Jour 2
Quand je me suis réveillée, j'étais de retour dans mon lit, et il faisait jour. J'étais de nouveau reliée à cette poche de liquide, et j'avais vraiment, vraiment envie d'aller aux toilettes. Mais il n'y avait pas d'autres portes dans ma chambre, que celle par où était entré le médecin. J'en déduis donc qu'il n'était pas venu des toilettes...
Une sorte de télécommande était posée près de ma main. Je ne l'avais pas remarquée la dernière fois que je m'étais réveillée. J'ai appuyé sur le bouton - à mes risques et périls - et j'ai attendu. Quelques secondes plus tard, un jeune homme plutôt séduisant, en blouse blanche déverrouilla la porte pour entrer.
- Vous avez besoin de quelque chose ? me demanda-t-il en souriant.
Cette situation était incroyablement gênante. Je crois que je me suis mise à rougir puisque mes joues commençaient à me chauffer.
- Hum... Je... Il faudrait que j'aille aux toilettes...
- Attendez une minute, je reviens.
Il sortit et verrouilla de nouveau la porte. Il crois que je vais m'enfuir ou quoi ? Il est revenu quelques instants plus tard, en poussant un fauteuil roulant.
- Je peux marcher, vous savez.
- Je suis obligé. Et puis vous êtes encore faible, alors je ne veux pas que vous vous évanouissiez, répondit-il avec un petit sourire.
Il était vraiment charmant. Il devait avoir dans les vingt cinq ans je dirais et avait un sourire à tomber. Mais je m'égare un peu... Il est là seulement pour m'emmener aux toilettes. Quel classe !
Il m'aida à m'installer dans le fauteuil et me poussa hors de la pièce. Quelques mètre après, il ouvrit la porte d'une salle de bain. J'ai attendu qu'il sorte, mais il ne semblait pas du même avis.
- Je... C'est bon je peux me débrouiller, merci.
- Je n'ai pas le droit de vous laisser seule, s'excusa-t-il.
Dites-moi que c'est une blague !
- Je suis pas handicapée à ce que je sache ! commençai-je à m'énerver.
- Je le sais bien, mais je n'ai pas le choix.
- Vous pouvez au moins vous retourner ? me résignai-je.
Il se retourna, et une fois que j'eus terminé, il me raccompagna jusqu'à ma chambre. Cette situation me dérangeait déjà alors je n'imagine pas le fiasco que ça sera quand je devrai prendre ma douche !
Il m'aida à me remettre au lit et me demanda si je n'avais pas besoin d'autre chose. Je lui ai répondu que non, mais au moment où il allait partir, je l'interpellai.
- Ça vous dérangerait pas de rester un peu ? J'ai... Quelques questions.
- Non pas du tout, me sourit-il.
Il prit la chaise qui était contre le mur et s'installa à côté de mon lit.
- Vous êtes mon médecin ?
- Votre infirmier. Je m'appelle Steven, et si vous avez besoin de quoique ce soit, c'est moi qui viendrai la plupart du temps.
Je le détaillai rapidement, pendant qu'il se présentait. Il était grand et plutôt musclé. Il n'avait pas du tout la carrure d'un infirmier... Ses yeux bleus foncés me fixaient et un sourire chaleureux était toujours dessiné sur son visage. Je ne sais pas si ce sourire est du cinéma pour paraitre sympathique avec les patients, ou s'il l'est vraiment...
- Je m'appelle vraiment Nikky ? lui demandai-je en fronçant les sourcils.
- Oui. Nikky Cassel.
- J'ai quel âge ?
- Dix-sept ans.
- Quoi ? C'est tout ?
- Oui pourquoi ? Vous vous attendiez à plus ? Ou à moins ?
- Largement plus ! m'exclamai-je. Pourquoi tout le monde me vouvoie si je n'ai que dix-sept ans ?
- Par respect je suppose, rit-il.
