Chapitre 16
Le coeur de Liz se brise en voyant son ami disparaître. Encore une fois, la voilà seule dans un monde cruel qui lui est inconnu. Durant un bref instant, elle se demande si elle a eu raison de l'abandonner pour rejoindre la Résistance. Et s'il avait raison ? Peut-être qu'ils veulent uniquement se servir d'elle.
— Je suis désolée.
L'adolescente fait volte-face et voit la femme qui la regarde, les yeux brillants de compassion. Elle lui adresse un léger sourire - du moins c'est ce qu'elle croit, étant donné que son visage est caché.
— Je sais à quel point il est dur de quitter un ami qui nous est cher. Mais tu l'as fait pour la bonne cause. Grâce à ce sacrifice, tu as peut-être sauvé tout un peuple.
Ses paroles sont justes, mais ne réconfortent pas pour autant la jeune fille. Désireuse de faire bonne allure, elle essuie les quelques larmes qui coulent sur ses joues et déclare :
— Je suis prête. Allons rejoindre la Résistance.
La rebelle hoche la tête, s'approche et lui tend la main. Comprenant qu'il est trop tard pour faire demi-tour, Liz l'attrape et ferme les yeux. Après quelques instants, le sol disparaît sous ses pieds, en même temps que ses repères. Il n'y a plus de haut, de bas, de gauche, de droite, rien, juste le néant le plus total. Son corps est balloté sans ménagement, comme si elle était dans une attraction de fête foraine, s'étirant et se compressant en même temps. Heureusement, elle sent bientôt ses jambes se poser sur une surface dure, et elle soulève ses paupières, curieuse de savoir où elle a atterri.
Avant de d'ouvrir grand la bouche en voyant où elle se trouve.
— Bienvenue à l'Aqua Civitatem, Liz, dit la Résistante d'une voix douce.
Devant elle s'étend du sable à perte de vue. Rien d'anormal, sauf quand elle lève les yeux et comprend qu'elle n'est pas sur une plage. Non, elle est sous l'eau. Dans une immense bulle, haute d'une dizaine de mètres, entourée d'autres sphères identiques, toutes plus grandes que les autres. À l'intérieur, elle voit des meubles, comme si chacune était un appartement dans lequel résidaient des gens. Des poissons, des dauphins et des requins nagent dans l'eau, ne semblant pas remarquer la ville aquatique qui est installée au fond de l'océan.
— Wouah... C'est magnifique, souffle la jolie brune, ne trouvant pas d'autre mot pour qualifier ce qu'elle a en face d'elle.
— C'est vrai que c'est très beau, concède la Résistante, regardant, elle aussi, les alentours. Cela a beau faire des années que je vis ici, je ne me lasse pas de ce paysage.
Ses yeux brillent, et Liz se surprend à se demander quel âge elle a. D'après sa voix, elle paraît jeune, mais peut-être n'est-ce qu'une illusion. Des mèches brunes sont visibles sous le col de sa capuche, sans aucun cheveu blanc. Les quatre Spectres qui escortaient la Résistante ont disparu, et elle en déduit qu'ils ne se sont pas téléportés.
— On devrait y aller, le Princeps doit nous attendre, et il n'aime pas quand les gens sont en retard.
La femme lui fait signe de la suivre et s'éloigne vers la paroi opposée de la bulle. Arrivée face à l'étrange mur d'air, elle pose sa main dessus. L'adolescente craint un instant qu'elle ne la fasse éclater, mais à sa grande surprise, ses doigts s'enfoncent dans l'eau.
— Qu'est-ce que...
— Touche, tu vas voir, il ne se passera rien.
En s'approchant, elle manque de déraper sur le sable humide, et se rattrape de justesse. Lorsque sa paume entre en contact avec l'étrange surface, elle frissonne : la sensation est très bizarre, c'est comme toucher un bassin horizontal.
— Comment est-ce que ça tient ? demande-t-elle, fascinée.
— Grâce à une petite manipulation d'influence faite par un de nos grands scientifiques. Avec un peu d'entrainement, tu devrais être capable de faire de même, à une moindre échelle. Mais là n'est pas le sujet, nous devons aller au Headquarter.
— Headquarter ? Qu'est-ce que c'est ?
— C'est notre quartier général, là où réside le Princeps. Pour le rejoindre, nous allons devoir emprunter un Torrens Aquae. Ne t'inquiète pas, c'est absolument sans danger, même si cela n'en a pas l'air.
— Euh... D'accord, mais c'est quoi au juste ? interroge Liz le ventre noué par la peur.
Les yeux de la Résistante pétillent lorsqu'elle enfonce sa main encore plus dans l'eau, puis son bras, jusqu'à ce que son épaule soit au bord de la paroi, causant un hoquet de stupeur chez son élève.
— C'est de l'eau oxygénée. On peut respirer à l'intérieur comme dans de l'air normal. Nos scientifiques l'ont créé afin de permettre de se déplacer librement dans la ville de façon facile, rapide et surtout indétectable. Pour l'utiliser, il suffit de s'immerger dedans et de se concentrer sur l'endroit où l'on veut aller : l'eau nous déplacera dans un courant jusqu'à notre destination.
— Mais je ne sais pas où je dois aller ! panique-t-elle.
— Regarde là-bas, tu vois l'immense bulle très haute ?
L'adolescente plisse les yeux et finit par distinguer une sphère plus grande que les hautes, à quelques centaines de mètres de là où elle se trouve. À l'intérieur, elle voit vaguement des halos rouges bouger, et comprend qu'il s'agit de sa destination.
— Heu... oui, je crois.
— C'est le Headquarter, là où on va. Concentre-toi sur cette image et le courant t'y emmènera.
— Et... il y a déjà eu des morts ? demande la jolie brune sans pouvoir se retenir, le cœur battant à tout rompre.
À sa grande surprise, la femme s'esclaffe en l'entendant, dans un son assez mélodieux, avant de lui répondre d'une voix amusée.
— Non, et encore heureux. Je ne te le proposerais pas si cela comportait des risques, je ne suis pas si méchante que ça.
Liz est sur le point de lui rappeler le sort subi par Mats, avant de fermer la bouche, ne souhaitant pas entraver sa possible collaboration avec la Résistance. Après tout, elle ignore encore si y entrer sera si facile.
— Bon, allez, trêve de bavardages ! Passe en premier.
Tout en priant pour ne pas rester coincée au milieu de l'océan, l'adolescente s'avance à petits pas, à deux doigts de faire demi-tour et de partir en hurlant. En même temps, l'idée de respirer dans l'eau lui est totalement étrangère et contre-nature. C'est comme demander à un poisson d'aller courir un marathon dans le désert.
— Liz, vas-y, insiste la Résistante.
La jolie brune déglutit avec peine en contemplant l'océan face à elle. L'air salé lui pique les narines et une brise légère frappe son visage.
— Si tu n'y vas pas, je vais devoir te pousser.
— Très bien, je vais le faire.
Tout en s'efforçant de ne pas céder à la panique, elle s'approche encore plus, jusqu'à frôler la surface horizontale. Elle sent la Résistante prête à la pousser, alors, pour garder un semblant de dignité, elle inspire un grand coup et entre dans l'eau, les yeux fermés.
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