Chapitre 1
La lumière qui était parvenue à s'infiltrer discrètement à travers les fins rideaux blancs vint taquiner gentiment les yeux de la jeune femme. Elle finit, au bout d'un moment, par ouvrir ses paupières, observant silencieusement le grand plafond au-dessus d'elle. Son bras essaya d'attraper ce blanc pâle plusieurs fois, en vain. Finalement, après quelques minutes de réflexion, son buste se redressa et ses pupilles ambre firent le tour de la chambre. La pièce n'était pas très grande et les murs étaient peints en blanc. Quelques meubles étaient placés de sorte à remplir l'endroit. La brune retira le masque à oxygène placé sur sa bouche, qui l'empêchait de respirer par elle-même et posa sa main gauche sur la barre métallique grise à côté d'elle. Mis à part sa propre respiration, elle n'entendait que les bruits répétitifs de l'électrocardiogramme.
« Où suis-je ? .. »
Un soudain mal de tête la saisit et elle se rendit compte qu'elle ne connaissait plus rien. Elle ne connaissait plus rien à propos d'elle-même. Elle ne savait ni son nom, ni son prénom, ni son âge, ni sa profession, ni son passé .. Elle était tout d'un coup devenue un être humain dépourvu de toute identité. Elle avait effroyablement peur. Elle voulait que tout cela soit un simple cauchemar.
« Docteur, pouvons-nous aller la voir ? Nous sommes très inquiets pour elle ..
- Je vous prie de patienter encore un peu. Je dois aller la voir pour vérifier si tout va bien, puis je vous ferai signe et vous pourrez rentrer. »
En entendant un bruit – il s'agissait en fait de la porte coulissante, la jeune femme tourna la tête vers la provenance du son, se retrouvant agréablement face à un homme âgé environ d'une quarantaine d'années. Celui s'avança vers la malade, les mains fourrées dans les poches de sa blouse blanche, une expression impassible au visage : il était impossible de deviner à quoi il pensait réellement.
« Bonjour, mademoiselle. Je suis votre docteur, le docteur Park.
- Bonjour ..
- Puis-je vous poser quelques questions pour savoir comment vous allez ?
- Oui ..
- Bien. Vous souvenez-vous de votre nom ? De votre prénom ? De votre âge ? De votre profession ? De votre entourage ? »
Ses mains se saisirent chacune d'un bout de drap, les serrant fortement. Sa tête se baissa, jusqu'à que son regard rencontre les fins tissus que tenaient ses doigts.
« Je ne me souviens de rien, d'absolument rien ..
- Je vois. Ecoutez bien ; vous vous appelez Choon-Hee Hwang. Choon-Hee est votre prénom et Hwang votre nom de famille. Vous avez vingt-et-un ans et vous vivez actuellement à Séoul.
- Choon-Hee Hwang ? ..
- C'est cela. »
Elle ne savait pas pourquoi, mais ce prénom laissait un sentiment d'amertume dans son esprit ; une sensation de dégoût et d'haine envahit son cœur qui traduisit rapidement celle-ci par de petits frissons traversant toutes les parties de son corps. Pour cacher tout cela, la dénommée aborda un sourire légèrement faux sur son doux visage pâle. Elle était sûre qu'avec ça, le médecin ne pouvait rien remarquer ; du moins, c'était tout ce qu'elle souhaitait pour l'instant.
« Bien, annonça le docteur, je vais maintenant laisser vos parents entrer. Ils s'inquiètent beaucoup de votre état. »
La brune y répondit par un simple hochement de tête et se contenta de regarder partir l'homme. Elle pouvait entendre quelques sons dehors et reconnut entre autre la voix de son médecin, mais malgré que les deux autres lui étaient familiers, elle n'arrivait pas à déduire qui étaient leurs propriétaires.
La porte se rouvrit, laissant place cette fois-ci à un couple âgé d'environ d'une cinquantaine d'années ; ils s'approchèrent de Choon-Hee, l'observant longuement, comme si ils se rencontraient tous les trois pour la première fois de leur vie. Néanmoins, si le père se contentait seulement de scruter du regard l'amnésique, la mère, quant à elle, accourut vers celle-ci et la prit dans ses bras, entourant avec force son corps frêle.
