûre que t'as compris ce que j'ai dit ?
-Oui oui t'inquiète, dit Kaori, il faut juste réfléchir dans la simplicité et le moment présent, après ça va tout seul !
Il y eut un blanc ou Matsuko médita ses paroles.
-Tu veux en parler ?
-Y'a pas grand chose à dire...
-Au contraire, je pense qu'il y a énormément à dire.
-Il n'y a même pas de terme pour définir ce que je suis, et d'ailleurs même Dieu ne doit pas le savoir, alors comment veux-tu qu'on en parle ?!
-C'est vrai qu'aux dernières nouvelles il n'y a pas encore de nom exact, mais vu toutes les variantes qu'ils sont en train d'inventer ils vont bien finir par trouver quelque chose qui te correspond !
-Tu t'y connais dis donc, t'es lesbienne ?
-Non, doux Jesus je préfère les bites, c'est juste que c'est un sujet qui m'intéresse énormément et que ducoup j'ai fais des recherches.
Le langage grossier était naturel et ni l'un ni l'autre ne bronchèrent à cette indiscrétion.
-En attendant, je dis que ce qui se rapproche le plus de toi c'est Changelin.
-Changelin ? C'est pas le type vert dans les Teen Titans ça ?
-Oui ! T'es comme Changelin sauf que toi tu changes de genre !
-Mais j'te permets pas !
-Je vais me gêner.
Matsuko rendit le sourire malicieux qu'elle lui lançait.
-Tu me provoques là. Tu veux te battre ?
Kaori haussa les sourcils.
-Que je t'écrase comme toute à l'heure tu veux dire ?
Ils se mirent rapidement sur leurs pieds et Kaori commença à s'étirer la nuque.
-Tant que j'y pense, ajouta-t-elle, merci d'avoir arrêté de m'attaquer quand ça a commencé à devenir chaud avec Mikey. J'ai trouvé ça très respectueux.
-C'est normal, répondit-il en faisant craquer ses doigts, mais maintenant qu'il n'y a plus personne pour nous interrompre je propose qu'on reprenne là où on s'est arrêtés ça te va ?
-Avec plaisir.
Il lança le premier coup, qu'elle esquiva en se décalant de justesse. Elle en profita pour attraper son poignet, qu'elle tira vers elle pour mettre Matsuko à la portée de ses coups. Elle leva le genou et l'enfonça dans son ventre. Il crachota une seconde.
-Connasse.
-C'est toi qui voulait te battre j'te rappelle, le taquina-t-elle.
Elle fut coupée par le croche-pied de Matsuko qui l'envoya sentir l'odeur du bois de la digue et à quel point celui-ci était mal poncé.
-Bah alors, on sait pas tenir sur ses deux jambes dans le Toman ?
Et ils s'amusèrent comme ça, se faisant des feintes, des coups bien portés mais pas méchants, tout en s'assurant que l'autre allait bien de temps en temps. Ils riaient tous les deux comme des enfants.
Kaori jeta un œil derrière elle et sourit, elle attrapa soudainement Matsuko et tourna sur elle-même, puis le poussa dans l'eau. Matsuko, surpris, s'accrocha à Kaori et l'entraîna dans sa chute.
Une fois tous les deux la tête hors de l'eau —ce cours d'eau n'était vraiment pas profond et très calme, ils pouvaient donc s'y asseoir aisément sans risquer la noyade— Kaori prit sa veste du Toman et l'essora tant bien que mal.
-Putain mec, cria-t-elle en peinant à retenir son rire, on a une réunion demain et tu m'as niqué mon uniforme ! Je fais quoi moi maintenant !?
-Écoute fallait pas me pousser ma vieille.
Matsuko s'accorda une seconde pour apprécier le sourire de Kaori et la remercia intérieurement d'avoir accepté son invitation, il en profita aussi pour remercier son côté impulsif et extraverti de s'être ouverts à elle. Ouais, il avait bien fait de l'inviter ici. Ils avaient encore beaucoup de choses à se dire, à mettre au clair et à instaurer entre eux, mais malgré les difficultés ils allaient s'en sortir, ils le savaient.
Matsuko s'était trouvé une amie pour la vie.
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BONJOUR
Je suis en vacances youpiiiii
Ce qui veut dire deux choses :
1) plus de temps pour écrire
2) plus de temps pour imaginer les scénarios de mes ff ! (Il faut sachez que je fais 70% de mes scénarios avant de dormir ou pendant mes grasses mat quand je somnole. Les 30% restant c'est quand je m'ennuie à des moments random de la journée.)
Si ça vous intéresse j'ai commencé à écrire la suite de Killed my family (qui va surement changer de nom) mais je vais surement travailler en même temps à l'os suivant sur Kaori.
D'ailleurs parlons en de l'os plutôt que parler d'un qui ne paraîtra pas de sitôt !
Qu'avez-vous pensé de Matsuko ? J'espère que j'ai bien expliqué sa genderfluidité ;-;
Et sa relation avec Kaori ? Je sais que y'a encore beaucoup de non-dits mais je voulais faire comprendre que enfaite ils s'en fichent des problèmes qu'ils risquent d'avoir (même si bien sur ils en ont parlé, ils ne sont pas dans le déni mais plutôt dans le "on fait avec").
Quand mon recueil a été supprimé j'étais en train de l'écrire, et purée de petit pois heureusement que je l'ai récupéré prcq je ne me serais jamais rappelé de tout ça.
Cet os était un peu comme celui d'avant : une conversation très longue mais utile et intéressante (fin j'espère)
Promis le suivant sera moins de ce style ; on va s'attaquer à l'arc Tenjiku 🤭 (on saute celui des Black Dragons prcq pas de trucs utiles assez pour en faire un os) et on va faire souffrir ma petite Riri (je sais on dirait pas mais je vous jure je l'aime d'amour)
Bisou 🐸
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