6 ➵ 𝒂𝒗𝒂𝒏𝒕




𝙙𝙚́𝙘𝙚𝙢𝙗𝙧𝙚 𝟮𝟬𝟭𝟱
𝙏𝙤𝙠𝙮𝙤

Jisung n'avait pas l'intention d'avouer à ses colocataires qu'il était sujet à des cauchemars récurrents. Il le savait, pourtant : en communauté, cela pouvait être dérangeant, car parfois, il parlait dans son sommeil, allant même jusqu'à crier lors des plus grandes crises. Et quand il était pris d'une telle panique, il lui était impossible de se calmer tout seul, il avait désespérément besoin d'un réconfort humain. Les années précédentes, il se réfugiait simplement dans le lit de Chan, ce qui l'apaisait immédiatement, mais cette année, il n'allait pas pouvoir faire la même chose, leurs chambres se situant à l'opposé l'une de l'autre. Et cette idée l'angoissait déjà. Il avait attendu les premières nuits avec appréhension, redoutant le moment où ses peurs nocturnes l'assailliraient.

Il ne savait pas exactement d'où ça lui venait, mais depuis tout petit il avait souvent affaire à des cauchemars. Jusqu'à son entrée à l'internat, ses parents le rassuraient, lui lisaient une histoire et l'aidaient à se rendormir. Et quand il ne voulait pas les déranger pour la troisième nuit d'affilée, il écoutait de la musique ou essayait de penser à autre chose. Mais ça avait commencé à devenir gênant, et ils avaient fini par aller voir un psychologue pour essayer d'exorciser la source de ces mauvais rêves à répétition, sans succès. « Jisung est simplement un enfant à l'imagination débordante », avait expliqué le docteur. « Ces peurs sont fréquentes chez les jeunes enfants, elles se calmeront avec le temps ». Les Han avaient donc pris leur mal en patience, et s'étaient efforcés de rendre les nuits moins effrayantes pour leur fils. Veilleuse, peluche, étoiles phosphorescentes, ils avaient essayé toutes les méthodes possibles et inimaginables pour que le petit garçon n'ait plus peur de se laisser aller au sommeil. Mais tous leurs efforts s'étaient avérés vain, et Jisung avait eu dix ans, puis quinze, sans que rien ne change.

Avant, ses parents habitaient dans une petite bourgade à une heure de Tokyo, et l'internat s'était présenté comme la meilleure solution pour lui. Ils avaient longuement pesé le pour et le contre, mais il avait très envie d'y aller et ne voulait pas que ses cauchemars l'empêchent de prendre son indépendance. Et dormir dans la même pièce que quelqu'un avait marché, au début : il était rassuré par les respirations de ses camarades à quelques mètres de lui. Il était heureux de ne pas avoir de nouvelles crises, il pensait enfin en avoir fini avec ces foutus cauchemars. En plus, il s'agissait de Chan et Changbin, alors il ne voulait pas avoir l'air plus enfant à leurs yeux qu'il ne l'était déjà. Mais bien vite, ça lui avait repris, aussi violemment qu'avant, et il se réveillait en sueur et en larmes, serrant son oreiller contre lui comme s'il pouvait le protéger. Mais il n'y avait aucun danger immédiat : son seul bourreau, c'était son cerveau. Quand il avait commencé à se rapprocher des deux autres, il avait fini par se confier sur ce problème, un soir où ils étaient occupés à se raconter des choses sur eux que personne ne savait. Chan avait alors immédiatement proposé de l'aider, et bien qu'au début Jisung se refusait à accepter, il avait bien vite trouvé les avantages de dormir avec Chan. C'était fou à quel point une simple présence à ses côtés le relaxait.

Sauf que maintenant, il se retrouvait à nouveau livré à lui-même, sans personne pour l'apaiser lors de ses crises. Les premières semaines dans sa nouvelle chambre, il se réveillait en larmes, hoquetant et tremblant. Par chance, jusque-là, aucun de ses colocataires ne semblait avoir été gêné par ces bruits. Il avait l'intention de garder le secret encore longtemps : il refusait d'être à leurs yeux celui qui fait encore des cauchemars comme un enfant. Et il réussit, pendant des mois entiers, à dissimuler cette particularité.