« Choon-Hee .. Si tu savais combien j'étais inquiète pour toi .. »
La jeune femme se sentit tout d'un coup gênée et nerveuse en présence de ces deux personnes qui lui étaient partiellement inconnues. Ce ne fut qu'après une dizaine de secondes de réflexion qu'elle se décida à rendre une étreinte maladroite à sa mère, habillant son sourire d'une fine robe d'angoisse sur laquelle étaient surmontés des motifs de stress. Elle regardait du coin de l'œil l'homme qu'elle était censé appelé papa ; celui-ci n'avait pas bougé de sa place depuis maintenant quelques minutes, puis, en remarquant la nervosité de la brune, l'homme lui sourit et finit par faire quelques pas vers la direction du lit, transformant ainsi l'étreinte à deux en un câlin collectif à trois.
« Tu es enfin de retour, Choon-Hee .. »
Le sentiment de nervosité qui animait son pauvre cœur avait fini par disparaître et avait laissé place à la joie. La dénommée Choon-Hee se sentit bien dans ces bras qu'elle avait l'impression de connaître depuis toujours mais dont les souvenirs ne revenaient pas. Au fond d'elle-même, elle savait très bien qu'elle n'était pas la seule à souffrir et que ses " proches " en souffraient aussi ; mais elle savait aussi parfaitement qu'elle ne pourra jamais remplacer celle qu'elle était avant de perdre tous ses souvenirs.
Parce qu'après tout, la « elle d'avant » et la « elle de maintenant » étaient deux personnes complètements différentes et aucune ne pourra, sans doute, jamais remplacer l'autre. Car chacune d'entre elles était unique et se comportait à sa façon.
Elle avait juste l'impression de naître et d'atterrir pour la première fois dans ce monde.
Le soleil était sur le point de disparaître du ciel lorsque ses derniers rayons pénétraient la chambre fade. De sa fenêtre, Choon-Hee avait une vue sur toute la ville. Ses iris bruns se plongèrent dans cet océan d'immeubles gris et noirs, observant avec attention les multiples fenêtres qui réfléchissaient la lumière émise par notre étoile. Elle avait entre ses doigts un livre avec une fine couverture ; sur celle-ci, on pouvait y lire, écrit en gros, trois mots : Soleil de minuit.
Ses yeux refusèrent de quitter le beau paysage qui se présentait devant elle. Ils le scrutèrent longuement, sans bouger une seule fois. Ayant le souffle coupé par la beauté de ce spectacle, l'esprit de la brune était maintenant ailleurs depuis quelques minutes. Il voulait lui dire que tout ça n'était qu'un mauvais rêve et qu'elle allait bientôt se réveiller pour retourner à sa vie d'antan. Mais, malheureusement, son cerveau rétablit rapidement la vérité et détruisit tout espoir : elle avait tout perdu. Elle avait perdu son identité, sa personnalité et ses souvenirs. Elle était à présent un nouvel être qui venait de se réveiller d'un long sommeil.
Elle s'était perdue dans un grand labyrinthe et s'était retrouvée seule.
Posant délicatement le livre sur la table de nuit qui se trouvait à sa droite, les prunelles de la jeune femme rivèrent sur le calendrier accroché juste en face de son lit. Il avait un fond rouge et l'écriture était de couleur blanche. Un aimant de forme circulaire était placé sur la troisième ligne du mois, plus précisément sur les deux derniers chiffres et le lendemain, il sera sûrement placé sur les premiers chiffres de la quatrième ligne.
« 22 janvier, 17h35 » , répétait lentement l'amnésique avec une voix faible.
Deux jours s'étaient écoulés depuis son réveil. L'impression de ne pas avoir fait grand chose durant ces quarante-huit dernières heures n'affectait pas vraiment la jeune femme, tant le fait d'avoir perdu son identité la rongeait.
C'était devenu presque une obsession.
Pour la énième fois de la journée, la porte coulissante s'ouvrit après un léger toc effectué sur celui-ci. Mais cette fois-ci, au lieu de s'attendre sur sa mère inquiète ou sur son docteur stoïque, Choon-Hee se retrouva face à quatre personnes, les unes aussi différentes que les autres. L'une avait les cheveux étrangement rouges et des yeux jaune d'or ; une autre portait un costard noir par-dessus une chemise rayée de couleur bleue ; une autre portait deux barrettes qui s'entrecroisaient dans ses mèches blondes, ce qui lui donnait un côté mignon ; et enfin, la dernière, portait un suit de couleur marron.
