DYNASTIE IKER *** III ***

VAISSEAU DE FIORA - EN APPROCHE D'EBREDES

Golt était contrariée. Elle ne comprenait pas vraiment les manœuvres de Zorth et de son groupe.

Pourquoi effectuaient-ils un détour si près de leur objectif ?

L'incertitude grandissait en elle, s'insinuant dans chaque pensée. L'absence de Drike à ses côtés pesait lourd, tandis que la présence de Lozy Lane et Tiger Stern ne lui inspirait guère confiance. Ces deux-là, complètement imprévisibles et violents, ne faisaient qu'ajouter à son malaise et amplifier son stress.

Elle avait tenté, à plusieurs reprises, d'entrer en contact avec Drike, mais celui-ci restait sourd à ses appels. Son silence obstiné la rendait folle de rage.

Ses deux acolytes par défaut étaient revenus dans le cockpit et observaient Ebredès depuis la troposphère, le vaisseau maintenu en vol stationnaire.

— On peut savoir ce qu'ils foutent là ? interrogea Lozy, la bouche pleine de brioche.

— Comment le saurais-je ? bougonna Fiora.

Lozy lui adressa un sourire malicieux avant de se tourner vers Tiger.

— On reste là ou on y va ?

— Ils n'ont toujours pas capté qu'on les suit. Ce serait une belle occasion de les prendre par surprise, répondit Tiger avec un sourire fier.

Fiora ne prêta pas attention à l'échange. Au même moment, son visiocommunicateur vibra : un appel de sa brute infidèle. Son cœur rata un battement, mais elle masqua son émotion en se levant précipitamment. Elle quitta la pièce d'un pas rapide.

Une fois à l'abri des oreilles indiscrètes, elle décrocha, non sans impatience. Elle n'aurait jamais cru que voir ce nom s'afficher à l'écran puisse lui apporter un tel réconfort.

— Drike ! Qu'est-ce que tu fous ? Pourquoi tu ne réponds jamais à mes appels ? reprocha-t-elle d'un ton mesuré, mais chargé de tension.

— Je suis toujours sur Zoldello. Au palais, répondit-il froidement.

— Et quand comptes-tu me rejoindre ? Je suis seule avec ces deux abrutis !

Le ton agacé de Fiora semblait glisser sur Drike, comme si son autorité n'avait plus aucune emprise sur lui. Cette prise de conscience lui serra la poitrine : elle n'impressionnait plus.

— Le saviez-vous ? finit-il par lancer.

Fiora déglutit, prise au dépourvu. Elle savait que Drike n'apprécierait pas la vérité. Et elle avait bien trop besoin de lui pour risquer d'être franche. Après tout, que pourrait bien changer cette révélation ? Bogz était mort, et cela devrait suffire.

— De quoi parles-tu, Drike ? Tu crois vraiment que j'ai le temps de jouer aux devinettes avec toi ? rétorqua-t-elle.

Son ton trahissait un mélange de rage et de frustration, mais elle espérait que cela suffirait à masquer son malaise. De son côté, son homme de main laissa les secondes s'étirer, remplissant le silence de ses propres réflexions. Il ne semblait pas remettre en question la réponse de sa patronne. Finalement, il reprit la conversation comme si de rien n'était.

— Et vous êtes où actuellement ? Je peux vous rejoindre.

Fiora ferma les yeux, soufflant discrètement son soulagement pour ne pas se faire entendre.

— On est au-dessus d'Ebrédès. Ils ont fait un détour sur cette planète, que je pensais ne jamais revoir, avoua-t-elle.

— Très bien, je pars immédiatement. Je vais demander à Andras de me fournir un vaisseau Tucanien, comme ça j'arriverai plus rapidement.

— Je ne sais pas si tu arriveras à temps, mais peut-être pourras-tu me rejoindre sur Kapu. Grouille-toi ! termina Fiora en raccrochant.

Une fois la communication terminée, Golt laissa enfin la tension dans son dos et ses épaules se relâcher, s'appuyant contre le mur métallique et froid du vaisseau. Se croyant seule, elle sursauta violemment lorsqu'une voix familière brisa le silence.

— C'était ton toutou ? Il a enfin décroché ? moqua Lozy.