Jusqu'à ce jour.

Cette nuit-là, la crise fut plus forte que n'importe quelle autre l'avait été depuis longtemps. C'était une froide nuit de décembre, et il s'était emmitouflé sous des couches de plaids, de couette et de pulls. Quand le cauchemar était arrivé, il s'était débattu dans son sommeil, et s'était emmêlé dans les épaisseurs de tissus. Plongé qu'il était dans son demi-sommeil, il avait fini par se retrouver complètement coincé. La panique l'avait saisi. Il se sentait étouffer, la gorge bloquée par une couverture qu'à force de gigoter, il avait plaqué contre lui. Il ouvrit les yeux, des limbes de son mauvais rêve encore accrochés à son esprit. Le noir de la pièce l'empêchait de voir correctement. Il tenta de se dépêtrer des draps, sans succès. Il commençait vraiment à angoisser, et plus il angoissait, plus il n'arrivait pas à mettre de l'ordre dans ses idées et à raisonner logiquement pour se sortir de cette situation. Il n'avait aucune idée de l'heure qu'il était, et les images de son cauchemar, des scènes horribles où il voyait ses parents mourir sous ses yeux, se mêlaient à sa réalité. Il crut qu'il allait se mettre à pleurer encore une fois, et il refusait d'être aussi ridicule. Mais malgré lui, il ne put s'empêcher de laisser échapper un sanglot bruyant, alors qu'il se sentait plus que jamais piégé et étouffé.

Il fallait qu'il inspire et qu'il expire, comme dans les exercices qu'il s'était entrainé à faire avec ses parents. Paniquer ne servirait qu'à aggraver les choses, il le savait, mais y remédier, c'était une autre paire de manches. Il ferma les yeux et tenta de se calmer. Il n'avait pas vraiment conscience du bruit qu'il pouvait faire, étant concentré à essayer de se dépêtrer pour retrouver sa liberté de mouvement et respirer normalement. Mais la pression sur sa gorge se faisait plus forte, et son cœur s'accélérait de façon anormale. Il sentit les larmes rouler sur ses joues, et s'insulta mentalement d'être aussi faible.

-Jisung, c'est toi ?

Le chuchotement parvint aux oreilles du brun, qui cessa un instant de s'agiter vainement. Cette fois, il avait vraiment réveillé un de ses amis. En revanche, il ne pouvait pas identifier à qui appartenait la voix. Il espérait juste que ce ne soit pas Minho. Sa relation avec le jeune homme était pour le moins... Chaotique. Ce qui, pour être honnête, était un petit peu de sa faute. C'était lui qui avait commencé à l'éviter en tout d'année, pour un nombre de raisons que même lui avait du mal à trouver crédibles. Au départ, ça devait être un simple éloignement, mais ça avait pris des proportions gigantesques, et maintenant ils ne s'adressaient littéralement jamais la parole, étant très gênés dès qu'ils se retrouvaient ensemble. Il était perturbé par sa présence, qui lui faisait ressentir beaucoup de choses qu'il n'était pas sûr de savoir identifier. Mais il espérait encore moins que ce serait Hyunjin : entre eux, ce n'était même pas de l'ignorance mutuelle, c'était une véritable guerre froide. Hyunjin lui tapait sur les nerfs à être bon dans tout ce qu'il entreprenait, alors que Jisung commençait toujours dix mille projets sans jamais venir à bout d'un seul. En plus, il avait l'impression qu'il avait pris sa place dans le cœur de Chan, et il appréciait peu se voir reléguer au second plan. Oui, c'était de la pure et simple jalousie. Ce qui, en fait, ne laissait pas beaucoup d'options sur la personne qu'il aurait aimé que ce soit qui l'ait entendu pleurer. Il n'y avait que Seungmin qu'il pouvait autoriser à le voir sans carapace. Seungmin l'adorable, qui avait toujours un mot de gentil pour lui, à qui il avait déjà confié beaucoup de choses.

-Jisung ? Jisung, ça va ?

