Jour 39
- Je suis désolée, lâchai-je en m'asseyant sur le canapé près de mes parents après le déjeuner.
Les jumeaux étaient en train de jouer dans le jardin avec Jordan, et j'en profitai donc pour parler un peu avec mes parents.
- Pourquoi tu t'excuses ma chérie ? s'étonna ma mère.
- De vous avoir ignoré ces derniers jours, vous les jumeaux et Jordan, avouai-je en baissant la tête.
- C'est nous qui devons nous excuser, Nikky. On n'aurait jamais dû faire ça.
- Oui mais je crois que j'ai réagit un peu trop excessivement. Je ne vous en veux pas tellement. Un peu quand même, c'est certain, mais dans un sens, je comprends la décision de Jordan. C'était seulement un peu trop d'un coup. Entre les choses que j'ai oublié, les quelques souvenirs qui reviennent sans que je ne m'y attende, et la vérité, c'est compliqué. Je me perds un peu dans tout ça, et j'avais besoin de réfléchir. À quoi, je ne sais pas, mais j'avais besoin d'être un peu seule. Alors je suis désolée.
Ma mère se leva et s'installa près de moi pour me serrer dans ses bras. Mon père se contenta de me prendre la main.
- Tu n'as pas à être désolée pour ça. C'est tout à fait compréhensif. Mais sache qu'on est là pour toi et on ne te cachera plus rien, déclara mon père.
Je hochai la tête pour lui montrer que j'avais compris, mais je continuais à me sentir mal vis-à-vis d'eux. Ils s'en rendirent compte et décidèrent de changer de sujet.
- On emmène les jumeaux au parc aujourd'hui. Tu pourras passer la journée avec Jordan, annonça ma mère.
Je lui souris pour la remercier, même si au fond de moi, j'appréhendais un journée seule avec lui.
La veille, après notre discussion chez lui, on était rentré chez moi, sans ajouter un mot. J'avais encore beaucoup de chose à lui demander, mais ça faisait déjà trop à encaisser. Toutes les informations que j'avais reçu me revenaient de plein fouet.
Je sortais avec lui depuis trois ans. J'étais sortis avec Alex avant lui seulement pour le rendre jaloux - mais ça, je le savais déjà. Il m'avait mentit un nombre incalculable de fois, mais d'un côté, je pensais comprendre pourquoi il l'avait fait. Me dire qu'il avait peut-être eut raison d'agir de la sorte me faisait mal.
Quand Alex m'avait embrassée, je m'étais dit que je pourrais accepter de continuer de sortir avec lui. Pour essayer de retrouver mes souvenirs, mais aussi par culpabilité d'avoir oublier.
Et ça, c'est que que Jordan avait voulu éviter. Je ne pouvais que le comprendre.
Toutefois, ce que j'avais du mal à encaisser, c'était qu'il aurait voulu que jamais je ne me rappelle, et je ne savais pas si je devais le croire quand il m'avait dit qu'il comptait m'avouer la vérité très bientôt. Il ne voulait pas que je sache parce qu'il ne voulait pas que je le déteste.
Mais je ne le détestais pas.
Et lui m'aimait toujours.
Il m'a dit qu'il ferait tout pour se faire pardonner, mais ce qu'il ne savait pas, c'est qu'il n'avait pas grand chose à faire pour cela. Voire rien du tout. Je ne savais plus quoi penser. Je ne savais plus rien, excepté le fait que mon amour pour lui était réciproque. Et c'était suffisant pour me faire oublier tout le reste.
- On y va ! m'annonça mon père sur le pas de la porte.
Je hochai la tête pour lui montrer que j'avais entendu et Jordan ferma la porte derrière lui, avant de venir s'asseoir près de moi.
- Est-ce que... Tu veux faire quelque chose de spécial aujourd'hui ? me demanda-t-il un peu nerveux.
Je haussai les épaules. C'était étrange comme ça avait changé entre nous en l'espace de quelques jours. Vendredi, on ne se parlait pas du tout, hier on s'était expliqué, puis engueulé, puis réconcilier - en quelques sortes - et aujourd'hui, c'était un peu comme si on revenait un mois en arrière. Au moment où je revenais de l'hôpital.
- Ou alors... Tu préfères peut-être que je te laisse seule ? me proposa-t-il hésitant, les yeux baissés comme s'il ne voulait pas me voir le dire à haute voix.
- Non. Non je... Emmène-moi quelque part, dis-je sans réfléchir.
