XVI
Je commençais presque à trouver mon travail amusant. Voir les marionnettistes se tirer dans les pattes et être le fil qui s’emmêle au fil voisin. Être le fil de nylon, droit, tiré, muet, de matière impossible, créé par les tirants.
Je ne réfléchissais plus ni ne sentait la tension qu’ils passaient en moi. Je faisais mon labeur sans en peser l’effort.
À force, j’avais dû mourir. Avoir laissé mon âme en cours de route pour plonger mon corps autonome au service d’il ne sait qu’elle but futile.
Toujours est-il que mon conscient en était toujours prisonnier et que j’entendais avec une certaine perplexité les mots sans sens des nobles sans noblesse.
- …la source de tous les maux. L’origine même de notre non-mort, bercée par les manigances de mon frère. Croyez-bien que cela m’attriste au point le plus sensible de mon misérable être. J’ai…
- Dite-moi ou le trouvez, l’ai-je interrompu. Je n’ai pas besoin de vos justifications et ce ne sont pas les trois gardes qui traînent leurs oreilles aux portes qui se risqueront à quoique ce soit.
- Comprenez pourtant que c’est plus compliqué que ça. Il s’agit d’une épidémie. L’infection se propage. En éliminer l’instigateur n’est pas une solution suffisante.
- C’est pourtant suffisant pour que vous héritiez de sa part de pouvoir. Non ?
- Qu’insinuez-vous là ?!
- Je vous l’ai dis ; je me fous de vos desseins.
L’air un peu gêné de celui qui sait qu’on sait.
- Bon. Il s’agit du manoir tout entier. Par le feu, ou ce que vous jugerez le plus efficace. Pas un survivant.
- Quand ?
- Au plus vite. La nuit.
- On se revoit quand vous serez la seule tête de la ville alors.
Il n’a pas répondu.
Je l’ai entendu encore qu’il ruminait :
- La politique… quelle plaie !
Je préférais ça ; quand ils comprenaient que j’en avais rien à carrer. Ça me faisait gagner du temps à perdre.
*
* *
Et puis j’en ai eu marre du travail. Aussi vite que l’entrain m’était venu. Il est passé et m’a laissé vide de toute envie. Je n’ambitionnais d’un coup plus que l’ennui. Quel mal à l’ennui ? Il a bougé le cul de tous les hommes et leur à fait construire des cités.
Je le prendrai de face et me glisserai à son côté. Qu’il me teste s’il le veut, je savourerai ses secondes au goût de patates amères lentement cultivées.
Une maison. Un jardin.
Oui.
Et pourquoi pas l’ancienne ?
Le grand raid attendrait, je me rendais à la campagne. Celle qui m’étoufferait de ses visions d’avant.
*
* *
Je traversais la ville, visant les écuries.
Il faisait chaud aujourd’hui. Des gosses couraient et disparaissaient dans le mouvement de gens.
Je m’en suis pris un dans les jambes. Ha! ils avaient bien raison de ne pas regarder où ils allaient.
Le ciel était parfait pour un voyage en selle.
De nouveau je me suis pris quelqu’un dans l’épaule. Peut-être c’était moi qui ne regardais pas après tout.
La foule était dense et avait la bougeotte. Un nuage gris planait au loin.
Encore quelqu’un qui passait sans regarder. Sa caisse m’a poussé dans le dos. Cette fois on ne pourra pas dire que c’est moi.
J’avançais au ralenti.
Bousculé ! Encore ! Bon sang !
Je voyais l’écurie.
Une jambe dans mes chevilles, j’ai bien failli manger la boue !
Les chevaux étaient devant moi.
Là encore !
C’est bon. J’en avais un. Je partais.
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