Cette fois-ci, il reconnut la voix : c'était Minho. Il grimaça. Il n'avait vraiment pas de chances. Il ne répondit rien, espérant que le brun finirait par se recoucher. Il profita d'avoir retrouvé son calme pour extirper ses bras de dessous la couette, inspirant une grande goulée d'air. Le silence était tombé dans la pièce. Après un temps d'attente qui lui parut interminable, il entendit Minho regagner son lit. Il soupira, soulagé. Avec un peu de chance, il croirait vraiment avoir rêvé, et il oublierait cet incident le lendemain matin.

Mais même s'il s'était débarrassé de son sentiment d'étouffement, il restait toujours ces fichus images qui tournaient dans sa tête en boucle. Sa mère allongée à terre, baignant dans le sang ; son père égorgé. Il se redressa d'un coup, la respiration hachée. N'allait-il donc jamais pouvoir dormir en paix ? Qu'avait-il fait de mal dans une autre vie pour souffrir comme ça ? Il attrapa son portable sur la table de chevet, l'alluma : il n'était que deux heures du matin. Il n'allait pas pouvoir allumer la lumière de sitôt, et il avait trop peur pour sortir dans le couloir. C'était idiot, déraisonné, mais il lui semblait subitement qu'il ne verrait plus jamais le soleil, et il sentit un poids peser sur sa poitrine alors que son rythme cardiaque s'emballait. Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas subi une crise aussi forte. Il avait toujours été sujet à de l'anxiété, mais il prenait des traitements pour ça et ils étaient généralement efficaces.

Il resta quelques instants assis sur son lit, la main sur son cœur, tentant de penser à autre chose pour oublier son cauchemar. Mais rien n'y faisait. Il avait été dans cette situation des dizaines de fois, et le seul remède avait toujours été de dormir aux côtés de quelqu'un. Il ne voulait pas réveiller Seungmin, et Hyunjin n'était même pas une option. Si jamais il était toujours réveillé, Minho pourrait...

-Minho ? chuchota-il avant de tergiverser trop longtemps.

Pendant un bref instant, il crut que le brun s'était déjà rendormi, et il se sentit déjà prêt à fondre en larmes. Mais un bruissement se fit entendre, et il sentit une silhouette s'approcher de son lit. Jisung dormant dans le lit superposé, Minho arrivait juste à la hauteur de son matelas.

-Oui ?

La voix ensommeillée du jeune homme était douce, apaisante. Déjà, Jisung se sentait un peu mieux. Il n'était pas seul, qu'importe ce que son esprit essayait de lui faire croire.

-J'ai... j'ai fait un cauchemar.

Il se sentait tellement idiot, tellement faible ! Il attendait avec appréhension la réaction de Minho. Il aurait compris s'il avait éclaté de rire à l'entente de sa petite voix d'enfant. Mais il n'en fit rien.

-Tu veux venir dormir avec moi ? chuchota-il après un temps d'hésitation.

Jisung hocha honteusement la tête, puis formula sa réponse à voix haute en réalisant qu'il ne pouvait pas le voir dans le noir ambiant.

-J'arrive.

Il termina de se dépêtrer des couvertures, essuyant ses yeux avec force. Il sentait confusément qu'il regrettait ce qu'il s'apprêtait à faire le lendemain, mais sur le moment, il avait le besoin physique de ne plus se sentir seul, abandonné à ses pensées noires. Tant pis si au lever du soleil sa crise lui paraitrait futile : à l'instant même, elle prenait des proportions gigantesques. Il descendit l'échelle en prenant soin de ne pas tomber, et dès qu'il posa le pied sur le sol froid de la chambre, expira un long soupir.

À tâtons, il chercha Minho. Ses mains finirent par rencontrer celles du jeune homme, et ils laissèrent échapper un petit rire gêné alors qu'ils se lâchaient immédiatement, comme s'ils s'étaient brûlés au contact de l'autre. Ils restèrent quelques instants dans le silence, puis Minho lui attrapa doucement le bras pour le conduire jusqu'à son lit. Ils ne voyaient presque rien, et n'osaient pas parler de peur de réveiller un de leurs colocataires. Maladroitement, ils réussirent tant bien que mal à se glisser sous la couette du plus âgé, non sans se cogner à la moitié des meubles de la chambre. Le matelas n'étant destiné qu'à une seule personne, ils étaient collés l'un contre l'autre, et cela ne faisait pas vraiment Jisung se sentir mieux.

