Chapitre 152 : Préparations

L'équipe de Jack remporta la bataille haut la main. Cammy (ou plutôt un de ses corps) fut éliminée et tous les autres, sauf Rose, furent capturés. Cette dernière est persuadée que son mari, Jerry, a été assassiné par l'usurier.

***

Jack, Steve, Randy et Luck sont attablés dans la salle à manger, leur faisant office de quartier général. Malgré le succès de la mission, ce soir, l'ambiance n'est pas festive. Le patron prend la parole en soufflant :

« Al, Cammy et tous leurs amis... ce souci est réglé. Néanmoins, il reste le plus gros problème : Skill et son équipe.

— Tant mieux, se réjouit Steve. Leur existence a toujours été une gêne pour nous. Autant se débarrasser d'eux une bonne fois pour toutes.

— Exactement, renchérit Randy, hochant la tête et croisant les bras. Un homme ne peut fuir éternellement ses problèmes. Il se doit de leur face.

— Pff, je comprends pas comment vous pouvez être aussi motivés, rétorque Luck en baillant aussi longuement que bruyamment. On parle pas d'une bande d'amateurs, là. Je suis déjà crevé rien qu'à l'idée d'affronter ces types... »

***

Quelques semaines plus tôt, Jack sut en espionnant Rose que la team Skill et celle d'Al étaient à l'origine de la destruction du quartier de Disease. L'usurier prit alors une décision :

« C'est vrai que ça serait tentant de voir Al et ses compagnons combattre dans l'arène, mais nous ferions mieux de ne pas nous frotter à eux. On parle d'un groupe qui a réussi à vaincre Skill et son équipe. Je déteste prendre des risques inutiles. Laissons-les tranquilles. »

Des jours passèrent. Jack apprit que Cammy fut mise au courant de ses activités criminelles. Il n'eut alors d'autre choix :

« Rose nous a dénoncés, soupira-t-il. Elle et son mari nous ont promis de ne jamais divulguer quoi que ce soit à propos de nous, à condition qu'on ne leur fasse rien de mal. Et elle vient de nous trahir, car elle pense que j'ai éliminé Jerry. J'ai cherché pendant je ne sais combien de temps son assassin, sans succès. C'est la première fois que je manque d'informations. »

L'usurier frappa la table de la salle à manger avec colère, faisant sursauter ses acolytes :

« Quelle idiote... elle pense vraiment que j'aurais tué mon ami, simplement parce qu'il a quitté notre organisation ?! Nous n'avons plus le choix, il faut agir. Même si nous décidons ne pas attaquer Cammy et les autres, c'est eux qui passeront à l'offensive. Nous allons par la même occasion donner une bonne leçon à Rose. Tous ses nouveaux amis disparaitront un à un dans l'arène. Cette imbécile réfléchira alors à deux fois avant de mêler d'autres personnes à nos affaires. »

Cependant, Jack savait bien qu'en s'en prenant à eux, il prenait un risque encore plus gros.

« Mais ça va être compliqué... Même si Skill se fiche pas mal du sort de ces bons samaritains, Daisy est amie avec eux. De plus, Sonya aussi s'entend bien avec Cammy et Berthold. À cause d'elles, ce monstre pourrait accepter d'intervenir. Si jamais ces deux équipes décidaient de s'allier, nous n'aurions aucune chance de gagner. »

Un blanc s'installa dans la conversation. Chacun réalisait la gravité de la situation. Luck, la tempe collée contre la table, les yeux mi-clos, prit la parole, toujours aussi atone :

« Donc si on attaque un groupe, l'autre débarquera sûrement en renfort. Et même si on ne fait rien, Cammy et compagnie viendront nous briser les noix. Comment on se sort de ce bourbier ? »

Steve afficha un sourire malicieux.

« Il nous faut des pions sacrifiables, commenta-t-il.

— Exactement, enchaina Jack. Je vais devoir créer une diversion. Peu importe si je dois utiliser tous mes prisonniers. »

Ainsi naquit un groupe de pilleurs. De redoutables combattants. Ils semaient le trouble dans le quartier de Flower avec pour unique but d'occuper Skill et son équipe. Ces derniers avaient beau les supprimer encore et encore, de nouveaux malfrats ne cessaient d'apparaitre.

***

Cependant, le problème n'est toujours pas réglé. Jack prend un ton inquiet et continue :

« Le plus gros problème était Daisy. Si nous l'avions gardée en liberté après la défaite de ses amis, elle aurait fini par convaincre Skill de se mêler de nos affaires. Et si on l'avait assassinée, il aurait cherché à la venger. J'ai donc opté pour la meilleure solution : la prendre en otage. Grâce à ça, nous pourrons gagner un peu de temps. Cependant, même en utilisant tous les combattants susceptibles de m'obéir, nos chances de victoire sont de 61%. C'est clairement insuffisant pour lancer un assaut. Nous devons être aussi prudents que possible face à de tels adversaires.

— Je vois, poursuit Randy en se caressant la barbe. Si tu les crains autant, ça signifie que la victoire de Cammy et les autres contre eux était un miracle quasiment impossible à reproduire. Tant mieux. Si on s'en sort, on en deviendra que plus forts.