Il releva la tête en souriant légèrement.
- Tu veux aller où ?
- Je ne sais pas. Un endroit que je ne connais pas.
Il ne prit que quelques secondes avant de se décider et je le suivis à l'extérieur de la maison, sa main tenant fermement la mienne. Il s'arrêta de marcher au bout de quelques mètres pour ouvrir le portail.
- J'avais dis un endroit que je ne connaissais pas, lui rappelai-je.
Il ne répondit pas et se contenta de me sourire timidement avant de me faire entrer chez lui. Je me rendis compte que son sourire m'avait manqué, beaucoup plus que je ne me l'imaginais.
Je le suivis jusqu'à l'étage, puis il ouvrit une porte et me laissa entrer dans la pièce. Une chambre. La sienne. Je la reconnaissais, puisque je l'avais vue dans un de mes souvenirs. Celui où nous nous étions disputés à propos de Morgane. Mais la pièce était différente de quand nous étions petits.
- Tu n'habitais pas ici quand on était petit.
Ce n'était pas une question, mais il acquiesça.
- Tu te souviens ?
- Oui. Un jour où ta mère n'avait pas voulu qu'on dorme ensemble. Mais j'étais quand même venue dans la nuit, dis-je en regardant autour de moi.
Un grand lit double où étaient entreposés des dizaines d'objets et papiers, un bureau, une commode et une télévision. Toute la pièce était grise mais très accueillante. J'aimais beaucoup cette atmosphère.
- Et le lendemain, on s'était un peu fait engueulé, m'informa-t-il en ouvrant la fenêtre pour aérer l'intérieur. Mais on en a prit l'habitude !
- De se faire engueuler ?
- Ouais. Tu venais tout le temps me rejoindre. Mais nos parents ont vite abandonné l'affaire.
Il s'installa sur sa chaise de bureau en souriant et je détournai le regard, le portant sur son lit. Je m'y approchai doucement et attrapai un morceau de papier. Je sentais le regard de mon ami sur moi, c'était donc qu'il m'autorisait à lire les mots inscrits d'une écriture légèrement penchée.
" Bouche toi les oreilles. Bouche toi les oreilles fort fort fort, encore plus fort ! Tu entends comme je t'aime ? "
Je ne savais pas ce que c'était, mais lire cette phrase me fit sourire. J'avais l'impression qu'en lisant ces mots, ils m'étaient adressés.
Je pris une autre note, où il y avait deux écritures différentes. La mienne et la même que sur la feuille précédente. Ça ressemblait à un dialogue, et ce n'était pas moi qui l'avait commencé, visiblement.
" - Alors, t'es amoureuse ? T'es pas obligée de répondre, c'est juste une question.
- J'ai personne dans mon lit si c'est ce que tu veux savoir... Enfin, personne que je n'puisse changer avec les draps. Il est footballeur, il s'appelle Sergueï Nimovnemovitch... Enfin s'appelait je l'ai largué ce matin.
- Comment t'as pu sortir avec un mec qui a un nom à coucher dehors ?
- Bah justement j'en avais marre de coucher dehors.
- Et depuis ce matin, rien d'autre ?
- À part Sergeï ? Euh... Greg son copain, Jérôme son père, un François, deux trois Kévin, le prince de Cendrillon, les droïdes de la guerre des étoiles enfin tu vois rien de bien sérieux. Un cœur à prendre. "
Je rigolai toute seule en le lisant. Je ne comprenais pas grand chose, alors je me tournai vers Jordan qui me fixait intensément.
- C'est quoi ?
- Des mots qu'on s'envoyait en cours.
Je reportai mon regard sur le lit, jonché de morceau de papier du même genre.
- Tout ça ?
- Ouais.
- On devait vraiment s'ennuyer en cours... remarquai-je.
- Tu ne peux pas savoir à quel point ! s'exclama-t-il.
Je lui tendis les deux papiers et il rit doucement.
- C'est les répliques d'un film qu'on connait par cœur.
- Quel film ?
- Jeux d'enfants.
- Et ça parle de quoi ? voulus-je savoir.
- On le regardera un jour, déclara-t-il en me souriant.
Je hochai la tête et pris une feuille blanche, où étaient inscrites quelques phrases qui ressemblait plus à une lettre qu'à un mot échangé en classe. L'écriture était appliquée mais un peu tremblante.