-Est-ce que tu peux te décaler, s'il te plaît ? finit-il par demander, ne pouvant plus supporter la proximité forcée.

-Euh, oui bien sûr.

Minho se rapprocha du mur le plus qu'il pouvait, et Jisung put enfin respirer librement. Il avait bien conscience de l'étrangeté de la situation, deux garçons se parlant à peine qui se retrouvaient à quelques centimètres d'écart en plein milieu de la nuit. Tout ça n'était pas pour le rassurer. Minho n'avait pas le pouvoir que Chan avait eu sur Jisung : à vrai dire, il commençait à se demander s'il avait bien fait de rappeler le noiraud et d'aller se coucher à ses côtés. Ils ne se connaissaient pas réellement, malgré tous les jours passés ensemble, et être aussi proche de quelqu'un qui était encore un inconnu pour lui rendait Jisung mal à l'aise.

Ni l'un ni l'autre ne parlait, et la tension commençait à être palpable. N'y tenant plus, Jisung amorça une conversation.

-Je... Je ne te dérange pas trop au moins ?

-Pas du tout, s'empressa de répondre Minho. Tu... Je n'étais pas sûr que ça soit toi qui pleurait. Tu veux en parler ?

-Ce n'est rien de grave, murmura le plus jeune. J'ai juste fait un cauchemar. Ça m'arrive des fois.

-Hmm, je vois.

Il y eut encore un blanc, mais cette fois moins gênant. Jisung n'arrivait pas à croire qu'il soit réellement en train de partager un lit avec Minho. Ils s'observaient toujours de loin, depuis ce premier jour où il l'avait trouvé errant dans les couloirs du lycée. Jisung avait commencé à l'éviter juste après, et n'avait jamais cessé depuis. Et tout cela parce qu'il était lâche, lâche et peureux. Minho ne l'avait définitivement pas laissé indifférent, et cela le terrifiait. Il ne comprenait pas comment les choses avaient pu se déclencher aussi vite, mais il refusait de s'attarder sur de tels sentiments. Il ne devait pas. Ils étaient un groupe d'amis soudés, il n'y avait pas de place pour ce genre d'amour entre eux. C'est pour ça que Jisung avait cessé de lui parler, cessé de rechercher sa compagnie. Il savait qu'il y avait quelque chose en lui qui ne demandait qu'à grossir et à prendre toute la place, et ne voulait pas que cela se produise, il était impossible qu'il tombe amoureux de Minho. Pour l'instant, il tenait à garder son attirance à l'état de simple crush.

Malgré tout, il ne put s'empêcher de remarquer à quel point ce dernier avait été adorable et gentil de venir le chercher quand il avait entendu qu'il n'avait pas bien. Même s'il l'aurait fait pour n'importe qui d'autre, Jisung se sentait un peu privilégié. Et regrettait d'avoir passé les trois derniers mois à éviter soigneusement de croiser son regard.

-Tu sais, je suis désolé de ne pas te parler souvent et d'agir si mal avec toi, commença-il.

Il ressentait le besoin urgent de se faire pardonner toutes ces semaines à ignorer royalement le plus âgé. Il sentit que Minho avait incliné sa tête sur le côté pour mieux l'entendre.

-C'est juste que je... tu m'impressionnes énormément, et je n'arrive pas à... je n'ai jamais l'impression d'être à la hauteur.. c'est... je... argh !

Il n'arrivait pas à formuler une réflexion complète. Mais son cerveau se vida encore plus de toutes pensées cohérentes quand il sentit une main se poser sur son épaule. Celle de Minho, évidemment. Le contact soudain le fit frissonner. C'était la troisième fois en moins de dix minutes qu'ils se touchaient, et il n'était pas sûr de s'y faire un jour.

-Jisung, si je t'ai proposé de venir dormir avec moi, ce n'est pas pour que tu me fasses des excuses, c'est pour que tu te sentes mieux. Je pensais qu'être avec quelqu'un t'aiderait peut-être à oublier ton cauchemar. Comment je me sens n'a aucune importance, c'est de toi qu'il s'agit ici.