— Faudrait pour ça qu'on arrive à les battre... soupire Luck, la voix alourdie par son bâillement.

— Réfléchis un peu, Luck. La solution est très simple... déclare Steve, guilleret et échangeant un regard communicatif avec son patron.

— Exactement, approuve le chef. Il nous faut des renforts, et je ne parle pas de chair à canon. Après une longue investigation, j'ai enfin trouvé deux nouveaux membres potentiels. S'ils acceptent de se joindre à nous, nos chances de victoire grimperont à 84%. »

***

Le lendemain soir, une femme avoisinant la trentaine, assez grande de taille, mince et portant des lunettes marche dans une rue faiblement éclairée et vide. Une brise glaciale secoue ses longs cheveux bleus, fouette ses joues fines et assèche ses lèvres pulpeuses.

Soudain, elle entend le son de voitures se dirigeant vers elle. Les pupilles marron de la dame tremblent et elle ferme ses paupières. Lorsque les gros véhicules s'arrêtent et qu'un quarantenaire à la courte chevelure noire, barbu, grand et ventru ouvre La portière, elle se crispe. C'est son patron.

L'homme est accompagné de deux gardes du corps. Des mastodontes possesseurs du Drive, en costard, avec des lunettes de soleil et à la mâchoire carrée.

Le patron se dirige vers la femme, un grand sourire aux lèvres.

« Rebecca, je suis très triste que vous ayez décliné mon invitation à diner ensemble ce soir.

— Je... je n'avais aucune raison d'accepter, balbutie la concernée. Ce n'était pas un rendez-vous professionnel. Je vous rappelle que je suis mariée, et vous également.

— Quelle importance ? On peut faire ce qu'on veut tant que nous ne sommes pas découverts, non ?

— Mais... je... »

Le ventru se rapproche de Rebecca et lui souffle dans l'oreille d'un air vicieux :

« Ce serait vraiment dommage que quelqu'un aille rapporter à la brigade que vous êtes une nigh... toute votre famille serait exterminée. »

Le cœur de l'employée manque un battement. Elle se pétrifie sur-le-champ.

« Alors, si vous tenez vraiment à protéger vos proches, vous feriez mieux de ne pas résister. »

L'haleine horrible du ventru, son souffle contre la peau de la femme, ses mains qui caressent les hanches de celle-ci... Rebecca en a la nausée. Néanmoins, elle se résigne.

Brusquement, le flash d'un téléphone illumine la pénombre. Le patron, la dame et les gardes du corps se retournent, surpris. Jack agite son appareil et s'exclame, sarcastique :

« Oups... que je suis maladroit. Je voulais prendre une photo discrètement, mais c'est raté. »

Les gardes du corps n'ont même pas besoin qu'on leur donne un ordre. Sourcils froncés et poings fermés, ils se dirigent vers Jack. En écartant ses bras comme s'il s'étirait, ce dernier envoie valser les mastodontes en baillant. Leur tête s'enfonce dans un mur et ils ne bougent plus.

Des renforts sortent immédiatement du véhicule qui accompagnait celui du patron. Des renforts inutiles. Jack agite ses épaules comme s'il s'échauffait avant une séance de sport. Ses coudes brisent la mâchoire de chaque opposant.

Le patron et Rebecca assistent, médusés, au carnage.

« C'est vraiment tout ce dont est capable votre meilleure équipe de sécurité ? Même pas capable de me divertir. Zéro sur dix ! »

Après avoir terminé sa phrase, l'usurier, sur les nerfs, se dirige vers le ventru. Ce dernier, bien qu'impressionné, n'a aucune crainte. Il croise ses bras et se vante :

« Si j'étais vous, je n'avancerais pas ! Savez-vous à qui vous avez affaire ? Je suis Nick Prime, PDG de la société...

— Je sais très bien qui vous êtes, l'interrompt froidement Jack.

— Alors vous n'êtes pas sans savoir que si jamais vous osez lever la main sur moi... !

— Vous avez beaucoup de contacts. Des actionnaires immensément riches, d'autres PDG, des députés, et même de grands mafieux. Si je vous frappe, vous utiliserez votre influence pour faire de ma vie un enfer. »

Nick sourit de toutes ses dents.

« Exactement. Alors, je vous conseille de... ! »

Le PDG n'a même pas le temps de terminer sa phrase. Jack, envahi par une fureur incontrôlable, écrase son poing contre sa face. Le ventru s'étale lourdement sur le sol, plusieurs dents arrachées et le nez tordu. Il roule sur lui-même en hurlant de douleur.

