Chapitre 15 - Xan


Je fus réveillé.e par fracas, ma colocataire également, par des tambourinements à la porte. Lorsque je me levai pour ouvrir, encore à moitié endormi.e, je fis face à deux filles, dont Pandore, portant maladroitement un garçon et Hëna derrière qui semblait paniquée. Je fermai les yeux, pris une grande inspiration et les laissai entrer.

Je leur dis d'installer le garçon n'importe où, qu'en deux minutes tout serait réglé.

— Je suis vraiment désolée de te réveiller pour ça, répétait Pandore.

— Ce n'est pas grave, vaut mieux cela qu'il souffre.

— Tout est de ma faute, dit Hëna. Je suis désolée.

— Excuse-moi, tu es... ? Demanda Pandore à ma colocataire.

— Fleur. Ne vous étonnez pas si je me rendors.

En quelques instants, les saignements du garçon cessèrent, et les filles poussèrent des soupirs de soulagement. Je leur demandai alors de sortir et me laisser dormir, qu'ils auront très bien l'occasion de me raconter ce qu'il s'est passé le lendemain. Une fois derrière mes murs, j'entendais Pandore et Hëna se disputer encore, et le garçon qui semblait perdu. Je me dis que c'est dans ces moments que j'aurais aimé avoir le pouvoir d'Orion et en un regard comprendre tout ce qu'il se passe.

Mais ce n'étais pas le cas alors j'essayais de retrouver le calme pour me rendormir plus paisiblement.

Le lendemain, mon réveil sonna, me trouvant dans un brouillard difficile à dissiper. Ma colocataire était déjà debout en train de se décider sur la tenue qu'elle mettrait, sa lampe de chevet allumée. Alors je me forçai à m'asseoir, et me motivai en me disant que je verrai Pandore et Hëna pour essayer de comprendre ce qu'il s'est passé la veille. Ma colocataire en me voyant me réveiller me demanda :

— C'était qui, hier ? Pandore et Hëna ?

Personne hier ne s'était présenté à elle, et pourtant elle savait leurs prénoms. Ce n'était effectivement pas surprenant qu'elles soient si populaires que tout le monde connaissait leur nom. Mais je ne m'y attendais tout de même pas.

— Oui, c'était elles. La fille avec Pandore doit être sa meilleure amie, elles sont souvent ensemble, et le garçon je n'ai pas trop fait attention à qui c'était.

— Mais qu'est-ce qu'il s'est passé hier ?

Je haussai les épaules avant de me rendre dans la salle de bain pour prendre une douche et m'habiller. La réponse à cette question j'espérais l'obtenir ce jour-là.

Alors je pris mon petit déjeuner à la cantine rapidement avant de me rendre dans la salle de notre premier cours, Pandore y était en avance avec son amie, et je les rejoignis.

— Vous allez me raconter ce qu'il s'est passé cette nuit ?

Les filles échangèrent un regard, l'amie de Pandore acquiesça, et Pandore se leva en appuyant ses mains sur la table. Elle me mena alors dans le couloir vide, et elle s'appuya de côté contre le mur, dégageant une odeur de cerises.

— Liv et moi étions en train de discuter dans le couloir de l'internat, on rentrait de la bibliothèque pour aller dans notre chambre, et avant de rentrer elle me racontait quelque chose. Donc on est restées dans ce couloir deux minutes, suffisamment pour voir Hëna arriver avec son « ami » Kellan.

Je pouvais ressentir une forme de colère, ou du moins de rancœur, chez elle, mais décidai de ne pas y prêter attention. Je la laissais parler sans rien dire.

— Et ils se sont embrassés, mais Kellan a fini par tomber dans les escaliers donc on est venus l'aider.

— Mais... Ok. Etrange.

— Je sais. Mais bon. Tout va mieux, tu l'as aidé.

Je plissai les yeux, sceptique. Mais leur histoire n'était pas la mienne, alors je n'avais rien à dire. Encore une fois j'aurais apprécié avoir le pouvoir d'Orion. Peut-être que j'aimais les ragots finalement. Je réprimais un sourire à cette idée. Pandore et moi retournâmes à l'intérieur, et je sortis mes affaires pour m'avancer sur des devoirs.

Quand Orion arriva, presque en retard, je lui dis que l'histoire entre Hëna et Pandore était trop bizarre et il rit en me demandant depuis quand je m'intéressais aux potins. Il me dit qu'il tenterait de se renseigner dessus.

A la fin de la journée, le directeur fit un discours, il avait réuni tous les étudiants dans le hall et parlait au micro :

— Chers étudiants et étudiantes, j'espère que cette rentrée se passe bien pour vous. Je tenais à prendre la parole sur l'avancée de l'enquête qu'il y a eu précédemment, et la pause que vous avez eue la semaine dernière. Vous n'avez plus à vous en faire, vous êtes parfaitement en sécurité. Nous sommes parvenus à trouver, comprendre et éloigner le sujet. Vous pouvez désormais vous concentrer sur votre santé, bonheur, et sur vos études. Nous comprenons tous à quel point cela peut être difficile de traverser un tel moment, et vous êtes soutenus. Nous rappelons qu'il y a des psychologues gratuits mis en place à l'infirmerie si vous avez besoin d'une aide professionnelle ou juste de parler. Sur ce, nous vous souhaitons une bonne soirée à tous.

Et c'était tout. M. Briggs s'en alla sous les applaudissements des étudiants. Je me tournai avec un sourire vers Orion :

— Croit-il ce qu'il dit ?

— Oui, me répondit-il avait la même expression au visage. Il en est persuadé, et l'atmosphère générale est d'autant plus détendue.

— Bon, faut croire que nous pouvons leur faire confiance.

Je ne savais pas si moi-même je croyais à ce que je disais. Mais peut-être qu'il serait bon pour nous tous de cesser de s'inquiéter quelques temps. Orion opina du visage, et je décidai de quitter le hall où il y avait trop de gens pour me trouver une place à la bibliothèque. Dehors, le temps automnal, bientôt hivernal, était frais, et il y avait de moins en moins de monde dans les cours extérieures, nous étions tous entassés dans le hall, les couloirs ou la bibliothèque. Le seul endroit pour trouver du calme était donc soit chez moi soit dans la bibliothèque.

Orion vint avec moi, et nous nous installâmes à une table et sortîmes des cahiers, feuilles et livres de cours, ainsi que des stylos. Je m'apprêtai à travailler, réviser pour les examens qui arrivaient, mais Orion fit une pause et me demanda :

— Est-ce qu'il y a quelque chose que t'aurais aimé dire à ton ravisseur ?

Je n'en avais aucune idée... Je réfléchis un instant en sentant le regard d'Orion se poser sur mon visage et m'étudier quelques secondes. Je finis par dire :

— Je suis content.e de ne pas avoir eu le temps de lui parler. En réalité je n'ai rien à lui dire. A part qu'il m'a changé.e pour toujours, et peut-être que c'est pour le bien, peut-être que ça me permettra d'avancer une bonne fois pour toutes.

Le mouvement de ses lèvres m'indiqua qu'il s'apprêta à répondre quelque chose, mais je le coupai :

— Et non je ne suis pas optimiste, j'essaie seulement.

— Tu peux être fier.e de toi, tu es très fort.e.

— Je n'ai vraiment pas l'impression de l'être.

C'était comme si à chaque fois que je tentais de poser des briques pour construire un mur, il s'effondrait. C'est comme si lorsque j'avançais d'un pas je reculais de plusieurs. Et je n'avais pas le temps de respirer, dans cette longue et profonde noyade.


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