V

            On m’avait assigné six gardes avec lesquelles j’ai dû attendre une semaine, cloitré au manoir. Ceux-là faisaient dans leur froc à chaque fois qu’on évoquait les non-morts. Je doutais qu’ils me servent beaucoup quand il faudrait passer à l’action.

Une heure avant le coucher du soleil, un postier haletant est venu nous prévenir que les non-morts s’étaient enfin décidés à attaquer un village alentour.

Je n’ai cure de la mort. Mais ce qui ce trouvait devant nous n’en était pas. C’était bien pire ; la damnation. On dit que ce sont juste des cadavres qui marchent, de la chair animée par de la vieille magie. Mais j’ai vu des non-morts qui, relevés dans des nécropoles lointaines, ont rampé sur des lieues et des semaines pour rejoindre ce qui fut la maison de leur famille. J’ai entendu, avant de trancher la tête d’un malheureux corps putréfié, dans le murmure écœurant de ce qui était une voix, les intonations d’un prénom de femme.

Je n’ai cure de la mort mais pas de ce qui se trouvait devant nous. Car ce qui marchait là-bas sans autre but que de survivre, c’était ce que je suis. De la chair animée par une vie qui ne sait plus. La respiration d’un noyé.

Les non-morts ne sont pas difficile à éliminer, mais on ne peut pas se laisser mordre, même griffer. Le germe ronge alors doucement la vie et à la mort, le cadavre se relève.

Les habitants se sont tous enfuit en voyant les zombies arriver. Cette fois, pas un abruti n’a voulu jouer les héros. Une bonne chose, il n’y aura pas de ménage à faire.

Nous avons déboulé sur le village des gueux et mis à feux les habitations, car le feu est le seul moyen efficace contre ces abominations. J’ai chargé un soldat d’aller saigner les bêtes que les paysans n’avaient pas prit avec eux et j’ai conduit les cinq autres directement sur la horde des morts qui marchaient.

Ç’a été une boucherie. Comme à chaque fois que la vie joue avec ce qui devrait être mort. On ne peut tuer ce qui ne vit plus. Tout ce qu’on peut faire, c’est découper au maximum ce qui est susceptible d’encore trop bouger pour attaquer. Plus un bras attaché à un tronc. Plus un doigt à compter sur une main.

La moitié des soldats ont vomi à peine le travail entamé. Ils sont moins fiers lorsqu’ils ne sont pas montés sur leurs longs membres de métal qui les mettent à l’abri, à dominer les foules.

Un d’eux est mort et a été découpé avec le même soin que ses agresseurs.

Nous avons rassemblé les corps, d’hommes et d’animaux, les avons posés sur un grand bûcher que les poutres poussiéreuses du village alimentaient. Nous y avons également jeté nos vêtements ; la mort est tenace.

J’ai fais s’aligner les cinq soldats restant pour inspecter leurs blessures. Deux étaient profondément coupés. Je les ai fais s’avancer et ai ouvert la gorge du premier. L’autre a compris et a essayé de s’enfuir. J’ai gueulé aux trois derrière de faire mur et ma lame lui à montré le chemin du bûcher. Pas de risque à prendre.

Les trois ont détalé direction le château sans oser demander de vêtement. Ils ont voulu regagner leurs montures mais j’avais pris la peine de m’en occuper, histoire de leur épargner les hémorroïdes que leur selle leur aurait offertes. Question d’habitude ; en générale, les hommes ont du mal à brûler leurs propres chevaux.

Je suis resté à contempler les flammes.

Le feu est-il vivant ? Pourquoi pas. Il se nourrit, se propage, meurt. Peut-il éprouver quelque-chose ? Quoiqu’après tout, ça ne semble pas nécessaire à la vie.

Il est si différent de la vie que nous subissons. Il ne semble se préoccuper de rien d’autre que de danser. Peut-être est-ce là la forme de vie la plus primitive, ou la plus évoluée. Il y a si peu de différence entre ces deux opposés.

Après tout, si nous évoluons, c’est simplement que nous n’avons pas le choix. Nous tentons de rendre tout tellement facile qu’en faite nous ne cherchons qu’à redevenir cette flamme qui ne pense qu’à danser dans le présent, sans se soucier de rien.

Pourquoi avoir voulu évoluer alors que nous étions cette flamme, ces animaux si tranquilles ? L’ennui peut-être. Oui, l’ennui. Nous n’acceptons pas de nous ennuyer. Alors nous remplaçons l’ennui par le souci d’évoluer, d’évoluer pour pouvoir à nouveau s’ennuyer.

Cette vie n’a aucun sens. J’aimerais connaître autre chose que cette boucle stupide. J’aimerais ne plus me poser de question et juste danser, comme cette flamme.

Je l’ai caressée, elle m’a enlacé. Je crois qu’elle aurait dû me faire mal, je me souviens à peine. Ma peau a noirci. Son contact ne me faisait rien. Sa danse si.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top