Le brun sentit son cœur s'accélérer brutalement et le rouge lui monter aux joues. Comme d'habitude, Minho allait droit au but et ne s'embarrassait pas de formules alambiquées. Il sortait ce qu'il avait sur le cœur, c'était tout. Et l'entendre dire aussi clairement que l'état de Jisung passait avant le sien lui fit décoller des papillons dans le ventre. Il ne méritait pas qu'on soit aussi gentil avec lui, pas alors qu'il avait agi comme le plus grand des connards depuis septembre.

-Ça va mieux ? finit par demande Minho, alors qu'aucune réponse ne lui parvenait.

-Un peu mieux.

Cette fois, c'était vrai : son rythme cardiaque s'était apaisé, et il retrouvait le calme qui l'habitait quand c'était autrefois auprès de Chan qu'il se réfugiait. Cela n'enlevait rien au sentiment étrange qui l'habitait, mais il savait que celui-ci n'avait rien à voir avec son anxiété, et qu'il n'était qu'une conséquence de sa proximité avec Minho.

-Ça te dérange si je m'endors ici ? murmura-il si bas qu'il crut un instant que le noiraud ne l'avait pas entendu.

Mais ce dernier, après quelques secondes de flottement, finit par répondre par la négative. Jisung sentit qu'on enlevait un poids de ses épaules. Retrouver son lit lui paraissait impossible dans l'état où il était : il savait qu'à l'instant où il ne ressentirait plus de chaleur auprès de lui, la peur reprendrait du terrain.

-Merci, articula-il piteusement.

Il n'arrivait pas à vraiment faire le tri dans toutes les émotions qui l'habitaient. Soulagement, honte, apaisement, son esprit semblait tournoyer sans jamais se fixer sur une bien définie. Il ne pouvait pas compter sur Minho pour l'aider : ce dernier était aussi peu bavard qu'à l'ordinaire, même s'il s'était montré rassurant. D'un côté, il avait envie de parler pour se sortir de la tête les images horribles de son cauchemar, de l'autre, il ne voulait vraiment pas déranger son ainé, surtout que celui-ci l'accueillait déjà dans son lit.

-Encore désolé.

-Je t'ai dit de ne pas t'excuser, le gronda gentiment Minho. Ça arrive à tout le monde d'avoir peur de temps en temps.

-Je me sens tellement nul...

-Je t'interdis de penser des choses pareilles. Tu es loin d'être nul.

-Tu parles. Je ne suis même pas capable de dormir seul apparemment. 

-Et alors ? Quelle importance ? Si tu préfères mourir de peur tout seul, c'est ton problème, mais moi je ne vois pas le mal qu'il y a à avoir besoin de quelqu'un.

Chacune de ses paroles étaient comme une couverture rassurante qu'on mettait à Jisung. Il murmura un merci, et lui souhaita bonne nuit. Alors qu'il y a dix minutes, il aurait trouvé impensable de s'endormir, il sentait maintenant ses yeux se fermer doucement. La chaleur de Minho à quelques centimètres de lui n'y était pas pour rien. Blotti sous la couette et la couverture du brun, apaisé par sa respiration régulière, il se sentait doucement plonger les bras de Morphée.

Presque ceux de Minho... songea-il avant que le sommeil ne l'emporte tout à fait.

Le reste de sa nuit se déroula sans incident notoire.

*

Au petit matin, Minho s'éveilla avec la sensation diffuse d'un poids contre lui. Il ouvrit alors totalement les yeux, et la vision d'une masse de cheveux bruns enfouie dans son cou le fit tout d'abord sursauter, avant que les évènements de la nuit passée ne lui reviennent en mémoire. Il constata alors que Jisung était complètement collé à lui, ses bras le serrant comme s'il avait peur qu'il ne s'échappe. Il n'avait aucune idée de l'heure qu'il était, et il n'avait aucun accès à son portable avec le jeune homme qui bloquait ses mouvements. Ni Seungmin ni Hyunjin n'étaient debout, à en juger par l'absence de bruit, mais cela n'était pas rassurant : généralement, c'est Minho qui se préparait avant tout le monde, et sans lui les réveils étaient difficiles.

