« Chapitre 14 »

Chapitre 14

PDV EMILY

L'après-midi même, je fus assez surprise de voir que Tania avait refusé de rejoindre Sofiane dans un restaurant pour la seule raison de rester avec moi. Elle était vraiment adorable cette fille. J'avais cependant beau lui répéter que j'allais mieux, elle ne semblait pas prête de vouloir me lâcher. De temps à autre, elle se lançait dans un discours philosophique en me disant que le bonheur n'était qu'éphémère, mais qu'il fallait y croire pour le conserver. C'était une vision assez étrange de voir la vie, mais je ne protestais pas, ne voulant pas paraître rabat-joie.

« Tu es sure de ne pas vouloir aller à la patinoire ? » répéta Tania.

« Tu deviens lourde là.. » soufflai-je.

« Désolée, désolée. » 

Elle leva les bras comme pour signer son abandon et pris une veste avant de l'enfiler sous mes yeux.

« Tu fais quoi ? » demandai-je.

« Bah, je me prépare. » me répondit-elle, sérieuse.

« On va où ? »

« Bah, se promener. Tu ne comptes pas rester dans cet appartement toute la journée, si ? Il y a bien mieux à faire à l'extérieur. » me sourit-elle.

J'acquiesçai d'un marmonnement à peine audible puis la mimai. Elle sortit de l'appartement, suivie de moi-même. Le vent me fouetta le visage. Je soupirai, las. Tania rit légèrement puis commença à avancer dans les rues de Los Angeles. Je restai à ses côtés et nous commençâmes à parler de tout et de rien.

Après de rapides minutes passées ensembles, nous arrivâmes devant un arrêt de bus sous lequel j'aperçus ce fameux Kyllian que j'avais vu le matin même. Je lui fis un léger signe de la main. Il m'aperçut et mima mon geste, accompagné d'un sourire assez tendre.

« C'est qui ? » me demanda Tania, intriguée.

« Un garçon que j'ai rencontré ce matin en faisant mon jogging. »

« Et même pas tu comptais m'en parler ? » s'indigna-t-elle.

« Tu voulais que je te dise quoi ? Je le connais à peine. » répondis-je, sincère.

« Il a l'air plutôt mignon. »

« Il l'est. »

Les mots étaient sortis rapidement de ma bouche. Tania eut un sourire en coin qu'elle tenta de dissimuler. Je sentis sa réflexion arriver, mais rien ne sortit de sa bouche.

« Allez dis-le. » fis-je.

« Dire quoi ? »

« Que tu es heureuse de ce que je viens de dire. »

« Pas faux. »

Je lui donnai un léger coup dans l'épaule comme les bons vieux amis masculins. Cela ne l'étonnait plus. J'avais beau être une fille, le fait de grandir avec deux frères et de traîner avec des garçons durant mon enfance m'avait rendue plus forte et donné des habitudes pas très féminines. 

« Tu comptes l'oublier ? » me demanda Tania tandis qu'elle replaçait ses cheveux en une queue de cheval.

« Pourquoi je l'oublierai ? » répondis-je, perdue.

« Je ne parle pas de l'homme du bus. Je parle d'Ethan. »

L'annonce de son nom me fit sursauter intérieurement. Dès que quelqu'un parlait de lui, je me remémorais cette scène dans ma tête. Son corps nu sur celui de Léna. Ces frottements qui paraissaient si passionnels. Ces gémissements incessants dont je fus témoin durant seulement quelques secondes, mais qui parurent une éternité, m'avaient tellement choquée et démolie que m'en souvenir de nouveau me fendait le coeur. Après une année, je pensais avoir cicatrisé, mais j'étais toujours dans le même stade. J'avais peur d'aimer car j'avais peur d'être trahie. J'avais peur de ne plus jamais trouver l'amour à cause de cet handicap. Fichu passé.

« Il faut bien. » 

Elle marmonna puis nous arrivâmes dans un parc assez peu fréquenté en semaine. Nous nous installâmes sur l'un des bancs que longeaient les longs chemins de cailloux. Le soleil brillait haut dans le ciel mais n'était pas très intense. La fine brise caressait nos joues. De temps à autre, je frissonnais. Je portais une légère veste afin de ne pas tomber malade, car même s'il ne faisait pas froid, la baisse de température avait été fulgurante ces derniers jours.

« Je pense que tu devrais essayer de contacter ce garçon. Il a l'air gentil. »

Je levai la tête et regardai Tania qui, elle, regardait dans la vide droit devant elle.

« Je ne sais pas. Il faut se méfier des apparences. »

Elle rit légèrement, remarquant que je venais de lui piquer sa phrase favorite. 

« Emily, si tu réfléchis comme ça, plus jamais tu ne retrouveras quelqu'un qui réussira à te rendre heureuse. »

« Peut-être que le bonheur n'est pas fait pour moi. » me lamentai-je.

Elle roula des yeux comme si je venais dire la plus grosse bêtise du monde. 

« Ne dis pas n'importe quoi. Tu es une fille exceptionnelle. Tu as le droit à un gendre exceptionnel. »

« Il faut d'abord le trouver. »

« Et pour le trouver, il faut le chercher. » finit-elle.

