Chapitre 158 : Infiltration
Rose apprit que Sophie tomba enceinte. Leur grand-père mit l'adolescente à la rue et Luck l'accompagna. Jerry, un humain amoureux de Rose depuis le lycée, lui dévoila où étaient les jumeaux et le genre d'activité qu'exerçait Luck. L'aînée fut énormément déçue lorsqu'elle découvrit à quel point ses cadets étaient devenus malfaisants.
Rappel : seul Luck travaille pour Jack. Sophie ne participe pas aux activités illégales.
***
Jack s'isola dans une chambre avec Jerry. L'acolyte était pâle face au regard furieux de son patron.
« Est-ce que tu te rends compte à quel point ce que tu as fait est grave ? tempêta l'usurier.
— Désolé... je suis dingue d'elle. Je n'arrive pas à réfléchir correctement en sa présence, avoua le subordonné, penaud.
— Et en plus, tu ne le caches même pas ! »
L'usurier caressa son menton, à la recherche d'une solution. Il ne se cassa pas la tête et opta pour l'idée la plus simple.
« Si jamais tu refais une erreur pareille, je me débarrasserai de toi, suis-je bien clair ?
— O... oui ! » s'exclama Jerry en tressautant.
De son côté, Rose était en route pour rentrer chez elle. Ses retrouvailles avec les jumeaux furent plus douloureuses que la période durant laquelle elle était à leur recherche. Leur âme était devenue trop corrompue. Elle ne savait pas comment s'y prendre pour les faire redevenir comme avant.
Alors qu'elle était perdue dans ses pensées, une ombre surgit derrière elle. Surprise, elle s'apprêta à crier. Jack colla sa main sur sa bouche et l'entraina dans une ruelle avalée par l'obscurité de la nuit.
« Qu'est-ce que tu me veux ?! demanda-t-elle avec véhémence.
— Je ne vais pas tourner autour du pot, répondit froidement l'humain. Si jamais tu racontes ce que tu sais à propos de nous à quelqu'un, je tuerai Luck, Sophie et Jerry.
Rose écarquilla ses yeux d'effroi. Elle ne comprenait pas comment son interlocuteur pouvait prononcer des paroles aussi terribles comme si de rien n'était.
Néanmoins, elle se ressaisit et fit part de ses déductions :
« Tu essaies de me faire peur car j'en sais trop sur vous, n'est-ce pas ? Tu aurais simplement pu m'éliminer. Mais tu sais que si tu t'en prends à moi, Luck et Jerry t'en voudront trop pour continuer à travailler pour toi. Autrement dit, ce ne sont que des menaces creuses. Ils te sont trop utiles pour que tu puisses te permettre de les tuer. »
Jack afficha un sourire mauvais et rétorqua spontanément :
« Tu te méprends. Jerry n'a aucun pouvoir, seule sa puissance m'intéresse. Quant à Luck, je peux me débarrasser de lui et facilement trouver quelqu'un avec une capacité similaire à la sienne. Toutefois... c'est inutile d'aller aussi loin. Je pense que nous pouvons régler ce problème sans effusion de sang, tu n'es pas d'accord ? »
Une barrière empêchait les mots de traverser les lèvres de Rose. L'air était frais, néanmoins, elle suait. Son cœur tambourinait dans sa poitrine. Son instinct lui hurlait de ne surtout pas contrarier cet homme.
« C'est compris... balbutia-t-elle, vaincue.
— Je savais que tu saurais te montrer compréhensive. Sur ce, bonne soirée. »
Et l'usurier se volatilisa dans la pénombre, sans inquiétudes.
***
Rose enchaina les nuits blanches. Que ce soit dans son lit, sous la douche, en salle de classe ou sur son lieu de stage, elle ne pensait qu'aux jumeaux. La voie obscure qu'ils empruntaient, l'individu dangereux à qui Luck obéissait... Elle devait faire quelque chose.
Après des jours de réflexion, elle prit sa décision. Elle infiltrerait l'organisation afin de récolter des informations, trouver un moyen de les détruire de l'intérieur, puis sauver ses cadets.
La jeune femme passa des semaines à s'entrainer pour que son rôle de criminelle soit le plus crédible possible. Elle devait paraître avide, vile. Elle se prépara psychologiquement aux horreurs qu'elle serait obligée de commettre.
Lorsqu'elle se sentit prête, elle alla un soir à la rencontre de Jack. Ce dernier fut étonné de la voir à l'autre côté de l'ouverture. Luck, Sophie, Jerry et Steve, jouant aux cartes, furent statufiés par la stupeur.
