Chapitre 94 - Led
— Petit enfoiré...
Je ris alors que sa langue se fraie un chemin dans ma bouche et m'empêche de répondre. Je ne savais pas trop ce que donnerait cette petite surprise et, apparemment, Matty aime autant qu'il déteste ce que j'ai fait. J'avoue qu'inviter sa mère au défilé était un pari osé : elle accepte l'homosexualité de son fils, mais c'était une autre histoire que de la faire assister à ce spectacle. En vrai, c'était aussi une petite vengeance pour le coup qu'il m'a fait en me mettant face à elle la première fois sans me mettre en condition.
Spoiler alert : elle a adoré le défilé et la réception, et veut être aux prochains évènements où Matt défilera. Si prochains il y a, me dis-je, surtout avec la dose de stress qu'il a bouffé toute la soirée. Il a l'air épuisé, mais tout aussi excité par l'adrénaline. Impossible de définir son état d'esprit réel. C'est assez rare pour que ça me marque. J'aime ça. C'est nouveau. Comme le passage de quelque chose.
Mes doigts s'enfoncent dans sa mâchoire pour le retenir, cependant il m'échappe encore. Sa bouche suit ma gorge, s'arrête sur ma pomme d'Adam, continue sur mes clavicules apparentes. Son pied cogne contre la porte de la cabine de toilettes alors qu'il se met à genoux et je suis reconnaissant à Sullivan de l'avoir laissé remettre ses propres vêtements après le défilé. Il reste classe, parce que Matty est du genre à porter des vêtements qui le mettent en valeur malgré lui, mais au moins il ne risque pas de dégueulasser des pièces d'une valeur absolument indécente. Dans la salle principale, la fête bat son plein. Nous en sommes, en partie, mais les murs qui nous en séparent et atténuent l'effervescence nous fait du bien. Il y a un petit quelque chose qui nous a donné le besoin de nous isoler, outre que mon compagnon avait à redire sur mes petites manigances avec ma belle-mère. Elle est rigolote et avenante, ça change de ce que j'ai connu sur le plan maternel, alors j'avoue : j'ai voulu pousser un peu. Pour voir. Pour tester. Elle a gagné.
— Led... grogne-t-il.
Ses doigts sont sur ma ceinture qu'il défait à une vitesse que je ne lui ai jamais vu. J'ai hâte qu'ils soient sur ma queue et je bénis qu'il ait accepté si vite de se faire tester pour se débarrasser des capotes. Mes poches ne sont pas assez grandes pour en trimballer des paquets entiers toute la journée quand on est ensemble, peu importe où l'on va. Etonnamment, Matty n'est pas si prude en matière de sexe. Juste... complètement néophyte. J'ai parfois l'impression d'avoir un adolescent curieux et submergé par ses hormones en face de moi, ce qui est plutôt étrange quand je regarde l'homme qu'il est. Surtout là, alors qu'il sort ma queue de mon string en s'attardant sur la dentelle fine.
— Tu aimerais en porter ? demandé-je distraitement.
— Mmh, non, murmure-t-il avant de glisser sa bouche le long de mon érection.
Bordel. J'inspire profondément et parviens à ne pas fermer les yeux. C'est une créature d'un autre monde, j'en suis certain. C'est la première fois qu'il additionne ma queue et – Seigneur, sa langue, sa langue qui remonte jusqu'à mon gland. Je pensais qu'il allait juste me branler, pour mon plus grand plaisir. On dirait que le défilé l'a excité. Qu'il est passé à quelque chose de plus grand, de plus féroce, et je gémis sourdement en voyant mon sexe disparaître entre ses lèvres, en prenant un temps infini.
Pourquoi cette première fois doit se passer ici, dans des toilettes semi-publiques et...
Oh.
Je laisse tomber, c'est sexy, et de toute façon je n'ai absolument plus la tête à réfléchir et chercher le pourquoi du comment. Je me laisse embarquer par la caresse non experte de sa bouche et c'est délicieux de n'avoir absolument aucune idée de ce qu'il va en faire à chaque seconde qui s'écoule. Un peu maladroit, mais vigoureux et enthousiaste. Ses doigts sont de la partie pour compenser sa technique et le fait qu'il ne peut pas me prendre entier, pas pour une première fois même si je n'ai pas la plus grande du monde – loin de là, merci, restons proportionnés. Je retiens le mouvement de mes hanches, de justesse. Il s'en rend compte et je perçois son rire dans une petite vibration autour de ma queue. J'essaie de l'avertir quand je vais venir, mais la seconde et demi qu'il met pour se dégager sont en trop. En attendant, je vise parfaitement sa bouche, son menton et sa joue. Le souffle court, je le dévisage dans cette position nouvelle, me demandant s'il réussira à ne pas être sexy un jour dans sa vie. Je pense que c'est foutu. Déjà sur scène, même s'il exhalait une tension effroyable, il était parfait. Et de plus en plus à l'aise et dans son élément alors que les passages se succédaient.
