V
Voilà plusieurs longs mois que les habitants de Kievag vivaient, plus que de coutume, dans l’angoisse. Les rumeurs d’une malédiction pressaient tous les cœurs.
Certains disaient que quand le vent soufflait fort, on pouvait y entendre les pleurs d’une fillette. Elle faisait, de ses sanglots, pourrir les fruits et la foi des hommes.
De plus en plus l’entendait dans le froid du soir.
On parlait du rejeton de quelque terrible sorcière, ou encore d’un démon caché sous les traits d’un enfant.
Un jour alors, un valeureux héros à la recherche de gloire annonça qu’il partirait mettre fin au fléau qui faisait pleurer le vent.
Après s’être attardé deux semaines en ville afin de profiter de tout ce que lui conférait son statut de héros, pourrait-on le croire, déjà vainqueur, il partit, épée au clair, vers les collines et la vieille forêt.
Une fois loin des regards du peuple, il ne rengaina pas sa lame, car son cœur n’était pas rassuré. Bien sûr, la divine protection était de son côté. Mais mieux fallait-il y mettre aussi toutes ses chances.
Il ne comptait pas aller dans les collines, car personne à Kievag n’est sans savoir qu’il y rôde les morts qui marchent.
Au soir venu, il se trouvait dans la forêt et il y camperait sans avancer deux jours encore.
À l’aube du troisième jour, il entendit les pleurs redoutés. Il pria et, se sentant empli de bénédictions, se lança tête haute entre les arbres secs.
Les battements agités dans sa poitrine s’amplifiaient comme les pleurs se faisaient plus proches.
Là, au milieu d’une minuscule clairière brune, il vit la fillette. Mais il ne se laisserait pas berner par la sorcellerie dans ses yeux. Le tranchant de son fer allait faire couler le sang noir de la bête déguisée. Il hurla des mots de puissance et avança prudemment vers le démon, le conjurant de mourir sur le champ. La petite fille poussa alors des cris en reculant. Elle n’osait pas se retourner et courir, car alors elle se serait fait rattraper. Après une seconde d’hésitation, le héros se mit à accélérer puis à charger en secouant son arme. Il n’eut le temps de voir ce qui surgit de sa droite et qui le projeta plusieurs mètres plus loin.
Le mort avait entendu les cris de la petite fille et avait couru sans regarder où il marchait, dans leur direction. Il était maintenant accroupi sur le héros et arrachait des lanières de sa peaux tandis qu’il se débattait comme le font les mouches quand on arrache leur pattes.
Bientôt il ne se débattait plus, mais le mort tournait la tête de tout sens. Il fallait partir d’ici. Les gens de la ville voulaient les tuer.
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