Chapitre 12.2: Parle-moi

En cinq minutes à peine, j'arrivai chez les Myers. Je sonnai à la porte et quelques minutes plus tard, Mickey vint m'ouvrir.

- Salut ! dis-je en lui faisant la bise. Qu'est-ce qui se passe ?

- Code bleu, se contenta-t-il de dire.

- Holly ? Encore ? Je pensais qu'on avait réglé ce problème avant la rentrée.

- Faut croire que non. Entre. Moi, j'ai déjà déclaré forfait.

Je traversai la petite porte en bois blanc semblable à la nôtre et pénétrai dans le vestibule, suivie par Mickey qui refermait la porte. Chaque fois que j'entrais dans cette maison, je sentais comme une vague de bien être et une légère odeur de poudre pour bébé m'envahir. La décoration y était charmante, très confortable, un peu comme chez nous mais avec ce brin de fouillis qui marquait la présence d'un enfant en bas âge, incapable de s'empêcher de faire des bêtises. Au loin dans le salon, assise sur un rocking-chair, je vis la mère de Mickey, Helena Myers, en train de bercer Ron, le petit dernier âgé de trois ans.

En me voyant, elle sourit et m'intima gentiment le silence en mettant un doigt devant sa bouche. Elle n'avait plus besoin de me le dire depuis la naissance de ce petit diable. Je ne savais que trop bien ce qu'il en coûtait de parvenir à l'endormir pour l'avoir babysitté plusieurs fois avec Mickey. Je ne voyais nulle part la trace du père de Mickey. Sûrement qu'il s'était encore absenté pour le boulot.

Je suivis Mickey vers la chambre d'Holly, à l'étage. Devant une jolie porte peinte en bleu ciel avec le prénom de la jeune collégienne marqué dessus en lettres brillantes, Mickey toqua doucement à la porte.

- Holly, June est là ! On peut entrer ?

Un moment, le silence nous répondit.

- Pourquoi tu n'as pas appelé Ann ? murmurai-je. Tu sais bien qu'elle est plus douée que moi avec elle.

- Oui, mais elle était occupée aujourd'hui. Tu es notre seul espoir. Maman a déjà assez à faire avec Ronny alors, je compte sur toi.

A ce moment, la jeune fille finit par parler.

- Entrez...

Mickey fit une petite grimace avant d'ouvrir la porte.

En entrant, je trouvai Holly assise sur son lit, un énorme oreiller serré contre elle et l'air renfrogné.

- Salut, petite puce, commençai-je en m'asseyant sur le lit rebondi. C'est quoi le problème cette fois ?

Elle se contenta de serrer encore plus son oreiller.

Du haut de ses treize ans, Holly avait une imagination débordante et adorait faire quelque chose de ses jolies mains. Donnez lui un bout de tissu, des vieux cartons ou même des bouteilles en plastiques, elle vous fabriquait quelque chose de complètement nouveau avec. A son entrée au Collège, elle avait décidé de se confectionner elle-même ses vêtements.

Au début, ça ne posait pas de problème. J'aurais même dit qu'elle s'était fait un petit nom avec ses créations. Mais c'était avant qu'une sale gosse de riche de sa classe, un an plus tard, ne se moque de ses œuvres. Elle ne s'en était jamais remise et maintenant en quatrième, elle préférait se fondre dans le moule en achetant ses vêtements comme tout le monde. Je trouvais ça vraiment dommage que les remarques d'une petite idiote aient pu transformer ainsi une fille comme Holly.

Avant la rentrée, Mickey nous avait appelés, Ann et moi, à la rescousse pour qu'on l'aide à s'acheter des vêtements qui lui correspondraient. Ça n'avait pas été aisé étant donné ses goûts difficiles en matière de vêtements. Mais nous y étions arrivés, tant bien que mal.

- Allez, raconte-moi, lui dis-je doucement en essayant de capter son regard.

Les bras obstinément repliés sur son oreiller, elle se mura dans un mutisme farouche. A la maison, Holly portait toujours ses créations. Aujourd'hui, c'était une sorte de combi-short en tissu léger décorée de dentelle. C'était très joli, comme elle. Elle avait hérité tout comme Mickey de la couleur café au lait chaud de sa mère. Ses cheveux délicatement frisés encadraient son petit visage, peu à peu frappé par les affres de l'adolescence, d'un masque de boucles brunes.