Fiora se redressa instantanément, son visage se fermant en une expression froide. Elle détestait Lozy, profondément. Et le fait qu'elle surgisse ainsi, comme une mouche indésirable, furetant autour d'elle avec une curiosité malveillante, ne faisait qu'alimenter la haine viscérale qu'elle ressentait envers elle. Fiora n'avait pas l'intention de se laisser impressionner aussi facilement et décida de répondre à son jeu malsain. Un sourire condescendant se dessina sur ses lèvres, puis elle s'approcha, jusqu'à ce que leur visage soit presque collé. Ses yeux dorés se glissèrent dans ceux de Lozy, perçant ses prunelles couleur café. Sa voix, basse et pleine de défi, résonna alors :

— Que ce soit bien clair entre nous : je ne vous dois aucune explication sur aucun de mes faits et gestes. De plus, vous semblez ne pas avoir compris que vous ne travaillez pas avec moi, mais pour moi, insista-t-elle en articulant avec une précision mécanique.

Lozy ne se démonta pas et lui offrit un ricanement qui sentait la provocation.

— Du calme, le demi-dieu. Je ne cherche pas la bagarre, c'est juste une mauvaise habitude, répondit-elle avec un amusement malsain. J'aime bien observer ce qu'il se passe autour de moi.

Fiora serra la mâchoire, les poings crispés, mais garda le silence. Elle pivota brusquement et retourna d'un pas vif dans le cockpit. Elle frôla Lozy d'une manière presque provocante, la surplombant sans effort d'une dizaine de centimètres.

Dans la salle de commande, Fiora ne prit même pas la peine de s'asseoir. Elle se planta devant le tableau de contrôle, la voix tranchante, froide comme l'acier.

— Ne perdons pas de temps avec un plan inutile, ordonna-t-elle. Le temps qu'on en parle, ils auront déjà pris la fuite. Saisissons cette occasion avant qu'elle ne disparaisse.

Tiger laissa échapper un sourire, celui d'un prédateur qui sentait l'odeur du danger. L'idée d'affronter ce groupe de missionnaires, sans aucune préparation, l'attirait comme une proie facile.

EBREDES - PIROS - SALLE PRINCIPALE

Lorsque Kybop entra dans la salle principale du vaisseau, Zorth se tenait debout, le dos droit, encadré par Slikof et Kylburt. Ses deux gardes du corps, immobiles et impassibles, comme des statues, attendant que l'équipage prenne place pour permettre à Zorth de s'exprimer.

Sylice était, bien entendu, la première sur place. Elle n'avait même pas quitté le vaisseau, toujours en blouse blanche, un tas de papiers à la main – sûrement des études ou des résultats tirés de ses innombrables recherches sur l'Œil de la princesse Tyra. Installée sur l'un des hauts tabourets du bar, elle restait en retrait, observant tout depuis son perchoir.

Non loin, Milo. Depuis leur arrivée sur Ébrédès, il s'était fait discret, mais le voilà tout pimpant. Rasé de près, les cheveux soigneusement coiffés en arrière – Kybop le soupçonnait même d'avoir mis du gel. Sa fleur blanche habituelle ornait toujours son veston, comme s'il était encore en service. Debout, les mains croisées devant lui, il arborait une posture presque solennelle, prêt à écouter attentivement ce que le conseiller avait à leur révéler.

La porte s'ouvrit derrière elle, laissant entrer Brizbi. La brune au regard glacé lui lança un regard furtif, encore un peu gênée par ce qu'il s'était passé devant le mur. Une vague de souvenirs traversa son esprit avant qu'elle ne se force à se reconcentrer sur les autres. La blonde à la sucette s'assit sur le canapé sans lui accorder d'attention particulière.

Puis vint Fyguie, tout sourire, accompagné des enfants de la famille Ristoc. Leur bonne humeur était contagieuse. Ils affichaient des visages radieux, comme des enfants qui rentrent d'une sortie pleine de rires et de bons moments. Les têtes roses se dispersèrent joyeusement dans la pièce, tandis que Fyguie, en apercevant sa sœur, se dépêcha de venir s'installer à ses côtés.

— Alors ? Qu'est-ce qui se passe ? demanda-t-il, impatient.