" Ma très chère Nikky,
Je n'ai pas pu fermer l'œil parce que je sais que tout est fini entre nous. Je ne suis plus amer car je sais que ce que nous avons vécu était vrai. Et si un jour, nous nous rencontrons dans nos nouvelles vies, je te sourirai sincèrement, en me rappelant l'été que nous avons passé sous les arbres, apprenant à nous connaître en étant amoureux l'un de l'autre. Le plus bel amour est celui qui éveille l'âme et nous fait nous surpasser. Celui qui enflamme notre cœur et apaise nos esprits. C'est ce que tu m'as apporté. Et c'est ce que j'espérais pouvoir t'apporter pour toujours.
Je t'aime,
À très bientôt.
Jordan. "
Le fait de lire ces mots me fit monter les larmes aux yeux, instantanément et...
- Pourquoi t'as écrit ça ? m'exclamai-je en pleurant. Si je ne serais pas venue chez toi avant que tu partes, j'aurais lu ta lettre toute seule !
- Je pensais que tu l'avais déjà lue... avoua Jordan. Je pensais que tu l'avais déjà lue et que tu ne voulais plus jamais me voir. Après tout, c'est ce que tu m'avais dit non ?
- T'es vraiment un imbécile ! m'écriai-je en essuyant mes larmes.
Je voulus sortir de ma chambre mais il me retint par la main, me ramenant face à lui.
- Je suis un imbécile parce que je t'ai crue ? Tu ne m'adressais plus la parole, Nikky. Tu as passé deux semaines en refusant de me voir ! Alors je me suis dis que si tu lisais ça, tu reviendrais. Mais tu ne l'as pas fait...
- Je ne voulais pas la lire.
- Parce que tu ne voulais pas revenir.
Je secouai la tête.
- Je ne savais pas ce que je voulais. Et si je lisais ça, quelques soient tes mots, je crois que je serais revenue. Je voulais pouvoir réfléchir toute seule, avouai-je en baissant la tête. Et avec ça, ça aurait été impossible de réfléchir. J'aurais tout de suite couru dans tes bras.
- C'est bien pour ça que je l'ai écrit, souffla-t-il comme si c'était un secret.
Je me reculai brusquement de lui et croisai les bras sur ma poitrine, le défiant du regard.
- J'aurais bien finit par la lire un jour ! Un jour où tu ne serais plus là. Peut-être même le lendemain de ton départ. Et comment j'aurais fait, hein ? Dis-moi comment j'aurais fait !
Jordan me sourit et leva sa main pour la poser sur ma joue, avec une douceur qui m'avait manqué.
- À ce moment-là, tu m'aurais probablement téléphoné, en pleurs comme aujourd'hui, et j'aurais fait le chemin inverse dans la seconde. J'aurais traversé la Terre entière dans la seconde et je serais revenu à temps pour essuyer tes larmes avant qu'elles n'arrivent sur tes lèvres et te prendre dans mes bras pour me faire pardonner. À ce moment-là, tu m'aurais supplié de rester et c'est ce que j'aurais fait, après m'être excusé des dizaines, voire des centaines de milliers de fois pour ce que j'avais fait. Et à ce moment-là seulement tu m'aurais pardonné.
Son regard n'avait pas quitté le mien toute sa tirade durant. Je lui répondis en boudant.
- Je déteste quand tu as raison.
Je clignai des yeux et ne vis que du bleu. Le bleu du tee-shirt de Jordan. Un goût salé pris possession de ma bouche. Comme le goût des larmes. Puis je sentis l'odeur singulière de son parfum s'insinuer en moi. Je sentais aussi maintenant le contact de sa main qui caressait doucement mes cheveux, l'autre faisait une douce pression dans mon dos pour me maintenir debout. Enfin, sa voix qui murmurait contre mon oreille me parvint.
- Ça va aller, Nikky. Tout va bien. Je suis là.
La chambre de Jordan. Les mots. La lettre. Ça me revenait maintenant. Ce n'était qu'un flash. Un souvenir.
Je me défis doucement de l'emprise de mon ami et m'essuyai les joues en reniflant avec élégance.
- Désolée...
- Ne t'excuses pas.
Il me prit par la main et me fit asseoir sur son lit, après avoir poussé ce qui l'encombrait. Il s'installa près de moi et je laissai ma tête tomber sur son épaule. De longues minutes de silence s'écoulèrent avant qu'il ne parle.
- Tu as eu un souvenir ?
- Oui. Et ça fait mal.
- Lequel ?