Je soupirai doucement et fis un discret signe à Mickey, qui se tenait toujours dans l'embrasure de la porte, de sortir, avant de plonger sur elle et de la couvrir de chatouilles. Holly glapit de surprise avant de pousser de petits cris.

- Alors, la puce ? On fait la tête ? Dis-moi tout avant de mourir de rire !

- Non, pitié ! Arrête ! gémit-elle avec difficulté à cause des chatouillis. C'est bon, c'est bon ! Temps-mort ! Je vais parler ! Je vais parler !

- A la bonne heure ! m'exclamai-je, ravie, en la relâchant.

Holly me balança son oreiller.

- Hey !

- Ça, c'est pour les chatouilles !

Je ris sans retenue. Au moins, elle avait retrouvé de sa fougue.

- Ok, on est quitte. Maintenant, si tu me disais ce qui n'allait pas ?

Il me sembla que son visage perdit un peu de sa vitalité retrouvée mais elle ne resta pas silencieuse.

- Je déteste avoir à faire semblant, finit-elle par déclarer. Je ne me sens pas à l'aise dans tous ces vêtements. Je préfère porter ce que moi-même j'ai fait.

- Mais qu'est-ce qui t'en empêche ?

- Bah...

- Lynn ?

Elle hocha la tête.

- Elle est encore dans ta classe ?

- Non...

- Mais quel est le problème ? Je pense qu'elle a autre chose à faire que de te chercher des poux parce que tu portes tes propres vêtements qui, en passant, sont très jolis.

- Je ne suis pas la seule à qui elle a fait ça. Dès que quelqu'un essaye de se démarquer, elle débarque et elle fout la merde. Je n'ai aucune envie de finir comme ça, moi. Tu ne peux pas imaginer à quel point la vie de reclus est triste.

- Alors, il ne te reste plus qu'à porter durant le reste de ta vie des vêtements qui ne te plaisent pas et t'en accommoder.

- Hey ! Je croyais que tu étais de mon côté ?

- Je le suis et je t'encouragerai quoi que tu décides, même si je ne suis pas d'accord.

Holly s'affala finalement sur le lit.

- Qu'est-ce que tu me conseilles, June ?

Honnêtement, j'avais beau parler comme si j'en connaissais un rayon niveau problème d'adolescent mais là, je ne savais pas trop quoi dire. Je ne pouvais pas répondre n'importe quoi alors que les conséquences ne me toucheraient pas directement. Mais en même temps, elle avait l'air tellement malheureuse...

Je m'allongeai à ses côtés, fixant un point indéfini du plafond.

- Tu sais, je ne peux pas décider à ta place. Mais j'ai appris quelque chose ces derniers jours. Que si tu ne fais rien, alors rien ne changera. En agissant, tu pourrais en subir les conséquences, c'est vrai. Elles ne seront pas forcément plaisantes mais au moins, tu pourras avancer, te dire que tu peux être fière de toi....

Je marquai une pause avant de reprendre.

- J'ai toujours été fascinée parce que tu pouvais faire avec tes mains si mignonnes et je suis sûre que je ne suis pas la seule. Tu avais bien quelques copines avec qui tu aimais traîner non ?

- Ouais... Mais quand j'ai changé de look, elles m'ont laissée tomber.

- Première erreur, ma belle. Elles ont compris avant toi ce qui allait se passer.

- Peut-être...

- Entre nous, tu devrais chérir tes amis, Holly. Je suis bien placée pour savoir que ça fait mal de réaliser que tu as fini par lâcher leurs mains en cours de route.

Je sentis sa tête bouclée se tourner vers moi.

- Ça t'est arrivé à toi ?

Techniquement, je n'étais pas en âge de comprendre quoi que ce soit mais...

- Peut-être...

- Peut-être ? C'est pas une réponse, ça ! se moqua-t-elle.

- T'as raison, répliquai-je en riant à mon tour.

Nos rires mêlés emplirent la pièce jusqu'à ce que les larmes nous vinrent presque aux yeux. Il nous fallut quelques minutes pour recouvrer notre calme. Holly se retourna et s'allongea sur le vendre, les coudes sur le lit, la tête soutenue par ses mains.

