Chapitre 11 - Xan
Orion et Xan arrivèrent sur la scène lorsque mon corps commençait à s'éteindre, tombant lentement en cendres dans l'humidité de cette nuit d'hiver. Leurs pas résonnaient sur le sol jonché de feuilles mortes, et ils accoururent en apercevant Hëna tituber avant de chuter lourdement. Orion s'approcha précipitamment d'elle, bouleversé et désorienté. Xan retira le couteau, exposant la blessure béante sur les côtes d'Hëna, révélant des lambeaux de chair entaillés qui faisait perler un sang rouge écarlate sur sa peau brune. Orion détournât rapidement le visage, dégoûté, et, sans perdre de temps, Xan s'empressa de la guérir. Dans une panique constante, ils essayèrent de la réveiller, mais elle semblait déjà loin, déjà. Xan s'occupa d'elle pendant qu'Orion tentait de démêler le mystère de ce qu'il venait de se passer.
Xan, penché.e sur le corps d'Hëna la mit en position latérale de sécurité, et essaya de la réveiller. Sa blessure était réparée, après quelques minutes d'attention et de magie, et elle devrait s'en remettre, du moins iel l'espérait. Hëna faiblissait, ses paupières vibraient, et Xan posa doucement sa main sur sa peau mate, cherchant à lui insuffler un peu de réconfort.
— Réveille-toi, Hëna...
Après quelques tentatives encore, la jeune fille ouvrit des yeux faibles, et fut frappée de stupéfaction, elle s'étonna :
— Où suis-je ?
— Dehors, dans la forêt, tu ne te souviens de rien ?
— Non, ce n'est pas réellement arrivé...
Xan comprit que ses souvenirs devaient lui revenir petit à petit, de chaudes larmes s'écoulèrent sur le visage d'Hëna, puis elle murmura :
— J'ai survécu alors...
D'un acquiescement réconfortant, Xan chuchota que tout ira mieux. Mais Hëna secouait le visage, et se rassit :
— Tu m'as sauvée... Vous êtes arrivés à temps.
— On t'a cherchée partout, rit nerveusement Xan. On a vraiment eu de la chance.
— Merci ! s'exclama-t-elle en l'enlaçant, des larmes dévalant ses joues.
— Il faut que tu nous expliques tout.
Hëna s'empressa d'acquiescer, mais Orion les coupa :
— Pas ici, on doit rentrer. Je disperse et dissimule les cendres deux minutes, de toute façon elles seront emportées par le vent, je vais enterrer le couteau, et je vous rejoins dans ma chambre, prenez-en les clés.
Il sépara la clé de son trousseau, les mains légèrement tremblantes, et tendit à Xan l'unique clé pour ouvrir sa chambre. Hëna se releva sans trop de difficulté, grâce à la guérison de Xan, son corps était comme neuf, même si son esprit était encore secoué. Elle avait du mal à réaliser ce qu'il venait réellement de se passer.
Xan et Hëna marchèrent alors jusqu'à l'internat, dans un silence de mort, dans la nuit qui leur était tombée dessus complétement, et les sanglots qu'Hëna retenait. Xan comprenait que cela devait être un choc dont on ne se remettait jamais, de traverser tout ça, commettre un meurtre, se voir mourir et puis reprendre vie au dernier moment... Hëna qui devait déjà être traumatisée par la mort de Pandore, venait de traverser l'enfer une fois de plus... Xan s'imaginait déjà les cauchemars qui pourraient hanter ses nuits, alors qu'iel n'avait même pas vu la scène entière.
Ensemble, ils traversèrent alors les couloirs, les visages déchirés, les vêtements abîmés et tâchés, les cheveux ébouriffés, mais marchaient comme si rien ne s'était passé. Par chance, ils ne croisèrent personne, l'heure étant tardive, ils devaient tous être dans leur chambre. Ils prirent soin alors de ne faire aucun bruit dans les couloirs. Si un regard curieux les apercevait, qui sait ce qui pourrait arriver ?
Ils atteignirent enfin la chambre d'Orion, Xan mit la clé dans la serrure et ouvrit la porte à Hëna qui retira ses chaussures et alla directement s'allonger dans le lit. Elle ne semblait plus maîtresse de son propre corps, ses mouvements étaient mécaniques, et elle avait l'air de ne même pas avoir conscience de sa présence, dans une déréalisation complète. Les yeux fermés, elle semblait déjà prête à s'endormir, mais Xan lui demanda :
— Depuis combien de temps n'as-tu pas mangé ?
Hëna frissonna et grimaça, puis finit par répondre :
— J'ai pris du pain au petit déjeuner...