« MC ! ..
- Yo, MC !
- Bonsoir, MC.
- MC ? .. Désolée, mais je crois que vous vous êtes trompés de chambre .. »
Choon-Hee ne comprenait plus grand chose. Est-ce qu'il y avait réellement quelqu'un qui avait ce prénom dans ce monde ? Il était vrai que le monde avait toujours regorgé de choses étranges et bizarres. Mais au final, personne ne savait vraiment ce qui était normal et ce qui était bizarre ; c'était une limite tracée par les humains eux-mêmes pour partager deux notions complètement abstraites.
Le blond agita de la main, ce qui permit à la brune de sortir de ses rêveries. Un léger sourire désolé parcourut ses fines lèvres, puis, il se mit à rire nerveusement, sentant les regards interrogatoires des quatre personnes : ils attendaient tous, apparemment, une réponse à ces gestes étranges.
« Désolé .. Je t'ai confondue avec une amie .. Elle te ressemble beaucoup.
- Ce n'est pas grave, cela arrive ..
- Je me présente, je m'appelle Yoosung Kim, enchanté ! Si tu as besoin de quoi que ce soit, je suis là ! »
Quand le dénommé vint serrer tendrement la main de la brune, celle-ci lui rendit un sourire poli et sincère. L'homme aux cheveux noirs s'approcha à son tour, réalisant par la suite une petite courbette.
« Je m'appelle Jumin Han. Tu peux appeler ce numéro si jamais tu as besoin d'aide. »
Il sortit alors de sa poche une petite carte de visite au fond blanc décoré de bandes bleues et noires, qu'il prit le soin de poser dans le creux de la main de la jeune femme, se forçant à lui adresser un petit sourire – il fallait préciser que le brun était quelqu'un de sérieux et de mature et avait beaucoup de mal à exprimer explicitement ses sentiments. Les deux dernières personnes s'approchaient à leur tour ; l'homme aux cheveux rouges tendit à son tour sa main, un rire venant accompagner le mouvement, suivie de la femme au suit qui se contenta simplement de s'asseoir à côté d'elle et de lui sourire gentiment, de façon à rassurer la malade.
« Yo, je m'appelle 707 mais appelle moi Seven, enchanté yo !
- Je m'appelle Jaehee Kang, enchantée de te connaître.
- Et toi, comment tu t'appelles ? » questionna alors Seven. Ils connaissaient déjà tous la réponse mais il fallait qu'ils la mettent en confiance.
Les yeux de Choon-Hee firent un tour d'horizon avant de se plonger dans les prunelles de 707. Ce regard lui rappelait quelque chose, mais encore une fois, tout était flou dans son esprit et elle ne parvenait pas à trouver de réponse à sa question.
Il fallait dire que toutes les personnes qu'elle avait vues jusqu'à présent lui semblaient familières. La jeune femme leur adressa à tous un simple sourire – mais forcé, serrant poliment chaque main qu'on lui tendait.
« Je m'appelle Choon-Hee, enchantée de tous vous connaître ! .. »
Les cinq personnes se retrouvèrent une fois de plus dans la même chambre. Le cercle jaune du calendrier avait changé de place et s'était maintenant retrouvé sur la troisième paire de chiffres de la quatrième ligne. Tandis que Jaehee, Yoosung et Choon-Hee discutaient chaleureusement, mêlant ainsi dans leur conversation rires et blagues, Seven et Jumin se tenaient un peu plus loin et semblaient entretenir une discussion privée.
Le rouge regardait avec insistance le brun, les bras croisés au niveau de la taille ; il avait jeté un rapide coup d'œil au petit groupe chaleureux que composaient les deux brunes et le blond avant de se concentrer sur son interlocuteur. Quant à celui-ci, il n'avait aucune expression particulière sur son visage et se contentait simplement de dévisager son ami.
« Jumin, tu es sûr qu'il ne va pas venir ? »
Le dénommé laissa échapper un petit soupir, avant de poser son dos contre le mur à côté de lui.
« Tu te trompes, Seven. Il est déjà venu. »
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