— Je n'en sais rien. Il attend que tout le monde soit là, je suppose, répondit-elle en lui ébouriffant les cheveux.

Un glissement de porte attira leur attention. D'autres membres de l'équipage arrivaient. Derrière la carrure imposante du capitaine, qui entra en fanfare comme à son habitude, apparut Tamy. Les bras chargés de sachets d'aliments lyophilisés, elle traversa la pièce pour les déposer derrière le comptoir du bar. Une fois sa tâche accomplie, elle s'installa à côté de Sylice, qui restait plongée dans ses papiers, totalement absorbée par ses recherches.

Dogast, toujours rapide et efficace, prit place autour de la table centrale, à quelques chaises des jumeaux. Puis, l'ambiance changea subtilement avec l'entrée de la famille royale. Hyldon, Tyra et Lilas apparurent ensemble, leur prestance attirant immédiatement tous les regards.

Kybop détourna les yeux dès qu'elle vit Lilas. Pas question de croiser son regard, pas maintenant. Le goût amer de la trahison lui serra encore la gorge, et elle refusa de lui accorder ne serait-ce qu'une seconde d'attention. Pourtant, malgré ses efforts pour l'éviter, celle-ci s'assit à sa droite, sa proximité l'électrisant d'un mélange de colère et de malaise.

Fyguie, assis à sa gauche, lui donna un coup de pied léger sous la table pour capter son attention et lui indiquer la présence de la princesse à ses côtés. Comme si je n'avais pas vue, crétin... grogna-t-elle. Elle lui lança un regard noir, espérant qu'il comprenne le message : un peu plus de discrétion ne ferait pas de mal.

Il ne manquait plus qu'Houda et Saranthia, qui firent une entrée fracassante. Tous les regards se tournèrent vers elles, et personne ne put ignorer les dégâts. Saranthia, malgré ses efforts apparents pour se débarrasser de la boue, portait encore les traces évidentes d'un combat perdu contre les éléments. Ses vêtements étaient parsemés de plaques de terre séchée, presque incrustées dans le tissu. Pourtant, sa veste, d'une propreté irréprochable, détonnait étrangement avec son allure générale. Un rapide coup d'œil éclaira Kybop : elle portait celle d'Houda.

Les murmures s'élevèrent doucement dans la pièce. Certains, amusés, échangèrent des regards complices. D'autres, visiblement perplexes, froncèrent les sourcils en essayant de deviner ce qui avait bien pu se passer. Kybop elle-même ne put s'empêcher de se poser la question. Mais Saranthia, imperturbable, ne laissa rien transparaître.

Avec une prestance qui contrastait nettement avec son allure défraîchie, elle avança d'un pas assuré jusqu'à la table. Là, elle prit place face à Lilas et à ses parents. Un bref échange de regards s'établit entre eux. Puis, sans un mot, Saranthia invita Houda à s'asseoir à ses côtés d'un simple geste de la main.

Une fois que le dernier grincement de chaise s'éteignit, Zorth s'éclaircit la gorge, levant élégamment un poing devant sa bouche dans un geste mesuré.

— Bien. Puisque nous voilà tous réunis, il m'est désormais permis de vous faire part d'une révélation singulière. Comme vous le savez, je me suis enquis d'un rendez-vous, soigneusement consigné sur ce billet, et y ai fait la rencontre d'une dame. Mais point une dame ordinaire, non, une figure éminente de la confrérie. J'ai eu l'insigne privilège d'échanger avec elle sur des sujets d'importance capitale, liés à la prophétie.

À ces mots, les réactions ne se firent pas attendre. Les oreilles devinrent plus attentives. Quelques chuchotements trahirent un nouvel intérêt pour son discours, et Kybop n'échappa pas à la règle. Au milieu de cette effervescence, elle prit soudain conscience qu'elle aussi avait des révélations à faire... à son frère. Mais le temps lui avait manqué pour s'y atteler avec tout ce tumulte.

— Toutefois, pour faire montre de la plus grande transparence, je m'en voudrais de ne point céder la parole à ladite personne. Ainsi, vous serez à même de lui adresser toutes les interrogations que votre esprit jugera pertinentes, ajouta-t-il, non sans esquisser un léger sourire en coin.

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