— Tu as de la chance, Orion cache des tablettes de chocolats et des petits pots de pâte à tartiner volés à la cantine. Il faut absolument que tu manges. Attends que je les trouve !
Un petit rire s'échappa de la bouche d'Hëna, et Xan s'empressa de chercher les gourmandises. Iel finit par les trouver au fond d'un de ses tiroirs censés être pour ses vêtements, il ouvrit alors une tablette et donna plusieurs morceaux à Hëna qui les mangea avec plaisir. Iel se servit aussi, car ni ellui ni Orion n'ont eu le temps de manger à la cantine pour le dîner.
Après leur dégustation, Orion arriva, et entra en disant qu'il avait vu Mélodie sur la route, qu'il l'avait rassurée sur le fait qu'ils aient retrouvé Hëna, et qu'il leur avait promis qu'ils pourraient la revoir après une bonne nuit de repos. Orion avança lentement vers ses amis après avoir refermé la porte. Il s'agenouilla près de son lit où s'était assise Hëna.
— Comment tu te sens ? demanda-t-il.
La question sembla lointaine, comme si la poser était la chose la plus stupide et insensée. Xan observa l'hésitation dans le regard d'Hëna. L'hésitation qui tremblait à côté de sa folie. Elle finit par répondre d'une voix incertaine :
— Ça va. Ça s'est bien passé, finalement.
Un vertige, un léger tournis, força Xan à s'asseoir à ses côtés. Les lèvres d'Orion dessinèrent une fine ligne, et il baissa le regard.
— Es-tu prête à nous raconter ce qu'il s'est passé ?
Hëna acquiesça rapidement, comme s'il s'agissait de quelque chose dont elle voulait se débarrasser au plus vite. Mais un silence s'imposa après cela. Hëna croqua dans un morceau de chocolat, puis finit par briser le malaise qui s'installait.
— Quand il a... tué Pandore, j'ai su que je devais agir, que je devais mettre fin à ce cauchemar. Je me suis alors renseignée du mieux que je pouvais, pour trouver les meilleures manières d'assassiner ce meurtrier, lui rendre la monnaie de sa pièce. J'ai entraîné ma magie, je me suis renseignée sur d'autres magies, dans des livres que je possédais sans jamais leur avoir vraiment accordé d'attention. J'ai beaucoup appris de choses sur la magie de protection, et j'ai compris. J'ai compris que l'unique chose qui m'empêchait d'aller lui faire face et le tuer directement, c'était la peur.
Elle marqua une pause en déglutissant, Xan et Orion la laissaient parler, comprenant son besoin de prendre son temps, de respirer entre les phrases pour éviter de se perdre de nouveau. Ils montrèrent une patience qui plut beaucoup à Hëna, qui pour une fois se sentait écoutée.
— Alors j'ai appris et je me suis beaucoup entraînée. J'ai compris comment créer une bulle de protection, et c'était si facile. J'ai regretté de ne pas avoir fait ça plus tôt. Et j'ai regretté qu'on n'apprenne pas cela en classe. Mais qu'importe, après m'être habituée à cela, je suis allée dans la forêt. De base... ce matin, c'était juste pour m'entraîner. Mais en m'enfonçant dans la forêt, je me suis retrouvée face à lui, et c'est comme s'il m'attendait. On a parlé...
— Qu'est-ce qu'il t'a dit ? la coupa expressément Orion, en se rapprochant d'elle.
— Je ne sais plus, bafouilla-t-elle. Il m'a dit qu'il comptait devenir le maître du monde je crois... En nous tuant tous pour utiliser nos pouvoirs infiniment. Mais il voulait tuer nos professeurs d'abord, pour qu'on se retrouve sans personne et qu'on soit à sa merci.
Xan remarqua le petit sourire sur les lèvres d'Orion, il semblait satisfait, et fier. Orion murmura :
— Et tu l'as tué comme si c'était la chose la plus facile au monde.
— Il ne pouvait rien faire. Il n'avait pas prévu que nous puissions être des étudiants intelligent, lâcha-t-elle avec un rire court.
— Et maintenant ? demanda Xan.
Les regards se tournèrent vers ellui. Telle était la question, qu'allaient-ils faire ? Qu'allaient-ils devenir ? Hëna avait un meurtre sur son dos, et Orion et Xan étaient complices. Même s'ils étaient en sécurité désormais, les morts avaient laissé un vide en eux, et les traumatismes resteraient. Ils avaient ressenti une peur puissante pendant plusieurs mois, et elle n'était pas prête de s'effacer.
Peut-être que c'était cela l'enfer, depuis le début. Ils étaient voués à se retrouver perdus, seuls.
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