— Merde, y'en a sur mes fringues ? s'alarme-t-il en attrapant du papier toilette.
Que ce soit la première chose qui lui traverse l'esprit après sa première pipe me fait rire.
— Juste sur ta jolie frimousse, gloussé-je d'une voix rauque. Bon sang, où tas appris à faire ça ?
— Disons que j'ai eu trop de temps pour réfléchir à tout ce que je voulais te faire.
Je plane. Les hormones post-orgasmes tourbillonnent à qui mieux-mieux et me font sourire bêtement en le regardant essayer de se débarbouiller, quand je sens une vibration contre ma fesse. Matty hausse les sourcils.
— T'as mis un vibro ? demande-t-il avec une telle innocence que je mets quelques secondes à comprendre de quoi lui, il parle vraiment.
— Sûrement pas à un défilé, non, maugréé-je en tâtant mes poches arrières. C'est mon téléphone, attends...
En le regardant, je me dis que l'idée du vibro ne serait pas si mauvaise si ça veut dire qu'il peut me baiser toute la nuit après un évènement comme celui-ci. Ou lui. Oh bon sang, Matty avec un truc comme ça dans le cul, à se tortiller en rougissant dès que j'actionne l'engin à distance ? J'en bande d'avance tout en décrochant, le regard sur le principal concerné.
Et je débande en une seconde chrono :
— Monsieur David ?
Je ne connais pas cette voix. En revanche, mon nom est prononcé suffisamment rarement et en des circonstances si spécifiques que mon sang se rue partout dans mon corps sauf dans mon cerveau et ma queue, en panique.
Le son est suffisamment fort pour que Matt entende. Il fronce les sourcils et grogne un « Putain, le David ? » en sortant son téléphone. Ah oui, j'ai oublié de lui dire que je l'avais stalké pendant des semaines avec ce compte-là. Pas grave, ce n'est rien de méchant, pour le coup et je me marre en le voyant rouler des yeux.
— Monsieur David, je suis du cabinet notarial Hernández.
— Qu'est-ce que vous voulez ? réussis-je à prononcer.
Je connais le nom de ce cabinet, c'est celui avec lequel ma famille a toujours traité. Autant dire que toute idée sexuelle et amusante m'a définitivement quitté à cet instant précis, mais... je ne raccroche pas. Ce n'est pas ma mère. Ce type est un professionnel et quelque chose me dit que je dois l'écouter. Peut-être dans son ton.
— C'est plutôt délicat, étant donné que vous rejetez nos appels depuis plusieurs mois.
— Ma mère m'a harcelé, vous comprendrez qu'après ce qu'ils ont fait, il était hors de question que je garde des liens avec eux.
— Et nous le comprenons. J'ai... plusieurs informations pour vous, à vrai dire, êtes-vous disponible pour discuter un peu ?
Je pose les yeux sur Matty qui, assis sur la lunette des WC, a la main dans son pantalon et se nettoie consciencieusement. J'arque un sourcil, surpris et il fait une moue qui m'intime de ne pas faire de remarque. Oh, j'en ferai quelques-unes, plus tard.
— Eh bien, nous sommes en pleine réception, avoué-je malgré ma curiosité soudain grandissante.
— Pouvons-nous convenir d'un rendez-vous ? Un vrai, monsieur David. Vous n'aurez pas votre mère au bout du fil, ajoute-t-il en riant.
— Si tel état le cas, j'irais porter plainte contre votre cabinet.
— Evidemment.
Il est tellement sûr de lui que... pourquoi pas ? Pour qu'ils me courent après depuis autant de temps et que ça ne concerne pas seulement ma mère et des raisons à la con pour me faire revenir à la maison, je me dis que pour une fois, je peux faire preuve de maturité et écouter les âneries qu'un mec en costard va me déblatérer.
Je raccroche quand le rendez-vous est pris, le note rapidement dans mon agenda en ligne et mets l'écran de mon téléphone en veille. J'ai besoin que quelques secondes passent en silence, ce que respecte Matt avant de poser la question :
— Alors ?
— Alors, c'est le notaire.
Son expression paniquée me fait marrer.
— Non, non. Tout va bien. Ma famille fait appel à eux pour le moindre truc, c'est pareil avec l'avocat. Même cabinet, d'ailleurs. Il me rappellera demain, on a mis un rendez-vous.
