Madrid, Espagne
Estrela Griezmann

- « Il suffit que vous poussiez encore une fois et votre fille est enfin là. » Me dit le gynécologue.

Je pousse de toutes mes forces et en broyant, encore, la main d'Anto. J'ai terriblement mal partout et j'ai l'impression que ce bébé ne veut vraiment pas sortir. Puis, j'entends finalement les pleurs de ma petite princesse. Et voilà, je suis officiellement la maman d'un deuxième petit bout de chou et j'espère pouvoir être en mesure de l'aimer tout comme j'aime son grand frère.

Elle m'est déposée dans les bras et je la regarde avec émerveillement et admiration. Elle a réussi à survivre pendant neuf mois alors que j'ai sûrement mis sa vie en danger un tas de fois mais je ne savais vraiment pas qu'elle était ici.

Elle ressemble tellement à Ban quand il était né mais elle a les cheveux plus foncés que lui. Elle sera très certainement brune comme moi sauf si ses cheveux deviennent plus clairs lorsqu'elle grandira. Je caresse doucement son si petit visage pendant qu'elle crie.

- « Vous allez désirer couper le cordon, monsieur ? » Demande le gynécologue à Anto.

Il lâche directement ma main pour aller couper le cordon qui reliait le petit et vigoureux corps de ma petite Eva à mon corps.

- « Naissance de la petite Eva Griezmann le 1er juin 2020 à 01h09. » Dit-il.

Il y a un an, je tenais mon petit Ban qui n'avait que quelques jours et je préparais mon mariage. Aujourd'hui, je viens de donner naissance à mon deuxième enfant.

Ma petite princesse m'est retirée des bras pour que les sage-femmes puissent s'occuper d'elle et pour qu'elles puissent lui faire plusieurs tests. Il faut voir si tout va bien parce que je n'ai pas pris les précautions qu'il fallait pendant la grossesse.

Antoine quitte la salle et le gynéco s'occupe des dernières choses.

- « Alors, heureuse malgré la surprise ? » Me demande-il.

Vu qu'il n'est que 1h du matin et que mon gynécologue est parti en vacances, il a fallu que ce soit le gynécologue de service qui s'occupe de mettre au monde ma petite Eva mais toutes les informations relatives à l'accouchement et l'après seront transmises à mon gynéco pour qu'elle puisse me suivre par après.

- « Oui. » Dis-je en souriant. « Je suis encore sous le choc mais je suis heureuse, j'espère juste pouvoir aimer cet enfant. »

C'est la seule chose qui m'inquiète vraiment. J'ai vraiment peur de regarder Eva comme une étrangère et de ne pas savoir l'aimer parce que je n'ai pas été préparée mentalement à l'accueillir.

- « Ne vous inquiétez pas. » Me dit-il. « Vous allez finir par l'aimer comme chaque mère aime ses enfants, il vous faudra juste du temps pour apprendre à la connaître, une chose que vous n'avez pas pu faire pendant la grossesse. »

Et nous allons devoir annoncer la nouvelle à nos familles et surtout, nous allons devoir expliquer tout ceci à Mia et Ban.

- « Mais je vais vous laisser vous reposer un peu et puis, je viendrai dans votre chambre pour tout vous expliquer. » Me dit-il. « Pendant ce temps, un pédiatre va examiner la petite Eva en profondeur pour s'assurer qu'elle est vraiment en bonne santé. »

J'espère vraiment qu'elle va bien.

Je suis ensuite emmenée dans une chambre où Anto m'attendait déjà, il prend place à côté de moi sur le lit et il prend son téléphone. Il faut maintenant que nous prévenions tout le monde. Il appelle sa mère et met le haut-parleur pour que je puisse entendre la conversation.

- « Chéri. » Dit-elle en répondant. « Alors qu'est-ce qu'Estrela a ? » Demande-t-elle.

J'arrive à entendre de l'inquiétude dans sa voix.

- « Elle va bien maintenant. » Lui répond-il.

- « Mais qu'est-ce qu'elle a ? »

- « A 01h09, tu es devenue grand-mère pour la cinquième fois. » Lui dit-il.

Elle ne dit rien pendant un instant et puis, elle se met à pleurer.

- « Mais... » Commence-t-elle à dire.

- « J'ai fait un déni de grossesse, Isabelle. » Lui expliquais-je.

Elle se met à pleurer de plus en plus et ça me brise le coeur.

- « Oh mon Dieu ! Mais quelle belle surprise. » Dit-elle. « Et le bébé va bien ? »

- « Pour l'instant, elle est en train de subir un tas d'examens mais lors de l'échographie, tout semblait aller bien. »

- « C'est une fille ? » Demande-t-elle.