- Et bien si vous pouviez abandonner le respect, vous et vos collègues, ça serait pas mal. Je me sens vieille... bougonnai-je.
- Très bien ! Je ferai passer le mot, me sourit-il.
Je le remerciai en souriant légèrement. Il regarda sa montre et se releva.
- Monsieur Marcord, votre... ton médecin, se reprit-il, va passer dans quelques instants pour faire le point.
Comme pour illustrer ses propos, l'homme que j'avais déjà rencontré entra dans la chambre. Lui, je ne l'aime pas ! Pas seulement parce qu'il est plus vieux et bien moins séduisant que Steven, ça va de soit, mais parce qu'il m'a énervée la dernière fois que je l'ai vu.
Mon infirmier sortit pour que monsieur... je-ne-sais-déjà-plus-son-nom prenne sa place. Il s'installa avec le même carnet que la dernière fois.
- Comment tu vas ?
Même sa voix m'exaspère !
- Bien.
- Te souviens-tu de quelque chose ?
- Vous allez me poser cette question à chaque fois que vous allez me voir ? Parce que je vous préviens tout de suite que ça va vite me gonfler ! lui dis-je en me recouchant sur mon lit, en soufflant de lassitude.
- Oui.
- Génial... m'exclamai-je en levant les yeux au ciel. C'est essentiel ça ? lui demandai-je en montrant la perfusion.
- Plus maintenant. On te la retirera plus tard dans la matinée.
- Et la porte fermée à clé ?
- On ne sait pas comment tu pourrais réagir alors nous sommes obligés, et je m'en excuse.
- Si vous saviez ce que j'en ai à faire de vos excuses...
Il fit abstraction de ma dernière phrase et continua de m'observer. Il ne ressemble vraiment pas à un médecin...
- Vous êtes sûr que vous êtes médecin et pas psy, ou un truc du genre ? En plus vous ne portez même pas de blouse.
- Tu as raison, je suis ton psychologue, mais peu importe.
- Je me disais bien qu'il y avait un truc ! m'exclamai-je. Et arrêtez de m'observer comme ça, merde ! Je suis pas un animal !
- Écoute Nikky, je comprend parfaitement ton désarroi mais...
- Mon désarroi ? ris-je nerveusement. Mais bien sûr, comme si vous alliez comprendre. Me faites pas rire ! Vous avez perdu la mémoire vous aussi ? Non, répondis-je à sa place. Alors vous ne me comprenez pas.
- Tu n'as pas tord, mais je suis ici pour t'aider.
- Si vous voulez m'aider, sortez d'ici, j'en ai assez.
Je me retournai dans mon lit, dos à lui. C'est peut-être puérile, mais je m'en fiche. Il ne semblait pas du même avis que moi, alors je lui dis :
- Finalement, vous pouvez rester. Posez moi toutes les questions que vous voulez, je n'y répondrai pas.
Le pire dans tout ça, c'est qu'il l'a fait ! Il m'a posé plusieurs questions, et bien sûr, il n'a pas obtenu de réponse. Si ça l'amuse de perdre son temps, qu'il continue !
Il a tout de même arrêté au bout d'un moment, et un autre homme, en blouse blanche, entra dans ma chambre.
- Bonjour Nikky. Je suis le Docteur Minau. Comment tu vas ?
- Mis à part que je suis amnésique, je suis au mieux de ma forme ! m'écriai-je ironiquement.
- Très bien. Je vais t'enlever la perfusion et je devrai t'ausculter.
Il ôta l'aiguille de mon bras, et vérifia chacun de mes muscles, ma tension, mon cœur, ma respiration, et j'en passe !
- Bon, et bien tout va pour le mieux, comme tu me la si bien dis, me sourit-il. Je te ferai passer un scanner dans l'après midi et quelques prises de sang.
- Ok...
