Chapitre 64
Ce matin encore, je me réveille joyeux et déjà prêt à observer mon cher voisin. Mes frères ne tardent pas non plus, attendant patiemment avec moi sa réaction... Nous faisons nos valises sans quitter des yeux le mobil-home ennemi. Mon sac est très vite prêt puisque je n'avais pas emporté grand-chose.
— Tu comptes te trimballer en maillot dans Paris, merdeux ? se moque de moi Paulo en observant la taille de mon baluchon minuscule.
— Occupe-toi de ta garde-robe, trou du'c !
— Il sort ! nous annonce Max.
Sa réplique nous met aussitôt d'accord et nous plongeons tous les trois à plat ventre sur le sol. Avoir partagé quinze jours avec mes frères a changé nos relations. Nous sommes plus complices et plus soudés. Paulo et Max m'incluent dans leurs plans sans que ça leur pèse comme avant. Et moi, même si j'aime toujours les chicaner, je suis plus à l'aise avec eux et j'ai moins envie de les torturer par jalousie.
Seules nos têtes dépassent de la tente pour regarder le gros con qui s'étire sur sa terrasse. Il est pieds nus et il ne met pas longtemps à se rendre compte qu'il piétine dans ma pisse. Évidemment, nous sommes tous les trois pris d'un fou-rire à le voir regarder au-dessus de sa tête pour vérifier qu'il n'a pas plu. Il cherche comme un imbécile ce qui a bien pu se passer sur sa terrasse humide. Il se gratte les couilles négligemment avant de tirer la porte pour comprendre qu'il s'agit de mes urines.
— Espèce de petit con ! se met-il à gueuler dans ma direction.
Je plonge aussitôt dans la tente me cacher, fier de ma connerie.
— Dites-lui de se laver les pieds ! je murmure à mes frères qui continuent de se marrer.
— Tu vas pouvoir lui dire toi-même, car il arrive !
— Arrête tes conneries, trou du'c !
Je m'appuie sur Paulo pour vérifier et je constate par moi-même que mon frère ne me ment pas.
— Regarde, me dit Max en s'écartant de l'entrée.
Mon connard de voisin, furieux, est en train de descendre de sa terrasse d'un pas décidé. Je n'ai pas trente-six solutions qui s'offrent à moi, si je ne veux pas me prendre un coup de poing dans la gueule...
— Bordel, il va me tuer !
J'attrape rapidement mon skate pour tenter de m'échapper rapidement. Ce gros con est tellement mou du genou que je n'ai pas besoin de trop forcer pour l'esquiver.
— Oh, morveux, tu vas où ? m'interpelle-t-il en me voyant lui filer entre les pattes.
— T'as un problème, sent-la-pisse ?
Sous les regards amusés de mes frères, je m'éloigne suffisamment du bonhomme pour éviter qu'il ne passe ses nerfs sur moi.
Après avoir un fait un tour dans le camping pendant quelques longues minutes, je suis revenu me cacher derrière ma tante qui est en train de charger la voiture.
— Toi, je ne te félicite pas pour ta connerie ! Il fallait que tu aies le dernier mot, pour changer !
Àma grande surprise, elle ne me punit pas. Tant mieux, je n'ai pas envie de rester cloîtré dans son appartement de Paris.
Dans la voiture, une fois sur l'autoroute, elle partage même avec notre tribu une anecdote qui nous fait bien rire.
— Ta bêtise me rappelle une ânerie que j'ai faite quand j'étais jeune, commence-t-elle en restant concentrée sur la route.
— Raconte ! je lui demande.
Ça m'occupera cinq minutes. Il n'y a pas pire torture pour moi qu'un long trajet ligoté par la ceinture de sécurité. Toujours assis à l'arrière du véhicule, j'ai besoin de distraction.
— Certainement pas ! refuse-t-elle dans un premier temps. Je ne voudrais pas vous souffler de bonnes idées !
— On n'a pas besoin de toi pour nous donner de l'inspiration ! je la rassure en rigolant.
Non, mais c'est vrai, je n'attends pas que ma tante, vieille de quarante balais, m'apprenne à faire des conneries qui sont probablement ridicules.
— C'est vrai ! approuve-t-elle après réflexion. Bon, je vous raconte, mais vous n'avez pas intérêt de faire la même, sinon, je vous le fais payer jusqu'à la fin de votre vie !
— Mais oui, t'inquiète pas !
— Je devais avoir une dizaine d'années. Votre mère avait deux ans de plus. Nous avions des amis de notre âge qui dînaient avec nos parents. Tous les adultes étaient à table, alors que nous, les plus jeunes, traînions dans le jardin. Avec ma sœur, nous avions regardé la veille le film Scouts toujours dans lequel les personnages font une blague en mettant une crotte de chien dans un journal. Puis ils posent le paquet sur un paillasson et allument le papier avant de sonner à la porte. Évidemment, dès qu'ils ouvrent la porte, les habitants sautent sur le feu pour l'éteindre...
Bref, ma sœur, nos amis et moi avons décidé de faire la même chose à notre seul et unique voisin. Sauf que nous étions vraiment mauvais et mal organisés ! Donc, nous avons réussi à déposer le paquet sur le paillasson, mais le voisin n'avait pas de sonnette et nous, pas d'allumettes. Nous avons donc demandé au petit-fils de notre voisin d'ouvrir sa porte d'entrée et de marcher sur le journal. Ce que le pauvre gosse a fait... Imaginez le plaisir de notre voisine quand elle a vu entrer dans le salon son petit-fils, les pieds pleins de merde...
Elle s'est aussitôt présentée chez nous. Nous l'avons accueillie. Elle était furieuse et a demandé à voir nos parents. On a dit qu'ils n'étaient pas là, alors qu'ils étaient tous à table en train de rire et que leurs voix résonnaient dans toute la maison. La voisine s'est donc mise en colère et a insisté. Finalement, ma mère a fini par entendre la voisine mécontente...
— Et vous avez été punis ? je demande, intrigué.
— Bien sûr, mais je ne me souviens pas quelle était la punition. En revanche, je me rappelle avoir eu terriblement honte ! Je n'osais plus regarder ma voisine !
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