Je baissai de nouveau la tête et plongeai dans mes pensées. Elle avait raison. Si je n'arrivais pas à trouver une relation stable et sérieuse avec une garçon était tout simplement car je ne sortais plus, que je ne cherchais même pas à lier des liens avec des personnes de mon entourage. Je me concentrai principalement sur la musique et mes activités. Seuls Tania et Momo étaient des personnes importantes pour moi à Los Angeles. Kate était loin. Elle était en France. Fichue France. Pourquoi ce pays se trouvait-il aussi loin d'ici ?

« Parle Emily.. Je n'aime pas quand tu restes muette. » se plaignit Tania.

Je souris faiblement avant de la prendre dans mes bras. C'était un geste non-réfléchi mais je le voulais. J'en avais besoin. J'avais besoin de sa présence près de moi, de son soutien quotidien pour surmonter ces souvenirs qui me tourmentaient depuis tant de mois. Pourquoi n'arrivais-je pas à oublier ? Parfois, je m'étais imaginée me faire renverser par une voiture, tomber dans le coma et me réveiller complètement amnésique. Peut-être que cela serait frustrant, mais au moins je ne souffrirai plus de tous ces regrets que j'avais laissés enfouis au plus profond de moi. 

Alors que je tenais fermement Tania dans mes bras, la tête posée sur son épaule, j'aperçus au loin une silhouette s'approcher de nous. Très rapidement, je reconnus celle d'Ethan. Mais que faisait-il là ? Ce n'était absolument pas le moment pour lui de venir me voir. Je craignais perdre mes moyens devant lui. Tania sentis que j'étais crispée et me relâcha. Lorsqu'elle aperçut mon regard inquiet dirigé derrière elle, elle se retourna et aperçut l'objet de mes tourments.

« Tu veux que je te laisse ? » me proposa-t-elle.

Elle n'eut pas le temps de se lever qu'Ethan était déjà là.

« Emily.. Je peux te parler ? »

« Je pense qu'on a déjà parlé, non ? »

Un soupçon de colère s'entendait dans ma voix.

« Je m'en veux.. Je vois bien que tu es mal de cette situation, mais je veux que nous repartions sur de bonnes bases.. »

« Pour que tu puisses me faire mal de nouveau ? »

Il paraissait blessé de mes paroles. Son visage se durcit légèrement.

« Ce n'est pas parce que je t'ai fait mal une fois que je le referai. »

« Tu plaisantes ? Pour toi, ce n'est pas si grave que ça ? "Je t'ai fait mal une fois". Tu sais qu'aujourd'hui, après un peu plus d'un an, je m'en suis toujours pas remise ? Tu sais que moi, contrairement à toi, j'ai réellement du mal à ressentir de l'amour ? Je ne sors même plus. Je ne fais plus confiance à un seul mec. Tu m'as bousillée, tu le sais ça ? »

« Emily.. » me coupa-t-il.

« Laisse-moi finir. » lui ordonnai-je. « Je me suis barrée dans cette ville pour fuir mon passé, et le voilà qu'il revient au galop. C'est agaçant, non ? Oui, je voulais t'éviter. Je ne voulais plus jamais te revoir. Je pensais qu'après cette histoire, tu allais vivre paisiblement avec cette fille. » Je roulai des yeux et replaçai mes cheveux vaguement d'un geste de la main. « Tu m'as terriblement déçue, tu le sais ça ? »

« Désolé.. »

Cela se sentait dans le ton de sa voix qu'il était sincère. Ça le touchait ce que je lui disais. J'étais satisfaite de voir que mon discours faisait effet sur lui. J'espérais qu'il ne ferait plus jamais cela à l'avenir. Je ne souhaitais à aucune fille de subir la tromperie de son mec. C'était tellement affreux que rien que le fait d'en reparler me rendait malade.

« Tu es désolé mais ça n'arrange rien au passé. Ça n'arrange rien à tout ce que j'ai vécu suite à ça. Ça ne répare pas les cicatrices que j'ai en moi. C'est comme si mes plaies étaient toujours ouvertes et que le fait de te revoir était comme une pincée de sel au dessus de ma blessure. Cette brûlure intense qu'est le fait de te revoir me fait si mal que j'en pleure le soir même. J'ai beau essayer de trouver n'importe quel médecin, aucun n'est capable de refermer cette plaie si douloureuse. Alors oui, je souffre. Oui, tu es désolé. Mais quoi qu'il arrive, quoi que tu feras, tu ne pourras rien effacer. »

Un long silence pesant s'incrusta dans cette ambiance maussade. Tania ne nous regardait même pas. Elle se contentait de fixer une canette de soda au sol non loin de nous. Non pas qu'elle était plus intéressante que nous, mais elle devait se sentir énormément gênée d'être témoin de cette scène. Plus personne ne parla. Seuls les klaxons des conducteurs pressés et les voix des passants résonnaient dans les rues.

L'amour était à bannir.


[Chapitre 14 ! Deux chapitres publiés ce soir. J'espère qu'ils vous ont plu ! :) Bref bref. Bonne journée/nuit/soirée/matinée ! I love you so much ! ♥ Passez de bonnes vacances ! *-* N'hésitez pas à commenter et à voter mes chapitres. :) Bises. ♥]

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