Il attendit quelques instants, sentent le torse de Jisung s'abaissait et se soulever au rythme de sa respiration. Il se rappelait la crise d'angoisse qui l'avait parcouru cette nuit, et à cette pensée il sentit son cœur se contracter douloureusement. Il détestait voir les gens autour de lui souffrir, et particulièrement Jisung, qui à ses yeux était invulnérable. L'entendre sangloter l'avait beaucoup atteint, il avait été aussi affecté que s'il avait s'agit d'un de ses parents. Il se sentit rassuré de voir qu'il avait visiblement réussi à s'endormir, même s'il le prenait pour son doudou personnel. Au fond, il n'y était pas opposé. Au contraire, il appréciait même de sentir le brun aussi près de lui. Pour une fois qu'il n'était pas en train de faire comme s'il n'existait pas... Il ne savait pas ce qui poussait Jisung à agir ainsi. Il avait l'impression que cette nuit, il lui en avait parlé, mais il était incapable de se rappeler des mots exacts. Il pourrait toujours lui poser la question une fois qu'il serait levé.

-Jisung~ il faut se réveiller ~

-Hmmhmh...

Pour toute réponse, le brun le serra plus fort. Certes, Minho n'était pas contre les câlins, mais il appréciait moyennement de se faire étouffer jusqu'à l'asphyxie. Il s'empara des bras de Jisung et les décolla de son corps, mais le petit était bien attaché.

-Hmhmmm... gémit-il encore.

Minho soupira.

-Jisung, il faut se lever, c'est le matin.

Toujours aucune réaction.

-Bouge tes fesses !

Il parvint à s'arracher à l'étreinte du plus jeune, et s'assit immédiatement pour éviter qu'il ne retombe dans ses filets. Mécontent d'avoir perdu son oreiller, Jisung s'agita, puis ouvrit totalement les yeux.

-Qu'est-ce que...

Il se redressa d'un coup, manquant de se cogner au sommier du lit au-dessus.

-Minho ?!

-C'est moi, se moqua l'intéressé.

Jisung paraissait à la fois horrifié et très honteux. Il regarda autour de lui, et ce qu'il vit ne sembla pas lui plaire.

-Oh nooon ne me dis pas que...

-Si si, on a dormi ensemble.

-Seigneur.

Les joues rouges, il se dépêcha de sortir du lit, et s'avança en titubant jusqu'à sa commode, où il récupéra son téléphone.

-Il est sept heures moins dix, se plaignit-il. D'habitude, je dors jusqu'à sept heures !

Il se mit à fouiller dans son armoire pour trouver ses affaires, mettant un point d'honneur à ignorer le jeune garçon avec qui il avait partagé un matelas. Minho le vit faire des allers-retours dans la chambre alors qu'il rassemblait ses cours, un petit sourire au coin des lèvres. Il savait que Jisung allait avoir du mal à admettre ce qui était arrivé cette nuit, mais il n'avait pas l'intention de le laisser s'en sortir aussi facilement. C'était une situation assez rare pour être notable, et s'il ne se moquerait jamais des faiblesses du plus jeune, ce n'est pas pour autant qu'il allait le laisser s'enfuir comme si rien ne s'était passé. Il en avait marre d'être ignoré sans raisons apparentes : il avait bien l'intention que Jisung l'apprécie comme les autres membres du groupe. Cette nuit, il avait trouvé un refuge en lui : pourquoi ne pouvait-il pas en faire autant la journée ? Qu'avait fait Minho de si rédhibitoire pour qu'il ne s'autorise à l'approcher que sous couvert de l'obscurité ? Il était sûr qu'ils pourraient bien s'entendre si seulement Jisung leur donnait une chance.

Minho n'avait pas dit son dernier mot. Jusque-là, il avait laissé glisser, mais maintenant il sentait qu'il y avait plus à découvrir que ce que le cadet laissait paraître.

Il arriverait à se rapprocher de lui coûte que coûte, il s'en faisait la promesse.

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