Avec un soupir à moitié rassuré, il remonte son caleçon, ne me laissant qu'à peine un aperçu sur son sexe vidé, ferme sa braguette et se lève.
— OK, alors, marmonne-t-il. Ça va aller pour ce soir ?
— Ouais, pas de souci.
Ou pas. Ça me trotte dans la tête durant toute la réception, comme des relents de quelque chose qui est là sans être vraiment là, et je ne sais plus si je dois être inquiet ou non.
Je décide que non quand la queue de Matty prend possession de mon corps après que nous ayons retrouvé mon appartement. Ses râles tout bas à mon oreille m'emplissent de félicité, le plaisir me submerge. Et je sombre dans cette douceur que lui seul a su m'apporter.
*
Je vais vomir.
— Vous pouvez... vous pouvez répéter ?
— Je disais que le testament de feu madame Valencia vous désigne comme unique héritier dans les circonstances actuelles.
Circonstances actuelles qui consistent en ma mère incapable de me ramener au foyer pour former une jolie petite famille aimante. En sachant que la seule raison pour laquelle elle m'a harcelé en insistant sur mon retour, c'est l'héritage, j'ai encore moins de remords à l'avoir envoyée chier.
Avec les dernières lois qui sont entrées en vigueur, le centre de thérapie dans lequel ils m'ont envoyé de force a été fermé avec pertes et fracas. Ou peut-être que c'est parce qu'un groupuscule a tout défoncé, mais quand les médias s'en sont mêlés et ont fait ressortir beaucoup trop d'histoires et de témoignages sordides, ils n'ont plus eu le choix. En local, ça a fait jazzer. J'imagine que les familles influentes qui y mettaient leur progéniture font profil bas pour que ça ne s'ébruite pas et ne leur retombe pas dessus. Ou juste de loin. Quelques rumeurs ne ternissent pas tant une réputation, quand on est à leur niveau.
Plus personne n'ira dans cet endroit.
Je vais vomir.
— Monsieur David ? appelle Juan Hernández.
— Euh, oui, oui...
— Est-ce qu'il y a des problèmes sur votre ligne ?
— Non, non, je... j'essaie de... enfin, de bien saisir... tout ça...
— Bien sûr, je comprends. Quand pouvez-vous vous déplacer pour la procédure ? Il y a l'aspect financier, évidemment, mais aussi toutes les possessions immobilières et des clauses spécifiques, qui ne devraient cependant pas être un frein à vos activités.
J'aime la façon dont il ne bafouille pas une seconde en abordant mon travail. Il s'en fout. Il sait ce que je fais et ça lui passe au-dessus, je l'entends. Ma mère serait verte.
— Je peux... je peux me dégager assez facilement. Donnez-moi vos disponibilités et...
Assis à mes côtés, Matt laisse sa main glisser sur ma cuisse dans un geste réconfortant. Je soupire.
— Mon compagnon m'accompagnera peut-être, tenté-je en jetant un coup d'œil à ce dernier.
Matt hoche vigoureusement la tête. Un poids s'envole. Il faut encore quelques échanges pour poser ce rendez-vous, puis le notaire me laisse avec mon téléphone entre les doigts. Le haut-parleur se désactive aussitôt. L'écran redevient noir. Le silence de mon salon n'est rompu que par le bruit de mon pied qui tape sur le sol. Le bras que Matt a passé autour de mes épaules se resserre quand il murmure.
— Je suis désolé.
Mémé est morte. En reniant sa fille et son gendre, en concentrant toute sa volonté sur son petit-fils et l'avenir qu'elle pouvait lui offrir, faute que ma mère ait réussi à le faire.
Ça fait des mois.
Je soupire, incapable de sa voir comment je dois réagir. Pleurer ne sert à rien, mais ça viendra peut-être plus tard quand l'idée me frappera de plein fouet, à n'importe quel moment, quand je réaliserai ce que ça signifie vraiment. J'ai été très peu confronté à cette situation. Petits, on nous tenait à l'écart, mes cousins et moi. Les « affaires d'adultes » n'étaient pas partagées ou peu. Je ne sais pas si c'était pour nous préserver aussi longtemps que possible ou parce que ça les agaçait de prendre ce temps pour nous, mais la finalité est là : je ne sais pas comment réagir.
Mat m'attire contre lui, m'entoure de ses bras et nous allonge sur les coussins du canapé.
— Tu peux me parler d'elle ? Je sais juste qu'elle était cool, murmure-t-il.
Il n'en faut pas plus. Ses doigts s'enfoncent dans mes cheveux, son autre main se pose tranquillement sur mon cul.
Je bénis sa présence.
Et je lui raconte à quel point elle était bien plus que cool.
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