L'usurier ne laissa même pas la visiteuse rentrer dans l'appartement et lança la discussion, suspicieux :
« Quel est l'objet de ta visite ?
— Je veux faire partie de votre équipe. »
Les globes oculaires de chacun semblaient sortir de leur orbite.
Jack sourit. Il gloussa. Puis, il rit à gorge déployée. Si bruyamment que tous les résidents de l'immeuble l'entendirent.
L'usurier essuya une petite larme et tel un gentleman, invita la jeune femme à pénétrer dans le salon d'un geste de la main.
Rose s'assit nerveusement sur un sofa. Son futur patron commença un entretien d'embauche improvisé :
« Pourquoi veux-tu subitement nous rejoindre ? »
L'aspirante fronça ses sourcils. Elle lança le regard le plus haineux et malveillant possible. Elle pensa à ses propres craintes pour essayer d'être convaincante :
« Ça fait un moment que je me demande... même si je termine mes études, est-ce que j'aurai un bon travail ? Toutes ces années d'efforts seront-elles récompensées ? Je ne veux pas passer ma vie à me faire crier dessus par un supérieur qui me prend de haut simplement parce qu'il a un meilleur poste que le mien.
— Je n'aurais pas dit mieux, approuva Jack. Et donc, quel est ton concept ? N'essaie même pas de me tromper car je le saurai bien vite lorsque je te confierai des tâches.
— Mon concept est celui des organes. »
L'usurier haussa les sourcils, très intéressé. Une idée de business se créa aussitôt dans son esprit. Il voyait déjà les billets affluer. C'était le jackpot à coup sûr.
Néanmoins, il se racla la gorge, faisant mine d'être impassible. Il demanda à Rose de patienter et partit se réunir avec ses acolytes dans une chambre.
« J'espère que tu ne comptes pas la laisser nous rejoindre ? s'inquiéta Jerry.
— Elle semble déterminée, mais elle n'est pas comme vous, renchérit Sophie et Luck hocha la tête.
— C'est vrai qu'ajouter Rose à notre équipe serait contreproductif. Toutefois, il existe une solution, répliqua Steve, fortement enthousiaste. N'est-ce pas, Jack ? »
L'usurier ne répondit pas. Il semblait ailleurs, concentré.
« Jack ? » répéta Steve.
C'était le silence complet. Tout à coup, le chef sortit de ses pensées. Il écarta grandement ses bras et annonça le résultat de son analyse de projet, euphorique :
« Si Rose nous rejoint, nos bénéfices augmenteront d'environ 11% ! »
Tous ses compagnons, sceptiques, le dévisagèrent, hormis Steve qui leva son pouce.
« Euh, gros... intervint Luck, il faudrait d'abord qu'elle soit capable de faire ce que tu lui demandes.
— Elle en sera capable, déclara Steve, sur la même longueur d'onde que son chef. Je parie que Jack a une magnifique idée.»
Ce dernier acquiesça et leur expliqua rapidement les tâches qu'il comptait confier à Rose. Puis, il conclut :
« Rose veut certainement s'infiltrer pour récolter des informations sur nous. Elle n'est pas notre alliée. Ne lui divulguez aucune information sensible nous concernant. Si vous désobéissez, je serai sans pitié, est-ce clair ? »
Chacun approuva.
« Mais... tu sais que c'est une espionne et tu l'accueilles quand-même à bras ouverts ? remarqua Sophie.
— En temps normal, je l'aurais rejetée, mais je ne peux pas laisser autant d'argent me filer entre les doigts. Et je compte bien l'exploiter autant que possible » expliqua le chef, un sourire diabolique aux lèvres.
Rose fut acceptée dans l'équipe. Grâce à elle, Jack créa une nouvelle affaire. Ils organisaient des opérations clandestines. Elles avaient l'avantage d'être extrêmement rapides et sans dangers. La jeune femme soignait tous les maux liés aux organes : problèmes de rein, de foie, de cœur, de vue, d'audition. L'usurier se remplissait les poches, tandis que sa complice se surprenait à aimer son travail.
Cependant, elle ne se faisait pas d'illusions. Le business des arènes existait toujours. Elle ne devait pas oublier sa mission.
Rose entretenait une bonne relation avec les jumeaux. Ils discutaient souvent, se taquinaient, riaient. Toutefois, un mur de glace les empêchait d'avoir la même complicité qu'auparavant. Ils ne s'échangeaient jamais de simples gestes d'affection comme des câlins, des caresses, des tapes sur l'épaule. L'ainée savait à quel point ses cadets étaient devenus malveillants. Ces derniers n'ignoraient pas que la jeune femme était une espionne. Derrière le masque de la fratrie unie se cachait une méfiance continue.