- « Une petite Eva. » Lui répond Antoine.

- « Je suis tellement heureuse pour vous. » Nous dit-elle.

Puis, Antoine lui demande si elle pourrait rester jusqu'à 7h avec les enfants et qu'il passerait à cette heure-là pour réveiller Mia et l'emmener à l'école. Il veut lui expliquer les choses petit à petit avant de la confronter avec sa nouvelle petite soeur.

Ensuite, nous avons appelé mes parents. Il a fallu que nous insistions à peu, ils devaient dormir et c'est ma mère qui a finalement répondu. Elle s'est mise à pleurer comme Isabelle et je me suis également mise à pleurer. Ça m'a tellement brisé le coeur et elle m'a dit qu'elle essayerait d'être là le matin avec mon père et mes frères.

Nous avons envoyé un message à Bella. Nous voulons laisser dormir Théo et Bella parce qu'ils ont besoin de dormir pour ne pas craquer pendant la journée. Ils viendront quand ils pourront parce que je sais que c'est loin d'être facile de devoir s'occuper de jumeaux.

Le gynécologue entre dans la salle en souriant et il s'approche d'Anto et moi. Il prend une chaise et s'installe près de nous pour pouvoir nous expliquer ce qu'il s'est passé ces neuf derniers mois.

- « Alors comment vous sentez-vous maintenant ? » Demande-il en souriant.

- « Je suis très fatiguée et j'ai quand même assez mal. » Lui dis-je.

L'après est souvent assez dur. J'ai vraiment mal à partir du bas de mon ventre et je me souviens que je ressentais la même douleur après avoir donné naissance à Esteban.

- « C'est tout à fait normal. » Dit-il.

- « Comment est-ce possible que je n'ai jamais su que j'étais enceinte ? » Lui demandais-je.

Je veux juste qu'il m'explique la situation parce que j'ai vraiment du mal à croire que ma petite Eva ait grandi dans mon ventre sans que je ne le sache.

- « Normalement vers les premières semaines de grossesse, les premiers symptômes commencent à apparaître comme les nausées, la fatigue et les envies de manger mais chez certaines femmes, un énorme traumatisme surgit à ce moment-là. » M'explique-t-il. « Si mes calculs sont juste, vous êtes tombée enceinte fin août, voir début septembre et vers novembre, vous avez dû traverser une période douloureuse ou terrible. Votre corps a alors décidé de vous cacher le bébé pour vous protéger. »

Et c'est également à partir de septembre que j'ai commencé à ne plus me sentir totalement heureuse à Madrid. Peut-être que ma grossesse est liée à ça et que c'est ce qui a amplifié ce sentiment de malheur. Mais je pense que l'accident d'Antoine et son coma ont ce qui a provoqué mon déni total de grossesse.

- « Votre cerveau voulait vous protéger et il a fait en sorte que votre corps vous cache la grossesse. Vos règles ont toujours été présentes, votre ventre n'a pas grossi et le bébé bougeait très peu pour que vous ne sentiez rien. Votre corps s'est arrangé à l'intérieur pour que le bébé puisse grandir normalement. » M'explique-t-il.

- « Mon cerveau voulait me protéger ? » Demandais-je surprise.

- « Le déni de grossesse est assez compliqué mais tout est psychologique. » Me dit-il. « C'est votre cerveau qui a tout fait pour que vous ne découvriez rien et c'est un mécanisme de défense. »

- « Mais est-ce qu'on aurait pu le découvrir plus tôt ? » Demande Antoine.

- « Vous m'aviez dit que depuis un certain temps, vous aviez régulièrement mal au ventre. » Me dit le gynéco. « Je pense qu'il s'agissait des fausses contractions et donc, votre corps commençait à se préparer pour l'accouchement. Si à ce moment-là, vous aviez été chez le médecin, vous l'auriez su mais ça aurait été quand même assez tard. »

Dans tous les cas, j'aurais découvert assez tardivement que j'étais enceinte mais j'aurais pu me préparer mentalement à recevoir ma petite Eva.

- « Mais pendant les neuf mois, vous avez sûrement senti des choses sauf que vous ne les avez jamais associés à une grossesse. » Me dit-il. « Le bébé bouge quand même mais très peu et vous l'avez sûrement sentie mais vous avez pensé que votre ventre gargouillait et que vous aviez faim. Vous avez sûrement mangé plus que d'habitude et vous avez sûrement pris quelques kilos en plus. »

J'ai eu tout ça mais jamais, je n'ai pensé que j'étais enceinte. Si c'était le cas, j'aurais été chez le gynéco pour vérifier.

