2 - Témoins (Tadashi)
Tadashi sait ce qui l'attend s'il se fait prendre : une raclée. Et des corvées supplémentaires, très certainement. Il hausse les épaules. Tant pis. S'il ne s'implique pas dans les opérations de son propre chef, alors tout le monde continuera à le cantonner dans le rôle du « mousse tout juste bon à faire la plonge », il en est persuadé.
— T'as pas l'droit d'aller là-bas ! Le sas, c'est dangereux !
Lydia est une petite fouineuse, mais il sait comment l'empêcher de le dénoncer.
— Tu as peur ? C'est normal, t'es qu'un bébé !
Il bombe le torse.
— Moi j'ai pas peur, j'y vais !
— J'ai pas peur non plus ! rétorque Lydia.
Elle trottine derrière lui. Si elle le suit elle n'ira pas rapporter, sourit Tadashi. Il sera toujours temps de la renvoyer d'où elle vient plus tard.
Les abords du sas sont déserts. Tadashi estime que ce n'est pas prudent, qu'il faudrait au moins dix pirates armés pour garder l'entrée, voire plus, même si M'sieur Tochiro affirme que le système de détection automatique suffit pour interdire le passage de tout intrus. De l'excès de confiance, voilà ce que c'est ! décrète Tadashi.
Il grommelle tout seul. Il est malgré tout forcé d'admettre que cela l'arrange bien.
— J'y vais ! répète-t-il.
Il remplit ses poumons d'air. C'est plus impressionnant qu'il ne se l'était imaginé. Mais il ne va pas se dégonfler devant Lydia, oh non.
— Toi, tu restes là ! ajoute-t-il.
Lydia répond d'une moue boudeuse.
Le sas d'abordage est un tube déployable qui descend en pente douce sur une vingtaine de mètres. Il est barré de plusieurs rideaux magnétiques pour éviter tout problème de décompression. Au bout, l'intérieur de l'autre vaisseau apparaît comme un mirage tremblant.
Tadashi inspire encore, dégaine son pistolaser, franchit le premier rideau. En passerelle ils ont dit « c'est vide, on n'a qu'à entrer et se servir », donc il peut tout à fait aller voir, pas vrai ?
Deuxième rideau. La sortie est un trou sombre.
Troisième rideau. Il déglutit.
Le cri le fige.
— C'est dangereux, chuchote Lydia.
Il sursaute. Lydia est dans ses pas, si proche qu'elle peut saisir le pan de son blouson quand il se retourne vers elle. Il fronce les sourcils. S'apprête à la rabrouer.
Le deuxième cri l'interrompt.
Il est plus long que le premier.
Tadashi croise le regard de Lydia. Ça ne ressemble pas à un affrontement contre « des ennemis » tels qu'il les connaît. On entendrait des tirs, des explosions, on verrait les éclairs de lasers se répercuter dans les coursives... Il avance d'un pas. De l'autre côté du sas, il n'y a rien que le silence et la pénombre. Et le cri, encore.
— Captain ! Captain, non !
Lydia presse sa main. Ce « non » se termine en râle.
Ça ne ressemble pas à des ennemis. Il les entendrait.
Il fixe Lydia. La fillette est pâle, les yeux écarquillés par la peur. Elle articule « c'est dangereux » en silence. Tadashi retient son souffle, tend l'oreille, opine. C'est dangereux.
Raclement, tintement de métal, expiration rauque. Il tressaille.
C'est dangereux.
Lydia a déjà fait demi-tour. Il lui emboîte le pas.
Ils courent aussi vite qu'ils peuvent.
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