- Ouais, je vais voir ce que je peux faire.

- D'accord, dis-je en me relevant. C'est bien. Ça évitera peut-être à Ann et moi des heures de shopping en ta compagnie !

- Tu rêves ! Je vous traînerai avec moi pour acheter des tissus !

- Je crois que tu as un grand frère qui est là pour ça, veinarde !

- Pas faux !

- Allez, je te laisse, petite puce. Tout ira bien.

Je laissai Holly, le visage beaucoup plus serein qu'à mon arrivée. En face de sa chambre, se trouvait celle de Mickey. J'entrai sans frapper comme j'en avais déjà l'habitude. Il était juste sur son ordinateur et trainaillais sur internet. A mon entrée, il tourna son visage vers moi.

- Alors ?

- Je m'excuse d'avance pour tout ce que tu subiras ces prochains jours.

- Hein ? s'exclama-t-il, perdu.

- Je plaisante. Je crois que ça ira pour elle. Qu'est-ce que tu fais ? lui demandai-je en m'asseyant sur son lit fait au carré.

Il était beaucoup trop ordonné pour un mec. Je lui avais déjà fait la remarque mais il me riait chaque fois au nez.

- Bof, rien de particulier. En tout cas, merci d'être venue lui parler. Vu que maman est constamment avec Ronny, elle n'a aucune autre fille avec qui parler dans cette maison. Toi et Ann êtes un peu comme ses grandes sœurs.

- T'inquiète. Et puis, ça me fera un bon entraînement pour quand Gaby arrivera aussi à cet âge. Quoique, je doute qu'elle ait ce genre de problème un jour. Je la vois déjà en futur reine de son école.

- Ne dis pas ça. Elle te ressemble plus que tu ne le crois.

- Tu penses ça, toi ?

- Ouais, mais bon, tu as le temps. Dans tous les cas, j'espère que je ne t'ai pas interrompu dans quelque chose d'important, comme une petite réunion avec quelqu'un qui habite à un jet de pierre de chez toi.

Ma gêne dut se lire sur mon visage.

- Attends, je plaisantais moi ! rit-il. Sérieux, j'ai vraiment interrompu quelque chose ? Vraiment désolé.

- Non, tu n'as rien fait. Disons que tu m'as empêché de tourner en rond comme un lion en cage dans l'attente de quelque chose.

- Qu'est-ce qui s'est encore passé ? me demanda-t-il en faisant tourner sa chaise à roulette pour se mettre face à moi.

Et je lui racontai ma journée d'hier. Ce que j'appréciais en particulier chez Mickey, c'était son calme en toute situation. Il était toujours réfléchi et prenait toujours les bonnes décisions dans tout ce qu'il faisait. Beaucoup trop mature pour son âge, lui disait-on. A la fin de mon récit, il prit le temps de bien analyser ce que je venais de lui dire.

- Ça se complique là, tu ne crois pas ? Il y a forcément quelqu'un parmi vous deux qui ne dit pas la vérité et comme ça ne peut pas être toi, c'est forcément lui.

- Je ne sais pas. Je préfère ne pas tirer de conclusion avant qu'on ait parlé de manière plus posée.

- Hmm...

Sans préavis, il se leva et enfila un blouson.

- Qu'est-ce que tu fais ?

- Bah, on va le chercher. Comme on dit, si le cheval ne vient pas à toi, alors tu devras aller vers le cheval.

- Je ne suis pas sûre que ce soit vraiment ça le dicton, Mickey...

- Peu importe, tu m'as compris.  Allez, on y va.

À Suivre...

©Tous Droits Réservés

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Au prochain chapitre: June et Mickey n'hésitent pas à aller chercher Chase mais peut-être que ce dernier pourrait leur réserver de bonnes surprises...

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J'avais juste envie de poster un chapitre en avance. C'était une bonne journée alors je vous en fait profiter. Nous découvrons la petite famille de Mickey. Vu qu'il a des airs de grand frère évidemment , il devait être l'aîné d'une famille. Ça lui va bien je trouve. Enfin, vous me le direz en commentaire 😉

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