- « Mais dans tous les cas, vous n'avez jamais pensé que vous êtiez enceinte et c'est la caractéristique principale du déni total. » Me dit-il. « Et maintenant, il ne vous reste plus qu'à apprendre à connaître cette petite. »

Et j'ai tellement peur de ne pas pouvoir l'aimer.

- « Pour les premiers jours, je vous conseille vraiment d'être entourée par vos parents pour qu'ils puissent vous aider et forcez-vous à passer du temps avec Eva, même si vous avez l'impression que c'est une étrangère. » Me dit-il. « Comme ce n'est pas votre premier enfant, vous finirez par penser à ce faisait votre premier né à son âge et vous verrez que vous finirez par l'aimer tout autant. »

Donc, je vais devoir me forcer à passer du temps avec Eva pour que j'apprenne à l'aimer, je pense pouvoir faire ça et puis, je suis sûre que ma mère m'aidera à l'aimer, tout comme Isabelle. Elles aiment toujours directement leurs petits-enfants et je pense qu'elles pourront m'aider.

- « Il faut juste que vous prenez votre temps et que vous ne stressez pas. » Me dit-il. « Les femmes qui font un déni de grossesse prennent toujours un certain temps à accepter ce petit bout de chou et surtout, ne culpabilisez pas. »

Je culpabilise déjà de ne pas avoir pu voir que j'étais enceinte alors que c'était évident.

- « Votre cerveau a vraiment tout fait pour que vous ne le sachiez pas. »

Mais c'est quand même mon corps et il s'est assuré que je ne découvre pas que je portais la vie en moi.

- « Mais il a su protéger votre fille parce qu'il y a beaucoup de cas où le bébé meurt peu de temps après l'accouchement ou les femmes font une fausse-couche pendant la grossesse ou parfois même, les femmes donnent naissance à enfant mort-né. »

Je pense que si Eva était morte-née, je n'aurais jamais pu me regarder dans le miroir et si elle vient à mourir dans les prochaines heures, je ne pourrais pas supporter de vivre alors que j'ai tué mon bébé.

- « Je viens de parler avec le pédiatre et jusqu'à maintenant, elle semble être en très bonne santé. Elle va vraiment bien mais nous allons continuer à suivre sa santé de très près pour nous assurer qu'elle va vraiment bien. »

Je ferais tout pour qu'elle vive le plus longtemps possible. Elle ne mérite pas de mourir parce que mon cerveau voulait me protéger et parce que je n'ai pas été capable de voir qu'elle grandissait en moi.

Quelqu'un toque à la porte et la sage-femme qui me suit depuis le début entre en tirant un petit berceau. Elle nous sourit et elle arrête le berceau près du docteur Jimenez.

- « Votre petite Eva est en très bonne santé et elle est vraiment très courageuse. » Dit-elle en nous souriant. « Je vais vous laisser et si jamais vous avez besoin d'aide, il suffit de m'appeler. Je passerai dans quelques heures pour vous aider à la nourrir et la changer. »

Je suis vraiment contente qu'elle puisse venir nous aider parce que je vais vraiment en avoir besoin. Elle quitte la chambre et puis, le docteur fait de même après s'être assuré que nous allons bien. Anto se lève du lit et il regarde longuement la petite Eva qui dort paisiblement. Je me mets au bord du lit et je la regarde également. Elle ressemble définitivement à Ban.

- « Elle ressemble tellement à Ban. » Dis-je.

- « Et je trouve qu'elle a quelques petites ressemblances avec Mia. » Me dit-il.

Après quelques minutes à simplement la regarder, Anto retire son t-shirt et finit par la prendre délicatement. Il la tient fermement dans ses bras et il la colle contre son corps.

- « Soit la bienvenue Eva. » Dit-il en la regardant.

Je m'approche de lui et la touche doucement. Elle semble si fragile et pourtant, je sais qu'elle est l'être la plus courageuse que j'ai rencontré. Elle s'est battue tous les jours pour rester en vie et pour venir au monde. Je pense qu'elle voulait vraiment nous rencontrer.

« L'amour d'un père est plus haut que la montagne. L'amour d'une mère est plus profond que l'océan. »

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Voilà, voilà, j'espère que ce chapitre vous a plu. C'était le tout premier chapitre que j'avais écrit de ce tome-ci mais pour finir, j'ai rien gardé du chapitre original, j'ai limite tout réécrit 🙄😭
Vous avez finalement quelques explications sur le déni de grossesse de notre Estrela et la petite Eva est finalement née. Cette journée du 1er juin va s'étaler sur plusieurs chapitres parce que je tiens encore à mettre en avant quand Mia et Ban rencontrent Eva et quand la famille entière débarque.
Je vous dis à bientôt pour la suite 😘