Chapitre 62
En rentrant cette nuit-là, je suis excité comme une puce et tellement fier d'avoir assuré avec la petite Eva. La seule question qui demeure est : "qu'est-ce que je vais bien pouvoir foutre d'elle demain matin ?"... Je ne peux pas la larguer comme ça, et je ne veux surtout pas m'emmerder avec une copine. La nuit porte conseil ! En arrivant devant le mobil-home de mon cher voisin, je découvre que monsieur a sorti sa poubelle. Parfait, j'ai besoin de laisser exploser ma joie.
C'est comme ça que je me retrouve à deux heures du matin en train de disperser ses déchets partout sur son emplacement. Un coup de sifflet me rappelle vite à l'ordre : Paulo et Max, morts de rire, me font signe que ça suffit et que j'en ai mis suffisamment partout pour me faire engueuler.
— Tsssttt, insiste Paulo qui m'éclaire désormais avec la torche de son portable.
Je me lave vite fait les mains au robinet extérieur et je plonge dans ma chambre.
— Tu ne peux pas t'en empêcher ! me reproche Max sans quitter son portable des yeux.
— Quoi ?
Je fais l'innocent en retirant mes chaussures et en cherchant ma batterie externe pour mettre mon IPad à charger.
— De foutre la merde !
Il ne va pas me saouler en pleine nuit pour ce connard de voisin qui n'a que ce qu'il mérite. De toute façon, ce n'est qu'une bataille. La guerre est loin d'être terminée avec lui...
— Je ne peux pas le voir, il est con comme une bite !
— Mais fais comme nous, laisse pisser le mérinos ! dit Paulo en se tournant vers moi.
— Ta gueule, je dors !
Je me jette sur mon coussin. Cette nuit-là, je ne ferme pas ma toile pour mieux profiter du spectacle qui se déroulera demain matin.
— C'était qui, ces meufs, revient à l'attaque Paulo, qui est au moins aussi curieux que moi.
— Chuuutttt, je dors !
Il est à peine huit heures quand j'allume mon portable pour consulter mes notifications. Évidemment, je ne bouge pas pour ne pas risquer de réveiller mes frères, mais je piste régulièrement ce qui se passe dans le mobil-home voisin. À ma grande déception, l'heure tourne et rien ne vient. Lorsque dix heures arrivent, je décide de rejoindre Eva et Claire à la piscine.
Malgré l'heure tardive à laquelle nous nous sommes couchés, elles sont déjà là. J'en déduis qu'Éva devait être pressée de me revoir. Notre salade de langues a dû lui plaire. Je m'avance vers Claire pour lui décocher deux bises et je fais un bisou instinctif sur la bouche d'Eva. Il est évident que si je n'avais pas voulu sortir avec elle, je n'avais qu'à tout simplement me planquer dans ma tente. Mais ce matin, j'avais envie de la revoir, alors pour une fois, je choisis d'assumer. Je m'assois même sur la chaise longue à côté d'elle. Elle est toujours aussi jolie avec ses cheveux blonds remontés dans un chignon. Ça me fait bizarre d'imaginer que c'est ma copine officielle.
— Tu vas faire quoi aujourd'hui, m'interrompt Claire dans mes pensées.
— Journée piscine, et vous ?
Je n'ai pas entendu ma tante parler de quelconques sorties. Mais le camping offre un grand nombre d'activités, et nous ne devrions pas nous ennuyer.
— Pareil, et nos valises... me répond Eva avec un air triste.
Valises, elle a bien dit valises ou j'ai rêvé ?
— Vos valises ? je la fais répéter.
— Ouais, on repart demain, m'avoue-t-elle d'un ton complètement désespéré.
Finalement, c'est quand même une bonne nouvelle pour moi. Je suis totalement soulagé par son annonce. Moi qui me voyais attaché à elle, à devoir lui obéir et faire mille concessions pour lui faire plaisir, voilà qu'elle m'informe de son départ pour demain... Oh, putain, dans cette histoire, j'aurai eu de la chance jusqu'au bout !
— Mais, on est quel jour ?
— Vendredi.
— Ah, c'est possible que moi aussi je parte...
Je réfléchis à la date à laquelle nous devons nous rendre sur Paris. Quand arrive midi, je ne traîne pas avec les filles. J'ai trop hâte de connaître la réaction de mon cher voisin. Je mime parfaitement l'indifférence en m'approchant du mobil-home, même si je constate que tous les déchets ont été ramassés. Toute ma famille est réunie autour de la table et mes deux frères sourient largement en me voyant. Ces deux cons sont repérables à un kilomètre à la ronde, avec leurs gueules qui m'accusent de tous les vices. J'évite au maximum leurs quatre yeux dénonciateurs en m'asseyant à côté de Clothilde.
— Tu t'es baigné ? m'interroge-t-elle.
— Faut bien qu'il se lave de temps en temps... me tacle direct Max en éclatant de rire.
L'enfoiré, il me cherche, il va me trouver...
— Fais pas chier ! Je vis presque dans la piscine ! Pas besoin de passer en plus dans la douche !
— Beuuurrrkkk ! font ensemble mes cousines avec des airs horrifiés.
Non mais c'est bon, c'est les vacances. Je vis dans l'eau du matin jusqu'au soir. C'est quoi le problème ?
— Tu t'es douché quand pour la dernière fois ? s'enquiert à présent ma tante.
— Mmm ? Avant-hier !
— Mais il faut tout te dire, c'est pas possible ça, Tonio ! s'énerve-t-elle.
Elle me sert une assiette de spaghettis bolognaise que je m'empresse de dévorer. Je me moque de les voir tous s'indigner de mon hygiène corporelle du moment.
— Quoi ? je continue la bouche pleine. Le chlore, ça désinfecte, non ?
— Ce soir, tu passes à la douche ! m'ordonne ma tante en faisant un signe de la main au voisin qui s'étire sur sa terrasse.
Ce trou du'c lui répond alors que je le nargue en faisant moi aussi un geste pour le saluer hypocritement.
— Tonio, te fous pas de sa gueule ! me reproche ma tante qui m'oblige à baisser la main. Et j'espère bien que tu n'y es pour rien dans le bordel qu'il y avait ce matin chez lui.
— Quel bordel ?
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