- Celui où j'ai lu... ça, dis-je en montrant le papier que j'avais toujours dans ma main. La première fois.
Il ne répondit pas. Essayant peut-être de se rappeler de quoi je parlais.
- C'était après que tu aies failli partir en Australie, chuchotai-je, ne sachant même pas s'il était capable de m'entendre.
- Oui.
Je reposai mes yeux sur la feuille noircie de lettres et relus chaque mot, un par un.
- Tu écris bien.
- Ce n'est pas de moi.
Je relevai la tête, surprise.
- Là aussi c'est une réplique de film. Je voulais t'écrire une lettre mais je n'ai jamais été doué pour l'écriture. Alors j'ai copié ça. C'est ce qui décrivait parfaitement ce que je ressentais.
- N'oublie jamais... murmurai-je.
Un sourire prit possession de ses lèvres.
- Oui, N'oublie jamais. Ce film-là aussi on le regardait souvent.
Il m'embrassa sur le front, avant de passer son bras sur mes épaules pour m'attirer près de lui. J'étais restée comme ça le temps de me remettre de mes émotions.
- Il y a que trois choses que tu ne m'as pas demandé de faire, que je regrette et j'aurais été cap... murmura-t-il.
Je me redressai en fronçant les sourcils.
- Comme quoi ?
- La réplique exacte c'est " Genre ? ", me corrigea-t-il en souriant.
Je secouai la tête sous l'incompréhension, puis je compris.
- Genre ? répétai-je en souriant.
- Manger des fourmis, insulter les chômeurs qui sortent de l'ANPE... t'aimer comme un fou.
Je baissai les yeux, gênée, et reposai ma tête contre son torse, où je pouvais sentir son cœur battre aussi vite que le mien.
- C'est de quel film ?
- Jeux d'enfants. Aussi.
- Je veux le regarder.
- Maintenant ?
- Oui.
***
C'était l'histoire de deux enfants qui se donnaient des gages mutuellement. Cap ou pas cap ? Tout reposait là-dessus. Puis en grandissant, ils s'étaient rendu compte qu'ils ne pouvaient pas vivre l'un sans l'autre. Inséparables. Indissociables. Indispensables.
Ça faisait maintenant une bonne dizaine de minutes que le film était terminé, mais aucun de nous deux n'avait bougé. Immobiles sur le canapé de chez moi, dans le noir complet, apaisant. Jusqu'à ce que la porte d'entrée s'ouvre et que l'interrupteur s'enclenche, laissant apparaitre mes parents et les jumeaux. Je m'écartai immédiatement de Jordan - ce qui le fit rire - comme si je venais d'être prise en flagrant délit, alors que j'avais seulement ma tête sur son épaule, et sa main dans la mienne. Je rougis instantanément en croisant le regard de ma mère.
- Pourquoi il fait tout nuit là-dedans ? demanda Tony.
- On regardait un film, répondit Jordan en se levant pour rouvrir les volets de la baie vitrée. C'est mieux quand il fait nuit.
- Mais oui c'est ça ! s'exclama mon frère. Je suis sûr que vous vous faisiez des bisous.
Pourquoi avait-il fallu que je décide de boire un coup juste à ce moment-là ? Je n'allais pas tarder à mourir d'étouffement et Jordan se retenait tant bien que mal de ne pas exploser de rire. Ma mère décida de ne pas relever et annonça qu'ils étaient aller chercher à manger. Ce soir était donc un repas chinois.
Mes parents n'avaient pas parlé d'aujourd'hui. Jordan et moi non plus.
***
Ça ne faisait qu'une dizaine de minutes que j'étais allongée dans mon lit, plongée dans le noir complet, quand la porte s'ouvrit, puis se referma rapidement. Je savais que Jordan venait d'entrer malgré l'obscurité. La couverture se souleva du côté gauche et mon lit s'affaissa sous son poids lorsqu'il s'allongea. Je me redressai pour allumer ma lampe de chevet et me tournai vers lui. J'ouvris la bouche pour parler mais il me coupa dans mon élan.
- S'il te plait Nikky, souffla-t-il en me regardant dans les yeux, couché sur le côté. Juste cette nuit, s'il te plait.
Il n'en fallait pas plus pour me laisser convaincre. Aussi, je m'allongeai à nouveau sur le dos, laissant la lumière allumée.
Même si on avait déjà dormi ensemble, je me sentais plus gênée que la dernière fois. Maintenant que je savais qu'on avait été ensemble, je ne savais plus comment agir avec lui. Je me contentais d'admirer le plafond pendant que lui me fixait.
