Chapitre 4 - Hëna
Il était tard, quand Hëna décida de se dégourdir les jambes dans les couloirs de l'internat après avoir passé l'après-midi et la soirée à « travailler ». Enfin, l'excuse du travail, c'est ce qu'elle répétait à Mélodie qui lui demandait qu'elles passent du temps ensemble, et insistait pour qu'elle l'accompagne en soirée. Elle avait plutôt réfléchi sur un plan pour détruire le meurtrier de Pandore, et lui faire regretter chacun de ses actes. Elle s'était surprise à sourire en songeant à des manières dont elle pourrait le torturer. Mais elle voulait prendre son temps, que tout soit bien fait. Alors elle gardait ses idées dans un coin de sa tête pour les laisser mijoter et s'assurer qu'elle sera plus que prête lorsqu'elle attaquera.
Elle décida donc de faire quelques pas dans les couloirs, de s'y promener, de bouger un peu pour ne pas se laisser atteindre par la faiblesse due au manque d'activité physique. Lorsqu'elle entendit du bruit derrière l'une des portes, elle repensa à la proposition de Mélodie, se doutant que la fête devait alors se faire dans cette chambre. N'ayant aucun contrôle sur ses actions, malgré l'hésitation, elle frappa à la porte et recula légèrement pour attendre qu'on l'ouvre. Un garçon le fit, et Hëna se demanda en plissant les yeux s'il avait réellement les cheveux bleus ou si c'était la lumière qui se reflétait sur des cheveux noirs.
— Hëna ! Je ne m'attendais pas à te voir ici ! s'exclama le jeune qui tituba en arrière pour la laisser entrer.
— Oui, moi non plus, je ne m'attendais pas à me voir là, répondit-elle en entrant lentement dans la pièce remplie de monde.
Hëna se demanda si cela était même possible de caser tant de gens dans les chambres de l'internat qui n'étaient pas si grandes que cela. La musique était forte, et les cris aussi, ce qui surprenait Hëna car ce genre de soirée n'était pas autorisée habituellement, encore moins si tard.
— Pourquoi est-ce que personne n'a interdit votre soirée ? demanda-t-elle en parcourant du regard la pièce bondée.
— Tu fais face à Kaïs, chérie, le plus convainquant des manipulateurs. Les surveillantes sont les plus faciles à persuader, ajouta-t-il en tournant sur lui-même de manière spectaculaire.
Ses manières firent acquiescer Hëna avec hypocrisie, qui s'efforça de ne pas lever les yeux au ciel, puis elle essaya de trouver Mélodie du regard. Elle parvint alors à la remarquer en cherchant ses cheveux bleus – bien plus clairs que ceux de Kaïs, mais elle comprit qu'elle était trop occupée à embrasser Jess, penchée sur lui et ses mains perdues dans ses cheveux. Hëna se retint de laisser s'exprimer sa colère par un long soupir, et Kaïs qui le remarqua plaça sa main sur sa taille, en murmurant :
— Si tu veux je peux t'occuper, moi aussi.
— Lâche-moi, tu peux toujours rêver, répliqua-t-elle en se détachant violemment de lui.
Elle n'était pas restée deux minutes qu'elle brûlait déjà d'envie de mettre le feu à leur ridicule salle des fêtes. Elle ferma ses poings du plus fort qu'elle le put pour ne pas céder à sa colère. Elle fit alors demi-tour, direction la porte, mais dû s'arrêter lorsque Liv, la meilleure amie de Pandore attrapa son bras.
— Il faut qu'on parle, déclara-t-elle d'un ton cinglant.
— Pas maintenant, je m'en vais.
Elle quitta alors la chambre qui s'était emplie d'une chaleur et d'une odeur insupportables, et retrouva le calme des couloirs, elle s'apprêta à fermer la porte, mais Liv sortit avant qu'elle ne puisse le faire. La blonde se mit à ricaner, probablement fortement alcoolisée, et elle planta ses yeux bleus dans ceux d'Hëna, la tenant par le bras pour la forcer à rester.
— Tu n'as pas idée d'à quel point l'absence de Pandore me fait mal, lança-t-elle avec agressivité. Aucune idée !
— Ok, et tu penses que tu es la seule à souffrir ? répliqua Hëna en retirant son bras de sa poigne d'un coup sec. Pourquoi tu me parles comme si c'était moi qui l'avais tuée ?
Hëna recula, mais Liv avançait avec un air menaçant et amusé plaqué au visage. Hëna sentit son cœur s'emballer. Elle n'avait aucunement peur d'elle, mais plutôt de ce qu'elle pourrait lui faire si elle s'emportait. Elle n'avait pas vraiment envie de le faire quand elle pensait à mettre les bâtiments en flammes, elle n'avait pas envie de blesser Liv d'un accès d'émotions.
— Je te vois faire ta vie, sécher des cours, jouer à la victime comme si t'avais mal. Je te vois pleurer en classe, prétendre en avoir quelque chose à faire. Comme si tu étais triste qu'elle soit morte, cracha Liv en mimant quelqu'un qui pleure.
— Tais-toi.
— Tu n'as aucune idée de ce que ça fait de voir sa meilleure amie partir !
— Elle est morte sous mes yeux !
— Oui, c'est ça, fais semblant d'en avoir quelque chose à foutre.
Les yeux d'Hëna étaient plongés dans ceux de Liv, et elle se mit à la pousser avec force. Liv recula et manqua de tomber, tenant à peine sur ses jambes fébriles, mais elle ne se laissait pas atteindre :
— Toute sa vie tu l'as fait souffrir, t'as tout fait pour que sa vie soit un enfer ! J'espère que tu mourras toi aussi.
— Sale folle. Va brûler en enfer.
— Pour t'y retrouver ? Non merci.
— Qu'est-ce que je t'ai fait au juste ?
— Tu as détruit ma meilleure amie. Lentement, en y prenant du plaisir. Tu l'as détruite jusqu'à sa mort. Et maintenant, tu pleures parce qu'elle te manque.
Tant de colère. Elle le savait, Liv avait les mots juste et c'était ce qui fit le plus de mal à Hëna. Elle sentait son sang prendre feu, elle était tellement dépassée par toute cette rage, que des larmes coulèrent de ses yeux, ce qui arracha un rire condescendant à Liv. La honte l'assena, et elle eut envie de s'emporter, de hurler, de faire exploser tout ce qui l'entourait.
— Oui, pleure, je te regarde, cracha Liv, transformée par la cruauté.
— Tu n'as aucun droit. Tu ne peux pas me dire tout ça, tu n'as aucune idée de ce que je ressens pour Pandore. Tout le monde peut être triste. T'es complètement stupide.
Liv s'approcha pour tenter de frapper Hëna, mais celle-ci fut plus rapide et la poussa avec force, jusqu'à ce qu'elle tombe au sol, le souffle coupé par la chute. Liv se mit à lui sourire d'un air machiavélique, puis à hurler à l'aide. Des étudiants sortirent en trombe de la chambre de Kaïs, pour voir ce qu'il se passait. Choqués de la scène, ils dévisagèrent Hëna, dont le visage était déformé par la colère. Hëna quitta alors ce doux tableau, le menton levé, ses talons claquant sur le sol, et ses cheveux rouges frappant contre son dos. Ce qu'ils ne savaient pas encore, était que ce n'était que le commencement.
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