Jerry était celui avec lequel Rose s'entendait le mieux. En revanche, lui aussi se taisait lorsqu'elle posait des questions sur les secrets l'organisation.
Lors de leurs conversations, elle ne put obtenir que quelques maigres renseignements comme le genre d'adversaire que Jack aimait affronter en personne... les lieux où il se battait, quand et comment les batailles se déroulaient dans l'arène.
Un soir, sur le toit de leur immeuble, Rose et Jerry discutaient de tout et de rien. Ils fixaient les étoiles qui créaient une ambiance renforçant leur complicité.
La jeune femme se confia :
« Luck, Sophie et moi n'avons jamais connu nos parents. Si, un jour, j'ai un enfant, j'espère que son père et moi serons là pour l'élever ensemble.
— Et est-ce qu'il y a une chance... que je devienne ce papa ? »
Jerry approcha doucement sa main de celle de sa bien-aimée. Cependant, Rose retira la sienne, rouge comme une tomate et glapit :
« Qu'est-ce que tu insinues, gros dégueulasse ? »
Le concerné s'esclaffa. Mais il n'abandonna pas.
Quelques jours plus tard, au même endroit, au même moment, il profita de la magie des astres :
« Quelle est ta couleur préférée ?
— Le vert.
— Je comprends mieux, dit-il, un sourire en coin.
— Comment ça ?
— Tu es comme la végétation. Sans toi, je ne peux pas respirer. »
Rose roula des yeux et gloussa.
« Et si j'avais répondu le rouge, tu aurais dit quoi ? le défia-t-elle.
— Tu es comme le sang qui coule dans mes veines. Sans toi, je ne peux pas vivre, répondit Jerry, fier.
— Jaune ?
— Tu es mon soleil. Impossible d'exister sans toi.
— Marron ?
— Tu es le sol de mon monde. Sans toi, pas de végétation. Autrement dit, sans toi, je ne peux pas resp...
— Ok, ok, j'ai compris ! », l'interrompit la jeune femme qui avait mal au ventre à force de rire.
***
Un an s'écoula. Une année durant laquelle Rose n'obtint aucun renseignement pertinent. Elle perdit espoir et se résigna à abandonner sa mission.
Néanmoins, Jerry avait atteint son objectif. Il était officiellement en couple avec l'élue de son cœur.
Jerry n'appréciait pas son travail auprès de Jack. Il le faisait uniquement pour l'argent. Alors, lorsque Rose décida de quitter le groupe, il la suivit. Pour elle, il était prêt à mener une vie honnête.
Le jour de leur départ, toute l'équipe se réunit une dernière fois dans le salon le matin.
« J'espère que vous serez heureux ensemble, souhaita Steve, le sourire jusqu'aux oreilles. Pensez à nous rendre visite ! »
Si Jerry s'apprêtait à acquiescer, le regard hostile de Rose envers Steve l'en dissuada.
« Je savais que tu prendrais vite tes jambes à ton cou, taquina Sophie, son bébé dormant tranquillement dans ses bras. Bon vent !
— Ouais, on passera te voir quand on aura le temps.
— Ça marche », leur sourit l'ainée.
Jack se racla la gorge. L'idée de casser l'ambiance ne l'enchantait pas, mais il était obligé de clarifier certaines choses :
« C'était un plaisir de travailler avec vous. J'espère sincèrement que vous mènerez une vie heureuse. Mais ne parlez de ce que vous savez sur nous à personne. Sinon, votre bonheur ne durera pas longtemps. »
Le couple acquiesça, avant de quitter définitivement le groupe. Chacun tint sa parole. Rose et Jerry ne divulguèrent rien à propos des criminels. Jack, de son côté, ne leur fit aucun mal.
Rose était peinée de n'avoir rien pu faire pour détruire cette organisation et sauver les jumeaux. Toutefois, elle savait que l'usurier ne s'en prendrait jamais à ses cadets. De plus, la présence de Jerry suffisait à égayer ses journées. Ils se marièrent. La jeune femme tomba enceinte. Leur vie était paisible.
Et un jour, le futur père fut assassiné. Leur enfant serait privé de la chance de connaitre ses deux parents. Aveuglée par la rage, la veuve était persuadée que Jack était le coupable. Ce dernier n'avait aucune preuve de son innocence. Elle n'hésita donc pas à trahir sa promesse, dévoilant tous les crimes de l'organisation à Cammy et ses amis.
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