C'est étrange comme le temps efface les moments. Vient à moi le retour des souvenirs taris ; et, indigne d'eux, presque, je les repousse affable.

C'est comme si ce retour était une dure épreuve : un renouveau soudain, une prière secrète. J'aurais voulu aimer, être aimée. Partager cet espoir débordant qui s'écoule de moi...

C'est comme si ce retour était une déception : ont-ils changé ? Ont-ils vécu ? Ont-ils grandi ? Comme si j'étais trop lâche pour comprendre que la vraie question était plutôt : comment vont-ils comprendre que j'ai changé ? Vont-ils s'apercevoir que j'ai vécu ? Vont-ils accepter que j'ai grandi ?

C'est comme si ce retour était brutal, un réveil soudain. J'émerge d'un doux rêve, et je comprends enfin, que l'idéal forgé n'est pas de bronze vêtu.

C'est comme si ce retour était une conscience. Une conscience lumineuse, vive, chatoyante, qui me guide et m'annonce que je me suis trompée...

C'est comme si ce retour était un doux regret. Je n'aime plus. J'ai aimé.

C'est comme si ce retour était un commencement. Une nouvelle vie brillante, un détachement sécant, incisif, de la toile tissée avec ferveur, toile de souvenirs embués, toile défraîchie, toile finie.

C'est comme si ce retour était une renaissance... Un printemps de verdure où pousseront les étoiles... Puisque le bleu revient, repeuplant le Soleil ; car mon cœur s'allume de poussières innombrables ; pleine de chant, de Passion, regonflée d'espérance ; il faut aimer sans cesse, après avoir aimé.