« Pauvre fou, s'écrie Nick en se redressant. Vous venez de ruiner votre vie, celle de votre famille et même de vos amis ! »

Jack prend une longue inspiration pour se calmer. D'une voix aussi monotone que celle d'une intelligence artificielle, il fournit les renseignements suivants :

— Je m'appelle Michael Eagle, mais on me surnomme Jack. Cette appellation fait référence au Jackpot, car j'adore l'argent. J'ai trente-deux ans. J'habite dans le quartier de Mainstay, en face de l'hôtel Breed. Je suis officiellement un agent immobilier, toutefois, je dirige de nombreuses activités illégales qui constituent trois quarts de mon revenu réel. Je n'ai plus de famille. Mes seuls amis sont Steve Shark, Randy Joey, Luck Clover et Sophie Clover. Voulez-vous en savoir plus pour détruire ma vie et celle de mes proches ? »

Nick et Rebecca dévisagent l'usurier, abasourdis. Il s'est échappé d'un asile psychiatrique, c'est la seule explication. Le patron voit rouge devant une telle insolence. Il sort son téléphone et lance un appel. Il le met sur le haut-parleur afin de montrer sa puissance à ce malade mental.

« Allô ? commence l'interlocuteur.

— Député Fright, comment allez-vous ? »

Après de très rapides formalités, le PDG entre dans le vif du sujet :

« Il m'est arrivé quelque chose d'invraisemblable aujourd'hui. Un imbécile a osé me frapper.

— Quoi ? Qui est énergumène ?

— Un certain Michael Eagle.

— Vous parlez de Jack ?! s'exclame le député.

— Tout à fait. »

Un silence s'installe. Nick fronce ses sourcils, confus, avant de poursuivre :

« Allô ?

— Je suis désolé, affirme le politicien, mais je ne peux rien faire pour vous. Je vous déconseille de contrarier cet homme.

— Comment ça ?! Expliquez-vous ! »

Le député lui raccroche au nez. Rebecca et le PDG en sont bouche bée. Blessé dans son orgueil, ce dernier contacte toutes les personnes influentes se trouvant dans son répertoire. Chaque appel se termine par un refus catégorique de l'aider.

Nick tombe sur ses genoux, son téléphone lui échappe des mains. Il tremble comme une feuille.

Jack se rapproche de lui, un sourire machiavélique aux lèvres. Il s'accroupit et prend enfin la parole :

« Il me semble que vous ayez du mal à comprendre pourquoi tous vos alliés vous ont abandonné. L'explication est très simple. L'arme la plus puissante au monde est l'information. »

Jack montre alors au patron la photo qu'il a prise tout à l'heure et murmure :

« Comment vont réagir votre femme, vos enfants et le reste de la population lorsqu'ils sauront que le respectable Nick Prime est en réalité une ordure qui harcèle son employée ? »

Le ventru reste muet, la gorge nouée. Jack se délecte un moment de son désespoir, avant de proposer :

« Ne vous en faites pas. Je ne vaux pas mieux que vous. C'est pourquoi je pense que nous pouvons nous arranger. Je ne divulguerai rien, à condition que vous me versiez la somme de... »

L'usurier susurre le montant dans l'oreille du PDG. Celui-ci écarquille ses yeux, éberlué :

« Vous êtes fou ?! Ça dépasse largement ma fortune personnelle ! Vous voulez que je détourne les fonds de ma société ?!

— Je vous avais prévenu que j'adorais l'argent. Je me fiche des moyens que vous emploierez. Sachez juste que vous avez vingt-quatre heures pour me verser le montant, sinon... la presse aura de quoi se régaler. »

Nick, dévasté, attrape sa tête, arrache ses cheveux. Sans la moindre considération pour lui, Jack s'en va, accompagné de Rebecca.

Une fois suffisamment éloignée de son employeur, la femme souffle de soulagement.

« Merci...

— Ne vous méprenez pas. J'ai fait tout ça dans mon propre intérêt, réplique l'usurier, impassible. C'est quand-même dommage que vous vous laissiez faire alors que vous auriez pu vous débarrasser de cet homme et de tous ses gardes du corps.

— Comment savez-vous... ?!

— N'avez-vous pas suivi ma conversation avec lui ? Je dispose de beaucoup d'informations. Vous êtes obligée de supporter ses avances pour ne pas perdre votre travail. Votre mari est gravement malade et vous devez vous occuper seule de votre fils. Cependant... et si je vous disais que vous n'aurez plus à subir tout ça ? »

Jack plonge ses yeux dans ceux, troublés, de la mère. Il sourit.

« Que diriez-vous de travailler pour moi ? Vous gagnerez vingt fois plus que votre salaire actuel.

— Autant ?! Mais... quel genre de travail est-ce ? »

Rebecca lui lance un regard méfiant. L'usurier lui explique de manière très transparente ses activités illicites.

La femme écarquille ses yeux, horrifiée.

« Et vous osez me révéler tout ça alors que je vous connais à peine ?!

— Je sais que vous ne me dénoncerez pas. Après tout... nous sommes faits du même bois, dit-il avec un rictus narquois.

— Je... je ne suis plus ce genre de personnes, rétorque-t-elle en baissant la tête, gênée. J'ai changé, pour le bien de ma famille. »

Jack hausse ses épaules.

« Je ne vous forcerai pas à me rejoindre, assure-t-il. Mais si vous changez d'avis, vous connaissez déjà mon adresse. »

Et il s'en va, sans la moindre inquiétude.

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