- Pourquoi tu gardes tout ces mots dans ta chambre ? demandai-je pour rompre ce silence embarrassant.
- C'est toi qui les gardais. Enfin... Une grande partie. Ils étaient dans une boite dans le tiroir du bas de ton bureau.
- Et tu as tout enlevé pour que je ne les trouve pas, compris-je.
- Oui. Comme les photos et tout ce qui pourrait te mener à...
- Nous, terminai-je à sa place.
Il soupira et se tourna pour s'allonger sur le ventre et enfouir sa tête dans mes oreillers. Il était resté tellement longtemps sans bouger que j'ai cru, un moment, qu'il s'était endormi. J'ai tout de même prononcer quelques mots.
- Je crois que je commence à comprendre pourquoi tu as fait tout ça...
Jordan se redressa sur ses deux coudes et je tournai la tête pour croiser son regard.
- Comment tu fais ? Moi-même je ne comprends pas comment j'ai pu être aussi égoïste.
Je haussai les épaules. Il m'était impossible de répondre à cette question.
Après de longues secondes à se regarder dans les yeux, son regard dévia sur mes lèvres. Instinctivement, le mien fit de même juste le temps d'un instant, avant de revenir au gris de ses yeux. Il le voulait autant que moi. Pourquoi ne le faisait-il pas ? Je ne savais pas si je serais capable de le faire moi-même...
À la place, je levai ma main pour la poser sur sa joue. Ses yeux se fermèrent à mon contact et un soupir s'échappa de ses lèvres, comme s'il avait attendu ce moment depuis des années. Quand il rouvrit les yeux, toute trace d'angoisse et de nervosité l'avait quitté.
Lentement, trop lentement, il se pencha vers moi diminuant de plus en plus l'espace entre nous. Après de longues et interminables secondes, après plusieurs jours de silence, ses lèvres effleurèrent délicatement les miennes, avant d'en prendre pleinement possession. Je répondis évidemment à son baiser, laissant ma main se balader dans ses cheveux pour le rapprocher plus près de moi. Si toutefois c'était encore possible.
À cet instant, plus rien n'existait autour de moi, et pour la seconde fois, j'avais tout oublié sauf son prénom. Plus rien n'avait d'importance. Son mensonge, mes pleurs, les siens, Alex... Tout s'envola au moment où sa langue se fraya un passage entre mes lèvres. Je ne pouvais penser à rien d'autre qu'à lui. Jordan. Celui dont j'étais tombée amoureuse une première fois. Puis une seconde fois. Celui que j'aimais. Celui qui allait me rendre folle.
Sa main s'agrippait désespérément à ma hanche, de peur que je m'en aille. Son baiser se faisait de plus en plus intense, comme s'il n'aurait plus jamais l'occasion de recommencer. Comme s'il voulait que je m'en souvienne jusqu'à la fin de mes jours.
Ce baiser me révélait tout ses sentiments. Son amour pour moi, sa peur de me perdre, son désir de se faire pardonner toutes ses erreurs, ses regrets, ses excuses et bien plus encore.
Toujours plus.
À bout de souffle, il finit par s'écarter de moi, sa bouche restait à quelques millimètres de la mienne. Nos respirations étaient frénétiques mais accordées au même rythme. Ma main, posée sur son torse, à gauche, me révélait que les battements de son cœur étaient aussi rapide et désordonnés que les miens.
- Je t'aime Nikky, souffla-t-il avant d'enfouir son visage dans mon cou. Je t'aime tellement.
Je l'encerclai de mes bras pour le serrer contre moi. Une larme roula sur ma joue. Doucement. Et il s'en rendit compte, alors il se redressa pour essayer de lire dans mes yeux.
- Pourquoi tu pleures ? murmura-t-il en capturant la goutte d'eau salé qui s'était échappé de mon œil à mon insu.
Je secouai doucement la tête en lui souriant, incapable de trouver une réponse à sa question.
- Tout va bien, lui assurai-je.
- Tu me le promets ?
- Je te le promet.
Il me fit un simple baiser du bout des lèvres, avant d'éteindre la lampe de chevet, et de s'allonger à nouveau à mes côtés, son nez contre mon cou et son bras sur mon ventre. Mes doigts étaient emmêlés dans ses cheveux, lui caressant la tête d'un geste machinal.
- Bonne nuit Nikky.
- Bonne nuit Jordan.
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