Avant de partir, il m'a dit que je m'étais noyée à la piscine. J'avais arrêté de respirer pendant un long moment, ce qui a engendré un coma de cinq jours. Ça avait été un miracle que mon cœur ai recommencé à battre après longues minutes, m'a-t-il dit. D'après plusieurs scanner que j'avais déjà passé, il n'y avait aucune anomalies dans mon corps et dans mon cerveau. Ils avaient seulement attendu patiemment que je me réveille. Ils avaient été étonné que j'ai perdu la totalité de ma mémoire, et selon eux, ce n'était qu'une question de temps avant que tout ne me revienne. Même si au fond de moi, je sais qu'il pense qu'il y a une chance que je ne recouvre ma la mémoire. Et ça me faisait peur...
Plus tard dans la journée, on m'a fait des prises de sang et un scanner. Puis, je suis retournée dans ma chambre pour manger, et continuer de me morfondre. Pourquoi personne ne venait me voir ? Je n'avais pas de famille ? Pas d'amis ?
D'un côté, je me dis que ce n'était pas plus mal. Ça me fera trop de peine de parler à quelqu'un qui me connait, alors que moi non. Et que je ne me connais pas moi-même.
Une infirmière, qui s'appelle Émilie, est passée dans l'après-midi, pour m'aider à prendre une douche. Je n'arrêtais de lui répéter que je n'avais pas besoin d'aide, mais elle n'a pas cédé. J'espère que je ne vais pas être assistée trop longtemps ! Mais bon, je préfère que ce soit elle, plutôt que Steven...
C'était très étrange de découvrir mon corps, en quelques sortes... C'est à peine si j'osais me regarder quand je me lavais. Comme si ce corps n'était pas le mien. Pourtant, j'en avais bien le contrôle, alors c'était extrêmement bizarre.
J'avais la peau claire et j'étais assez mince. Mon ventre était plat, j'avais de longues jambes ni trop fines, ni pas assez, et une poitrine plutôt généreuse. Je devais être bien dans ma peau, vu le corps que j'avais ! Sans vouloir me vanter, bien sûr... Je pouvais aussi voir le bout de mes cheveux blonds foncés, qui m'arrivaient un peu plus bas que les épaules.
En sortant de la douche, je suis passée devant le miroir que je n'avais pas regardé en entrant dans la salle de bain. Je ne voulais pas me voir. Mais là, sans le faire exprès, mon regard s'est bloqué sur mon reflet. Des yeux verts me regardaient. Ce visage fin, et plutôt joli me fixait. Je posai doucement ma main sur ma joue pour me montrer à moi-même que c'était bien moi. Je passai mes mains sur chaque partie de mon visage : des lèvres roses et pulpeuses, un nez fin et droit - un peu trop long à mon gout - de grands yeux aux iris vertes, et une frange qui recouvrait mon front. C'était comme... observer une photo d'une personne inconnue. Toutefois, je me trouvais vraiment jolie. C'était peut-être prétentieux de ma part, mais tant pis. J'ai perdu la mémoire, je peux bien être égocentrique non ?
Pourtant, je pouvais voir mes yeux se remplir de larmes, et je ne pus les empêcher de couler. Ça me faisait tellement mal... C'était moi. Mon regard. Mes mouvements. Mes larmes. Et pourtant je ne reconnaissais rien de tout ça.
J'ai commencé à sangloter et je me suis réfugiée dans le bras de l'infirmière. Tout compte fait, heureusement qu'elle était présente. Elle n'a pas fait grand chose pour me réconforter, mais ressentir une présence contre moi me rassurait.
Une fois mes pleurs un peu atténués, je me suis reculée pour constater que je ne portais que la serviette de bain. J'ai commencé à rougir et me suis habillée rapidement. Enfin, habillée est un bien grand mot. J'ai enfilé la robe d'hôpital, et c'est tout.
En retournant dans ma chambre, je me suis couchée dans mon lit, et je me suis endormie. On m'a réveillée pour manger, ce que j'ai fais puisque j'y étais obligée, et je me suis rendormie. Cette journée m'avait exténuée. Et ce n'était que le début !
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